République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 2
ARRÊT DU 06/06/2013
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N° de MINUTE :
N° RG : 12/02754
Jugement (N° 11/01270)
rendu le 23 Mars 2012
par le Tribunal de Grande Instance de SAINT OMER
REF : MZ/VD
APPELANT
Monsieur [Y] [N]
Demeurant
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Me Bernard FRANCHI de la SCP FRANÇOIS DELEFORGE-BERNARD FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI
assisté de Me Nathalie MICAULT, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉS
Monsieur [C] [M]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 4]
Madame [Z] [L] épouse [M]
née le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 4]
Demeurant ensemble
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentés par Me Jean-Sébastien DELOZIERE, avocat au barreau de SAINT-OMER
SAS SOGEA CARONI venant aux droits de la Société VASSEUR CONSTRUCTION, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Ayant son siège social
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Jean-Louis CAPELLE, avocat au barreau de BÉTHUNE
DÉBATS à l'audience publique du 06 Mars 2013, tenue par Martine ZENATI magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Martine ZENATI, Président de chambre
Fabienne BONNEMAISON, Conseiller
Dominique DUPERRIER, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2013 après prorogation du délibéré en date du 15 Mai 2013 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame Martine ZENATI, Président et Claudine POPEK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 13 février 2013
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Vu le jugement rendu le 23 mars 2012 par le tribunal de grande instance de Saint-Omer, qui a :
- condamné solidairement la société Vasseur Construction et le cabinet d'architecte [Y] [N] à payer à M. [C] [M] et à Mme [Z] [M] la somme de 85.665,58 euros,
- condamné solidairement la société Vasseur Construction et le cabinet d'architecte [Y] [N] à payer à M. [C] [M] et à Mme [Z] [M] la somme de 2.250 €,
- condamné le cabinet d'architecte [Y] [N] à rembourser à M. [C] [M] et à Mme [Z] [M] la somme de 5.948,80 euros ,
- mis hors de cause la Caisse Régionale d'Assurance Mutuelle Agricole du Nord-Est,
- condamné le cabinet d'architecte [Y] [N] et la société Vasseur Construction à payer à M. [C] [M] et Mme [Z] [M] la somme de 1.200 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné le cabinet d'architecte [Y] [N] et la société Vasseur Construction aux dépens qui comprendront le coût des opérations d'expertise,
Vu les appels interjetés par M. [Y] [N] et la sas Vasseur Construction et leur jonction par ordonnance du conseiller de la mise en état du 18 septembre 2012,
Vu les conclusions remises et notifiées le 28 novembre 2012 par M. [Y] [N],
Vu les conclusions remises et notifiées le 26 septembre 2012 par la sas Sogea Caroni venant aux droits de la sas Vasseur Construction,
Vu les conclusions remises et notifiées le 3 février 2013 par M. [C] [M] et son épouse née [Z] [L],
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 13 février 2013.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu qu'à la suite de l'incendie de leur maison d'habitation, les époux [M] ont confié sa reconstruction à M. [Y] [N], architecte, selon contrat de maîtrise d'oeuvre du 1er avril 2006 et la réalisation du lot gros oeuvre, charpente, couverture à la société Vasseur Construction selon devis accepté du 12 février 2007 ;
Attendu que se plaignant de désordres affectant les travaux, ils ont obtenu la désignation de M. [E] [T] en qualité d'expert par ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Saint-Omer du 14 octobre 2008 ;
Attendu qu'ensuite du dépôt du rapport d'expertise le 21 décembre 2010, les époux [M] ont fait citer M. [Y] [N] et la sas Vasseur Construction aux fins d'obtenir leur condamnation solidaire à les indemniser des préjudices subis ; que l'architecte et l'entreprise ont interjeté appel de la décision du 23 mars 2012 ayant fait droit à cette demande, les époux [M] en ayant interjeté appel incident sur le quantum des réparations allouées ;
Attendu que les travaux litigieux n'ont pas été réceptionnés ; que si l'entreprise de gros oeuvre a été intégralement payée de ses appels de fonds, l'architecte ne l'a pas été ; que par ailleurs, si les maîtres d'ouvrage ont pris possession des lieux qui représentent leur résidence principale, il convient de rappeler qu'ils sont profanes dans le domaine de la construction et que dès lors il ne peut en être déduit de manière non équivoque qu'ils avaient une connaissance éclairée des désordres affectant les travaux dans toutes leurs conséquences lors de cette prise de possession ; que dès lors, il ne saurait en être déduit une réception tacite des travaux ; que le fondement de leurs demandes est donc contractuel, ainsi que l'a retenu le premier juge ;
Attendu que l'expert a relevé que les travaux n'avaient pas été exécutés dans les règles de l'art et que les désordres concernaient :
