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05/06/2014 | FRANCE | N°13/02895

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 05 juin 2014, 13/02895


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 05/06/2014



***



N° de MINUTE : 14/

N° RG : 13/02895



Jugement (N° 2013003113)

rendu le 02 Avril 2013

par le Tribunal de Commerce de LILLE METROPOLE



REF : SD/KH





APPELANTS



Madame [T] [J] épouse [M]

née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 3] (CAMEROUN)

demeurant [Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me Hadrien DEBACKER, avocat au barreau de LILLE

Assistée de Me Dimitri LECUYER (avocat au Barreau de LILLE)







Monsieur [B] [M]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 2]

de nationalité Française

d...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 05/06/2014

***

N° de MINUTE : 14/

N° RG : 13/02895

Jugement (N° 2013003113)

rendu le 02 Avril 2013

par le Tribunal de Commerce de LILLE METROPOLE

REF : SD/KH

APPELANTS

Madame [T] [J] épouse [M]

née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 3] (CAMEROUN)

demeurant [Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Hadrien DEBACKER, avocat au barreau de LILLE

Assistée de Me Dimitri LECUYER (avocat au Barreau de LILLE)

Monsieur [B] [M]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 2]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté par Me Hadrien DEBACKER, avocat au barreau de LILLE

Assisté de Me Dimitri LECUYER (avocat au Barreau de LILLE)

SAS BRAIN AND HART en liquidation judiciaire représentée par Maître [K], ès qualités de mandataire liquidateur

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Hadrien DEBACKER, avocat au barreau de LILLE

Assistée de Me Dimitri LECUYER (avocat au Barreau de LILLE)

INTIMÉE

SA BANQUE POPULAIRE DU NORD

représentée par son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Marie-Hélène LAURENT, avocat au barreau de DOUAI, substitué par Me SURMONT

Assistée de Me Philippe VYNCKIER, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience publique du 09 Avril 2014 tenue par Sandrine DELATTRE magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Caroline NORMAND

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe BRUNEL, Conseiller faisant fonction de Président

Sandrine DELATTRE, Conseiller

Stéphanie BARBOT, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2014 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Philippe BRUNEL, Conseiller faisant fonction de Président et Caroline NORMAND, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 20 mars 2014

***

Vu le jugement réputé contradictoire du 2 avril 2013 du tribunal de commerce de Lille-Métropole, qui a condamné solidairement la SAS BRAIN ET HART, [T] [M] et [B] [M] à payer à la BANQUE POPULAIRE DU NORD la somme de 41 803, 32 euros au titre du prêt de 50 000 euros avec intérêts au taux conventionnel de 5, 85% l'an à compter du 8 février 2013 et dans la limite de 9000 euros en ce qui concerne [B] [M] outre intérêts au taux légal à compter du 3 février 2013, et dans limite de 9000 euros en ce qui concerne [T] [M] outre intérêts au taux légal à compter du 3 février 2013, ainsi que 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, a condamné solidairement la SAS BRAIN ET HART et [T] [M] à payer à la BANQUE POULAIRE DU NORD la somme de 82 391, 47 euros au titre du prêt de 77 500 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4, 80% l'an à compter du 8 février 2013 et dans la limite de 27900 euros s'agissant d'[T] [M] avec intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2013, a ordonné l'exécution provisoire du jugement à hauteur de ces chefs nonobstant appel et sans caution, et condamné solidairement la SAS BRAIN ET HART, [T] [M] et [B] [M] aux dépens ;

Vu l'appel interjeté le 17 mai 2013 par la SAS BRAIN ET HART, [T] [M] et [B] [M] ;

