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18/02/2015 | FRANCE | N°14/01272

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 18 février 2015, 14/01272


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 18/02/2015



***



N° MINUTE :

N° RG : 14/01272



Jugement (N° 11/02365)

rendu le 15 Janvier 2014

par le Tribunal de Grande Instance d'ARRAS

REF : JLC/VC



APPELANTE

SELAS [S] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SA de Construction du Centre Commercial -Acquisitions de terrains à reconstruire, Construction et Aménagement - Centre commercial [

Localité 4], prise en la personne de Me [V] [S]

Ayant son siège social

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Bernard FRANCHI, membre de la SCP FRANÇOIS DELEFORGE-BER...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 18/02/2015

***

N° MINUTE :

N° RG : 14/01272

Jugement (N° 11/02365)

rendu le 15 Janvier 2014

par le Tribunal de Grande Instance d'ARRAS

REF : JLC/VC

APPELANTE

SELAS [S] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SA de Construction du Centre Commercial -Acquisitions de terrains à reconstruire, Construction et Aménagement - Centre commercial [Localité 4], prise en la personne de Me [V] [S]

Ayant son siège social

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Bernard FRANCHI, membre de la SCP FRANÇOIS DELEFORGE-BERNARD FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me Antoine CARPENTIER, avocat au Barreau de LILLE

INTIMÉS

COMMUNAUTÉ URBAINE D'[Localité 2] Etablissement Public de coopération intercommunale, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège de l'établissement

Ayant son siège social

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Sylvie REGNIER, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me José SAVOYE, avocat au barreau de LILLE

ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER DU NORD PAS DE CALAIS, pris en la personne de son représentant légal

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Marie-Hélène LAURENT, membre de la SELARL ADEKWA, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me Jean-Paul PHELIP, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Jean-Loup CARRIERE, Président de chambre

Fabienne BONNEMAISON, Conseiller

Véronique FOURNEL, Conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK

DÉBATS à l'audience publique du 08 Décembre 2014

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 18 Février 2015 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur Jean-Loup CARRIERE, Président, et Claudine POPEK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 8 décembre 2014

***

FAITS & PROCÉDURE

Par délibération en date du 21 décembre 2001 la communauté urbaine d'[Localité 2], ci après la CUA a engagé une opération de renouvellement urbain sur le quartier des Nouvelles Résidences, situé sur les communes de [Localité 4] et [Localité 3]. Elle a mandaté à cette fin l'établissement public foncier du Nord Pas de Calais, ci après EPFNPC, pour procéder à l'acquisition des immeubles nécessaires à cette opération de restructuration du quartier, par voie amiable, par préemption ou par voie d'expropriation.

Par arrêté du 18 avril 2003 le préfet du Pas de Calais a déclaré d'utilité publique et urgent 'le projet de restructuration urbaine du centre du quartier Les Nouvelles Résidences sur le territoire des communes de [Localité 4] et [Localité 3] nécessitant l'acquisition à l'amiable ou par voie d'expropriation par la communauté urbaine d'[Localité 2] (CUA) ou l'établissement public foncier Nord-Pas de Calais des terrains nécessaires sis sur le territoire de la commune de [Localité 4] d'une superficie totale de 2ha 29a 29 ca en sous sol et 11a 93 ca en sur-sol d'après cadastre'. Cette déclaration d'utilité publique, ci après DUP, indique que l'expropriation de ces immeubles devra être accomplie dans un délai de 5 ans à compter de la date d'affichage en mairie de l'arrêté.

Par arrêt infirmatif du 20 juin 2005, cette cour a fixé à la somme de 635.000 € l'indemnité d'expropriation à revenir à la SA DE CONSTRUCTION DU CENTRE COMMERCIAL pour l'ensemble immobilier d'une superficie de 19.182 m² lui appartenant.

Par jugement du 22 avril 2005 le tribunal de commerce d'Arras a ouvert la procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SA DE CONSTRUCTION DU CENTRE COMMERCIAL et nommé Maître [V] [S] de la SELARL [U] et [V] [S] en qualité de représentant des créanciers. Par jugement du 7 avril 2006 le même tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de la SA DE CONSTRUCTION DU CENTRE COMMERCIAL.

