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30/09/2014 | FRANCE | N°13/04715

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 30 septembre 2014, 13/04715


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 30/09/2014



***



N° de MINUTE :

N° RG : 13/04715



Jugement (N° 11/01372)

rendu le 11 Juin 2013

par le Tribunal de Grande Instance de CAMBRAI



REF : BP/AMD





APPELANTE



SA AXA FRANCE IARD

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 3]

représentée par son représentant légal



Représentée

par Maître Bernard FRANCHI, membre de la SCP DELEFORGE FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Maître Alain BILLEMONT, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉS



Monsieur [Z] [S]

demeurant [Adresse 4]

[Localité 1]



R...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 30/09/2014

***

N° de MINUTE :

N° RG : 13/04715

Jugement (N° 11/01372)

rendu le 11 Juin 2013

par le Tribunal de Grande Instance de CAMBRAI

REF : BP/AMD

APPELANTE

SA AXA FRANCE IARD

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 3]

représentée par son représentant légal

Représentée par Maître Bernard FRANCHI, membre de la SCP DELEFORGE FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Maître Alain BILLEMONT, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS

Monsieur [Z] [S]

demeurant [Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Maître Jean-Claude HERBIN, avocat au barreau de CAMBRAI

SCI LE PRE D'ESPAGNE

ayant son siège social [Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par son représentant légal

Représentée par Maître Marie-Hélène LAURENT, membre de la SELARL ADEKWA, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Maître Dominique HENNEUSE, avocat au barreau de VALENCIENNES

SARL GRESELLE CONSTRUCTIONS

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée et assistée de Maître Guy DELOMEZ, avocat au barreau de CAMBRAI

DÉBATS à l'audience publique du 11 Juin 2014 tenue par Bruno POUPET magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Martine ZENATI, Président de chambre

Fabienne BONNEMAISON, Conseiller

Bruno POUPET, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2014 après prorogation du délibéré en date du 24 Septembre 2014 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur Bruno POUPET, Conseiller en remplacement de Madame Martine ZENATI, Président empêché et Claudine POPEK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 21 mai 2014

***

Au cours de l'année 1997, dans le cadre de la rénovation de trois immeubles contigus situés à [Localité 4] et destinés à être donnés en location par appartements, la société civile immobilière Le Pré d'Espagne a confié notamment :

- à Monsieur [Z] [S] l'exécution des lots gros-oeuvre, plâtrerie, isolation, menuiserie, peinture et papier peint,

- à la sarl Gréselle, assurée par la compagnie AXA France IARD, le lot 'sanitaires' ainsi qu'une mission de maîtrise d'oeuvre (plans après travaux, descriptif et quantitatif des travaux, suivi et coordination des travaux, passage des ordres de commandes).

Par jugement contradictoire du 11 juin 2013, le tribunal de grande instance de Cambrai a :

- dit la sarl Gréselle et Monsieur [Z] [S] responsables in solidum, sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil, de l'affaissement du plancher et des désordres consécutifs constatés par Monsieur [V] [G], expert, dans son rapport du 3 août 2009 affectant l'immeuble de la sci Le Pré d'Espagne,

- condamné en conséquence solidairement la sarl Gréselle et son assureur la société AXA France IARD, ce dans les limites de sa garantie, ainsi que Monsieur [Z] [S] à payer à la sci Le Pré d'Espagne les sommes de :

* 6 897 euros au titre des réparations à effectuer, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2006,

* 18 964,04 euros, outre 402,21 euros par mois à compter du 15 août 2009 jusqu'à achèvement des travaux de réparation,

* 5 940,62 euros, outre 407,71 euros par mois à compter du 16 mars 2008, jusqu'à achèvement des travaux de réparation,

- dit que dans leurs rapports entre eux, les condamnations prononcées devront être supportées à concurrence de 50 % par la sarl Gréselle et son assureur d'une part, Monsieur [Z] [S] d'autre part,

- condamné en conséquence Monsieur [Z] [S] à garantir à concurrence de 50 % la sarl Gréselle et la société AXA des condamnations prononcées à leur encontre,

- condamné la société AXA France IARD à garantir la sarl Gréselle des condamnations prononcées à son encontre dans les limites du contrat d'assurance,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné solidairement la sarl Gréselle et son assureur la société AXA France IARD, ce dans les limites de sa garantie, ainsi que Monsieur [Z] [S] à payer à la sci Le Pré d'Espagne la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné en conséquence Monsieur [Z] [S] à garantir à concurrence de 50 % la sarl Gréselle et la société AXA de cette condamnation,

