République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 7 SECTION 2
ARRÊT DU 17/04/2014
***
N° MINUTE : 14/347
N° RG : 12/06173
Jugement (N° 11/00290)
rendu le 19 Juillet 2012
par le Juge aux affaires familiales de CAMBRAI
REF : AF/LW
APPELANTE
Madame [H] [CW] épouse [WZ]
née le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 4],
[Adresse 3] (PORTUGAL)
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Frédérique NORTIER, avocat au barreau de CAMBRAI
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/02/12/08415 du 02/10/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)
INTIMÉ
Monsieur [T] [WZ]
né le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 3]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Cathy BEAUCHART, membre de la SCP DEBACKER & Associés, avocat au barreau de CAMBRAI
DÉBATS à l'audience en chambre du Conseil du 13 Février 2014, tenue par Agnès FALLENOT magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Nabyia JUERY
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Chantal MUSSO, Président de chambre
Yves BENHAMOU, Conseiller
Agnès FALLENOT, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 Avril 2014 après prorogation en date du 10 avril 2014 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Chantal MUSSO, Président et Nabyia JUERY, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 13 février 2014
*****
FAITS ET PROCÉDURE :
[T] [WZ] et [H] [CW] se sont mariés le [Date mariage 1] 1995 à [Localité 5] (Portugal). Ce mariage n'a pas été précédé d'un contrat relatif aux biens.
De cette union sont issus trois enfants :
- [US], né le [Date naissance 3] 1998 ;
- [C], née le [Date naissance 4] 2001 ;
- [J], né le [Date naissance 3] 2004.
Une requête en divorce a été présentée le 16 février 2011 par [T] [WZ].
Par ordonnance de non-conciliation du 5 avril 2011, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Cambrai a :
- constaté que chacune des parties, assistée de son conseil, a accepté le principe de la rupture du mariage, sans considération des faits à l'origine de celle-ci, en application des dispositions de l'article 233 du code civil, et a renvoyé les parties à se pourvoir devant le juge du fond, la cause du divorce demeurant acquise ;
- autorisé les époux à introduire l'instance en divorce ;
- dit que chaque époux reprendra ses vêtements et objets personnels ;
- attribué la jouissance du domicile conjugal à [H] [CW] à titre gratuit ;
- dit que l'autorité parentale sera exercée conjointement par les deux parents ;
- enjoint aux parties de rencontrer un médiateur afin qu'elles puissent ensemble déterminer ou examiner les nouvelles modalités de fixation de résidence des enfants et du droit de visite ;
- fixé la résidence habituelle des enfants chez la mère, à défaut d'accord entre les parties à l'issue de la médiation ;
- organisé le droit de visite et d'hébergement du père, à défaut d'accord amiable, les 1ères, 3èmes et 5èmes fins de semaine de chaque mois, du vendredi à la sortie des classes au lundi matin à la rentrée des classes et la moitié des vacances scolaires (première moitié les années paires, seconde moitié les années impaires) ;
- fixé la contribution du père à l'entretien et à l'éducation de [US], [C] et [J] à la somme de 120 euros par mois et par enfant, soit 360 euros au total, avec indexation et, en tant que de besoin, l'a condamné à payer cette somme à [H] [CW] ;
- réservé les dépens.
Par acte d'huissier du 12 juillet 2011, [T] [WZ] a fait assigner son conjoint en divorce en application des articles 233 et 234 du code civil.