Estimant que les immeubles expropriés n'ont pas reçu une destination conforme à la DUP dans le délai prévu, la SELAS [U] et [V] [S] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SA DE CONSTRUCTION DU CENTRE COMMERCIAL-ACQUISITION DE TERRAINS A RECONSTRUIRE, CONSTRUCTION ET AMÉNAGEMENT- CENTRE COMMERCIAL [Localité 4], ci après la SELAS [S] ès qualités, a, par acte des 27 septembre et 13 octobre 2011 assigné la CUA et l'EPFNPC en rétrocession des parcelles et immeuble ayant appartenu à la société et en paiement de diverses sommes sur le fondement de l'article L 12-6 du code de l'expropriation.

Par jugement du 15 janvier 2014 le tribunal de grande instance d'Arras a :

- rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la Communauté Urbaine d'[Localité 2] et l'Etablissement Public Foncier du NORD-PAS-DE-CALAIS,

- déclaré la SELAS [U] et [V] [S], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SA de Construction du Centre Commercial -Acquisition de terrains à reconstruire, Construction et Aménagement- Centre Commercial [Localité 4] recevable en ses demandes,

- débouté la SELAS [S] ès qualités de l'intégralité de ses demandes,

- condamné la SELAS [S] ès qualités à payer à la Communauté Urbaine d'[Localité 2] la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SELAS SO!NNE ès qualités à payer à l'Etablissement Public Foncier du NORD-PAS-DE-CALAIS la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la SELAS [S] ès qualités de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SELAS [S] ès qualités aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- rejeté toute autre demande.

La SELAS [S] ès qualités a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le21 février 2014.

La procédure devant la cour a été clôturée le 8 décembre 2014.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions en date du 2 décembre 2014 par lesquelles la SELAS [U] et [V] [S] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SA DE CONSTRUCTION DU CENTRE COMMERCIAL-ACQUISITION DE TERRAINS A RECONSTRUIRE, CONSTRUCTION ET AMÉNAGEMENT- CENTRE COMMERCIAL [Localité 4], appelante, invite la cour, au visa des articles L 12-1, L 12-2 et L 12-6 du code de l'expropriation, à :

- infirmer le jugement entrepris, en tant qu'il la déboute de l'intégralité de ses

demandes, y compris sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- constater son droit à rétrocession des parcelles et immeubles lui ayant appartenu, ou, à tout le moins, son droit à réparation en raison de la charge excessive subie du fait de l'expropriation,

- constater que la rétrocession des parcelles et immeubles lui ayant appartenu est impossible compte tenu de la destruction des immeubles et de leur cession par l'autorité expropriante,

- en conséquence, dans l'impossibilité de procéder à la rétrocession, condamner la COMMUNAUTÉ URBAINE d'[Localité 2] et l'ÉTABLISSEMENT PUBLIC FONCIER NORD-PAS DE CALAIS à lui payer une indemnité compensatrice d'un montant de 1.770.535, 17 €, montant éventuellement à parfaire,

- subsidiairement, dans l'hypothèse où elle l'estimerait nécessaire, ordonner une

mesure d'expertise en vue de déterminer la valeur vénale de l'immeuble à la date de sa décision ou, le cas échéant, à la date de l'assignation,

- condamner la COMMUNAUTÉ URBAINE d'[Localité 2] et l'ÉTABLISSEMENT

PUBLIC FONCIER NORD-PAS-DE-CALAIS au paiement d'une somme de 182.466,57 € au titre du remboursement des charges d'entretien et de gestion de l'immeuble exproprié qu'elle a indûment supportée,

- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jour de l'assignation,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir (sic),

- condamner la COMMUNAUTÉ URBAINE d'[Localité 2] et l'ÉTABLISSEMENT

PUBLIC FONCIER NORD-PAS-DE-CALAIS à lui verser solidairement la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la COMMUNAUTÉ URBAINE d'[Localité 2] et l'ÉTABLISSEMENT

PUBLIC FONCIER NORD-PAS-DE-CALAIS aux dépens ;

Vu les conclusions en date du 5 décembre 2014 par lesquelles la COMMUNAUTÉ URBAINE d'[Localité 2] (CUA), intimée ayant relevé appel incident, demande à la cour, au visa des articles L 12-6, R 12-6 et R 13-78 du code de l'expropriation et 564 du code de procédure civile, de la réquisition d'une nouvelle DUP par délibération de son conseil communautaire du 20 novembre 2014, de :

