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05/02/2015 | FRANCE | N°13/03371

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 7 section 2, 05 février 2015, 13/03371


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 7 SECTION 2



ARRÊT DU 05/02/2015



***



N° MINUTE : 2015/99

N° RG : 13/03371



Jugement (N° 10/00316)

rendu le 30 Avril 2013

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE



REF : IC/LW





APPELANT



Monsieur [T] [O] [J]

né le [Date naissance 4] 1944 à [Localité 9] (CAMBODGE)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 5]


r>Représenté par Me Alexis IHOU, avocat au barreau de LILLE

Assisté de Me Gervais TETI, avocat au barrreau de PARIS



INTIMÉE



Madame [S] [S] [O] épouse [J]

née le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 8] (COTE D'IVOIRE)

[Adress...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 7 SECTION 2

ARRÊT DU 05/02/2015

***

N° MINUTE : 2015/99

N° RG : 13/03371

Jugement (N° 10/00316)

rendu le 30 Avril 2013

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : IC/LW

APPELANT

Monsieur [T] [O] [J]

né le [Date naissance 4] 1944 à [Localité 9] (CAMBODGE)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Alexis IHOU, avocat au barreau de LILLE

Assisté de Me Gervais TETI, avocat au barrreau de PARIS

INTIMÉE

Madame [S] [S] [O] épouse [J]

née le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 8] (COTE D'IVOIRE)

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Chantal LAHAYE, avocat au barreau de LILLE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/002/2013/06393 du 02/07/2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Isabelle CHASSARD, Président

Agnès FALLENOT, Conseiller

Cécile SORIANO, Conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Lima GHARBI

DÉBATS à l'audience en chambre du Conseil du 19 Décembre 2014,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 Février 2015 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Isabelle CHASSARD, Président, et Anaïs DELAIRE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 19 Décembre 2014

*****

Monsieur [T] [O] [J] et Madame [S] [S] [O], se sont mariés le [Date mariage 2] 2001 à [Localité 2] (Côte d'Ivoire).

De leur union sont issues deux enfants :

- [D], le [Date naissance 3] 1985 ;

- [R], le [Date naissance 1] 1987.

Par ordonnance contradictoire en date du 14 mai 2010, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de LILLE a constaté la non-conciliation des époux et a notamment :

- constaté la résidence séparée des époux ;

- attribué la jouissance du domicile conjugal à Monsieur [T] [O] [J] ;

- mis à la charge de M. [J] le paiement de la somme mensuelle de 900 euros au titre du devoir de secours, outre indexation ;

- condamné Monsieur [T] [O] [J] à payer à Madame [S] [S] [O] la somme de 3.000 euros pour provision sur frais d'instance.

Par ordonnance rectificative en date du 11 juin 2010, le juge aux affaires familiales a modifié les mentions relatives aux revenus de Monsieur [T] [O] [J] et a précisé que la pension alimentaire au titre du devoir de secours est due à compter du 12 mars 2010.

Par arrêt en date du 20 janvier 2011 pris sur appel de l'ordonnance de non conciliation, la Cour d'Appel de DOUAI a fixé cette pension à la somme de 1.500 euros par mois.

Par exploit d'huissier signifié le 31 août 2011, Monsieur [T] [O] [J] a fait assigner Madame [S] [S] [O] en divorce sur le fondement de l'article 242 du Code Civil.

Dans un courrier en date du 5 février 2013, soumis aux débats lors de l'audience de plaidoiries, le conseil de Monsieur [T] [O] [J] a indiqué se désister de sa demande en divorce. Il n'y a formulé aucune demande accessoire.

Dans ses conclusions récapitulatives signifiées le 6 juillet 2012 et produites au dossier du tribunal le jour de l'audience des plaidoiries, Madame [S] [S] [O] a demandé au premier juge de :

- prononcer le divorce sur le fondement de l'article 237 du Code Civil ;

- ordonner la liquidation de la communauté et désigner un notaire à cette fin ;

- condamner Monsieur [T] [O] [J] à lui payer la somme de 600.000 euros au titre de la prestation compensatoire ;

- condamner Monsieur [T] [O] [J] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles ;

- condamner Monsieur [T] [O] [J] aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit du conseil de Madame [S] [S] [O].

Par jugement en date du 30/04/2013, le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de LILLE a statué comme suit :

' Vu l'ordonnance de non-conciliation en date du 14 mai 2010 rectifiée ayant constaté la résidence séparée des époux ;

PRONONCE le divorce, en application de l'article 237 du Code Civil : de Monsieur [T] [O] [J], né le [Date naissance 4] 1944 à [Localité 9] (CAMBODGE) ; et de Madame [S] [S] [O], née le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 8] (COTE D'IVOIRE) mariés le [Date mariage 2] 2001 à [Localité 2] (Côte d'Ivoire) ;

ORDONNE toutes mentions et transcriptions conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur, ci notamment en marge de l'acte de mariage des époux et des actes de naissance de chacun d'eux ;

ORDONNE la liquidation du régime matrimonial, conformément aux règles relatives à la communauté réduite aux acquêts ;

REJETTE la demande de désignation d'un notaire ;

RAPPELLE que, en application de l'article 265 du Code Civil, le divorce est sans incidence sur les avantages matrimoniaux qui prennent effet au cours du mariage et sur les donations de biens présents quelle que soit leur forme ; que, en revanche, le divorce emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu'à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l'un des époux et des dispositions à cause de mort, accordés par un époux envers son conjoint par contrat de mariage ou pendant l'union, sauf volonté contraire de l'époux qui les a consentis ; que cette volonté est constatée par le juge au moment du prononcé du divorce et rend irrévocables l'avantage ou la disposition maintenus ; que, toutefois, si le contrat de mariage le prévoit, les époux peuvent toujours reprendre les biens qu'ils auront apportés à la communauté ;

CONDAMNE Monsieur [T] [O] [J] à payer à Madame [S] [S] [O] la somme de 350.000 (trois cent cinquante mille) euros au titre de la prestation compensatoire ;

CONDAMNE Monsieur [T] [O] [J] à payer à Madame [S] [S] [O] la somme de 3.000 (trois mille) euros au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE Monsieur [T] [O] [J] aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit du conseil de l'épouse'.

