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13/03/2014 | FRANCE | N°13/01318

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 13 mars 2014, 13/01318


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 13/03/2014

***

N° MINUTE :

N° RG : 13/01318

Jugement (N° 10/07580)

rendu le 14 Décembre 2012

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : BP/VC

APPELANT



Monsieur [N] [X]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 1] (59) - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 2]

Représenté par Me Isabelle CARLIER, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de

Me ANGRAND, avocat



INTIMÉE



SA BANQUE POPULAIRE DU NORD prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social : [Ad...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 13/03/2014

***

N° MINUTE :

N° RG : 13/01318

Jugement (N° 10/07580)

rendu le 14 Décembre 2012

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : BP/VC

APPELANT

Monsieur [N] [X]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 1] (59) - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 2]

Représenté par Me Isabelle CARLIER, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me ANGRAND, avocat

INTIMÉE

SA BANQUE POPULAIRE DU NORD prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social : [Adresse 1]

Représentée par Me Marie-Hélène LAURENT, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me VYNCKIER, avocat

DÉBATS à l'audience publique du 23 Octobre 2013 tenue par Hélène BILLIERES magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre CHARBONNIER, Président de chambre

Benoît PETY, Conseiller

Hélène BILLIERES, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 13 Mars 2014 après prorogation du délibéré du 19 décembre 2013 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

Exposé du litige, de la procédure et des prétentions des parties :

Par acte sous seing privé du 17 avril 2008, Monsieur [N] [X] s'est porté caution solidaire de tous les engagements de la S.A.R.L. CONCEPT D'INTERVENTIONS POUR LA RENOVATION (ci-après dénommée C.I.R.) dans la limite d'un montant de 100.000 euros couvrant le principal, les intérêts, frais, commissions et accessoires pour une durée de cinq années. La société C.I.R., immatriculée le 25 janvier 2005 au R.C.S. de ROUBAIX-TOURCOING, avait pour objet la réalisation de travaux de maçonnerie et de gros 'uvre, son dirigeant étant Monsieur [M] [H], neveu de Monsieur [X].

La société C.I.R. a été mise en redressement judiciaire le 14 mai 2009, procédure convertie en liquidation judiciaire dès le 1er septembre 2009. Au jour de l'ouverture de la procédure collective, cette personne morale était débitrice de la BANQUE POPULAIRE DU NORD (B.P.N.) à plusieurs titres :

solde débiteur du compte courant de la S.A.R.L. : 4.693,37 euros,

deux effets de commerce (lettres de change) impayés : 40.000 euros,

prêt professionnel n°07775775 outre intérêts : 26.390,50 euros,

prêt professionnel n°07769325 outre intérêts : 3.424,19 euros,

prêt professionnel n°07769326 outre intérêts : 693,85 euros.

La banque créancière a donc déclaré à titre chirographaire ces créances pour la somme totale de 75.201,91 euros entre les mains du mandataire judiciaire, Madame [C] [V]. Le redressement judiciaire ayant été converti en liquidation judiciaire, la banque a mis en demeure le 4 septembre 2009 Monsieur [X] de lui payer cette somme en exécution de son engagement de caution, en vain.

Par exploit du 23 août 2010, la BANQUE POPULAIRE DU NORD a fait assigner en paiement Monsieur [X] devant le tribunal de grande instance de LILLE.

Par jugement du 14 décembre 2012, cette juridiction a condamné Monsieur [X] à payer à l'établissement bancaire poursuivant, dans la limite totale de 100.000 euros, les sommes de :

4.629,54 euros,

40.000 euros,

26.390,50 euros augmentée des intérêts au taux de 5,50 % l'an sur la somme de 24.504,56 euros à compter du 4 septembre 2009 et des intérêts au taux légal sur la somme de 1.885,94 euros,

3.424,19 euros augmentée des intérêts au taux de 2,95 % l'an sur la somme de 3.190,77 euros à compter du 4 septembre 2009 et des intérêts au taux légal sur la somme de 233,42 euros,

de 693,85 euros augmentée des intérêts au taux de 3,60 % l'an sur la somme de 646,57 euros à compter du 4 septembre 2009 et des intérêts au taux légal sur la somme de 47,28 euros.