Vu les conclusions déposées le 18 mars 2014 pour ces derniers, et maître [K], mandataire liquidateur représentant la société BRAIN ET HART, en liquidation judiciaire, aux termes desquelles ils demandent de prononcer la nullité du jugement déféré et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir, à titre subsidiaire, d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, de dire et juger que la société BANQUE POPULAIRE DU NORD a manqué à son devoir de conseil à l'égard de la société BRAIN & HART en lui faisant souscrire un emprunt manifestement excessif au regard de l'état de trésorerie qu'elle ne pouvait ignorer et de la viabilité du projet qu'elle savait être compromise, de dire et juger qu'il s'en est suivi une perte de chance de n'avoir pu contracter dans des conditions différentes, de condamner la BANQUE POPULAIRE DU NORD à payer à la société la SAS BRAIN ET HART la somme de 77 500 euros au titre du préjudice qu'elle lui a causé, de dire que la banque a également manqué à son devoir de conseil à l'égard des cautions pour lesquelles il en est résulté un préjudice analogue, de condamner la société BANQUE POPULAIRE DU NORD à payer la somme de 9000 euros à [B] [M] et la somme de 36 900 euros à [T] [M] au titre de leurs préjudices respectifs, de dire que le cautionnement souscrit le 28 septembre 2009 par [T] [M] lui est inopposable car disproportionné à ses ressources au jour de sa souscription, très subsidiairement, de dire que la société BANQUE POPULAIRE DU NORD a, de manière fautive, laissé perdre un droit préférentiel qui aurait pu procurer aux cautions, par voie de subrogation, un avantage particulier de nature à accroître ses chances de remboursement, dire en conséquence qu'[T] [M] est déchargée de son engagement de caution en date du 28 septembre 2009, à titre infiniment subsidiaire, de leur octroyer un échelonnement de la dette sur 24 mois, de prendre acte du paiement de 10 191, 42 euros effectué au profit de la BANQUE POPULAIRE DU NORD le 31 décembre 2012, et prononcer la compensation partielle avec la créance qu'elle détient à l'encontre des concluants, en tout état de cause, de condamner la société BANQUE POPULAIRE DU NORD à payer à la société BRAIN ET HART, [T] [M] et [B] [M], chacun, la somme de 3500 euros, ainsi qu'à supporter la charge des dépens;

Vu les conclusions déposées le 11 mars 2014 pour la société BANQUE POPULAIRE DU NORD aux termes desquelles elle demande à la cour de débouter les appelant de leurs demandes, de constater que la créance de la BANQUE POPULAIRE DU NORD à l'égard de la société BRAIN ET HART s'élève à 41 803, 32 euros au titre du prêt de 50 000 euros avec intérêts au taux conventionnel de 5, 85 % l'an à compter du 8 février 2013, de condamner au titre de ce prêt [B] [M] et [T] [M], en leur qualité de caution, à payer la somme de 9000 euros chacun outre intérêts au taux légal à compter du 3 février 2013, de constater que sa créance à l'égard de la société BRAIN ET HART est de 82 391, 47 euros au titre du prêt de 77 500 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4, 80 % l'an à compter du 8 février 2013, de condamner [T] [M] en sa qualité de caution solidaire à lui payer la somme de 27900 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 février 2013, outre la condamnation solidaire de maître [K] en qualité de liquidateur judiciaire, et des époux [M], aux dépens et au paiement de 8000 euros pour procédure abusive, ainsi que 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ;

Vu l'ordonnance de clôture du 20 mars 2014;

Référence étant faite au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, il suffit de rappeler que la société BRAIN ET HART, ayant pour activité le coaching en reclassement, orienté mass market, gérée par [T] [M], associée à l'instar de son époux [B] [M], souscrivait le 24 décembre 2008 un prêt de 50 000 euros cautionné par actes du même jour, par [T] et [B] [M] dans la limite de 9000 euros chacun, puis le 14 octobre 2009, un prêt de 77 500 euros remboursable en 87 échéances, cautionné par [T] [M], par acte du 21 octobre 2009, dans la limite de 27 800 euros, que par ordonnance du 19 juillet 2010 maître [E] [Y] était désigné en qualité de mandataire ad hoc de la société BRAIN ET HART, avec pour mission d'assister [T] [M] pour apprécier la situation de la société et son évolution, au besoin solliciter tels moratoires, et du tout faire un rapport, que le 15 novembre 2011 un protocole d'accord était conclu avec la BANQUE POPULAIRE DU NORD quant aux modalités de remboursement des prêts, que par courrier recommandé du 29 novembre 2012, demeuré non réclamé, la BANQUE POPULAIRE DU NORD prononçait la clôture des comptes et l'exigibilité anticipée de tous les concours, que ce courrier était réitéré le 19 décembre 2012, également revenu non réclamé, que par courrier du 3 janvier 2013, revenu non réclamé, les cautions étaient mises en demeure d'honorer leurs engagements, en vain, que par acte d'huissier de justice du 1er mars 2013 la société BANQUE POPULAIRE DU NORD assignait la SAS BRAIN ET HART,[T] [M] et [B] [M] devant le tribunal de commerce de LILLE METROPOLE aux fins d'obtenir le remboursement de sa créance, procédure qui donnait lieu au jugement déféré.