- à titre principal, dire que la requête est devenue sans objet à raison de la réquisition d'une nouvelle DUP,

- à titre subsidiaire, dire la requête de la SELAS [S] irrecevable pour défaut de qualité et d'intérêt à agir du liquidateur judiciaire,

- à titre très subsidiaire, dire la requête mal dirigée et la mettre hors de cause,

- à titre infiniment subsidiaire, confirmer le jugement entrepris,

- à titre plus qu'infiniment subsidiaire, à supposer par impossible fondée la demande de rétrocession, dire qu'elle n'ouvre aucun droit à indemnisation compensatrice en l'absence de préjudice,

- en tout état de cause, débouter la SELAS [S] de sa demande de remboursement au titre des prétendus charges qu'elle aurait supportée de manière indue,

- déclarer irrecevable et non fondée la demande de la SELAS [S] tendant au paiement des indemnités de retard sur le fondement de l'article R 713-78 du code de l'expropriation,

- ajoutant au jugement, condamner la SELAS [S] à lui payer la somme de 10.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SELAS [S] aux dépens de première instance et d'appel ;

Vu les conclusions récapitulatives par lesquelles l'ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER DU NORD PAS DE CALAIS (EPFNPC), intimé ayant relevé appel incident, demande à la cour, au visa de l'article L 12-6 du code de l'expropriation, de :

- dire la SELAS [S] irrecevable et en tout cas mal fondée en ses demandes, en conséquence l'en débouter,

- constater que la SELAS [S] ne justifie pas de son intérêt à agir, infirmer le jugement en ce qu'il a retenu le contraire,

- constater que sa responsabilité ne saurait être recherchée au titre de sa mission de portage, aucun manquement n'étant allégué à ce titre,

- subsidiairement, constater l'absence de tout droit à rétrocession et partant, que la SELAS [S] n'a droit à aucune indemnité compensatrice,

- à titre infiniment subsidiaire, constater le caractère injustifié des sommes réclamées,

- condamner la CUA à la garantir de toute hypothétique condamnation,

- condamner la SELAS [S] à lui payer la somme de 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE,

L'article L 12-6 du code de l'expropriation dispose en son alinéa 1 :

'Si les immeubles expropriés en application du présent code n'ont pas reçu dans le délai de cinq ans la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation, à moins que ne soit requise une nouvelle déclaration d'utilité publique';

L'alinéa 3 du même article dispose :

'Lorsque ces terrains sont rétrocédés, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel disposent d'une priorité pour leur acquisition. L'estimation de leur valeur de vente se fera suivant les mêmes normes que pour les expropriations';

Sur la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la SELAS [S] ès qualités de liquidateur judiciaire

La CUA soutient que l'action en rétrocession du bien exproprié n'est pas ouverte au liquidateur judiciaire compte tenu de la nature de celle ci, d'autant que la restitution du bien peut être subordonnée au paiement de la plus value crée par l'autorité expropriante ; elle fait valoir que cette action a pour objet de remettre l'exproprié en même état que celui qui était le sien avant l'expropriation sans qu'il supporte les conséquences d'une dépossession devenue injustifiée, que la restitution ne se réalise pas par la restitution concomitante des indemnités d'expropriation mais par le paiement du prix correspondant à la valeur du bien à la date de la demande de rétrocession et que si la valeur du bien abusivement exproprié a connu une majoration, l'exproprié doit payer le prix de cette majoration, lequel peut être supérieur à la restitution des indemnités d'expropriation, que l'action en restitution ne peut donc entraîner une augmentation de l'actif du débiteur en liquidation judiciaire, lequel doit demeurer constant ;

L'EPFNPC soulève de même l'irrecevabilité de la demande de la SELAS [S] ès qualités pour défaut de qualité et d'intérêt à agir au motif que le liquidateur ne dispose d'aucun moyen financier pour rembourser l'indemnité d'expropriation augmentée du coût des travaux et du montant des frais engagés ;