Par jugement du 19 juillet 2012, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Cambrai a :
- prononcé le divorce des époux [WZ] [CW] sur le fondement de l'article 233 du code civil, avec toutes ses conséquences de droit en matière de publication à l'état civil ;
- ordonné, s'il y a lieu, la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux;
- constaté qu'en vertu des dispositions de l'article 262-1 du code civil, les effets du jugement de divorce, en ce qui concerne les biens des époux, remonteront au 5 avril 2011 ;
- rappelé que le jugement produit les effets d'un divorce aux torts partagés ;
- rappelé que les avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu'à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l'un des époux et des dispositions à cause de mort, accordés par un époux envers son conjoint par contrat de mariage ou pendant l'union, sont révoqués de plein droit par l'effet du divorce ;
- confié aux parents l'exercice conjoint de l'autorité parentale sur [US], [C] et [J] ;
- fixé la résidence habituelle des enfants chez la mère ;
- organisé le droit de visite et d'hébergement du père, les 1ères, 3èmes et 5èmes fins de semaine de chaque mois, du samedi 14 h 00 au dimanche 19 h 00, et la moitié des vacances scolaires (première moitié les années paires, seconde moitié les années impaires) ;
- fixé la contribution du père à l'entretien et à l'éducation de [US], [C] et [J] à la somme de 80 euros par mois et par enfant, soit 240 euros au total, avec indexation, et, en tant que de besoin, l'a condamné à payer cette somme à [H] [CW] ;
- débouté les parties de leurs demandes de désignation d'un notaire ;
- débouté [H] [CW] de sa demande de prestation compensatoire;
- dit que chacune des parties conservera la charge des dépens avec dispense pour toute partie bénéficiaire de l'aide juridictionnelle.
Par déclaration au greffe du 14 septembre 2012, [H] [CW] a interjeté appel général de ce jugement.
Par arrêt du 24 octobre 2013, la cour d'appel de Douai a sursis à statuer sur toutes les demandes, désigné [DK] [PW], enquêtrice sociale, pour procéder à l'audition de [US] et [C] et réservé dépens.
Les mineurs ont été entendus le 30 décembre 2013.
Par dernières conclusions récapitulatives déposées le 21 décembre 2012, [H] [CW] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :
- fixer la contribution du père à l'entretien et à l'éducation de [US], [C] et [J] à la somme de 120 euros par mois et par enfant, soit 360 euros au total ;
- fixer la prestation compensatoire à la somme de 30.000 euros ;
- débouter [T] [WZ] de ses prétentions ;
- maintenir les mesures relatives aux enfants telles qu'elles ont été prévues par le jugement entrepris ou subsidiairement, dans l'hypothèse où la résidence des enfants serait fixée au domicile du père, lui accorder un droit de visite et d'hébergement et constater son insolvabilité;
- condamner [T] [WZ] aux dépens, conformément aux règles sur l'aide juridictionnelle.
Au soutien de son appel, elle indique qu'[T] [WZ] exerce à son compte une activité d'électricien depuis décembre 2010, qui lui permet de dégager un bénéfice de 4.000 euros mensuels.
Elle vit quant à elle exclusivement des prestations sociales.
Elle n'a exercé aucune activité professionnelle pendant la vie commune, s'étant consacrée à l'éducation des enfants. Elle aura des difficultés à s'intégrer professionnellement, notamment en raison de la barrière linguistique.
Elle reproche à son époux de produire des documents portugais inexploitables pour démontrer qu'elle a perçu un capital de 115.109,72 euros dans le cadre de la succession de ses parents.
Le couple est propriétaire de deux immeubles, dont les prêts immobiliers sont remboursés par le montant des loyers perçus.
Elle s'oppose au transfert de la résidence de [US] et [C] au domicile de leur père, bien qu'ils en aient exprimé le souhait devant l'enquêtrice sociale. Elle argue que les adolescents cherchent à échapper aux règles qu'elle leur fixe pour vivre selon un mode plus festif auprès de leur père. Ils n'ont pas conscience du bouleversement qu'un changement de domicile entraînerait dans leurs repères quotidiens. Elle souligne qu'il convient de ne pas séparer la fratrie.
Par dernières conclusions récapitulatives déposées le 10 février 2014, [T] [WZ] demande à la cour de :
- fixer la résidence habituelle des enfants à son domicile ;
- organiser le droit de visite et d'hébergement de la mère du vendredi soir au dimanche 19 heures, un week-end sur deux, les semaines paires ;
- supprimer la pension alimentaire mise à sa charge pour l'entretien et l'éducation des enfants ;
- dispenser [H] [CW] du versement de toute pension alimentaire pour les enfants, compte tenu de sa situation ;
- confirmer le jugement entrepris pour le surplus et notamment en ce qu'il a débouté [H] [CW] de sa demande de prestation compensatoire;
- confirmer pour le surplus le jugement déféré sauf à prévoir que le droit de visite et d'hébergement du père s'exercera du samedi 14 heures au dimanche 19 heures tous les week-end des semaines impaires ;
- condamner [H] [CW] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître BEAUCHART, avocat, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
A cet effet, il rappelle avoir toujours sollicité le transfert de la résidence de ses enfants à son domicile, en raison des carences de leur mère. Il évoque ses multiples sorties, ses absences lors des retours d'hébergement des enfants et un problème récurrent d'alcoolisation.