Au soutien de leur appel, la société BRAIN ET HART, [T] [M] et [B] [M] indiquent que leurs domiciles respectifs étaient connus de sorte que l'huissier de justice ne pouvait délivrer l'acte introductif d'instance par le biais de la procédure prévue à l'article 659 du code de procédure civile, laquelle n'a en outre pas été respectée, qu'il en est résulté pour eux un grief grave dés lors qu'ils n'ont pu faire valoir leurs moyens de défense en première instance, ce qui justifie l'annulation du jugement déféré.

A titre subsidiaire, ils exposent que la société BANQUE POPULAIRE DU NORD a accordé un prêt de 50 000 euros à la société BRAIN ET HART alors qu'elle avait déjà souscrit deux prêts auprès de la CAISSE D'EPARGNE pour un montant de 50 000 euros, ce qu'elle n'ignorait pas, qu'un autre prêt de 77 500 euros a été accordé le 28 septembre 2009, cautionné par [T] [M], alors que l'exercice clos au 30 juin 2009 était déficitaire de 92 000 euros, que trois semaines après l'avenant augmentant le remboursement des mensualités, la société BRAIN ET HART a été incapable de les rembourser, et a été placée en liquidation judiciaire, ce dont il résulte tant un manquement au devoir de conseil de la banque à l'égard de la société BRAIN ET HART et de sa dirigeante, ainsi qu'un manquement au devoir de mise en garde à l'égard des cautions novices dans le milieu des affaires.

[T] [M] estime que lorsqu'elle a souscrit l'engagement de caution à hauteur de 27 900 euros, il était manifestement disproportionné à ses revenus n'ayant plus d'emploi salarié pour se consacrer à sa société dans laquelle elle avait déjà investi toutes ses économies (45 000 euros en compte courant d'associé et 29 600 euros en capital social), que la BANQUE POPULAIRE DU NORD n'a pas inscrit d'autres sûretés.

Elle indique qu'en n'inscrivant aucun nantissement sur le compte courant d'associé, elle a laissé perdre un droit préférentiel ce qui doit être sanctionné par la décharge d'[T] [M] en sa qualité de caution.

Les époux [M] exposent qu'ils ont par ailleurs sept emprunts à rembourser au CREDIT AGRICOLE, le solde global s'élevant à 618 452, 74 euros, que le CREDIT AGRICOLE a prononcé la déchéance des termes des septs emprunts par courrier du 26 septembre 2012, de sorte qu'ils doivent rembourser cette somme alors qu'[T] [M] est actuellement au chômage, ce qui justifie l'octroi de délais.

En réponse, la société BANQUE POPULAIRE DU NORD indique que les domiciles connus des parties ont bien été indiqués dans l'acte introductif d'instance, que l'huissier a conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, constaté qu' une enseigne CENTRE MIYE OSAKA était inscrite sur la façade et qu'aucun nom ne figurait sur la boîte aux lettres, qu'il a ensuite consulté l'annuaire révélant que les époux étaient bien domiciliés à cette adresse, qu'il a tenté de contacter le numéro de téléphone d'[T] [M] indiqué dans l'annuaire, en vain, que dans ces conditions l'acte a valablement était délivré aux époux [M] selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, les lettres simples et en recommandé avec accusé de réception ayant été adressées.