Le premier juge a notamment retenu que :

- les deux époux étant de nationalité française et ayant établi leur domicile conjugal sur le territoire français, le juge français est compétent et la loi applicable est la loi française

- l'assignation en divorce avait été délivrée par Monsieur [J] sur le fondement de l'article 242 du Code Civil

- il s'est par la suite désisté de sa demande

- le courrier de désistement de M [J] constituait ses dernières conclusions

- la demande en divorce formulée par Madame [S] [S] [O] l'est à titre reconventionnel

- l'altération définitive du lien conjugal s'apprécie non plus seulement au vu de la durée de la séparation, mais également compte tenu de l'introduction de l'instance par Monsieur [T] [O] [J] sur le fondement de la faute

- si l'assignation a été délivrée avant l'expiration du délai de deux ans, le fondement de la demande initiale en divorce formulée par Monsieur [T] [O] [J] enlève à ce délai, conformément à l'alinéa 2 de l'article 238 du Code Civil son caractère impérieux

- les époux sont soumis au régime de la communauté réduite aux acquêts, aucun contrat de mariage n'ayant été conclu avant ni après l'union et à aucun moment une quelconque séparation de biens n'ayant été déclarée auprès des personnes concernées (officiers de l'état civil français et notaire français)

- Monsieur [T] [O] [J], alors qu'il était demandeur dans la présente procédure, s'en est désisté, indiquant qu'une autre procédure de divorce est finalement engagée en Côte d'Ivoire

-Madame [S] [S] [O] : elle n'a pas de qualification et n'a que très peu travaillé ; elle n'a pas de patrimoine propre ; Monsieur [T] [O] [J] se serait, lors de la vie commune, opposé à ce qu'elle exerce une profession ou qu'elle entame une scolarité ou formation quelconques ;

- Monsieur [T] [O] [J], médecin retraité gère le patrimoine du couple ; il est particulièrement difficile de distinguer quels sont les biens qui lui sont propres de ceux appartenant à la communauté ; l'ensemble des biens en cause (immeubles et liquidités) est évaluable à environ 2.000.000 euros, au vu des pièces produites par Madame [S] [S] [O] ainsi que de l'analyse faite d'ores et déjà pour partie par la Cour d'Appel ; une grande partie des biens se trouve hors du territoire français, ce qui complique tant leur évaluation qu'un éventuel partage.

Suite à des non paiements de la pension alimentaire fixée au titre du devoir de secours, le juge de l'exécution a pris deux jugements du 29 Juillet 2013 (pièces 46 et 47) puis à nouveau par un Jugement du 12 Mai 2014 régulièrement signifié (pièces 50 et 51).

M. [J] a saisi la Cour d'une requête aux fins de voir poser une question prioritaire de constitutionnalité concernant l'article 255 du Code Civil prévoyant le devoir de secours entre époux.

Par arrêt rendu le 6 Mai 2014 , la Cour a relevé d'office l'irrecevabilité de cette requête pour des raisons de forme, rappelant que M [J] :

« s 'était adressé directement à la Cour, en dehors même de toute procédure relative à la pension alimentaire qu'il doit à son épouse, sans l'assistance d'un Conseil alors que la procédure devant le Juge aux Affaires Familiales est soumise aux règles de la procédure avec représentation obligatoire, et ne précise pas dans sa requête à quels droits et libertés garantis par la Constitution l'article 255 du Code Civil porte atteinte ».

Par ordonnance en date du 31/07/2014, le conseiller de la mise en état a :

- débouté Mme [O] de ses demandes tendant à voir déclarer l'appel irrecevable en application de l'article 954 du code de procédure civile et pour défaut de qualité de l'appelant

- débouté Mme [O] de sa demande de caducité de la déclaration d'appel invoquée sur le fondement de l'article 908 du code de procédure civile

- débouté les parties de leurs demandes de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 32

- renvoyé la cause à l'audience collégiale du 17/10/2014

- ordonné la production de pièces justificatives.

Le conseiller de la mise en état a souligné que le débat était notamment celui de la portée du désistement de M. [J] en première instance sur la procédure engagée.

LA COUR

Vu l'appel 'partiel' sans précision en date du 10/06/2013 interjeté par M. [J]

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 09/12/2014, M. [J] a présenté les demandes suivantes :

' Vu les articles : 65 ; 700 ; 385 ; 954 al 2 du code de procédure civile

Vu les articles : 237 ; 238 ; 270 alinéa 2 ; 266 du code civil

Et tous autres à déduire et à suppléer,

Mr [T] [O] [J] requiert qu'il plaise à la Cour d'Appel de Douai de :

AU PRINCIPAL :

Recevoir son appel

L'y dire bien fondé

Rejeter l'exception d'irrecevabilité

Dire que la procédure a été régularisée par les présentes conclusions

En conséquence,

Déclarer nul et de nul effet le jugement du 30 avril 2013

SUBSIDIAIREMENT :

Prononcer le divorce entre les époux [J] conformément aux dispositions de l'art 237 et 238 du code civil.

Conformément aux dispositions de l'ordonnance de non conciliation, Monsieur [T] [O] [J] a pris acte de ce qu'il gardera le domicile conjugal en sa qualité de propriétaire.

Dire que Madame [S] [S] [O], épouse [J] ne conservera pas le nom de son époux et reprendra donc son nom de jeune fille de [O].

Dire que les époux [J] sont mariés sous le régime de la séparation des biens.

Dire qu'ils ne possèdent aucun bien immobilier ou mobilier en commun.

Dire qu'il n'y a donc pas lieu à liquidation

Fixer la prestation compensatoire à 20 000, 00 € au bénéfice de Mme [S] [S] [O], épouse [J]

DEMANDES ADDITIONNELLES de Mr [T] [O] [J] :

Condamner Mme [S] [S] [O], épouse [J] à 120 000, 00 € au titre de dommages et intérêts à payer à Mr [T] [O] [J] .

La condamner à 4 500 € au titre de l'art 700 du CPC

Condamner Madame [S] [S] [O], épouse [J] aux entiers dépens'.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 02/12/2014, Mme [O] a présenté les demandes suivantes :

' Et tous autres à déduire en temps et en heure s'il échet.