Il indique avoir travaillé en tant qu'électricien à compter du mois de juillet 1995au sein de la société DEBAILLEUX, mais avoir été placé en arrêt de travail à la suite de problèmes de santé le 9 février 2009 et avoir signé une rupture conventionnelle de son contrat de travail le 20 novembre 2010. Il a créé sa propre entreprise le 10 décembre 2011 mais ne peux pas encore se salarier. Il a perçu une aide des ASSEDIC qui lui procure un revenu mensuel de l'ordre de 1.000 euros.
Il expose vivre en concubinage avec [NU] [GN], qui exerce la profession d'aide-soignante et assume la charge de sa fille issue d'une précédente union. Le couple est en accession à la propriété. Leur maison permet d'accueillir [US], [C] et [J], lesquels bénéficieront d'un cadre structurant, et notamment d'une aide aux devoirs.
Il considère que [H] [CW] est en capacité de retrouver un emploi au regard de son âge, d'autant qu'elle a travaillé en qualité de saisonnière pendant la vie commune.
Il affirme qu'elle a hérité de ses parents et qu'elle est partie en s'appropriant une partie des économies du couple et les comptes des enfants.
Il rappelle que les loyers perçus de la location des deux immeubles de communauté ne peuvent entrer dans ses ressources, s'agissant de revenus communs. Il souligne que les charges supportées sont élevées et qu'il doit combler un déficit régulier.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le13 février 2014.
MOTIFS :
Il sera en préliminaire constaté que dans leurs écritures, les parties ont circonscrit le débat à la résidence des enfants, aux modalités du droit de visite et d'hébergement,
à la contribution due pour l'éducation et l'entretien des enfants et à la prestation compensatoire. La Cour entrera donc en voie de confirmation des autres mesures du jugement que les parties n'ont pas jugé utile de soumettre à son appréciation.
Sur les effets du divorce concernant les enfants :
Sur la loi applicable et la compétence du juge français :
[T] [WZ] est de nationalité française et [H] [CW] de nationalité portugaise.
Les époux se sont mariés au Portugal, le [Date mariage 1] 1995.
La requête en divorce a été enregistrée le 16 février 2011.
A cette date, la résidence de l'épouse et des enfants mineurs était fixée à [Adresse 1], et celle de l'époux à [Adresse 2].
Sur la compétence du juge français :
Concernant les modalités d'exercice de l'autorité parentale :
Il résulte des dispositions de l'article 8 du règlement (CE) n°2201/2003 du conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale que les juridictions d'un État membre sont compétentes en matière de responsabilité parentale à l'égard d'un enfant qui réside habituellement dans cet État membre au moment où la juridiction est saisie.
La juridiction française est donc compétente.
Concernant l'obligation alimentaire :
Il résulte des dispositions de l'article 3 du règlement (CE) n° 4/2009 du conseil du 18 décembre 2008 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions et la coopération en matière d'obligations alimentaires que sont compétentes pour statuer en matière d'obligations alimentaires dans les États membres :
a) la juridiction du lieu où le défendeur a sa résidence habituelle,
ou
b) la juridiction du lieu où le créancier a sa résidence habituelle,
ou
c) la juridiction qui est compétente selon la loi du for pour connaître d'une action relative à l'état des personnes lorsque la demande relative à une obligation alimentaire est accessoire à cette action, sauf si cette compétence est fondée uniquement sur la nationalité d'une des parties, ou
d) la juridiction qui est compétente selon la loi du for pour connaître d'une action relative à la responsabilité parentale lorsque la demande relative à une obligation alimentaire est accessoire à cette action, sauf si cette compétence est fondée uniquement sur la nationalité d'une des parties.
La juridiction française est donc compétente.
Sur la loi applicable :
Le procès portant sur des droits dont les parties n'ont pas la libre disposition, l'article 3 du code civil fait obligation au juge de rechercher quelle est la loi qui les régit.