- condamné la société AXA France IARD à garantir la sarl Gréselle de la condamnation prononcée à son encontre de ce chef dans les limites du contrat d'assurance,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné solidairement la sarl Gréselle et son assureur la société AXA France IARD ainsi que Monsieur [Z] [S] aux dépens, en ce compris les frais d'expertise,

- condamné en conséquence Monsieur [Z] [S] à garantir à concurrence de 50 % la sarl Gréselle et la société AXA de cette condamnation,

- condamné la société AXA France IARD à garantir la sarl Gréselle de la condamnation prononcée à son encontre de ce chef dans les limites du contrat d'assurance.

La société AXA France IARD, ayant relevé appel de ce jugement le 1er août 2013, demande à la cour de le réformer et de :

- débouter la société Gréselle de son appel en garantie à son encontre,

- débouter pareillement la sci Le Pré d'Espagne de son action directe à son encontre,

- subsidiairement, condamner Monsieur [S] à la garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre,

- condamner, selon le cas, la société Gréselle et la sci Le Pré d'Espagne ou Monsieur [S] à lui payer la somme de mille euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, dont distraction au profit de la scp Deleforge-Franchi.

Elle soutient à cet effet :

- qu'elle ne doit pas sa garantie à la sarl Gréselle dès lors que celle-ci n'est pas intervenue, dans le marché dont il s'agit, comme 'contractant général' (assurant à la fois la conception et la réalisation) ni comme constructeur de maisons individuelles, seules activités couvertes par le contrat d'assurance qui les lie,

- qu'en toute hypothèse, il ressort du rapport d'expertise que la responsabilité des dommages n'incombe qu'à Monsieur [S].

La sci Le Pré d'Espagne, maître de l'ouvrage, conclut à la confirmation du jugement, au débouté de la sarl Gréselle, de Monsieur [S] et de la société AXA de leurs demandes et à la condamnation solidaire de ces derniers à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, dont distraction au profit de Maître Laurent.

Si plusieurs désordres ont motivé initialement sa demande d'expertise, elle ne prétend, dans le cadre de la présente instance, sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil, qu'à être indemnisée des conséquences (frais de réparation, perte de loyers) d'un dommage survenu en 2005 et qu'elle impute, au visa du rapport d'expertise judiciaire, à la rupture d'une poutre vermoulue, imprudemment conservée lors des travaux de 1997, et à une réparation inadéquate effectuée en 2001 par Monsieur [S], lors d'un premier affaissement du plancher du premier étage résultant du mauvais état de ladite poutre.

Elle soutient qu'une réception tacite des travaux est intervenue dès leur achèvement en 1997, que Monsieur [S] n'apporte pas la preuve de ce qu'il ne serait pas l'auteur de la mauvaise réparation de 2001, que la sarl Gréselle, en tant que maître d'oeuvre, est responsable avec ce dernier des conséquences de la conservation de la poutre en 1997 et de la réparation inadaptée de 2001 et a d'ailleurs reconnu sa responsabilité en prenant en charge l'organisation des travaux nécessités par l'affaissement de 2001 et même le relogement temporaire des locataires, et en s'abstenant de contester cette intervention à la suite de la déclaration qui lui a été faite du sinistre de 2005.

La société Gréselle, formant appel incident, conclut à l'infirmation du jugement, au débouté de la sci Le Pré d'Espagne de ses demandes à son encontre, à la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, subsidiairement à la condamnation de la société AXA à la garantir de toute condamnation prononcée contre elle et à prendre en charge tous les frais qu'elle a exposés à l'occasion du présent litige.

Elle fait valoir à cet effet que sa mission de maîtrise d'oeuvre a pris fin en 1997, que le dommage n'est imputable qu'aux travaux réalisés postérieurement par Monsieur [S] en dehors de tout conseil, contrôle ou surveillance de sa part, qu'en toute hypothèse la sci Le Pré d'Espagne est responsable de l'essentiel du préjudice financier qu'elle prétend subir tant par ses carences dans les déclarations de sinistre et la conduite de la procédure qu'en s'abstenant de faire exécuter, depuis les opérations d'expertise, les travaux de reprise préconisés, qu'en toute hypothèse, elle a exercé une activité couverte par son contrat d'assurance et doit être garantie par la société AXA qui a reconnu, par un courrier à l'expert, être son assureur au titre de la responsabilité décennale.