La SELAS [S] ès qualités réplique que les parcelles vis à vis desquelles elle entend exercer le droit à rétrocession ont été cédées par l'autorité expropriante à la CUA, qui a elle même, après division, cédé des lots à PAS DE CALAIS HABITAT et au département du PAS DE CALAIS, que ne disposant pas d'un droit de suite vis à vis de ces personnes, elle ne peut exercer le droit à rétrocession et que seule la voie de l'indemnisation lui est ouverte sans qu'il soit nécessaire de démontrer qu'elle aurait pu racheter le bien exproprié ; elle soutient que son action a pour objectif d'augmenter l'actif de son administrée et que le liquidateur reprend à son compte, ès qualités les droits et obligation de la personne morale liquidée et qu'il est chargé de recouvrer toutes sommes qui lui sont dues ;

En réalité, si le droit à obtenir des dommages-intérêts prend naissance lorsque le droit à rétrocession est reconnu et que cette rétrocession est devenu impossible, le droit à rétrocession n'est pas un droit alternatif pouvant recevoir satisfaction soit en nature, soit par équivalent ; en effet, l'obligation pour l'expropriant de payer des dommages-intérêts n'est que subsidiaire, prenant seulement naissance lorsque, le droit à rétrocession étant reconnu, la rétrocession s'avère impossible ; par conséquent, il convient d'abord d'examiner si le droit à rétrocession existe et, préalablement, d'examiner la recevabilité de la demande de rétrocession faite par Maître [S] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SA DE CONSTRUCTION DU CENTRE COMMERCIAL ;

Compte tenu du caractère subsidiaire des dommages-intérêts alloués en cas d'impossibilité de restitution, le droit à rétrocession et, partant, la recevabilité de la demande de rétrocession, n'a pas à être examinée au regard du montant éventuel de ces dommages-intérêts puisque le droit à rétrocession doit d'abord être reconnu ; s'il n'est pas le cas, il n'y pas lieu d'examiner l'étape suivante du montant des dommages-intérêts lorsque la rétrocession est impossible ;

Il résulte des dispositions de l'article L 12-6 précitée que l'action en rétrocession n'a pas pour objet d'augmenter l'actif de l'exproprié mais de racheter l'immeuble exproprié ; lors de l'expropriation, le patrimoine de l'exproprié n'a subi aucune perte puisqu'il a été dédommagé de la valeur de son immeuble ; en effet, l'expropriation a eu pour seul effet de substituer à un actif immobilier un actif en liquidité, sans qu'il y ait eu diminution de l'actif ; lors de la rétrocession, il ne s'agit donc pas d'augmenter l'actif de l'exproprié car ce dernier doit faire sortir de son patrimoine les liquidités nécessaires pour acquérir son ancien bien immobilier ; l'opération est donc neutre, de sorte qu'il n'y a pas d'augmentation d'actif et pas davantage en l'espèce de reconstitution de l'actif du débiteur en liquidation judiciaire puisque le débiteur exproprié n'est pas créancier de la valeur de l'immeuble ; ce débiteur a uniquement la faculté de racheter son ancien immeuble indûment exproprié à sa valeur estimée suivant les mêmes normes que pour l'expropriation ; s'il entend faire valoir son droit à rétrocession, le débiteur en liquidation judiciaire devient alors débiteur du prix de rachat de son ancien immeuble ; en application de l'article 12-6 précité, l'action en rétrocession exclut tout enrichissement de l'exproprié aux dépens de l'autorité expropriante ;

En dehors du point de savoir si le débiteur peut payer le prix du rachat de l'immeuble, ce qui est indifférent, le liquidateur judiciaire n'a aucun intérêt à se déposséder de liquidités qui lui sont nécessaires pour procéder aux opérations de liquidation judiciaire pour acquérir un immeuble qui ne lui serait d'aucune utilité pour ces opérations puisque cette acquisition n'a pas pour effet d'augmenter l'actif de son administrée ; si le liquidateur doit exercer toutes les actions nécessaires pour récupérer les créances du débiteur afin d'augmenter l'actif de celui ci et vendre ensuite ces actifs pour payer les créanciers du débiteur, il n'entre pas dans sa mission de liquidateur judiciaire de substituer à un actif liquide, qui lui est nécessaire, un actif immobilier ; le rachat de l'immeuble indûment exproprié en contrepartie du paiement de son prix est sans intérêt pour le liquidateur judiciaire au regard de ce qui a été dit sur la nature de l'action en rétrocession ;