Concernant les modalités d'exercice de l'autorité parentale :
Il résulte des articles 1 et 2 de la convention de La Haye du 5 octobre 1961 concernant la compétence des autorités et la loi applicable en matière de protection des mineurs que les autorités judiciaires de l'Etat de la résidence habituelle d'un mineur sont compétentes pour prendre des mesures tendant à la protection de sa personne ou de ses biens et prennent les mesures prévues par leur loi interne.
La loi française est donc applicable.
Concernant l'obligation alimentaire :
Il résulte des dispositions des articles 1, 3 et 4 du protocole de La Haye du 23 novembre 2007, qui détermine la loi applicable aux obligations alimentaires découlant de relations de famille, de filiation, de mariage ou d'alliance, y compris les obligations alimentaires envers un enfant indépendamment de la situation matrimoniale de ses parents, que la loi de l'État de la résidence habituelle du créancier régit les obligations alimentaires. Ces dispositions s'appliquent en ce qui concerne les obligations alimentaires des parents envers leurs enfants.
La loi française est donc applicable.
Sur la résidence des enfants :
Aux termes de l'article 373-2-9 du code civil, la résidence de l'enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l'un d'eux.
L'article 373-2-11 du code civil ajoute que, lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, le juge prend notamment en considération :
1° la pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu'ils avaient pu antérieurement conclure,
2° les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1,
3° l'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre,
4° le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l'âge de l'enfant,
5° les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l'article 373-2-12,
6° les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre.
[US], [C] et [J] vivent au domicile de leur mère depuis la séparation de leurs parents.
[H] [CW] produit les attestations de [AK] [R], [IG] [M], [WU] [SD], [PE] [MK], [G] [CA], [YW] [KI], [SQ] [DB], [LA] [XM], [DF] [Y], [AK] [CN], [EP] [ZT], [E] [TI], [QO] [R] et [FM] [O] afin de démontrer qu'elle est parfaitement apte à prendre [US], [C] et [J] en charge. Ces témoins attestent que [H] [CW] s'occupe correctement de ses enfants, décrits comme 'bien habillés', 'polis' et 'épanouis'.
Leurs propos sont cependant généraux et peu étayés par des anecdotes précises. Ils sont par ailleurs contredits par les attestations d'[P] [S], [U] [CE], [LS] [I], [YE] [Z], [HO] [N], [UX] [GW], [IY] [V], [RG] [YJ], [SV] [ZT], [A] [W], [SQ] [YJ], [X] [D], [K] [NC] et [VP] [L], aux termes desquels [H] [CW] s'alcoolise régulièrement et multiplie les sorties sans se soucier du rythme de vie de ses enfants.
Leurs témoignages sont confirmés par le rapport d'investigation réalisé en janvier 2010 par une agence de détectives privés, dont il est ressorti que la mère se rendait chaque jour au local d'une association portugaise avec ses trois enfants, de la sortie de l'école jusqu'à 20h00, et y consommait de l'alcool.
Les auditions de [US] et [C], réalisées le 30 décembre 2013, ont mis en évidence leur désir de voir leur résidence transférée au domicile de leur père. Tous deux ont indiqué entretenir de bonnes relations avec leur père et leur belle-mère, ces derniers leur consacrant du temps, notamment pour aider [C] à effectuer ses devoirs. [US] et [C] ont également déploré le fait que leur mère les laissent seuls le vendredi, le samedi et le dimanche pour sortir avec des amis, évoquant ses alcoolisations excessives et son désintérêt pour eux.
Les deux enfants avaient déjà tenu des propos similaires dans le cadre des deux enquêtes sociales réalisées sucessivement après la séparation de leurs parents. Lors de la première mesure menée en 2008 par l'ADSSEAD, l'enquêteur avait relevé qu'ils avaient tendance à amplifier certains éléments en défaveur de leur mère, afin d'optimiser leurs chances de vivre auprès de leur père. Lors de la seconde mesure menée en 2010, leurs propos n'avaient pas été retranscrits en raison des craintes qu'ils avaient émises, l'enquêteur ayant cependant relevé que leur discours apparaissait davantage critique à l'égard de leur mère et que l'absence de leur père créait un manque dans leur vie quotidienne.
Si ces deux enquêtes ont montré que les enfants se trouvaient au coeur de relations parentales conflictuelles, empreintes de pression, la récurrence de certains éléments ne peut manquer de questionner la Cour.
