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29/10/2014 | FRANCE | N°13/05920

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 29 octobre 2014, 13/05920


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 29/10/2014



***





N° MINUTE :

N° RG : 13/05920



Jugement (N° )

rendu le 24 Juillet 2013

par le Tribunal de Commerce de BOULOGNE SUR MER

REF : VF/VC



APPELANT

Monsieur [E] [Q]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 4]

Demeurant

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représenté par Me Eric LAFORCE, membre d

e la SELARL ERIC LAFORCE, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me Géry HUMEZ, avocat au barreau d'ARRAS





INTIMÉE

SARL MENUISERIE DU CANTON, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 29/10/2014

***

N° MINUTE :

N° RG : 13/05920

Jugement (N° )

rendu le 24 Juillet 2013

par le Tribunal de Commerce de BOULOGNE SUR MER

REF : VF/VC

APPELANT

Monsieur [E] [Q]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 4]

Demeurant

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté par Me Eric LAFORCE, membre de la SELARL ERIC LAFORCE, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me Géry HUMEZ, avocat au barreau d'ARRAS

INTIMÉE

SARL MENUISERIE DU CANTON, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Ayant son siège social

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée et assistée par Me Yves BOURGAIN, membre de la SELAS LLC et Associés, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER, substitué à l'audience par Me Anne-Bénédicte ROBERT, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

DÉBATS à l'audience publique du 10 Septembre 2014, tenue par Véronique FOURNEL magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Jean-Loup CARRIERE, Président de chambre

Fabienne BONNEMAISON, Conseiller

Véronique FOURNEL, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 Octobre 2014 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur Jean-Loup CARRIERE, Président et Claudine POPEK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 27 août 2014

***

Monsieur [E] [Q] est propriétaire d'un immeuble à usage d'habitation sis [Adresse 2].

Dans ce cadre, un devis a été réalisé par la SARL MENUISERIE DU CANTON (MDC) le 29 juin 2010 portant sur le remplacement des menuiseries existantes au nombre de 19 pour la somme de 40 846,81 euros.

Un chèque d'acompte de 8 169,69 euros a été réglé à la société MDC le 24 juillet 2010..

Trois fenêtres en charpente ont été changées par la société MDC dans un premier temps.

En cours de chantier, la société MDC a démonté les 9 portes à l'intérieur de l'habitation pour les réhabiliter. Elle a conservé ces portes.

Monsieur [W] [X], expert chargé par Monsieur [Q] du suivi du chantier, a refusé de réceptionner les trois menuiseries en charpente, invoquant des non-conformités au regard notamment des exigences de la Fondation du Patrimoine.

Par courrier du 21 juin 2011, la société MDC a confirmé sa décision, annoncée par mail du 21 mai 2011, de cesser les travaux, soulignant qu'aucun contrat n'avait été signé et qu'elle n'avait jamais eu le descriptif des travaux.

Le 29 décembre 2011, la société MDC a facturé la somme de 8 344,28 euros TTC pour solde de ses interventions, sauf à déduire l'acompte de 8 169,69 euros.

Par acte du 25 mai 2012, Monsieur [Q] a fait assigner la SARL MDC devant le Tribunal de Commerce de Boulogne sur Mer.

Il réclamait la condamnation de cette société à lui payer les sommes suivantes :

- 8 169,69 euros au titre du remboursement de l'acompte,

- 12 175,28 euros au titre du préjudice matériel,

- 9 000 euros au titre du préjudice de jouissance,

- 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il s'estimait victime de la rupture abusive du chantier par la société MDC qui aurait entamé les travaux sans avoir l'agrément du maître d'oeuvre et réalisé des ouvrages non conformes aux règles de l'art.

La société MDC, qui déniait toute responsabilité, les désordres étant selon elle imputables au couvreur, concluait au débouté de ces demandes et réclamait les sommes de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts et de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 24 juillet 2013, le Tribunal de Commerce de Boulogne sur Mer a :

- débouté Monsieur [Q] de sa demande de remboursement de l'acompte pour la somme de 8 169,69 euros,

- condamné la société MENUISERIE DU CANTON à payer à Monsieur [Q] la somme de 500,00 euros au titre du préjudice matériel,

- débouté Monsieur [Q] de sa demande au titre du préjudice de jouissance,

- débouté les parties du surplus de leurs demande,

- dit n'y avoir lieu au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé les dépens à la charge de la défenderesse.