Il en est de même pour la société BRAIN ET HART qui, lors des recherches effectuées par l'huissier de justice, ne se trouvait plus dans l'immeuble correspondant à l'adresse de son siège, une autre société occupant ses locaux, de sorte que c'est à juste titre qu'un procès-verbal de recherches infructueuses a été dressé.

Sur le fond, elle explique que la société BRAIN ET HART a été immatriculée le 15 février 2008, que le premier prêt a ainsi été consenti en début d'activité, que le second l'a été en octobre 2009 pour financer du matériel, des frais de communication, de brevet et aussi le fond de roulement de la société, que dans ces conditions elle ne pouvait pas consulter les chiffres des activités des trois années précédentes, que les échéances des prêts ont régulièrement été payées jusqu'en mars et avril 2012, que le choix de la désignation du mandataire ad hoc n'est pas lié aux prêts consentis par les différents établissements bancaires, mais aux difficultés de paiement des charges de sécurité sociale et de l'assurance chômage, que c'est dans ces conditions que les banques ont accepté, dans le cadre de protocoles homologués par le tribunal de commerce, de suspendre l'exigibilité des échéances jusqu'au 30 septembre 2011 et ensuite la suspension en capital du 1er octobre 2011 au 31 décembre 2011, que les avenants ont été réalisés dans ce cadre et n'ont pas été imposés à la société BRAIN ET HART, qu'il n' a jamais été considéré par le mandataire ad hoc que les prêts consentis étaient excessifs, qu'aux termes des protocoles d'accord la société BRAIN ET HART a d'ailleurs déclaré pouvoir faire face à son passif exigible avec son actif disponible et ne pas être en état de cessation des paiements.

Elle ajoute qu'une banque n'est pas tenue aux devoirs de mise en garde et de conseils à l'égard de cautions en l'absence de risque excessif d'endettement, ce qui est le cas en l'espèce eu égard au caractère très limité des cautionnements, aux revenus des époux [M] qui ont établi des fiches patrimoniales certifiées sincères et véritables, mentionnant des revenus de 11 914 euros par mois pour aucune charge, un patrimoine immobilier très conséquent financé au moyen de prêts dont certains déjà largement remboursés, ce qui révèle par ailleurs l'absence de caractère manifestement disproportionné des engagements de caution, l'oubli de la part des époux [M] de déclarer des prêts ne lui étant pas imputable.

Elle s'oppose enfin à la demande de délais de paiement, aucune pièce n'étant produite à l'appui, aucune négociation n'ayant été menée par les époux [M] pour le remboursement des prêts, le chèque de 10 191, 42 euros invoqué par les époux [M] ne devant servir à rembourser la banque qu'à hauteur de 5000 euros comme cela résulte de leur mail du 19 décembre 2012, ce chèque ayant finalement été destiné à la société BRAIN ET HART et n'ayant pas apuré les dettes de la société.

Elle expose que le montant de ses créances résulte de la déclaration de créances qu'elle a régularisée le 10 juillet 2013 mentionnant un solde de 42 189, 63 euros pour un prêt et un solde de 83 822, 61 euros pour l'autre, aucune imputation n'étant à faire sur ces montants, et les revenus et patrimoine des époux [M] leur permettant de faire face à leurs engagements.

SUR CE 

En matière de signification, la règle est la signification à personne, qu'elle soit physique ou morale, et, si cela est impossible, la signification à domicile ou à résidence, selon les règles des articles 654 à 658 du code de procédure civile, étant précisé que le domicile d'une personne morale est, en général, celui de son siège social ou d'un établissement inscrit à son extrait K bis ;

Par ailleurs, selon les dispositions de l'article 659 du même code, lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte ;

La société BANQUE POPULAIRE DU NORD a fait signifier l'assignation à la société BRAIN ET HART, le premier mars 2013, à l'adresse inscrite au K bis de cette dernière, qui correspond à celle indiquée dans ses conclusions, à savoir au [Adresse 2] ;