Les interrogations sur la consommation d'alcool de la mère persistent depuis la séparation des parents. La mère ne produit aux débats que deux analyses sanguines, conformes aux normes, datant du 27 avril 2010 et du 10 février 2011. Il ressort cependant du rapport d'enquête sociale déposé en novembre 2010 qu'elle avait également réalisé une analyse le 11 septembre 2010 dont les résultats étaient supérieurs aux normes.
[H] [CW] reconnaît par ailleurs dans ses écritures avoir toujours des difficultés pour maîtriser la langue française. Cette situation ne lui permet pas d'aider ses enfants dans la réalisation de leurs devoirs. [C] a ainsi indiqué lors de son audition recourir régulièrement à l'aide de son père et de sa compagne, notamment en leur téléphonant. Lors de l'enquête sociale de 2010, il était souligné par les enseignants de [US] et [C] que le travail à la maison manquait de rigueur et n'était pas suffisant.
La mère est enfin décrite comme ayant des difficultés à poser des limites aux enfants.
Les attestations de [OM] [Q], [WC] [RY], [ZB] [F], [UA] [Q], [XR] [CS], [VK] [CS], [EC] [N], [JQ] [WH] et [ZB] [B] démontrent qu'[T] [WZ] est un père attentif, soucieux de l'éducation et du rythme de vie de ses enfants, capable d'assurer leur prise en charge quotidienne.
Ces éléments démontrent que les mineurs bénéficieront d'un cadre éducatif plus adapté à leurs besoins au domicile de leur père que de leur mère, leur âge et leur besoin de repères se prêtant d'ailleurs parfaitement à un tel transfert.
En conséquence, il convient de fixer la résidence de [US], [C] et [J] au domicile de leur père et d'infirmer la décision entreprise de ce chef.
Sur le droit de visite et d'hébergement :
Aux termes des articles 373-2 et 373-2-1 du code civil, chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l'enfant et respecter les liens de celui-ci avec l'autre parent. Lorsque la résidence d'un enfant est fixée au domicile de l'un des parents, le juge aux affaires familiales statue sur les modalités du droit de visite de l'autre parent. Ce droit, lorsque l'intérêt de l'enfant le commande, peut être exercé dans un espace de rencontre désigné par le juge. Le droit de visite et d'hébergement du parent chez qui la résidence des enfants n'a pas été fixée ne peut être restreint ou supprimé que pour motifs graves.
[T] [WZ] demande que le droit de visite et d'hébergement de la mère soit fixé du vendredi soir au dimanche à 19 heures, un week-end sur deux, les semaines paires. [H] [CW] ne se prononce pas sur cette demande.
Aucune raison ne justifiant l'absence de contacts entre la mère et les enfants pendant les congés scolaires, il convient de dire que [H] [CW] exercera son droit de visite et d'hébergement selon les modalités suivantes, sauf meilleur accord des parties :
- en dehors des périodes scolaires, les fins de semaines paires, du vendredi à la sortie des classes au dimanche à 19 heures ;
- la première moitié des congés scolaires les années paires et la seconde moitié les années impaires.
Sur la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants :
Aux termes de l' article 371-2 du code civil, chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur.
La situation des parties s'analyse au jour de la demande, mais en raison de l'effet dévolutif de l'appel, la Cour doit aussi prendre en considération les modifications intervenues dans la situation des parties jusqu'à l'ordonnance de clôture.
[H] [CW] est défaillante dans le respect de l'injonction qui lui a été délivrée par l'avis de fixation de produire sa dernière déclaration de revenus, son dernier avis d'imposition ainsi que les relevés des prestations qui lui ont été versées par la CAF au cours des six derniers mois.
Elle verse aux débats des pièces datant des années 2011 et 2012, qui démontrent qu'elle n'a pas de revenus propres.
Son impécuniosité sera constatée, conformément à la demande des deux parents.