Le Tribunal a considéré :

- qu'il n'était pas établi que l'entreprise aurait bénéficié d'un descriptif précis des menuiseries à réaliser,

- qu'elle ne savait pas que le chantier était placé sous le contrôle de la Fondation du Patrimoine,

- que la confection des larmiers d'étanchéité est de coutume de la responsabilité du couvreur.

Monsieur [Q] a relevé appel de ce jugement le 15 octobre 2013.

Dans ses conclusions récapitulatives du 12 mai 2014, il demande à la cour de réformer le jugement entrepris et de faire droit à l'ensemble de ses demandes formulées en première instance.

Il sollicite en outre une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient que la qualité des châssis posés est déficiente, qu'ils ne respectent pas les engagements contractuels et ne correspondent pas au dessin labellisé par la Fondation du Patrimoine.

La réalité contractuelle étant selon lui établie, il fait valoir qu'il appartenait à la société MDC de se renseigner sur l'étendue de son intervention, ce d'autant plus qu'elle n'ignorait pas que la Fondation du Patrimoine intervenait sur le chantier.

Compte tenu de l'abandon du chantier par la société défenderesse il invoque un retard d'environ 4 mois dans l'avancement de celui-ci justifiant un préjudice de jouissance de 9 000 euros, et un préjudice matériel, occasionné notamment par l'obligation de remplacer les 9 portes non rendues par la société MDC, outre des travaux de reprise et de démontage, chiffré à 12 175,28 euros.

La société MDC a relevé appel incident.

Dans ses conclusions du 13 mars 2014, elle conclut à la confirmation du premier jugement à l'exception de la disposition la condamnant à payer une somme de 500,00 euros à Monsieur [Q].

Elle réclame à titre reconventionnel la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts outre la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 août 2014.

SUR CE,

Sur les relations contractuelles

A titre préalable il doit être relevé que la réalité des relations contractuelles ne peut être niée au motif que le devis n'aurait pas été signé, l'accord verbal des parties étant concrétisé par l'engagement effectif des travaux et le versement de l'acompte de démarrage correspondant à 20% du montant du chantier.

La présence de l'entreprise MDC aux réunions de chantier à compter du 29 octobre 2010 jusqu'à celle du 20 mai 2011, date à laquelle elle a décidé d'arrêter le chantier de travaux, confirme l'effectivité des liens contractuels.

Il résulte de l'examen des compte- rendus de chantiers et des pièces produites que la société MDC, qui avait établi le 19 juin 2010 un devis d'intervention détaillé correspondant nécessairement à un descriptif précis, a établi en document préalable une coupe de principe définissant les profils et le compartiment des menuiseries envisagées.

Elle ne peut soutenir qu'elle n'aurait pas été en possession d'un descriptif des travaux.

Il lui appartenait en tout état de cause de se renseigner sur l'étendue de ses obligations au regard des spécificités du chantier qu'elle ne pouvait ignorer compte tenu de sa participation aux réunions.

Monsieur [Q] soutient que le plan établi par la société MDC a été accepté par la Fondation du Patrimoine. Bien que la fondation n'ait pas visé expressément le document pour accord, elle indique dans un courrier du 1er décembre 2011 que les menuiseries réalisées ne correspondent pas au 'dessin labelisé'.

Son intervention ne pouvait être ignorée de la société puisque tous les compte- rendus des réunions de chantier lui étaient adressés.

Dès le démarrage des travaux, la société MDC a été sollicitée pour communiquer ses plans d'exécution et les plans d'adaptation au gros oeuvre. Elle ne s'est pas exécutée en dépit des relances mais a néanmoins de façon non concertée installé les trois fenêtres de charpente.

Les menuiseries mises en oeuvre ont immédiatement été contestées dans leur conception et leurs conditions de mise en oeuvre ( pièce d'appui de bois d'une largeur insuffisante, dépourvue de rejingot et de larmier réglementaire, alors même que celui-ci figurait sur le propre dessin de coupe de la société).

L'entreprise MDC n'a pas contesté ces désordres, constatés dès la réunion de chantier du 29 octobre 2010 au cours de laquelle elle proposait de reprendre l'ouvrage et de soumettre un profil témoin à l'approbation du maître de l'ouvrage avant réalisation.

Les échanges de mail entre M. [X] et l'entreprise établissent qu'aucune proposition n'a été soumise.

Par mail du 21 mai 2011, la société MDC annonçait qu'elle n'effectuerait aucun remplacement et proposait de procéder à l'habillage des éléments bois défaillants par une enveloppe de zinguerie.