Vu les articles 384 alinéa 1 du Code de Procédure Civile, 700 et 906 alinéa I du même Code,

Vu les articles 237 et 238 du Code Civil, 270, 271 et 272 du même Code, 1382 du Code Civil,

- A titre principal, déclarer Monsieur [J] irrecevable en son appel,

- En tout état de cause, le débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions.

- Confirmer le Jugement entrepris en ce qu'il a :

* prononcé le divorce d'entre les époux [J] [O] sur le fondement de l'article 237 du Code Civil,

* déclaré que les époux [J] [O] étaient soumis au régime de la communauté réduite aux acquêts et dit que la liquidation du régime matrimonial devra être faite en tenant compte de cette mention.

* condamné Monsieur [J] au paiement d'une somme de 350 000 euros à titre de prestation compensatoire.

* condamné Monsieur [J] au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

- Y ajoutant, condamner Monsieur [J] à payer à la concluante

* 10 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

* 10 000 € sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil

- Condamner Monsieur [J] en tous les frais et dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître LAHAYE, Avocat aux offres de droit'.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 19/12/2014.

SUR CE

Sur l'irrecevabilité de l'appel

=$gt; sur l'application de l'article 906 alinéa 1 du code de procédure civile

Mme [O] soutient que bien que l'incident ayant été partiellement traité par l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 31/07/2014, le problème se pose à nouveau devant Votre Cour dans la mesure où Monsieur [J], appelant, ne vise toujours aucune pièce dans ses écritures, ne communique aucun bordereau de pièces, et n'a versé aux débats ' en dernier lieu ' que les quelques éléments demandés dans l'Ordonnance d'incident précitée.

Elle considère en conséquence que son appel est irrecevable.

M. [J] conclut au débouté au motif que ses dernières conclusions régularisent la procédure.

Il est établi que M. [J] a contradictoirement communiqué par RPVA un message sous le titre 'conclusions' le 08/12/2014 à 12H08. Cependant, aucune conclusion n'était jointe audit message.

Cette difficulté a été régularisée par l'appelant le 09/12/2014 à 17H56 par l'envoi d'un nouveau message comportant :

- ses dernières conclusions visées en tête du présent arrêt auquel est joint un bordereau de 23 pièces

- un acte de signification à Me LAHAYE, conseil de Mme [O], en date du 17/11/2014 comprenant les conclusions susvisées ainsi que 23 pièces.

En conséquence, l'intimée ne peut prétendre que le principe du contradictoire n'a pas été respecté.

En tout état de cause, l'application de l'article 906 du code de procédure civile n'est pas sanctionnée par une irrecevabilité de l'appel.

M. [J] , contrairement aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, n'a pas expressément visé dans ses conclusions les pièces sur lesquelles il se fonde, se contentant d'annexer le bordereau listant ses 23 pièces.

Cependant, cette disposition n'est pas sanctionnée par l'irrecevabilité de l'appel.

Compte tenu du faible nombre de pièces produites par M. [J] figurant sur la liste du bordereau et dont la plupart sont des décisions judiciaires parfaitement connues de Mme [O], l'intimée ne saurait arguer d'un non respect du contradictoire ou d'une attitude de déloyauté dans les débats de nature à préjudicier à sa défense.

Mme [O] sera donc déboutée de sa demande en déclaration de l'irrecevabilité de l'appel sur le fondement des textes qui précèdent .

Sur la fin de non recevoir développée par Mme [O] dans ses conclusions

Mme [O] invoque 'une fin de non recevoir' des demandes de M. [J] du fait de son désistement en première instance dans les motifs de ses conclusions.

Cependant, il convient de rappeler que la Cour n'est tenue de répondre qu'au dispositif de ses conclusions en application de l'article 954 du code de procédure civile et qu'elle n'a formulé aucune prétention tendant à voir constater l'irrecevabilité de demandes présentées , irrecevabilité qui ne peut être confondue avec l'irrecevabilité de l'appel lui même.

Le visa de l'article 384 alinéa 1 du code de procédure civile dans son dispositif, ne saurait suffire à caractériser une prétention univoque puisque ce texte évoque simplement les différentes cas d'extinction d'instance.

Sur la demande de nullité du jugement présentée par M. [J]

M. [J] considère que le premier juge a failli en statuant malgré son désistement et en retenant uniquement les demandes de Mme [O] alors que son désistement n'avait pas été expressément accepté par Mme [O].

Il estime que c'est à tort que le Tribunal a statué sur la demande reconventionnelle de Mme [O] et retenu un désistement d'instance non accepté en omettant de statuer sur sa propre demande en divorce pour faute. Il conclut que la Cour annulera le jugement attaqué au regard de la jurisprudence citée par l'intimée (Cass 09.10.1986, ACP G 1986 IV 323 ; Bull. Civ. 1986 V n" 486) qui précise que 'Cet effet extinctif intervient dès lors qu'à la date à laquelle la volonté de se désister a été souverainement constatée par le juge du fond, elle était certaine'.

S'agissant de la demande de M. [J] à voir constatée la nullité du jugement, Mme [O] ne présente pas de moyens précis au regard de cette question procédurale spécifique.

Si M. [J] peut dans le cadre d'un appel ordinaire invoquer la nullité du jugement soumis à l'examen de la Cour, encore faut il qu'il établisse que le jugement a été rendu 'en violation d'un principe essentiel de procédure'.

Un simple désaccord sur les effets juridiques d'un désistement ni accepté ni refusé explicitement ne saurait être considéré comme la violation d'un principe essentiel de procédure et ce même si la Cour devait considérer que l'analyse effectuée par le premier juge n'était pas conforme aux textes applicables alors que M. [J] s'est effectivement désisté de son action principale en divorce par courrier.

En outre, Mme [O] n'argue pas plus d'une quelconque difficulté quant au principe du contradictoire s'agissant de la lettre de désistement de M. [J] soumise au contradictoire dans les débats de première instance, les deux parties étaient assistées d'un conseil.

En conséquence, en l'absence de démonstration de tout excès de pouvoir au regard des motifs allégués et en l'absence de moyens de nullité de forme soulevés, la demande de M. [J] en nullité du jugement sera rejetée.

