République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 22/03/2012
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N° MINUTE :
N° RG : 11/02879
Jugement (N° 10/00649)
rendu le 05 Avril 2011
par le Tribunal de Grande Instance de DOUAI
REF : HB/VC
APPELANTS
Monsieur [M] [T] [J]
né le [Date naissance 3] 1963 à [Localité 7]
demeurant : [Adresse 2]
Représenté par Me Jean-Guy VOISIN, avocat au barreau de DOUAI constitué aux lieu et place de la SCP COCHEME LABADIE COQUERELLE, anciens avoués
Madame [H] [N] [K] [I] épouse [J]
née le [Date naissance 5] 1964 à [Localité 6]
demeurant : [Adresse 2]
Représentée par Me Jean-Guy VOISIN, avocat au barreau de DOUAI constitué aux lieu et place de la SCP COCHEME LABADIE COQUERELLE, anciens avoués
INTIMÉ
Monsieur [L] [M] [R]
né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 8]
demeurant : [Adresse 4]
Représenté par la SCP DRAGON-BIERNACKI, avocats au barreau de DOUAI constitué aux lieu et place de la SCP THERY LAURENT, anciens avoués.
DÉBATS à l'audience publique du 18 Janvier 2012 tenue par Hélène BILLIERES magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Pierre CHARBONNIER, Président de chambre
Benoît PETY, Conseiller
Hélène BILLIERES, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2012 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Suivant exploit du 30 mars 2010, Monsieur [M] [J] et Madame [H] [I], son épouse, ont fait assigner Monsieur [L] [R] devant le tribunal de grande instance de Douai en remboursement de la somme de 20 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2010 qu'ils exposent lui avoir prêtée, outre sa condamnation au paiement des sommes de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts par application des dispositions de l'article 1153 alinéa 4 du code civil et de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 5 avril 2011, ladite juridiction a débouté les époux [J] de leurs prétentions et a fixé en faveur du défendeur, une indemnité de procédure de 1 500 euros.
Monsieur [M] [J] et Madame [H] [I], son épouse, ont relevé appel de cette décision le 27 avril 2011.
Ils réitèrent devant la cour les prétentions qu'ils avaient initialement soumises au premier juge, sauf à porter à 3 000 euros la somme réclamée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils exposent qu'il n'est pas contesté qu'ils ont remis le 21 janvier 2002 un chèque bancaire d'un montant de 20 000 euros à Monsieur [L] [R], lequel leur a signé le jour même un document valant reconnaissance de dette, ou à tout le moins commencement de preuve par écrit complété par les attestations qui confirment le prêt à ce dernier et l'aveu que Monsieur [L] [R] a fait à l'huissier de justice lors de la sommation interpellative du 14 janvier 2010 de les rembourser de la somme ainsi prêtée.
Ils soutiennent en tout état de cause que l'aveu passé par Monsieur [L] [R] supplée l'absence d'écrit.
Monsieur [L] [R] pour sa part conclut à la confirmation du jugement déféré ainsi qu'à la condamnation de Monsieur [M] [J] et Madame [H] [I], son épouse, au paiement de la somme de 2 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il conteste l'existence même d'un prêt que leur auraient consenti les époux [J] et fait valoir que ces derniers ont agi à son égard, mus par une intention libérale.
Il soutient que le document signé le 21 janvier 2002 ne vaut ni reconnaissance de dette ni commencement de preuve par écrit, mais seulement quittance, et conteste avoir reconnu être débiteur de la somme de 20 000 euros.
SUR CE
Attendu que la remise d'une somme de 20 000 euros par Monsieur [M] [J] et Madame [H] [I], son épouse, à Monsieur [L] [R] n'est pas contestée ;
Que si cette remise ne fait ainsi l'objet d'aucun débat, il importe toutefois de rappeler qu'elle n'est pas de nature à elle seule à caractériser l'obligation pour son bénéficiaire de restituer les fonds, la preuve de l'existence d'une telle obligation incombant, conformément aux dispositions de l'article 1315 alinéa 1 du code civil, à la partie qui s'en prévaut ;
Qu'il incombe en conséquence à Monsieur [M] [J] et à Madame [H] [I], son épouse, d'apporter la preuve de l'existence d'une telle obligation, contestée par Monsieur [L] [R] qui se prétend bénéficiaire d'un don manuel ;
Que cette preuve doit être apportée conformément aux règles qui gouvernent la preuve des actes juridiques, ce qui implique, en vertu des dispositions de l'article 1341 du code civil, la production d'un écrit ;
Qu'il convient à cet égard de rappeler qu'en vertu des dispositions énoncées par l'article 1326 dudit code, l'acte juridique par lequel une partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent, doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention écrite par lui-même de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres ;
Qu'à défaut, l'acte ne peut valoir que comme commencement de preuve par écrit devant être complété par d'autres éléments, tels que témoignages ou indices ; qu'on appelle commencement de preuve par écrit tout acte par écrit qui est émané de celui contre lequel la demande est formée, ou de celui qu'il représente, et qui rend vraisemblable le fait allégué ;
Attendu en l'espèce que Monsieur [M] [J] et Madame [H] [I], son épouse, versent aux débats, à l'appui de leurs assertions, la photocopie d'un document entièrement manuscrit, daté du 21 janvier 2002 et revêtu de la signature de Monsieur [L] [R] aux termes duquel ce dernier « déclare recevoir ce jour le 21.01.2002 de la part de Mr et Mme [J] la somme de vingt mille euros (20.000,00 euros) par chèque crédit agricole tiré sur le compte de l'entreprise CIBEC N° 0903645 » ;
Que si ce document comporte certes la signature de Monsieur [L] [R] ainsi que la mention manuscrite prévue par l'article 1326 du code civil, il ne saurait valoir reconnaissance de dette à défaut de comporter tout engagement de sa part, au sens de l'article 1326 du code civil, d'avoir à rembourser Monsieur [M] [J] et Madame [H] [I], son épouse, de la somme ainsi remise ;
Qu'il ne saurait davantage valoir comme commencement de preuve par écrit dès lors qu'en démontrant seulement la réalité de la remise des fonds, il est dépourvu de la condition de vraisemblance du fait allégué exigé par l'article 1347 du code civil ;
Qu'à défaut de commencement de preuve par écrit, les divers témoignages produits par les époux [J] sont dès lors insuffisants à rapporter légalement la preuve de la convention de prêt alléguée ;
Attendu enfin que la réponse donnée par Monsieur [L] [R] à la sommation interpellative du 14 janvier 2010 dans les termes suivants : « je vais en référer à mon avocat, Monsieur et Madame [J] restent me devoir trois mois de salaire, je me tiens à votre disposition pour régler cette situation », ne constitue pas davantage un moyen de preuve pertinent du prêt allégué dès lors que ces paroles ne peuvent être interprétées comme une reconnaissance de sa dette ;
Qu'il s'ensuit que les demandes de Monsieur [M] [J] et Madame [H] [I], son épouse, ne peuvent prospérer ; que le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu enfin qu'il ne parait pas inéquitable de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
PAR CES MOTIFS ;
Statuant publiquement et contradictoirement ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Monsieur [M] [J] et Madame [H] [I], son épouse, aux dépens d'appel qui seront recouvrés par la S.C.P. THERY LAURENT, avoués, pour les actes accomplis antérieurement au 1er janvier 2012 et par Maître DRAGON, avocat, pour les actes accomplis à partir de cette même date, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
A. DESBUISSONSP. CHARBONNIER