La juridiction de première instance déboutait par ailleurs chaque partie de sa demande articulée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur [N] [X] a interjeté appel de cette décision. Il demande à titre principal à la cour de dire que la B.P.N. est infondée à lui réclamer une quelconque somme du fait de son soutien abusif et doit être déboutée de toutes ses demandes. Il sollicite de la juridiction du second degré qu'elle constate le manquement de la banque à son obligation d'information, la condamne en conséquence à lui payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts et sursoit à statuer dans l'attente du rapport de l'expert-comptable judiciaire désigné dans cette affaire. A titre subsidiaire, il sollicite que soit ordonnée la compensation avec les condamnations à intervenir. Il forme en tout état de cause une demande d'indemnisation de ses frais irrépétibles à concurrence de 2.000 euros.

La caution reproche dans un premier temps à la banque son soutien abusif à la société C.I.R. dont le compte courant a présenté de manière récurrente entre janvier 2008 et mai 2009 un solde débiteur alors que la convention de compte précisait que le compte devait fonctionner exclusivement en ligne créditrice, aucun dépassement même minime n'étant toléré. Monsieur [X] ajoute que si ce compte s'est avéré créditeur en février, mars et avril 2009, c'est bien parce qu'il a réalisé un apport de 75.000 euros à la société C.I.R.

Sur le fondement des dispositions des articles L. 313-22 du Code monétaire et financier et L. 341-1 du Code de la consommation, Monsieur [X] reproche ensuite à la B.P.N. un défaut d'information de la caution alors que cet établissement financier avait une parfaite connaissance, de par la gestion des comptes des sociétés HERISSON INVESTISSEMENTS et GLYCINES INVESTISSEMENTS détenant des parts dans la société C.I.R., des difficultés avérées de cette dernière. En omettant d'informer Monsieur [X] de la situation financière compromise de la société C.I.R., la banque a exposé la caution au risque de répondre d'une dette en constante progression, ce qui justifie une indemnisation du préjudice ainsi éprouvé pour la somme de 20.000 euros.

Monsieur [N] [X] fait enfin grief à la BANQUE POPULAIRE DU NORD d'avoir brutalement cessé de soutenir la société C.I.R. au moment où celle-ci se trouvait face à un déficit de trésorerie dû à un retard de paiement de la part d'un de ses principaux clients. La banque n'a pas craint à ce moment d'exiger des actionnaires de la société C.I.R. une augmentation de capital de 10.000 à 100.000 euros, d'obliger la caution à se défaire d'une assurance-vie d'une valeur de 82.000 euros afin de réinjecter des fonds dans la société en cause. Dans ce contexte délicat, l'établissement bancaire a dénoncé le découvert en compte avec effet au 14 octobre 2008.

La caution expose enfin qu'une expertise comptable judiciaire diligentée par Monsieur PREUD'HOMME est en cours suite à une ordonnance du tribunal de commerce de ROUBAIX-TOURCOING en date du 19 février 2010. Cette mesure d'instruction doit permettre de déterminer les circonstances exactes ayant conduit à l'état de cessation des paiements de la société C.I.R. Les travaux de Monsieur PREUD'HOMME doivent permettre de caractériser un soutien abusif de la part de la banque. Le sursis à statuer s'impose quant à la mise en 'uvre du cautionnement.

***

La S.A. BANQUE POPULAIRE DU NORD demande à la cour de condamner Monsieur [X], en exécution de son engagement de caution, à lui payer les sommes de :

au titre du solde débiteur de compte courant n°30192612197 : 6.023,38 euros outre les intérêts au taux de 3,79 % l'an à compter du 29 mai 2010,

au titre du prêt n°07775775 : 27.779,13 euros outre les intérêts au taux de 5,50 % l'an à compter du 29 mai 2010,

au titre du prêt n°07769326 : 715,58 euros outre les intérêts au taux de 3,60% l'an à compter du 29 mai 2010,

au titre du prêt n°07769325 : 3.508,92 euros outre les intérêts au taux de 2,95% l'an à compter du 29 mai 2010,

au titre de deux lettres de change impayées : 40.000 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2010,

à titre de dommages et intérêts eu égard à la mauvaise foi du débiteur : 5.000 euros,

au titre des frais irrépétibles : 2.500 euros.