Monsieur [Z] [S], conclut à l'infirmation du jugement, au débouté de la sci Le Pré d'Espagne de ses demandes à son encontre et à la condamnation de celle-ci aux dépens.

Il soutient principalement qu'il n'est intervenu sur le plancher litigieux ni lors des travaux de 1997 ni en 2001 contrairement à ce qu'affirme l'expert sur la seule foi des affirmations de la société Gréselle et, à titre subsidiaire, que les demandes de la sci Le Pré d'Espagne contre lui se heurtent à la prescription dès lors qu'il n'a fait l'objet d'une assignation en référé qu'en 2008, soit plus de dix ans après l'achèvement des travaux et le règlement de sa facture intervenu le 28 novembre 1997.

SUR CE

Sur les demandes de la sci Le Pré d'Espagne fondées sur la garantie décennale

Attendu que les articles 1792 et 1792-4-1 du code civil disposent que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, pendant dix ans à compter de la réception de celui-ci, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'immeuble ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'une telle responsabilité n'est point due si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère ;

que l'article 1792-1 précise qu'est notamment constructeur de l'ouvrage tout architecte, entrepreneur, technicien ou toute autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ;

qu'il est constant que la mise en oeuvre de la garantie décennale n'impose pas la recherche de la cause des dommages ;

qu'en l'espèce, il n'est pas discuté que les travaux réalisés en 1997 dans les immeubles de la sci Le Pré d'Espagne relèvent, compte tenu de leur ampleur, des dispositions précitées ;

qu'il ressort du rapport de l'expert judiciaire, qui a analysé les factures et documents contractuels, comme des écritures et pièces des parties, que les intervenants ont été la sarl Gréselle et Monsieur [S] investis des missions rappelées ci-dessus, et la sarl Bernard Covelet qui a réalisé les carrelages, plinthes, chapes en béton de vermiculite sur les planchers, les faïences murales ; qu'il n'est fait état d'aucune autre entreprise ;

qu'il est acquis qu'il n'a pas été procédé à une réception formelle des travaux mais que les parties s'accordent sur l'existence d'une réception tacite au 28 novembre 1997, date de règlement de la dernière facture, étant précisé que les travaux étaient achevés, que la sci Le Pré d'Espagne a pris possession des lieux et les a donnés en location sans formuler de réserves ni alors ni ultérieurement ;

qu'au sujet du désordre objet du présent litige, à savoir l'affaissement en 2005 du plancher de l'appartement situé [Adresse 1], premier étage, côté gauche, et les dommages corrélatifs (espace important entre les plinthes et le sol, affaissement de deux centimètres du muret de la cuisine longeant le couloir, fissuration des carreaux de grès posés au sol, affaissement du carrelage d'une chambre et du couloir), Monsieur [G], expert judiciaire désigné par une ordonnance de référé de 2006, écrit :

' Ce désordre, qui a été déclaré huit ans après la fin des travaux, compromet la solidité de l'ouvrage.

Son origine est à rechercher dans la rupture d'une poutre en bois du plancher de l'étage qui a entraîné l'affaissement, dont la réparation réalisée par Monsieur [S] est inappropriée.

Ce [premier] désordre, qui est survenu quatre ans après la fin des travaux et a été réparé par Monsieur [S], sans qu'existe au dossier ni déclaration de sinistre, ni commande, ni courrier, ni facture, ni trace de règlement, n'a finalement été déclaré par la sci Le Pré d'Espagne que quatre ans plus tard, le 10 juin 2005.

Les ouvrages litigieux ayant été modifiés, la poutre litigieuse ayant disparu et aucun constat des lieux sinistrés n'étant au dossier, je ne suis pas en mesure de dire quel était l'état de cette poutre quatre ans avant sa rupture ni s'il fallait alors prévoir de la renforcer ou de la remplacer.