Sur les effets du divorce concernant les biens :
Sur la prestation compensatoire :
Sur la compétence du juge français et la loi applicable :
Sur la compétence du juge français :
Il résulte des dispositions de l'article 1070 du code de procédure civile que le juge aux affaires familiales territorialement compétent est :
- le juge du lieu où se trouve la résidence de la famille ;
- si les parents vivent séparément, le juge du lieu de résidence du parent avec lequel résident habituellement les enfants mineurs en cas d'exercice en commun de l'autorité parentale, ou du lieu de résidence du parent qui exerce seul cette autorité ;
- dans les autres cas, le juge du lieu où réside celui qui n'a pas pris l'initiative de la procédure.
Le juge français est donc compétent.
Sur la loi applicable :
Il résulte des articles 3 et 4 de la convention de La Haye du 14 mars 1978 applicable aux mariages célébrés postérieurement à compter du 1er septembre 1992 que le régime matrimonial est soumis à la loi interne désignée par les époux avant le mariage. Les époux ne peuvent désigner que l'une des lois suivantes :
1. la loi d'un Etat dont l'un des époux a la nationalité au moment de cette désignation ;
2. la loi de l'Etat sur le territoire duquel l'un des époux a sa résidence habituelle au moment de cette désignation ;
3. la loi du premier Etat sur le territoire duquel l'un des époux établira une nouvelle résidence habituelle après le mariage.
La loi ainsi désignée s'applique à l'ensemble de leurs biens. Toutefois, que les époux aient ou non procédé à la désignation prévue par les alinéas précédents, ils peuvent désigner, en ce qui concerne les immeubles ou certains d'entre eux, la loi du lieu où ces immeubles sont situés. Ils peuvent également prévoir que les immeubles qui seront acquis par la suite seront soumis à la loi du lieu de leur situation.
Si les époux n'ont pas, avant le mariage, désigné la loi applicable à leur régime matrimonial, celui-ci est soumis à la loi interne de l'Etat sur le territoire duquel ils établissent leur première résidence habituelle après le mariage.
Toutefois, dans les cas suivants, le régime matrimonial est soumis à la loi interne de l'Etat de la nationalité commune des époux :
1. lorsque la déclaration prévue par l'article 5 a été faite par cet Etat et que son effet n'est
pas exclu par l'alinéa 2 de cet article ;
2. lorsque cet Etat n'est pas Partie à la Convention, que sa loi interne est applicable selon son droit international privé, et que les époux établissent leur première résidence habituelle après le mariage :
a) dans un Etat ayant fait la déclaration prévue par l'article 5, ou
b) dans un Etat qui n'est pas Partie à la Convention et dont le droit international privé prescrit également l'application de leur loi nationale ;
3. lorsque les époux n'établissent pas sur le territoire du même Etat leur première résidence habituelle après le mariage.
A défaut de résidence habituelle des époux sur le territoire du même Etat et à défaut de nationalité commune, leur régime matrimonial est soumis à la loi interne de l'Etat avec lequel, compte tenu de toutes les circonstances, il présente les liens les plus étroits.
En l'espèce, [T] [WZ] et [H] [CW] n'indiquent pas avoir désigné une loi applicable à leur régime matrimonial.
Il ressort des rapports d'enquête sociale réalisés par l'ADSSEAD en octobre 2008 et en novembre 2010 qu'ils ont établi leur première résidence habituelle après leur mariage sur le territoire français, le mariage étant intervenu le [Date mariage 1] 1995 et le couple s'étant installé en France dès le 21 août 1995.
La loi française est donc applicable.
Sur la demande de prestation compensatoire :
Aux termes de l' article 270 du code civil, le divorce met fin au devoir de secours entre époux. L'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge. Toutefois, le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si l'équité le commande, soit en considération des critères prévus à l'article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture.
Aux termes de l'article 271 du même code, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. A cet effet, le juge prend en considération, notamment la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenus, après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles, leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa.
L'appel étant général, la situation des parties doit être appréciée au jour du présent arrêt.
Devant la Cour, la situation est la suivante.
La vie commune dans les liens du mariage a duré 13 années.
[H] [CW], née le [Date naissance 1] 1975, est âgée de 38 ans.
Elle indique ne pas avoir d'activité professionnelle, expliquant que son insertion professionnelle va être compliquée par la barrière linguistique.
Elle ne verse cependant aucun élément démontrant qu'elle est effectivement à la recherche d'un emploi ou qu'elle a effectué des stages ou des formations.