Il résulte du procès verbal de signification établi par maître [Z] et maître [R], huissiers de justices, le 1er mars 2013, qu'une fois sur place, il a été constaté qu'aucune personne répondant à l'identification du destinataire de l'acte n'avait son domicile, sa résidence ou son établissement à cette adresse, que sur place, au rez de chaussée se trouvait la compagnie d'assurances GESCO dont l'interlocuteur a indiqué que la société BRAIN ET HART était partie sans laisser d'adresse il y a plus d'un an, que l'interlocuteur du nouveau locataire des locaux anciennement occupés par la société BRAIN ET HART, la société TOUT EN PIXEL, lui a indiqué qu'elle occupait les locaux depuis décembre 2011, et ne pas connaître la nouvelle adresse de la société BRAIN ET HART, que la consultation du registre du commerce et des sociétés indiquait que l'adresse de la société BRAIN ET HART était [Adresse 2], que l'annuaire électronique ne révélait aucune société BRAIN ET HART dans le département;

Il s'ensuit que les diligences accomplies par les huissiers de justice instrumentaires, qui sont suffisantes et précisément décrites, ont permis de révéler que la société BRAIN ET HART n'était plus domiciliée ou établie à l'adresse indiquée par le registre du commerce et des sociétés, et n'y exerçait plus aucune activité, de sorte que c'est à juste titre qu'il a été procédé dans les formes prescrites par l'article 659 du code de procédure civile ;

La société BANQUE POPULAIRE DU NORD communique aux débats une copie de la preuve du dépôt de la lettre avec accusé de réception destinée à la société BRAIN ET HART au [Adresse 2], les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile exigeant que 'le même jour ou au plus tard le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité l'huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue , par lettre recommandée avec accusé de réception, une copie du procès verbal à laquelle est jointe une copie de l'acte de signification' ;

Cependant, il ressort de cette copie, que la lettre recommandée prescrite n'a été adressée à la société BRAIN ET HART que le lundi 4 mars 2013 à 16 heures, alors que le procès verbal de recherches a été dressé le vendredi premier mars 2013, l'audience devant le tribunal de commerce de LILLE METROPOLE étant prévue le 19 mars 2013 à 14 heures 30;

Il s'ensuit que la lettre recommandée dont s'agit n'a été adressée que le deuxième jour ouvrable après la date du procès verbal, alors que les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile disposent qu'à peine de nullité, cette lettre doit être adressée le jour même, ou au plus tard le premier jour ouvrable suivant ;

Par ailleurs, le procès verbal dressé le 1er mars 2013 par les huissiers instrumentaires, rappelle les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, mais ne relate ni l'envoi d'une lettre recommandée, ni l'envoi en lettre simple de l'avis au destinataire, tandis que la société BANQUE POPULAIRE ne communique aux débats aucun élément relatif à ce dernier;

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'assignation du premier mars 2013 dont s'agit n'a pas été délivrée à la société BRAIN ET HART, conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile ;

Par ailleurs, la société BANQUE POPULAIRE DU NORD a fait signifier l'assignation à [T] [M] et à [B] [M], le premier mars 2013, à leur dernière adresse connue, correspondant à celle inscrite dans leurs conclusions, à savoir au [Adresse 1] ;

Il résulte des procès verbaux de signification établis le premier mars 2013 par maître [Z] et maître [R], huissiers de justices, qu'un fois sur place, il a été constaté qu'aucune personne répondant à l'identification des destinataires de l'acte n'avait son domicile, sa résidence ou son établissement à cette adresse, qu'une enseigne 'CENTRE MIYE OSAKA CENTRE NATURO-ESTHETIQUE' était présente sur la façade, qu'il n'y avait personne et que la boîte aux lettres était pleine, qu'il a été procédé aux diligences suivantes pour rechercher les destinataires de l'acte, à savoir une consultation de l'annuaire électronique ne donnant aucun [B] [M] dans le département, mais indiquant une madame [M] [T] au [Adresse 1], ainsi que plusieurs messages laissés, en vain au numéro de téléphone d'[T] [M] indiqué dans l'annuaire ;

Les huissiers instrumentaires ont, dans ces conditions, indiqué que les démarches décrites n'avaient permis de retrouver l'adresse actuelle ni d'[T] [M], ni de [B] [M], et ont procédé conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile ;