Sur le litige concernant les effets du désistement de M. [J] en première instance 

Il est constant que les deux époux avaient initialement sollicité le divorce :

- M. [J] sur le fondement de l'article 242 du code civil

- Mme [O] sur le fondement des articles 237 et 238 du code civil

Le premier juge a exclusivement statué sur la demande reconventionnelle en divorce présentée par Mme [O] en considérant que le désistement de M. [J] exprimé dans un courrier du 05/02/2013 qui ne présentait aucune demande accessoire devait être considéré comme son dernier jeu de conclusions et en estimant de ce fait qu'aucun moyen n'était soulevé à l'encontre des prétentions de Mme [O].

Les parties s'opposent sur la nature du désistement puisque Mme [O], en visant l'article 384 du code de procédure civile considère que le désistement de M. [J] était un désistement d'action tandis que ce dernier invoque les dispositions de l'article 385 du code de procédure civile applicable aux désistements d'instance.

Or si le second n'est parfait que par l'acceptation du défendeur (article 395 du code de procédure civile), le désistement d'action n'a pas à être accepté si la partie adverse ne justifie pas d'un intérêt (civ 09/12/1986) mais doit être constaté par une décision constatant le dessaisissement de la juridiction.

Cependant dans un cas comme dans l'autre, le désistement emporte extinction de l'instance :

- soit par une décision de dessaisissement prise par le juge en cas de désistement d'action

- soit par une extinction de l'instance à compter du moment où le désistement est parfait (article 395 du code de procédure civile) pour le désistement d'instance étant relevé qu'en l'espèce une telle acceptation était nécessaire puisque Mme [O] avait présenté des demandes reconventionnelles

Mme [O] ne peut prétendre que M. [J] ait entendu se désister de son action en divorce alors qu'elle reconnaît elle même que la motivation du désistement était de poursuivre une procédure de divorce dans le cadre d'une procédure en Côte d'Ivoire de sorte qu'il n'avait nullement renoncé à une action en divorce.

Le désistement de M. [J] était dès lors un désistement d'instance nécessitant un positionnement de Mme [O] pour le rendre parfait.

Or, Mme [O] indique elle-même que lorsqu'elle a pris connaissance du désistement de son époux, elle a maintenu ses propres demandes reconventionnelles auxquelles il a été fait droit en partie par le jugement attaqué ce qui n'est pas possible en cas d'acceptation du désistement d'instance puisque l'instance unique et en l'espèce indivisible (eu égard notamment aux dispositions de l'article 246 du code civil) se continue alors.

Ce positionnement doit être analysé comme un refus de désistement d'instance implicite.

Dès lors, le premier juge devait statuer sur la demande pour faute dont il était saisi en application de l'article 246 du code civil , le désistement de M [J] n'étant pas parfait.

Il n'y a pas lieu à infirmation du jugement sur ce point puisqu'aucune mention du dispositif du jugement ne constate le désistement de M. [J].

*****

Les parties ayant toutes deux conclu subsidiairement au fond, la cour est en mesure de statuer sur les demandes présentées.

SUR LA DEMANDE EN DIVORCE

Il convient de constater qu'en cause d'appel, ni M. [J] ni Mme [O] ne remettent en question le prononcé du divorce sur le fondement de l'article 237 du code civil pour altération définitive du lien conjugal.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

SUR LES DOMMAGES ET INTERETS

Aux termes de l' article 266 du code civil, sans préjudice de l'application de l'article 270, des dommages et intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage, soit lorsqu'il était défendeur à un divorce prononcé pour altération définitive du lien conjugal et qu'il n'avait lui-même formé aucune demande en divorce, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint.

Si M. [J] est défendeur à une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal, il ne peut solliciter des dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code de procédure civile dans la mesure où il avait formé une demande en divorce pour faute, M. [J] invoquant lui-même que son désistement d'instance n'était pas parfait puisque non accepté par Mme [O].

Il sera donc débouté de sa demande additionnelle de dommages et intérêts à hauteur de 120000 euros présentée sur le seul fondement de l'article 266 du code de procédure civile.

SUR LE REGIME MATRIMONIAL

Les parties s'opposent sur la nature juridique du régime matrimonial, M. [J] soutenant être marié sous le régime de la séparation de biens selon les dispositions de loi ivoirienne dont il indique avoir la nationalité quoiqu'étant d'origine cambodgienne pour être né dans ce pays, tandis que Mme [O] soutient qu'ils sont mariés sous le régime légal.

Le premier juge a considéré que :

''il ressort des éléments objectifs du dossier que les époux sont soumis au régime de la communauté réduite aux acquêts, aucun contrat de mariage n'ayant été conclu avant ni après l'union et à aucun moment une quelconque séparation de biens n'ayant été déclarée auprès des personnes concernées (officiers de l'état civil français et notaires français). Que la copie certifiée conforme produite en original au dossier de plaidoirie par l'épouse comporte également la mention « régime de la communauté de biens ; Que la liquidation du régime matrimonial devra être fait en tenant compte de cette mention'.

Les époux se sont mariés le [Date mariage 1]/2001 à [Localité 2] (COTE D'IVOIRE).

Ils sont ensuite venus vivre en FRANCE en 2002 puis se sont fait naturaliser français : Madame suivant décret du 15 mai 2006 - pièces 52 et 54 - puis Monsieur le 18  décembre 2007. Ils ont ensuite toujours vécu en FRANCE où se situait le dernier domicile commun.

M [J] soutient que :

- le mariage entre Monsieur [T] [O] [J] et Mme [S] [S] [O] a eu lieu en Côte d'Ivoire, de ce fait, il est régi par le droit ivoirien

- si en vertu du droit ivoirien, le régime de communauté d'acquêts est toujours le régime légal (depuis la réforme résultant de la loi du 02 avril 1983), les époux ont désormais avant la célébration du mariage une faculté d'opter pour le régime de la séparation de biens, mais le contrat de mariage est interdit.

- l'article 69 nouveau du code civil ivoirien dispose que «Le mariage a pour effet de créer entre les époux une communauté de biens à moins que ceux-ci ne déclarent expressément opter pour le régime de la séparation des biens»

- le droit ivoirien n'admet pas la liberté des conventions matrimoniales.

- cette option en faveur de la séparation des biens s'effectue lors de la célébration du mariage et mention est faite en marge de l'acte de mariage

- il a été mentionné sur l'acte de mariage en date du [Date mariage 2] 2001 enregistré sous le n° 449 ce qui suit : 'Lesquels ont déclaré sur notre interpellation opter pour le régime de la séparation de biens, ...'