L'action en rétrocession de l'immeuble exproprié engagée par la SELAS [S] ès qualités est donc irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ;

Au surplus, en application de l'article L 12-6 du code de l'expropriation, une demande en rétrocession ne peut prospérer lorsque qu'une nouvelle DUP est requise ; or, le conseil communautaire d'[Localité 2] a, au terme d'une délibération du 20 novembre 2014, requis une nouvelle DUP ; cette réquisition a pour effet de rendre irrecevable la demande en rétrocession, étant rappelé qu'il n'appartient pas au juge judiciaire de se prononcer sur le bien fondé ou la légalité de cette réquisition ;

Le jugement déféré doit donc être infirmé en ce qu'il a déclaré cette action recevable ;

La SELAS [S] ès qualités doit donc être déclarée irrecevable en son action en rétrocession pour défaut d'intérêt à agir ;

Sur les demandes en paiement formées par la SELAS [S] ès qualités

Pour les motifs qui viennent d'être exposés, l'irrecevabilité de l'action en rétrocession entraîne l'irrecevabilité de la demande en paiement des sommes de 1.770.535, 17 € au titre de l'indemnité compensatrice ;

S'agissant de la demande en paiement des sommes de 7.833, 36 € et 111.033, 21 € au titre du remboursement des charges d'entretien et gestion de l'immeuble, la SELAS [S] ès qualités soutient qu'alors qu'elle n'était plus propriétaire du centre commercial pour avoir été expropriée le 5 avril 2004, son administrée a supporté, sur la période du 5 avril 2004 au 30 mai 2005, le coût d'entretien et de gestion de ce centre, à savoir les frais d'entretien, de gardiennage, de chauffage et d'électricité ; toutefois, les premiers juges ont exactement retenu que les pièces produites à l'appui de cette demande et notamment l'extrait du grand livre clients, ne permettent d'établir, ni que la SA DE CONSTRUCTION s'est acquittée des ces charges, ni le caractère indu de celles ci ; le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté la SELAS [S] ès qualités de cette demande ;

Pour la première fois en cause d'appel, la SELAS [S] sollicite la condamnation de la CUA et de l'EPFNPC à lui payer la somme de 63.000 € au titre des intérêts de retard sur le règlement des indemnités fixées par le juge d'expropriation ; cette demande nouvelle est irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile ;

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SELAS [S] ès qualités, partie perdante, doit être condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer les sommes suivantes par application de l'article 700 du code de procédure civile :

- à la COMMUNAUTÉ URBAINE d'[Localité 2] :5.000 €

- à l' ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER

DU NORD PAS DE CALAIS :1.500 €

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par la SELAS [S] ès qualités ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les fins de non recevoir soulevées par la COMMUNAUTÉ URBAINE d'[Localité 2] et l' ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER DU NORD PAS DE CALAIS ;

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable l'action en rétrocession engagée par la SELAS [S] ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA DE CONSTRUCTION DU CENTRE COMMERCIAL-ACQUISITION DE TERRAIS A CONSTRUIRE, CONSTRUCTION ET AMÉNAGEMENTS-CENTRE COMMERCIAL [Localité 4] ;

Déclare irrecevable la demande de la SELAS [S] ès qualités en paiement de la somme de 1.770.535, 17 € au titre de l'indemnité compensatrice ;

Déclare irrecevable la demande de la SELAS [S] ès qualités en paiement de la somme de 63.000 € au titre des intérêts de retard ;

Confirme le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant,

Condamne la SELAS [S] ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA DE CONSTRUCTION DU CENTRE COMMERCIAL-ACQUISITION DE TERRAIS A CONSTRUIRE, CONSTRUCTION ET AMÉNAGEMENTS-CENTRE COMMERCIAL [Localité 4] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer les sommes suivantes par application de l'article 700 du même code en cause d'appel :

- à la COMMUNAUTÉ URBAINE d'[Localité 2] :5.000 €

- à l' ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER

DU NORD PAS DE CALAIS :1.500 €

Rejette toute autre demande.

Le GreffierLe Président,

C. POPEKJ.L. CARRIERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 14/01272
Date de la décision : 18/02/2015

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°14/01272 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-18;14.01272 ?
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