Cependant, ces dispositions ont été appliquées alors que les diligences accomplies révélaient que l'adresse d'[T] [M] était bien celle indiquée dans l'acte de signification, et que cette dernière disposait d'un numéro de téléphone ;

Même si les appels à ce numéro sont demeurés vains, dés lors qu'il ressortait des recherches effectuées qu'[T] [M] n'avait changé ni d'adresse, ni de numéro de téléphone, les huissiers de justice auraient dû poursuivre leurs investigations notamment en prenant attache avec la mairie, avec les services postaux afin de vérifier s'il existait des démarches attestant d'un changement d'adresse, et en contactant la société BANQUE POPULAIRE DU NORD afin de savoir s'il y avait des lieux de travail connus ;

En outre, et à l'instar de ce qui a été constaté pour la société BRAIN ET HART, les procès verbaux destinés tant à [T] [M] qu'à [B] [M] ont été dressés par les huissiers de justice sans relater ni l'envoi d'une lettre recommandée, ni l'envoi en lettre simple de l'avis au destinataire prescrits par l'article 659 du code de procédure civile, tandis que la société BANQUE POPULAIRE DU NORD ne communique aux débats aucun élément relatif à ce dernier, et que les copies de preuve du dépôt des lettres avec accusé de réception destinées à [T] [M] et [B] [M] révèlent qu'elles n'ont été adressées que le lundi 4 mars 2013 à 16 heures, soit le deuxième jour ouvrable après la date du procès verbal, les délais prescrits par l'article 659 du code de procédure civile n'ayant ainsi pas été respectés;

Les irrégularités et insuffisances des diligences accomplies dans le cadre des significations destinées tant à la société BRAIN ET HART, qu'à [B] [M] et [T] [M], leur ont causé un préjudice en ce qu'ils n'ont pu organiser leur défense devant les premiers juges, en temps voulu, de sorte que les assignations du premier mars 2013 doivent être annulées, ainsi que, par voie de conséquence, le jugement rendu à la suite de l'instance qu'elles ont introduite;

Le jugement déféré étant annulé pour irrégularité de la saisine des premiers juges, il n'y a pas lieu à évocation du fond de l'affaire, les parties étant renvoyées à mieux se pourvoir;

La société BANQUE POPULAIRE DU NORD qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, et déboutée de sa demande en dommages-intérêts pour procédure d'appel abusive et de celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la société BRAIN ET HART, d'[T] [M] et de [B] [M] les frais exposés par eux en cause d'appel et non compris dans les dépens ; il leur sera alloué la somme de 800 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS 

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,

Reçoit l'exception de nullité soulevée par la société BRAIN ET HART, société en liquidation judiciaire représentée par maître [P] [K] en qualité de mandataire liquidateur, [T] [J] épouse [M] et [B] [M], et la déclarant bien fondée,

Prononce la nullité des assignations du premier mars 2013 destinées à la société BRAIN ET HART, [T] [J] épouse [M], et [B] [M],

En conséquence,

Prononce la nullité du jugement déféré rendu par le Tribunal de commerce de Lille Métropole le 2 avril 2013,

Dit n'y avoir lieu à évocation,

Déboute la société BANQUE POPULAIRE DU NORD de l'ensemble de ses demandes comprenant celles formulées à titre de dommages-intérêts pour procédure d'appel abusive, et au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société BANQUE POPULAIRE DU NORD à payer à la société BRAIN ET HART, société en liquidation judiciaire représentée par maître [P] [K] en qualité de mandataire liquidateur, [T] [J] épouse [M], et [B] [M], la somme de 800 euros chacun, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de leurs frais irrépétibles d'appel,

Condamne la société BANQUE POPULAIRE DU NORD aux dépens d'appel et de première instance.

Le GreffierLe Conseiller faisant

fonction de Président

C. NORMANDP. BRUNEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 13/02895
Date de la décision : 05/06/2014

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°13/02895 : Prononce la nullité de l'assignation


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-06-05;13.02895 ?
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