- cette mention figure sur la copie du registre des actes de l'Etat civil pour l'année 2001 établie le 10 juillet 2001, soit trois jours après le mariage

- cette question de la communauté de biens a été définitivement réglée par l'arrêt de la Chambre 7 Section 2 de la Cour d'Appel de Douai en date du 20 janvier 2011 en considérant que les époux [J] étaient mariés sous le régime de la séparation des biens

- il est surprenant que la copie produite tardivement en 2013 par Mme [J], née [S] [S] [O] en date du 18 janvier 2010, c'est-à-dire, entre les deux copies du 11 janvier 2010 et celle du 04 février 2010, porte la mention de l'option de la communauté de biens.

Mme [O] soutient au contraire que :

- L'article 3 du Code Civil exprime clairement « Les lois de police et de sûreté obligent tous ceux qui habitent le territoire... Les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les français, même résidant en pays étrangers ».

- le Juge français est indéniablement compétent, étant celui du dernier domicile commun.

- La loi française doit également s'appliquer dans la mesure où les deux époux ont fait le choix délibéré d'acquérir la nationalité française, Monsieur [J] ayant déposé sa requête en divorce en invoquant le droit français.

- toute contestation sur l'application de la loi française ne peut qu'être rejetée

- M. [J] a lui même déclaré au Notaire à l'occasion d'une acquisition faite en FRANCE, chez Maître [V], Notaire à [Localité 5], le 1er Septembre 2003 : 'Acquéreur : Monsieur [T] [O] [J], médecin, époux de Madame [S] [O], sans profession, mariés sans contrat préalable à leur union célébrée à la mairie d'[Localité 2] (COTE D'IVOIRE), ledit régime n'ayant subi aucune modification contractuelle ou judiciaire postérieure, ainsi déclaré', (ainsi qu'attestation établie par Maitre [V], ès qualités : pièces 20 et 21 précitées).

- Les documents émanant de l'État Civil d'[Localité 2] sont mêmes radicalement opposés et contradictoires.

- elle produit :

* le livret de famille établi à [Localité 2], mairie de [Localité 3], pièce 7, qui déclare que les futurs époux n'ont pas opté pour un régime matrimonial, ce qui entraîne l'application du régime de communauté de biens.

* le livret de famille délivré par le Ministère des Affaires Etrangères en FRANCE (pièce 9) sans aucune mention d'adoption d'un régime matrimonial quelconque, ce qui entraîne

l'application du régime de communauté de biens.

* l'acte de mariage établi le 18 Janvier 2010 par la mairie d'[Localité 2] (pièce 53) indiquant l'adoption du régime de communauté de biens en présence de deux témoins dont Monsieur [P] [L] ami et témoin de l'appelant.

- Dès lors, le témoignage contraire de Monsieur [L] produit par Monsieur [J] n'est nullement probant

==$gt; sur la détermination de la loi applicable au régime matrimonial

M. [J] invoque une option de séparation de biens prise par les époux (mais contestée en l'état de pièces contradictoires produites émanant en apparence des mêmes autorités locales) mais indique également que le droit ivoirien interdit le contrat de mariage. Dès lors, il n'est nullement contesté par M. [J] qu'il n'existe pas de contrat de mariage entre les époux.

Il en résulte donc que la question est celle de la loi applicable au régime matrimonial.

Cette question est entrée dans les débats Mme [O] ayant conclu sur ce point en indiquant que les époux avaient fait le choix d'acquérir la nationalité française et que dès lors la loi française était applicable.

Il est constant que lors de l'introduction de la procédure de divorce M. [J] et Mme [O] étaient tous les deux français et domiciliés en France.

Le juge français est donc compétent et la loi française applicable au divorce et aux demandes ayant le caractère alimentaire.

La référence à l'arrêt du 20/01/2011 pris sur appel de l'ordonnance de non conciliation ne saurait être considéré comme déterminant et ayant autorité de la chose jugée sur ce point alors qu'aucune mention relative à la loi applicable ne figure dans le dispositif de l'arrêt et que la Cour n'a alors apprécié que les pièces qui lui ont été alors soumises pour refuser à Mme [O] sa demande d'avance de communauté.

S'agissant du régime matrimonial, la seule référence à l'article 3 du code civil est insuffisante, la France étant signataire d'une convention internationale sur ce sujet : la Convention de LAHAYE du 14/03/1978 applicable aux couples mariés après le 01/09/1992, ce qui est le cas en l'espèce .

Il résulte de ce texte les éléments principaux suivants concernant la loi applicable au régime matrimonial en présence d'un élément d'extranéité ce qui est le cas en l'espèce compte tenu du lieu du mariage des époux [J], alors qu'ils n'étaient ni l'un ni l'autre français.

La convention susvisée détermine la loi applicable aux régimes matrimoniaux.

Les questions relatives aux obligations alimentaires entre époux, aux droits successoraux du conjoint survivant et à la capacité des époux sont exclus de son champ d'application.

La convention susvisée a une vocation universelle car elle s'applique même si la nationalité ou la résidence habituelle des époux ou la loi applicable en vertu des articles ci-dessous ne sont pas celles d'un Etat contractant.

Il résulte de l'article 3 que le régime matrimonial est soumis à la loi interne désignée par les époux avant le mariage. En l'espèce, il apparaît que les époux n'ont pas expressément choisi de loi applicable ni au moment du mariage ni postérieurement.

Dans ce cas, la loi applicable est en principe définie par les dispositions de l'article 4 qui énonce que :

'Si les époux n'ont pas, avant le mariage, désigné la loi applicable à leur régime matrimonial, celui-ci est soumis à la loi interne de l'Etat sur le territoire duquel ils établissent leur première résidence habituelle après le mariage.

Toutefois, dans les cas suivants, le régime matrimonial est soumis à la loi interne de l'Etat de la nationalité commune des époux :

1. lorsque la déclaration prévue par l'article 5 a été faite par cet Etat et que son effet n'est pas exclu par l'alinéa 2 de cet article ;

2. lorsque cet Etat n'est pas Partie à la Convention, que sa loi interne est applicable selon son droit international privé, et que les époux établissent leur première résidence habituelle après le mariage :

a) dans un Etat ayant fait la déclaration prévue par l'article 5, ou

b) dans un Etat qui n'est pas Partie à la Convention et dont le droit international privé prescrit également l'application de leur loi nationale ;

3. lorsque les époux n'établissent pas sur le territoire du même Etat leur première résidence habituelle après le mariage.