L'établissement bancaire poursuivant soutient dans un premier temps que si Monsieur [X] n'est pas le gérant de la société C.I.R., il est cependant très impliqué dans cette personne morale dont il connaît parfaitement les rouages et les engagements, l'intéressé détenant une procuration sur le compte de cette société dans laquelle la société holding HERISSON INVESTISSEMENTS dont il est le gérant détenait près d'un quart du capital avant de les céder à la société GLYCINE INVESTISSEMENTS dont Monsieur [X] est également le gérant. Cette dernière personne morale est devenue en juin 2008 associé majoritaire de la société C.I.R. En s'engageant comme caution de cette dernière le 17 avril 2008, Monsieur [N] [X] avait selon la banque une connaissance parfaite de la situation financière du cautionné.

La B.P.N. conteste ensuite toute faute au titre d'un prétendu soutien abusif de la société C.I.R. En effet, la banque fait valoir que si Monsieur [X] allègue un tel grief, il n'en fait état qu'au titre du fonctionnement du compte de la personne morale à compter de la situation financière irrémédiablement compromise, ce qu'il situe en mai 2008, sans argumenter sur les prêts, lesquels ont en toute hypothèse été accordés deux ans et près de dix mois avant l'ouverture du redressement judiciaire. La B.P.N. en conclut qu'elle ne peut aucunement être mise en cause au titre de ces concours financiers, pas plus d'ailleurs qu'au titre de l'émission de lettres de change impayées dont Monsieur [X] ne parle pas, ni moins encore d'une augmentation de capital de la société C.I.R., opération dont il n'est pas démontré que la banque en aurait exigé la réalisation.

Quant au compte de la société débitrice, celui-ci était créditeur en janvier, février et mars 2009 et son solde débiteur au jour de la clôture le 12 mai 2009 n'était que de 4.693,37 euros. Les crédits exorbitants sous forme de découverts en compte allégués par la caution n'ont jamais perduré, le solde de fin de mois entre janvier 2008 et la date de clôture du compte a toujours été créditeur sauf à une seule exception (juillet 2008). C'est l'ensemble de l'historique du compte qu'il faut examiner et non les seuls relevés de compte transmis par Monsieur [X]. Les situations débitrices du compte de la société C.I.R. n'ont donc été que temporaires. La banque ajoute qu'elle est intervenue auprès de son client pour le contraindre à ramener le découvert dans des limites raisonnables, ce qui n'est pas constitutif d'un soutien abusif de sa part.

La B.P.N. ajoute que, contrairement à ce que prétend Monsieur [X], ce n'est pas lui mais bien la S.A.R.L. GLYCINE INVESTISSEMENTS qui fait un apport en compte courant de 74.000 euros le 27 octobre 2008, ce qui caractérise une décision de gestion propre au groupe, opération dans laquelle la banque n'est par définition pas intervenue de par son devoir de non-immixtion. Cela ne saurait en rien caractériser contre la B.P.N. un quelconque acte de soutien abusif de la société C.I.R. La situation gravement compromise que Monsieur [X] situe à partir de septembre 2008 n'est pas démontrée, la cessation des paiements ayant été provisoirement fixée au 31 mars 2009 sans que la juridiction consulaire avance ultérieurement cette date. La liquidation judiciaire a été prononcée suite au redressement en raison de la constitution d'un nouveau passif, ce qui n'est pas le fait de la banque mais est dû à l'organisation même de la société C.I.R. (direction défaillante et forte dépendance de C.I.R à son principal client). La B.P.N. n'est donc pas responsable de la déconfiture de cette société et sa responsabilité ne saurait être retenue, comme l'a à bon droit jugé le tribunal de grande instance de LILLE.

En toute hypothèse, la banque fait état de ce que les dispositions de l'article L. 650-1 du Code de commerce trouvent à s'appliquer en l'espèce et Monsieur [X] n'opposent pas à la banque l'une des trois exceptions que sont la fraude, l'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou même le caractère disproportionné des garanties prises. La banque est donc à ce titre irresponsable. Et c'est donc valablement que les premiers juges ont pu rejeter les prétentions à cet égard de la caution.

Pour ce qui relève de l'information de la caution, la B.P.N. énonce qu'elle ne voit pas ce qu'elle aurait dû signaler à Monsieur [X] qui, sans être caution dirigeante, n'ignorait rien du fonctionnement de la société C.I.R. en qualité de gérant de la société holding. Il a par ailleurs déjà été démontré que la situation économique de la société C.I.R. n'était pas gravement compromise lorsqu'elle a accordé à cette dernière du crédit sous forme de découvert en compte.