En revanche, il apparaît, comme l'a justifié le BET H Sigier dans son rapport, que la réparation réalisée par Monsieur [S] à la suite de la rupture de la poutre en bois n'a pas permis de mettre définitivement fin à l'affaissement du plancher.' ;

qu'il s'agit donc d'un désordre survenu moins de dix ans après la réception des travaux et compromettant la solidité de l'immeuble, de sorte que la sci Le Pré d'Espagne est bien fondée, a priori, à revendiquer la garantie décennale des constructeurs que sont la sarl Gréselle et Monsieur [S] ;

qu'en ce qui concerne ce dernier, toutefois, il n'a été assigné devant le tribunal de grande instance de Cambrai par la sci Le Pré d'Espagne que le 9 août 2011 et n'avait été assigné devant le juge des référés, afin que lui soient déclarées opposables les opérations d'expertise, et ce par la société Gréselle et non par le maître de l'ouvrage, qu'en 2008, soit plus de dix ans après la réception ;

que les demandes dirigées contre lui par la sci Le Pré d'Espagne expressément et exclusivement sur le fondement de la garantie décennale sont donc irrecevables ;

que force est de constater que la société Gréselle, si elle impute la responsabilité du dommage à Monsieur [S] pour échapper aux demandes dirigées contre elle par la sci Le Pré d'Espagne, ne demande nullement, par le dispositif de ses conclusions, sur lequel seul la cour est tenue de statuer, la condamnation de Monsieur [S] à la garantir d'une éventuelle condamnation prononcée à son encontre au profit de la sci ;

que seule les demandes présentées par la sci Le pré d'Espagne à l'encontre de la société Gréselle sont donc susceptibles de prospérer ;

que l'on doit comprendre des développements de cette dernière sur l'intervention de 2001, qui, selon elle, aurait été réalisée par le seul Monsieur [S] de sa propre initiative, qu'elle invoque cette intervention comme une cause étrangère susceptible de la dispenser de la garantie légale ;

que les conditions dans lesquelles a été réalisée l'intervention de 2001 restent nébuleuses dans la mesure où la sci Le Pré d'Espagne soutient que la société Gréselle a tout pris en main, fait intervenir des entreprises de son choix et même relogé temporairement un locataire, que la société Gréselle affirme que seul Monsieur [S], est intervenu et que Monsieur [H] n'a offert de reloger un locataire que par amitié pour le(s) gérant(s) de la sci, que Monsieur [S] conteste toute intervention de sa part, que l'expert, enfin, n'a pu obtenir aucun document à ce sujet ;

que quoi qu'il en soit, les conclusions de l'expert rapportées ci-dessus ne permettent pas de retenir l'intervention de 2001 comme la seule cause de la survenance du sinistre de 2005 ni, par conséquent, comme une cause étrangère exonérant les constructeurs de la garantie décennale car on ne doit pas perdre de vue que, comme l'indique bien Monsieur [G], ladite intervention, consécutive à la rupture d'une poutre, n'a certes pas permis de mettre fin définitivement à l'affaissement du plancher mais que le sinistre déclaré en 2005 est avant tout la conséquence de ce désordre antérieur à la réparation de 2001 et ayant rendu celle-ci nécessaire ;

que la société Gréselle ne peut par conséquent s'exonérer de sa garantie décennale ;

qu'il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré à la fois la société Gréselle et Monsieur [S] tenus d'assumer cette garantie;

Sur le préjudice de la sci Le Pré d'Espagne

attendu que l'expert a évalué le coût des travaux propres à remédier aux désordres à 6 897,66 euros et que cette évaluation n'est pas discutée ;

attendu que la sci Le Pré d'Espagne demande en outre à être indemnisée de la perte de loyers résultant de l'impossibilité de louer l'appartement du premier étage et l'appartement du rez-de-chaussée concernés par le sinistre ;

qu'elle a déclaré le sinistre à l'origine de la procédure le 10 juin 2005 à la société Gréselle et le 26 juillet 2005 à son assureur ;

qu'elle fait état :

- pour l'appartement du premier étage, d'un départ du locataire le 31 mai 2005 et d'une perte se montant à 18 964,04 euros pour la période allant du 1er juin 2005 au mois d'août 2009 (date de dépôt du rapport d'expertise), puis de 402,21 euros par mois, indexés, depuis lors et jusqu'à la réalisation des travaux,

- pour l'appartement du rez-de-chaussée, d'une perte de 5940,62 euros du 1er janvier 2008 au 16 mars 2009, puis de 407,71 euros par mois, outre indexation, depuis lors ;

que cependant, la sci ne produit pas les contrats de location qu'elle évoque ni aucune pièce relative aux circonstances dans lesquelles ils ont pris fin ;

qu'il s'avère, au vu des pièces produites et en particulier des décisions de justice et du rapport d'expertise, que la sci Le Pré d'Espagne, après voir déclaré le sinistre à la société Gréselle le 10 juin 2005, n'a assigné celle-ci aux fins d'expertise qu'au mois de juillet 2006, s'est abstenue de procéder aux mises en causes envisagées lors de la première réunion d'expertise du 15 janvier 2009 (entreprises [S] et Covelet), n'a engagé la présente procédure au fond que le 9 août 2011, soit deux ans après le dépôt du rapport d'expertise ;