A défaut de résidence habituelle des époux sur le territoire du même Etat et à défaut de nationalité commune, leur régime matrimonial est soumis à la loi interne de l'Etat avec lequel, compte tenu de toutes les circonstances, il présente les liens les plus étroits'.

Il résulte d'autre part de l'article 7 de la même convention que :

'Article 7

[... alinéa 1]

Toutefois, si les époux n'ont ni désigné la loi applicable, ni fait de contrat de mariage, la loi interne de l'Etat où ils ont tous deux leur résidence habituelle devient applicable, aux lieu et place de celle à laquelle leur régime matrimonial était antérieurement soumis :

1. à partir du moment où ils y fixent leur résidence habituelle, si la nationalité de cet Etat est leur nationalité commune, ou dès qu'ils acquièrent cette nationalité, ou

2. lorsque, après le mariage, cette résidence habituelle a duré plus de dix ans, ou

3. à partir du moment où ils y fixent leur résidence habituelle, si le régime matrimonial était soumis à la loi de l'Etat de la nationalité commune uniquement en vertu de l'article 4, alinéa 2, chiffre 3".

Enfin, la loi compétente en vertu des dispositions de la Convention demeure applicable aussi longtemps que les époux n'en ont désigné aucune autre et même s'ils changent de nationalité ou de résidence habituelle ( article 7 alinéa 1).

La nationalité des époux au sens de la présente convention doit s'apprécier selon les principes de l'article 15 qui énonce que :

'Aux fins de la Convention, une nationalité n'est considérée comme nationalité commune des époux que dans les cas suivants :

1. les deux époux avaient cette nationalité avant le mariage ;

2. un époux a volontairement acquis la nationalité de l'autre au moment du mariage ou ultérieurement, soit par une déclaration prévue à cet effet, soit en ne déclinant pas cette acquisition alors qu'il savait que ce droit lui était ouvert ;

3. les deux époux ont volontairement acquis cette nationalité après le mariage'.

En l'espèce, la loi française est applicable dans la mesure où les époux n'ont pas fait le choix d'une autre loi et ni fait de contrat de mariage, qu'ils ont installé leur domicile de manière continue en France depuis 2002 et qu'ils ont acquis la nationalité française qui est leur nationalité commune depuis 2007 et qui est celle du lieu de leur résidence habituelle.

Dès lors, le régime légal est applicable à savoir le régime de communauté réduite aux acquêts puisqu'il est constant que les époux n'ont pas fait de contrat de mariage au moment du divorce (possibilité interdite par la loi ivoirienne) et qu'en droit français, en l'absence de contrat de mariage, le régime légal est applicable.

SUR LA PRESTATION COMPENSATOIRE

Aux termes de l'article 270 du code civil, le divorce met fin au devoir de secours entre époux. L'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge. Toutefois, le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si l'équité le commande, soit en considération des critères prévus à l'article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture.

Aux termes de l'article 271 du même code, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. À cet effet, le juge prend en considération, notamment la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenus, après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles, leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa.

*****

M. [J] offrant de verser une somme au titre de la prestation compensatoire, il ne conteste pas l'existence d'une disparité entre les époux, seule étant en litige son montant :

- le premier juge a fixé la prestation compensatoire à la somme de 350.000 euros

- M. [J] offre la somme de 20.000 euros

- Mme [O] sollicite la confirmation du jugement sur ce point

L'appel principal étant total, le prononcé du divorce n'a pas acquis force de chose jugée de sorte qu'il convient de se placer à la date du présent arrêt pour apprécier la situation des parties. En effet, M. [J] a formé une déclaration d'appel 'partiel, réformation' sans préciser les chefs du jugement auquel il entendait limiter son appel.

******

==$gt; M. [J] soutient qu'il n'a jamais empêché son épouse de travailler et de suivre une formation, qu'il n'y a plus de disparité puisqu'elle a désormais un appartement, une voiture et navigue sur internet où elle pose comme mannequin.

Il ajoute que malgré toutes les apparences, il a un revenu mensuel modeste de 2 556, 55 euros et que ses dépenses mensuelles s'élèvent à 3 387, 87 euros par mois, de ce fait, il a un déficit de 831, 32 E pour lequel il est obligé de faire mains et pieds en vue de boucler son budget mensuel, tandis que Mme [S] [S] [O] ne se soucie guère de fin de mois ; qu'ayant travaillé toute sa vie durant en Côte d'Ivoire, M. [J] est bénéficiaire d'une retraite de 9 379, 60 frs CFA, soit 14, 32 € par mois, alors que Mme [S] [S] [O] a encore la possibilité d'améliorer le revenu de sa retraite.

Il souligne également qu'à 70 ans, il ne peut plus prétendre ni à travailler, ni à obtenir un quelconque moyen pour améliorer sa vie, or, Mme [S] [S] [O], jeune femme de 49 ans sans charge, ambitieuse et très photogénique sur internet a encore beaucoup d'atouts pour un avenir meilleur.

==$gt; Madame [O] soutient que Monsieur [J] a cessé tout paiement de pension alimentaire depuis le mois d'Août 2012 et que ni les courriers officiels à son avocat, ni la plainte pour abandon de famille n'ont donné un quelconque résultat (pièces 34 à 37). L'exécution forcée est devenue impossible, faute de connaître des biens saisissables facilement en FRANCE.

Son époux dispose d'un beau patrimoine, même s'il rechigne à le révéler, depuis l'origine (pièce 22 correspondant à sa déclaration de patrimoine immobilier qu'il estimait à hauteur de 1.070.000 euros outre 276 383 euros de biens mobiliers correspondant à des placements et assurances vie).

Il résulte des pièces versées devant la Cour :

* pour Mme [O]

Elle est sans emploi et justifie poursuivre une formation de CAP esthétique Cosmétique (pièce 57) Cette formation induit un coût justifié de 384 euros par mois, pendant 10 mois à compter du mois de septembre 2014.