La B.P.N. fait encore valoir que le grief de Monsieur [X] sur un prétendu arrêt brutal du soutien abusif n'est pas sérieux dès lors qu'il ne peut y avoir d'abus à mettre un terme même brutal à une situation qu'il n'y a aucun intérêt à maintenir, à supposer que ce soutien abusif soit caractérisé, ce qui n'est pas acquis pour la banque.

Enfin, sur la question d'un sursis à statuer dans l'attente de l'accomplissement par Monsieur PREUD'HOMME de sa mission d'expertise judiciaire comptable, force est de relever que le lien entre le présent contentieux et cette mesure d'instruction n'est pas démontré. Il résulte en outre d'informations reçues du mandataire liquidateur que cette expertise comptable ordonnée depuis plus de trois ans est au point mort compte tenu du caractère impécunieux de la procédure collective, ce que la caution ne peut ignorer.

***

Motifs de la décision 

Sur la responsabilité alléguée de la banque à l'égard de la caution 

Attendu que Monsieur [N] [X], qui a souscrit le 17 avril 2008 un cautionnement solidaire à concurrence de 100.000 euros et pour cinq ans des engagements pris par la société C.I.R. à l'égard de la B.P.N., entend rechercher la responsabilité de cet établissement financier au titre du soutien abusif accordé à sa cliente ainsi que d'un défaut dommageable d'information de la caution ;

Attendu qu'au sujet du premier grief, Monsieur [X] reproche à la B.P.N. d'avoir laissé fonctionner le compte courant de la société C.I.R. en position débitrice et dans des proportions exorbitantes du 15 janvier 2008 au 31 mai 2009 alors qu'aucune autorisation de découvert n'a été conclue entre la banque et cette personne morale et que la situation économique de la société C.I.R. était déjà irrémédiablement compromise, ce qui a finalement abouti à l'ouverture le 1er septembre 2009 d'une procédure de liquidation judiciaire ;

Qu'outre la circonstance que la caution semble ne quereller à ce titre que le seul fonctionnement du compte courant de la société C.I.R. sans critiquer les prêts consentis à la société C.I.R. ni même évoquer les deux lettres de change revenues impayées, Monsieur [X] ne peut ignorer le principe d'irresponsabilité que la banque lui oppose au visa des dispositions de l'article L. 650-1 du Code de commerce, disposition qui s'applique en l'espèce puisque la procédure collective ouverte à l'égard de la société C.I.R. l'a été le 14 mai 2009 au titre du redressement judiciaire, donc postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005 instaurant ce nouvel article dans le Code de commerce, ce texte étant applicable depuis le 1er janvier 2006 ;

Que cet article énonce que « les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci », étant de surcroît acquise la circonstance que cet article ne distingue pas selon que la caution est dirigeante ou non ;

Qu'en conséquence, la B.P.N. bénéficie d'un principe d'irresponsabilité à l'égard de la caution, étant précisé que cette dernière n'invoque aucune des trois exceptions de l'article précité pour tenter de renverser cette donnée ;

Qu'ainsi, la responsabilité de la B.P.N. n'est pas engagée au titre d'un prétendu soutien abusif accordé entre janvier 2008 et mai 2009 à la société C.I.R. relativement au fonctionnement de son compte courant, et elle ne l'est pas plus au titre d'un prétendu arrêt brutal d'un tel soutien ;

Qu'il s'avère ainsi qu'aucun sursis à statuer ne s'impose en l'état dans l'attente du dépôt du rapport comptable de Monsieur PREUD'HOMME, expert judiciaire commis par la juridiction consulaire de ROUBAIX-TOURCOING ;

Attendu, sur le second grief tiré du défaut d'information de la caution, que Monsieur [X] entend opposer à la banque poursuivante les dispositions des articles L. 313-22 du Code monétaire et financier et L. 341-1 du Code de la consommation, la caution précisant qu'elle n'était pas dirigeante de la société C.I.R., débitrice principale cautionnée ;

Qu'il faut rappeler que le premier des textes sus-visés pose le principe d'un devoir d'information annuelle à tout établissement de crédit envers une caution personne physique, le créancier devant au plus tard le 31 mars de chaque année faire connaître à la caution le montant du principal, des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation de la caution, le second de ces textes faisant obligation à tout créancier professionnel d'informer la caution de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement ;