Cette disposition, qualifiée de 'bricolage' par M. [X] n'a pas été acceptée. Par mail du même jour , il demandait à l'entreprise de lui proposer une solution définitive et la conviait aux prochaines réunions de chantier.

C'est dans ces circonstances que l'entreprise MDC a décidé brutalement d'arrêter le chantier, sans motiver son abandon.

Les procès-verbaux de constats d'huissier de Me [R], huissier de justice à [Localité 3], en date des 20 juin et 22 juillet 2011, confirment l'existence visible des désordres.

La rupture des relations contractuelles par l'entreprise MDC est dépourvue de cause justificative, elle n'en invoque d'ailleurs aucune. Elle est constitutive de faute.

Sur la réparation des dommages

- sur le remboursement de l'acompte

Les menuiseries livrées sont impropres à leur destination. Il est établi par l'ensemble des pièces du dossier et notamment par le courrier de la Fondation du Patrimoine du 1er décembre 2011 qu'elles devront être déposées et remplacées.

La demande de remboursement de l'acompte versé est justifié. Il y sera fait droit.

- sur le préjudice de jouissance

Monsieur [Q] réclame un préjudice de jouissance pour 4 mois de retard, calculé à partir du taux de valeur locative de son bien, estimé à 950 000 euros.

Le retard pris sur le chantier ne peut être imputable à la seule société MDC, les compte-rendus de chantier faisant apparaître que de nombreuse modifications techniques ont venues perturber le déroulement de celui-ci, en particulier au cours de la période hivernale 2010-2011.

Toutefois son abandon brutal a généré un retard supplémentaire incontestable, compte tenu du blocage du chantier, les autres corps de métier se trouvant freinés dans leur avancement ,et de la nécessité de rechercher un autre intervenant.

Le retard de 4 mois invoqué est justifié.

Le préjudice du maître de l'ouvrage est établi.

Monsieur [Q] ne produit toutefois aucune pièce justifiant de la valeur de son immeuble.

Au regard du marché immobilier locatif, et de la période hivernale pendant laquelle le chantier a pris du retard, une valeur locative de 500 euros par mois peut être retenue.

Il sera en con séquence accordé à Monsieur [Q] une somme de 2 000 euros (500 X 4) en réparation de son préjudice de jouissance.

- sur le préjudice matériel

Il est précisé dans la réunion de chantier du 28 avril 2011 ' que les portes intérieures seront emmenées en atelier pour une remise en état et un examen permettant d'apprécier les conditions dans lesquelles elles pourraient être récupérées.'

L'entreprise MDC reconnaît dans ses conclusions toujours détenir ces portes. Il lui a été demandé par courrier du 17 juin 2011 de les restituer, en vain.

Le Tribunal a estimé que la probabilité que les portes soient récupérables apparaissait mince.

Si une telle appréciation, qu'aucun élément ne corrobore, ne peut être retenue, il n'en est pas moins vrai que lesdites portes étaient loin d'être en bon état et que les possibilités de récupération restaient à examiner.

Le maître de l'ouvrage, qui n'a pas multiplié les diligences pour récupérer les portes, ne saurait se voir accorder leur remplacement par des éléments neufs.

Il lui sera accordé à ce titre une somme de 3 500 euros, correspondant au montant du devis établi par la SARL MDC pour leur remise en état.

En revanche les postes 'prestation de démontage ' des menuiseries non-conformes et 'reprise étanchéité', seront pris en compte à hauteur des devis produits, soit respectivement 1 454,34 euros et 2 217,38 euros.

La société MDC sera en conséquence condamnée à payer une somme totale de 7 171,72 euros à Monsieur [Q] en réparation de son préjudice matériel.

Condamnée aux dépens de la procédure d'appel, la SARL MENUISERIE DU CANTON devra payer une somme de 2 000 euros à Monsieur [Q] sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions

Statuant à nouveau

Condamne la SARL MENUISERIE DU CANTON à payer à Monsieur [Q] les sommes suivantes:

- 8 169,69 euros au titre du remboursement de l'acompte,

- 2 000 euros au titre du préjudice de jouissance,

- 7 171,72 euros au titre du préjudice matériel,

- 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la SARL MENUISERIE DU CANTON aux dépens de la procédure d'appel.

Le GreffierLe Président,

C. POPEKJ.L. CARRIERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 13/05920
Date de la décision : 29/10/2014

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°13/05920 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-29;13.05920 ?
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