Elle avait précédemment suivi une formation de trois semaines en onglerie.

Selon l'attestation de droits du 19/09/2014, elle perçoit 439,39 euros par mois au titre du RSA.

Elle justifie également ne pouvoir bénéficier d'allocation pôle emploi d'une durée insuffisante.

Au 14/05/2012, Mme [O] reconnaissait bénéficier d'un capital assurance vie personnel de 3294 euros.

Elle n'a pas de patrimoine propre ce qui n'est nullement contesté par M [J].

Elle est locataire [Adresse 4] moyennant un loyer de 600 euros. (pièce 23/1).

Si son budget apparaît déficitaire puisqu'elle invoque elle même l'absence de règlement des pensions auxquelles M. [J] a été condamné par décisions exécutoires. Elle doit dès lors bénéficier de quelques revenus annexes en tout état de cause sans aucune proportion avec les disponibilités financières de son époux qui percevait des sommes en liquide régulières sur des comptes bancaires (en 2009).

M. [J] ne justifie pas par contre de ses affirmations quant à un train de vie exceptionnel en qualité de mannequin, la référence à des publications internet étant insuffisantes à cet égard.

* Pour M. [J]

Pour l'appréciation du montant de la prestation compensatoire, il importe de déterminer au mieux en fonction des pièces produites quels sont les biens communs et quels sont les biens propres de M. [J].

M. [J] justifie que l'appartement sis [Adresse 1] d'une valeur annoncée de l'ordre 120 000 euros, le studio [Adresse 5] (valeur déclarée : 120 000 euros), l'appartement sis [Adresse 6] (valeur déclarée 144 000 euros), les biens immobiliers acquis en Côte d'Ivoire l'ont été avant le mariage (pièce 12/11, 12/12, 12/13) et ce pour une valeur totale déclarée de 300.000 euros.

La pièce partiellement produite et assez illisible concernant le studio d'[Localité 4] ne permet pas de déterminer son statut aucune indication du nom de l'acquéreur ne figurant.

Il en est de même de la pièce 12/8 (seule la première page étant produite) et semblant concerner d'après la chronologie de ses pièces un appartement qui aurait été acquis en 2003 [Adresse 2] qu'il déclare être sa résidence principale. Il est justifié que cette acquisition a été faite en 2003 par les époux [J] [O] (pièce 21).

La pièce n° 12/10 est produit sans que figure la page 2 détaillant l'immeuble vendu. Compte tenu de la localisation du Notaire, il apparaît qu'il s'agit du bien qu'il reconnaît posséder à [Localité 7] acquis en le 08/02/1993 antérieurement au mariage ( une valeur déclarée de 126 000 euros).

Il résulte des éléments produits qu'en l'état il n'est justifié que d'un immeuble commun sis [Adresse 7], ce qui correspond d'ailleurs à l'attestation sur l'honneur de Mme [O].

M. [J] reconnaît dans sa déclaration de patrimoine disposer de soldes de comptes pour 276 383 euros (soldes en 2011/2012).

L'arrêt de la cour d'appel de DOUAI mentionnait en outre ainsi que le premier juge l'a relevé, l'existence de portefeuilles mobiliers à Monaco (261 180 euros au 31/03/2010 et au Luxembourg (664 452 euros au 31/12/2009).

M. [J] justifie d'une retraite CARSAT de 16,51 euros par mois (pièce 12).

Il a déclaré selon l'avis d'imposition 2014, 197 euros/an de retraite et des revenus fonciers nets de 2330 euros. Son imposition sur les revenus 2013 est de 337 euros.

Il invoque avoir à sa charge financière les deux filles du couple, sans en justifier puisqu'il ne produit à cet égard que leurs actes de naissance.

M. [J] indique cependant lui même qu'il perçoit un revenu mensuel modeste de 2 556,55 euros ce qui ne correspond pas aux revenus fiscalement déclarés. Il invoque de plus des charge de 3 387 euros par mois non justifiées. Ce déficit budgétaire revendiqué et le fait qu'il prétende mobiliser 2 x 1000 euros par mois pour ses filles démontre son manque de transparence sur ses revenus et charge dans la mesure où même l'aide apportée à ses filles apparaît incohérent avec son niveau de revenu allégué.

M. [J] n'hésite pas à invoquer qu' 'il est obligé de faire mains et pieds en vue de boucler son budget mensuel, tandis que Mme [S] [S] [O] ne se soucie guère de fin de mois' alors qu'il résulte des éléments qui précèdent qu'il dispose sans contestation possible de capacités financières conséquentes et pouvant être mobilisées.

Eléments relatifs au couple

Mme [O] est âgée de 50 ans pour être née en 1964. M. [J] est âgé de 70 ans.

La vie commune contemporaine du mariage à la date de l'ordonnance de non-conciliation a été de 9 années.

Mme [O] n'a jamais travaillé pendant le temps du mariage et justifie que, alors sans formation particulière, elle s'occupait du foyer et des enfants (pièce 27).

Ce choix de couple, fait en considération également de l'absence de formation de Mme [O] est intégré dans le projet économique commun et en considération du mariage qui n'a pas vocation à être stoppé avant le décès de l'un ou l'autre. Il a perduré pendant la vie commune soit pendant 9 années.

Si M. [J] justifie qu'elle a suivi des formations en 2009 et 2012, aucun élément ne démontre qu'elles aient donné lieu à des rémunérations conséquentes.

Les affirmations de M. [J] indiquant qu'il a tout fait pour qu'elle puisse acquérir une formation sont sans incidence à cet égard étant relevé de plus que la pratique en cours d'acquisition de la langue française, l'absence d'expérience professionnelle liée à une formation minimale de Mme [O] ne lui auraient pas permis de trouver un travail très rémunérateur.

En conséquence, ses droits à la retraite seront à l'évidence minimes.

Il résulte des éléments qui précèdent que :

- M. [J] reste peu transparent quant à ses revenus fonciers et ses revenus de capitaux mobiliers en particulier pour ceux situés à l'étranger.