Que la sanction de l'obligation de l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier est la déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information, la sanction de l'article L. 341-1 du Code de la consommation résidant dans la déchéance des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle la caution en a été informée ;

Qu'en l'occurrence, force est d'observer que l'argumentation de la banque sur cette question de l'information de la caution consiste de manière inexacte à prétendre qu'elle n'était tenue à obligation de cette nature, Monsieur [N] [X], bien que non dirigeant de la société C.I.R., connaissant parfaitement la situation de cette personne morale pour être le gérant des deux sociétés GLYCINES INVESTISSEMENTS et HERISSON INVESTISSEMENTS qui ont successivement pris des participations au sein de la société C.I.R. ;

Qu'en outre, si la question de la qualité ou non de dirigeant de la caution est parfaitement indifférente pour ce qui a trait à l'application de l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier, la circonstance que Monsieur [X] ait dirigé la holding détenant une partie du capital de la société C.I.R. ne peut présumer d'une connaissance par la caution de la situation exacte de cette personne morale et notamment de l'existence d'un incident de paiement non régularisé, ce qui ne peut affranchir le créancier professionnel de l'exécution de son obligation d'information le cas échéant ;

Qu'en définitive, la B.P.N. qui ne justifie strictement d'aucune information quelconque de la caution au titre du fonctionnement du compte courant de la société C.I.R., est de fait déchue du droit aux intérêts et pénalités et autres accessoires dans les termes des dispositions précédemment rappelées, ce qui sera ultérieurement chiffré lors de l'établissement de la créance de la banque au titre du solde débiteur de ce compte ;

Qu'en toute hypothèse, la sanction du défaut d'exécution par la banque créancière de ses obligations d'information ne consiste aucunement à arrêter en faveur de la caution non informée une quelconque créance de dommages et intérêts de telle sorte que Monsieur [X] sera débouté de sa demande tendant à voir condamner la B.P.N. à lui verser une somme de 20.000 euros ;

Sur les créances principales de la B.P.N. à l'encontre de Monsieur [X] 

Attendu qu'au titre de sa demande en paiement du solde débiteur du compte courant de la société C.I.R., la B.P.N. communique aux débats la déclaration de créance du 18 juin 2009, la convention de compte, l'historique du compte et la mise en demeure de payer avec le décompte, ce qui permet d'arrêter les sommes suivantes :

-solde débiteur à la date de la clôture du compte : 4.693,37 euros,

-pénalités dont la banque est déchue faute de justification de l'information de la caution (l'historique ne fait apparaître d'intérêts): 72 pénalités de 10,45 euros chacune = 752,40 euros,

soit une créance définitive de 3.940,97 euros augmentée des intérêts au seul taux légal (compte tenu de la déchéance) à compter de la mise en demeure du 12 juillet 2010 ;

Attendu, pour ce qui relève du prêt professionnel n°07769325 du 14 mars 2005 d'un montant de 15.000 euros, que la B.P.N. verse aux débats la déclaration de créance déjà visée, le contrat de prêt, le tableau d'amortissement, l'historique de compte et la mise en demeure de payer avec décompte, ce qui permet d'arrêter les sommes qui suivent :

-mensualité échue impayée (1) : 272,95 euros,

-capital restant dû : 2.917,82 euros,

-intérêts au taux contractuel du 30 avril 2009 au 28 mai 2010 : 94,39 euros,

-indemnité forfaitaire : 212,49 euros,

soit une créance totale revenant à la banque de 3.497,65 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 2,95 % l'an sur la somme de 3.285,16 euros à compter du 29 mai 2010, les intérêts courant sur l'indemnité forfaitaire ne pouvant être calculés qu'au seul taux légal ;

Attendu, pour ce qui a trait au prêt professionnel n°07769326 du 14 mars 2005 d'un montant de 3.000 euros, que la B.P.N. verse aux débats la déclaration de créance sus-visée, le contrat de prêt, le tableau d'amortissement, l'historique de compte, la mise en demeure de payer et le décompte de créance, ce qui permet d'arrêter les sommes suivantes :