qu'il lui était en outre loisible de demander l'autorisation de procéder aux travaux de réfection, relativement limités dans leur nature et dans leur coût, dès la fin des opérations d'expertise pour le compte de qui il appartiendrait et ne démontre nullement avoir été dans l'impossibilité de les financer ;

qu'elle a donc grandement participé à l'aggravation du préjudice résultant pour elle du désordre dénoncé ;

qu'il ne peut être tenu pour acquis que les appartements auraient été effectivement loués pendant toute la période pour laquelle elle demande une indemnisation ;

qu'enfin, le terme qu'elle entend voir fixer à cette indemnisation, soit la réalisation des travaux, dépend au moins en partie de ses diligences ;

que, compte tenu de ces circonstances, la cour a les éléments suffisants pour évaluer le préjudice matériel résultant de l'impossibilité de louer les logements considérés à 20 000 euros ;

Sur les demandes dirigées contre la société AXA France IARD

attendu qu'il résulte du titre III des conditions particulières du contrat d'assurance unissant la société AXA à la société Gréselle que celle-ci est couverte pour les activités suivantes :

- contractant général, assumant la maîtrise d'oeuvre et la réalisation des travaux ou sous-traitant tout ou partie de la maîtrise et/ou tout ou partie de maîtrise d'oeuvre et/ou tout ou partie de la réalisation des travaux,

cette activité s'exerçant pour des travaux de réaménagement, de réhabilitation et d'extension de maisons individuelles ou de bâtiments à usage d'habitation, commercial, industriel ou scolaire,

- constructeur de maisons individuelles ;

qu'il n'est pas discuté que la société Gréselle n'a pas agi, au cas présent, en qualité de constructeur de maisons individuelles ;

qu'elle n'a pas davantage agi en qualité de contractant général au sens défini par le contrat précité dès lors que, si elle a assumé la maîtrise d'oeuvre de l'ensemble des travaux de rénovation et de réaménagement, elle n'a réalisé que le lot 'sanitaires' et qu'il n'est pas contesté que les entreprises chargées des autres lots n'étaient pas ses sous-traitants ;

que le fait que la société AXA France IARD, par un courrier adressé le 13 janvier 2009 par son conseil à l'expert, ait indiqué qu'elle intervenait en qualité d'assureur RCD tant pour la société Gréselle que pour Monsieur [S] n'emporte pas engagement de sa part de garantir ladite société Gréselle s'il s'avérait que celle-ci avait oeuvré en l'espèce hors des limites de son contrat ;

que l'exception de non garantie soulevée par la société AXA France IARD est donc bien fondée et qu'il y a lieu de réformer le jugement en ce qu'il a jugé le contraire ;

Sur les autres demandes

attendu que conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, il appartient à la société Gréselle, partie perdante, de supporter la charge des dépens ;

qu'il serait en outre inéquitable, vu l'article 700 du même code, de laisser à la sci Le Pré d'Espagne et à la société AXA France IARD la charge intégrale de leurs frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,

Déclare irrecevables les demandes de la sci Le Pré d'Espagne dirigées contre Monsieur [Z] [S] ;

Condamne la société Gréselle à payer à la sci Le Pré d'Espagne les sommes de:

- six mille huit cent quatre-vingt-dix-sept euros et soixante-six centimes (6 897,66) en réparation du préjudice lié aux travaux de réfection nécessaires,

- vingt mille euros (20 000) en réparation du préjudice financier résultant d'une perte de revenus locatifs,

- deux mille euros (2 000) par application de l'article 700 du code de procédure civile,

lesdites sommes avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

Déboute la sci Le Pré d'Espagne du surplus de ses demandes indemnitaires;

Déboute la sci Le Pré d'Espagne et la société Gréselle de leurs demandes dirigées contre la société AXA France IARD ;

Déboute la société Gréselle de toutes ses autres demandes ;

Condamne la société Gréselle et sci Le Pré d'Espagne à payer, chacune, à la société AXA France IARD une indemnité de cinq cents euros (500) par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Gréselle aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés par Maître Laurent conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

Le Greffier,Pour le Président,

Claudine POPEK.Bruno POUPET.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 13/04715
Date de la décision : 30/09/2014

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°13/04715 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-30;13.04715 ?
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