- Mme [O] n'établit pas non plus une justification réelle et totale de ses revenus compte tenu du caractère déficitaire structurel du budget mensuel qu'elle présente étant considéré cependant que ses ressources ne peuvent être du niveau de celles de M. [J], médecin à la retraite et ayant constitué un patrimoine immobilier particulièrement important au regard même de son activité professionnelle

- la disparité majeure entre les parties résulte du patrimoine propre de chacun, M. [J] au contraire de Mme [O], dispose, outre ses placements sur différents comptes dont certains au Luxembourg et à [Localité 6], d'un patrimoine immobilier propre conséquent

- seul l'appartement de [Localité 5] ne peut être pris en considération dans la mesure où il a été acquis après le mariage

- Mme [O] est encore jeune et dispose de facultés désormais d'améliorer sa situation personnelle tandis qu'il est constant qu'à 70 ans la situation confortable de M. [J] n'est plus de nature à évoluer considérablement.

Au regard de ces éléments, et en considération de l'équité prévue par l'article 270 du code civil appliquée aux critères de l'article 271 du même code, il convient d'infirmer la décision en ce qu'elle a fixé le montant de la prestation compensatoire à la somme de 350 000 euros et d'en fixer le montant à la somme de 250 000 euros payable en capital, M. [J] disposant de nombreux biens propres lui permettant d'en régler le montant.

Sur la demande de Mme [O] en dommages et intérêts pour procédure abusive (article 1382 du code civil) 

Mme [O] invoque un lourd préjudice matériel et moral qui justifie l'allocation d'une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil en raison de :

- la multiplicité d'actions, de contestations, de revirements de M. [J] est une souffrance réelle et réitérée pour la concluante, ce dont M. [J] est parfaitement conscient

- le non paiement des sommes (pension alimentaire au titre du devoir de secours) auxquelles il a été condamné qui lui aurait permis de vivre avec moins de difficultés et sans se trouver en situation de besoin.

Il résulte effectivement de l'historique de la procédure que M. [J] a adopté un comportement procédurier retardant l'issue du litige et parfois même sans prendre conseil auprès de son avocat (QPC). Son droit d'accéder à la justice a sans conteste dégénéré en abus de droit.

Cependant, Mme [O] ne démontre pas qu'elle en a subi un préjudice moral particulier alors qu'il est constant qu'elle a tenu à poursuivre elle-même la procédure de divorce pour altération définitive du lien conjugal et qu'en 2010/2011 elle avait entretenu des relations avec une tierce personne (rapport d'enquête privée non contesté produit par M. [J]).

Mme [O] ne démontre pas plus avoir été totalement dans l'impossibilité d'exécuter les décisions prises alors qu'elle disposait des adresses et localisation d'immeubles en France appartenant à M. [J] ni avoir subi un préjudice matériel lié à l'obligation de se défendre étant rappelé qu'elle est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale.

Il sera d'ailleurs observé que son conseil n'a pas formé de demande sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10/07/1991.

Mme [O] sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que 'La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Les conditions dans lesquelles il peut être mis à la charge d'une partie qui bénéficie de l'aide juridictionnelle tout ou partie des dépens de l'instance sont fixées par les dispositions de la loi n°91-647 du 10/07/1991 et du décret n°91-1266 du 19/12/1991".

Il convient préalablement de constater que Mme [O] a sollicité la condamnation de M. [J] aux dépens de première instance et d'appel. M. [J] sollicite la condamnation de Mme [O] aux dépens, sans précision (première instance et appel). Il convient donc de considérer que la Cour est saisie de la question des dépens de première instance.

En application de l' article 1127 du code de procédure civile, les dépens de l'instance sont à la charge de l'époux qui a pris l'initiative du divorce pour altération définitive du lien conjugal, à moins que le juge n'en dispose autrement.

Il n'y a pas lieu d'écarter l'application du principe susvisé s'agissant des dépens de première instance. En conséquence, le jugement sera infirmé sur ce point et Mme [O], demanderesse au divorce pour altération définitive du lien conjugal, sera condamnée aux dépens de première instance.

Par contre, étant constaté que M. [J] n'a pas obtenu gain de cause pour l'essentiel de ses demandes en cause d'appel, il convient de le condamner aux dépens d'appel.

Sur l'application de l'article 699 du code de procédure civile

Il résulte de l'article 699 du code de procédure civile que 'Les avocats peuvent dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans en avoir reçu provision.

La partie contre laquelle le recouvrement est poursuivi peut toutefois déduire, par compensation légale, le montant de sa créance de dépens'.

Il convient de faire droit à la demande de distraction des dépens présentée par le conseil de Mme [O] concernant les seuls dépens d'appel restés à sa charge nonobstant l'octroi de l'aide juridictionnelle à savoir notamment le droit de plaidoirie.

Sur la demande de frais irrépétibles présentée par les parties

Il résulte de l'article 700 du code de procédure civile que :

'Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :

1° À l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat'.

Mme [O] n'étant pas condamnée aux dépens d'appel, il convient de rejeter la demande de M. [J] présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

Il est équitable d'allouer à Mme [O] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

Dit l'appel de M. [J] recevable

Constate, en application de l'article 954 du code de procédure civile, que Mme [O] n'a pas formulé dans le dispositif de ses conclusions, de fin de non recevoir à l'encontre des demandes présentées par M. [J]

Déboute M. [J] de sa demande de nullité du jugement soumis à l'examen de la Cour

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :

- fixé le montant de la prestation compensatoire à la somme de 350 000 euros

- condamné M. [J] aux dépens

Statuant de nouveau sur les points infirmés :

- Condamne M. [J] à payer à Mme [O], en capital, une prestation compensatoire de 250 000 euros.

- Condamne Mme [O] aux dépens de première instance

Y ajoutant :

Déboute M. [J] de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code civil

Dit le juge français compétent pour l'ensemble des demandes

Dit que la loi française est applicable à l'ensemble des demandes ainsi qu'aux questions relatives au régime matrimonial des époux.

Constate qu'en conséquence, le régime matrimonial des époux relève du régime légal de communauté réduite aux acquêts

Déboute Mme [O] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Condamne M. [J] à payer à Mme [O] la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [J] aux dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me DELAHAYE.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE

A. DELAIREI. CHASSARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 7 section 2
Numéro d'arrêt : 13/03371
Date de la décision : 05/02/2015

Références :

Cour d'appel de Douai 72, arrêt n°13/03371 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-05;13.03371 ?
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