Elle occupe le logement où était fixée la résidence familiale à titre gratuit.
Elle assume des charges courantes en rapport avec son niveau de vie.
[T] [WZ], né le [Date naissance 2] 1973, est âgé de 40 ans.
Il a créé sa société, l'EURL [T] [CW] ELECTRICITE, en décembre 2010.
Il s'est vu allouer une aide à la création d'entreprise de 6.670,35 euros en février 2011 et en août 2011.
Il n'a perçu aucune rémunération pour l'année 2011 et une rémunération de 1.200 euros par mois entre le 1er mars 2012 et le 30 septembre 2012.
Cependant, au 30 septembre 2011, après 10 mois d'exercice, il avait réalisé un bénéfice de 49.790 euros.
L'époux vit en concubinage et partage donc ses charges courantes.
Il rembourse un prêt personnel de 3.000 euros par mensualités de 130,88 euros jusqu'au 5 octobre 2014.
Le couple est propriétaire de l'immeuble où était fixé le domicile conjugal, d'un immeuble et d'un studio situés à Cambrai.
Aucune évaluation de la valeur vénale de ces biens n'est versée par les époux.
Les tableaux d'amortissement produits démontrent qu'un premier prêt de 44.177,58 euros sera intégralement remboursé le 10 novembre 2016 et un second prêt de 74.322,11 euros sera intégralement remboursé le 25 février 2019.
Ces immeubles de communauté sont gérés par l'époux. Le montant des loyers encaissé n'est pas indiqué à la Cour.
Les époux étaient par ailleurs titulaires d'une épargne bancaire d'un montant de 51.470,11 euros au 15 mars 2008.
Il ressort enfin suffisamment du mandat de vente et de ses annexes produits aux débats par [T] [WZ] que [H] [CW] a reçu la somme de 115.109,72 euros de la vente de treize terrains dépendant de la succession de ses parents, à défaut de toute preuve contraire.
L'épouse bénéficie donc d'un patrimoine personnel. Elle va par ailleurs pouvoir prétendre à la moitié de la valeur du patrimoine commun, financé par les revenus de l'époux.
L'ensemble de ces éléments justifie la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a débouté [H] [CW] de sa demande de prestation compensatoire.
Sur dépens et les frais irrépétibles :
Compte tenu de la nature familiale du litige, il convient de laisser à la charge de chacune des parties les dépens exposés par elle en appel, les dépens de première instance restant répartis ainsi que décidé par le premier juge.
Il n'y a donc pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par mise à disposition au greffe, publiquement après débats non publics, contradictoirement,
Déclare le juge français compétent et la loi française applicable ;
Confirme la décision entreprise sauf au titre des dispositions relatives à la résidence habituelle des enfants et aux mesures accessoires ;
Fixe la résidence habituelle des enfants chez le père ;
Accorde à la mère un droit de visite et d'hébergement qui s'exercera selon les modalités suivantes, sauf meilleur accord des parties :
- en dehors des périodes scolaires, les fins de semaines paires, du vendredi à la sortie des classes au dimanche à 19 heures ;
- la première moitié des congés scolaires les années paires et la seconde moitié les années impaires ;
Dit que si la fin de semaine est précédée ou suivie d'un jour férié, cette journée s'ajoute au droit d'hébergement ;
Dit que par dérogation à ce calendrier, le père aura les enfants pour le dimanche de la fête des pères et la mère aura les enfants pour le dimanche de la fête des mères ;
Dit qu'il appartient à la mère de prendre ou faire prendre et ramener ou faire ramener les enfants au domicile du père ;
Dit que faute pour la mère d'avoir exercé son droit d'hébergement dans la première heure, pour les fins de semaine, ou le premier jour, pour les vacances, elle sera réputée, sauf accord écrit des parties, y avoir renoncé pour toute la période considérée;
Dit que les dates de congés scolaires à prendre en considération sont celles de l'académie dans le ressort de laquelle les enfants sont inscrits ;
Dispense [H] [CW] de toute contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens en cause d'appel, les dépens de première instance restant répartis ainsi que décidé par le premier juge ;
Rappelle que les dépens seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle ;
Accorde la faculté de recouvrement direct aux conseils des parties qui en ont fait la demande.
Le Greffier Le Président
N. JUERYC. MUSSO