-mensualité échue impayée (1) : 55,46 euros,

-capital restant dû : 591,11 euros,

-intérêts contractuels du 30 avril 2009 au 28 mai 2010 : 23,35 euros,

Indemnité forfaitaire : 43,06 euros,

soit une créance totale revenant à la banque de 712,98 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 3,60 % l'an sur la somme de 669,92 euros à compter du 29 mai 2010, les intérêts courant sur l'indemnité forfaitaire ne pouvant être calculés qu'au seul taux légal ;

Attendu, relativement au prêt professionnel n°07775775 du 29 mai 2010 d'un montant de 40.000 euros, que la B.P.N. communique la déclaration de créance sus-visée, le contrat de prêt et le tableau d'amortissement, la mise en demeure de payer avec le décompte de créance, ce qui permet d'arrêter les sommes suivantes :

-mensualités échues impayées : 930,26 euros,

-capital restant dû : 23.574,30 euros,

-intérêts contractuels du 30 avril 2009 au 28 mai 2010 : 1 '346,36 euros,

-indemnité forfaitaire : 1.820,16 euros,

soit une créance totale revenant à la banque d'un montant de 27.671,08 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,50 % l'an sur la somme de 25.850,92 euros à compter du 29 mai 2010, les intérêts courant sur l'indemnité forfaitaire ne pouvant être calculés qu'au seul taux légal ;

Attendu enfin que deux lettres de change émises par la société C.I.R. sont demeurées impayées pour la somme totale de 40.000 euros, montant dû par la caution outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 12 juillet 2010 ;

Qu'en définitive, le jugement déféré sera réformé en ses dispositions arrêtant les cinq créances principales de la banque à l'encontre de la caution ;

Sur les dommages et intérêts sollicités par la banque pour appel abusif :

Attendu que la seule circonstance que Monsieur [X] ait obtenu un gain certes très partiel de ses prétentions au titre du défaut d'information par la banque suffit à démontrer que son recours n'était pas totalement vain, le caractère abusif de cette instance en appel n'étant en conséquence pas démontré ;

Que la B.P.N. sera en cela déboutée de sa demande indemnitaire à ce titre ;

Sur les frais irrépétibles 

Attendu que si l'équité ne justifiait pas qu'il soit arrêté en première instance une quelconque indemnité pour frais irrépétibles au profit de la banque poursuivante, la décision entreprise étant en cela confirmée, cette considération commande en cause d'appel de fixer en faveur de la B.P.N. une indemnité de procédure de 1.500 euros, le débiteur de cette somme étant lui-même débouté de sa propre prétention à cette fin ;

***

PAR CES MOTIFS ;

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Dit n'y avoir lieu à sursis à statuer ;

Réforme le jugement déféré en ses dispositions arrêtant les créances principales de la S.A. BANQUE POPULAIRE DU NORD à l'encontre de Monsieur [N] [X] ;

Prononçant à nouveau de ces chefs,

Condamne Monsieur [N] [X], ès-qualité de caution solidaire et dans la limite de 100.000 euros, à payer à la S.A. BANQUE POPULAIRE DU NORD les sommes de :

au titre du solde débiteur du compte courant de la société C.I.R. : 3.940,97 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2010,

au titre du prêt professionnel n°07769325 du 14 mars 2005 d'un montant de 15.000 euros : 3.497,65 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 2,95 % l'an sur la somme de 3.285,16 euros à compter du 29 mai 2010,

au titre du prêt professionnel n°07769326 du 14 mars 2005 d'un montant de 3.000 euros : 712,98 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 3,60% l'an sur la somme de 669,92 euros à compter du 29 mai 2010,

au titre du prêt professionnel n°07775775 du 29 mai 2010 d'un montant de 40.000 euros : 27.671,08 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,50 % l'an sur la somme de 25.850,92 euros à compter du 29 mai 2010,

au titre de deux lettres de change impayées : 40.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2010 ;

Pour le surplus,

Confirme en ses plus amples dispositions la décision entreprise ;

Y ajoutant,

Déboute tant Monsieur [N] [X] que la S.A. BANQUE POPULAIRE DU NORD de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts ;

Condamne Monsieur [N] [X] à payer en cause d'appel à la S.A. BANQUE POPULAIRE DU NORD une indemnité de procédure de 1.500 euros ;

Condamne Monsieur [X] aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONSP. CHARBONNIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 13/01318
Date de la décision : 13/03/2014

Références :

Cour d'appel de Douai 81, arrêt n°13/01318 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-13;13.01318 ?
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