- la mauvaise assise des solives sur les poutres,
- les fissures affectant les cloisons de distribution,
- la maçonnerie 'non redressée' au droit des pavés de verre,
- la charpente non conforme et instable ;
Attendu que l'expert explique que la mauvaise assise des solives relève d'un incident isolé d'exécution de la sas Vasseur Construction ; que les fissures relèvent d'un incident isolé d'exécution du lot 'plâtrerie' dont la sas Vasseur Construction est également titulaire ; que le défaut de la maçonnerie au droit des pavés de verre est imputable à un manquement de l'entreprise titulaire du lot gros oeuvre ; que la sas Vasseur Construction aux droits de laquelle se trouve la sas Sogea Caroni étant débitrice à l'égard des maîtres d'ouvrage d'une obligation de résultat de livrer un ouvrage exempt de vices leur doit réparation de ce chef ;
Attendu que l'expert a relevé à l'examen de la charpente, qu'au niveau des deux travées centrales, la portée des pannes faîtières et ventrières est trop importante pour la section de bois employée, qu'au droit du palier, un arbalaîtier de ferme de charpente a été coupé et présente une instabilité certaine, qu'aucune demi-ferme de charpente n'a été réalisée en retour de couverture, coté versant arrière, qu'au droit de la montée d'escalier menant au palier, une panne ventrière a été doublée, qu'au droit des fermes, les entraits sont positionnés trop hauts ; qu'il conclut que la charpente n'a fait l'objet d'aucune triangulation sérieuse et qu'aucun calcul n'a été réalisé pour sa mise en oeuvre ;
que cette non conformité sera à terme de façon certaine et inéluctable de nature à nuire à la solidité de la charpente ; que dès lors l'entreprise Vasseur Construction a manqué à son obligation de livrer une charpente conforme à sa destination ;
Attendu que le contrat de maîtrise d'oeuvre de l'architecte définit ses missions comme suit :
- conception architecturale de l'oeuvre,
- direction de son exécution par les entreprises,
- l'assistance au maître de l'ouvrage pour qu'il reçoive et règle les ouvrages,
et rappelle qu'il n'est pas chargé de la surveillance du chantier et ne peut être rendu responsable des fautes d'exécution de l'entreprise ;
Attendu que l'expert indique que le désordre affectant la charpente relève d'un incident d'exécution (et non de conception), décelable en cours de chantier pour lequel le maître d'oeuvre doit répondre ; que toutefois, la surveillance du chantier ne lui incombant pas, il ne peut lui être fait grief de ce défaut d'exécution ; que dès lors le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il entré en voie de condamnation à l'encontre de M. [Y] [N] au titre des préjudicies matériel, moral et de jouissance subis par les époux [M] et au titre du remboursement des honoraires perçus ; qu'il convient dans ces conditions de condamner les époux [M] au paiement du solde de ses honoraires, soit la somme de 8.922,60 euros (14.871 euros ttc - 5.948,80 €) ;
Attendu que le jugement mérite donc confirmation en ce qu'il a condamné la sas Vasseur Construction aux droits de laquelle vient la sas Sogea Caroni à verser aux époux [M] la somme de 85.665,58 euros ttc en réparation de leur préjudice matériel ; qu'il mérite d'être infirmé quant à l'évaluation de leur préjudice moral et de jouissance qu'il convient de fixer à la somme de 5.000 euros tenant compte du temps écoulé depuis le jugement ;
Attendu que l'équité commande de faire bénéficier les époux [M] et M. [Y] [N] des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il condamne :
- M. [Y] [N] à payer aux époux [M] solidairement avec la société Vasseur Construction la somme de 85.665,58 euros,
- M. [Y] [N] à rembourser aux époux [M] la somme de 5.948,80 €,
- M. [Y] [N] solidairement avec la société Vasseur Construction à payer aux époux [M] la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la société Vasseur Construction et M. [Y] [N] solidairement à payer aux époux [M] la somme de 2.250 euros,
- M. [Y] [N] solidairement avec la société Vasseur Construction aux dépens,
Statuant à nouveau de ces chefs,
Déboute M. [C] [M] et son épouse née [Z] [L] de leurs demandes formées à l'encontre de M. [Y] [N],
Condamne M. [C] [M] et son épouse née [Z] [L] à payer à M. [Y] [N] la somme de 8.922,60 euros ttc au titre du solde de ses honoraires,
Condamne la sas Sogea Caroni venant aux droits de la sas Vasseur Construction à verser à M. [C] [M] et à son épouse née [Z] [L] la somme de 5.000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance et moral,
Confirme le jugement sur le surplus de ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la sas Sogea Caroni venant aux droits de la sas Vasseur Construction à verser à M. [C] [M] et à son épouse née [Z] [L] la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la sas Sogea Caroni aux dépens, distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le GreffierLe Président,
C. POPEKM. ZENATI