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22/03/2012 | FRANCE | N°10/02255

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 22 mars 2012, 10/02255


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 22/03/2012



***





N° MINUTE :

N° RG : 10/02255



Arrêt (N° 06/01250)

rendu le 18 Novembre 2008

par le Cour d'Appel de DOUAI



REF : PB/FR





APPELANTS



Madame [A] [M] veuve [K]

née le [Date naissance 4] 1919 à [Localité 18]

demeurant [Adresse 20]

[Adresse 20]

[Localité 11]



Repr

ésentée par Me Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI constituée aux lieu et place de la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués

Assistée du Cabinet d'Avocats DOMINIQUE-ROGER DUFOURG du barreau de PARIS



Monsieur [V], [D], [F],...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 22/03/2012

***

N° MINUTE :

N° RG : 10/02255

Arrêt (N° 06/01250)

rendu le 18 Novembre 2008

par le Cour d'Appel de DOUAI

REF : PB/FR

APPELANTS

Madame [A] [M] veuve [K]

née le [Date naissance 4] 1919 à [Localité 18]

demeurant [Adresse 20]

[Adresse 20]

[Localité 11]

Représentée par Me Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI constituée aux lieu et place de la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués

Assistée du Cabinet d'Avocats DOMINIQUE-ROGER DUFOURG du barreau de PARIS

Monsieur [V], [D], [F], [O] [H] [K]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 15]

demeurant [Adresse 20]

[Adresse 20]

[Localité 11]

Représenté par Me Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI constituée aux lieu et place de la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués

Assisté du Cabinet d'Avocats DOMINIQUE-ROGER DUFOURG du barreau de PARIS

Monsieur [N] [Y]

né le [Date naissance 7] 1930 à [Localité 14]

demeurant [Adresse 8]

[Localité 9]

Représenté par Me Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI constituée aux lieu et place de la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués

Assisté de la SELARL CASAL Charles, avocat au barreau de PARIS

Madame [S] [K] épouse [Y]

née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 15]

demeurant [Adresse 8]

[Localité 9]

Représentée par Me Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI constituée aux lieu et place de la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués

Assistée de la SELARL CASAL Charles, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

Société V.H. HOLDING S.C.A.

agissant en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

Ayant son siège social [Adresse 19]

[Localité 12]

Représentée par Me Philippe Georges QUIGNON, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me Brigitte PETITDEMANGE, avocat au barreau de LILLE,

S.A. FINANCIERE VH anciennement dénommée CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ET DU HAUT BANC agissant en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

Ayant son siège social [Adresse 19]

[Localité 12]

Représentée par Me Philippe Georges QUIGNON, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me Brigitte PETITDEMANGE, avocat au barreau de LILLE,

Monsieur [D] [K]

né le [Date naissance 3] 1952 à [Localité 15]

demeurant [Adresse 5]

[Localité 10]

Représenté par Me Philippe Georges QUIGNON, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me Brigitte PETITDEMANGE, avocat au barreau de LILLE,

SASU COTE D'OPALE GRANULATS

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Ayant son siège social [Adresse 6]

[Localité 13]

Représentée par la SCP DELEFORGE ET FRANCHI, avocats au barreau de DOUAI

Assistée de Me Patrice GRENIER, avocat au Barreau de PARIS,

ASSIGNEE EN INTERVENTION FORCEE :

SAS CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE

agissant en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

Ayant son siège social [Adresse 19]

[Localité 12]

Représentée par Me Philippe Georges QUIGNON, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me Francis LINQUERCQ, avocat au barreau de DOUAI

DÉBATS à l'audience publique du 26 Janvier 2012, où l'affaire a été mise en délibéré au 22 Mars 2012, prorogé au 22 Mars 2012, tenue par Philippe BRUNEL magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Véronique DESMET

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Christine PARENTY, Président de chambre

Philippe BRUNEL, Conseiller

Sandrine DELATTRE, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2012 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Christine PARENTY, Président et Françoise RIGOT adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 17 novembre 2012:

*****

Vu le jugement du tribunal de commerce de Calais en date du 6 décembre 2005 qui a rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise judiciaire ordonnée le 2 avril 2002 et déposé le 25 juillet 2003 en retenant que le principe du contradictoire avait été respecté et qui a également rejeté la demande d'annulation de l'assemblée générale extraordinaire du 28 décembre 2001 de la société FINANCIERE VH en retenant que le droit d'information des actionnaires avait été respecté, que les gérants de la société VH HOLDING n'avait pas excédé leurs pouvoirs, que l'opération d'apport ne constituait par un abus de majorité dès lors que l'atteinte à l'intérêt social dans le but de favoriser les actionnaires majoritaires n'était pas démontrée , et que la demande de révocation de [D] [K] n'était pas fondée, l'opération d'apport ayant d'ailleurs été approuvée par l'assemblée générale extraordinaire de FINANCIERE VH;

Vu la déclaration d'appel des consorts [K] du 28 février 2006 ;

Vu l'arrêt de cette cour en date du 18 novembre 2008 infirmant le jugement en toutes ses dispositions excepté en ce qu' il s'était déclaré compétent pour statuer sur la demande de révocation de [D] [K], cet arrêt annulant le rapport d'expertise judiciaire et prononçant la nullité des délibérations adoptées lors de l'assemblée extraordinaire du 28 décembre 2001 et faisant droit à la demande de révocation de [D] [K] de ses fonctions de gérant commandité de la société VH HOLDING;

Vu l'arrêt de la cour d'appel de Douai en date du 11 février 2010 qui, interprétant l'arrêt du 18 novembre 2008 à la demande de la société COTE D'OPALE GRANULATS a précisé que la nullité prononcée le 18 novembre 2008 des délibérations de l'assemblée extraordinaire de la société FINANCIERE VH était sans conséquence sur les délibérations de l'assemblée de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ni sur le traité d'apport du 7 décembre 2001 ni sur le bail emphytéotique du 25 mars 2002 ni enfin sur la cession d'actions du 12 janvier 2007 ;

Vu l'arrêt de la chambre commerciale de la Cour de Cassation en date du 16 février 2010 cassant au visa de l'article 455 alinéa un et de l'article 954 alinéa deux du Code de procédure civile l'arrêt du 18 novembre 2008 en toutes ses dispositions pour défaut de visa des dernières conclusions des intimées avec l'indication de leur date et pour défaut d'exposé des moyens qui y étaient contenus ;

Vu la déclaration de saisine de la cour d'appel de Douai désignée comme cour de renvoi en date du 31 mars 2010 par les consorts [K];

Vu l'assignation en date du 1er septembre 2010 par laquelle les consorts [K] ont assigné la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE en intervention forcée;

Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 16 décembre 2010 qui s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes des sociétés COTE D'OPALE GRANULATS et CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE visant à voir déclarées irrecevables leurs mises en cause;

Vu les dernières conclusions des consorts [K] en date du 8 septembre 2011 s'agissant de Mme veuve [C] [K], de M. [V] [K] et du 17 novembre 2011 s'agissant de Mme [S] [K] et de son époux [N] [Y] visant à la réformation du jugement et à l'annulation des opérations d'expertise judiciaire, à l'annulation des délibérations de l'assemblée extraordinaire du 28 décembre 2001 de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ultérieurement dénommée société FINANCIERE VH mais également de la sixième délibération de l'assemblée générale mixte du 22 juin 2010 portant ratification les délibérations précédentes; ils demandent que la nullité de ces délibérations s'étende au traité d'apport, au bail emphytéotique du 25 mars 2002 et à la cession d'actions au profit de COTE D'OPALE GRANULATS du 12 janvier 2007; ils demandent que l'annulation de ces délibérations soit déclarée opposable aux sociétés CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE et COTE D'OPALE GRANULATS et qu'il en soit fait publication dans un journal d'annonces légales ; ils demandent la révocation de M. [D] [K] de son mandat de gérant commandité de la société VH HOLDING ; une somme de 40 000 euros est demandée au titre des frais irrépétibles; ils font valoir :

quant à la nullité du rapport d'expertise:

- que l'expert a méconnu le respect du principe du contradictoire en ne procédant pas à la communication des pièces examinées par lui et tout spécialement du traité d'apport intervenu entre la société VH HOLDING et la société STARDOUZE ultérieurement devenue CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ; ils font également grief à l'expert de s'être entretenu seul avec un technicien géologue M.[E] pour obtenir des explications techniques alors que M. [E] était précédemment intervenu en tant que conseil de MM [D] et [O] [K];

quant à la nullité des délibérations de l'assemblée générale:

- qu'elles ont trouvé leur dénouement dans la cession de 47 % du capital social de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE au groupe LAFARGE et ont abouti à confier à un tiers au groupe familial la cogestion de la société d'exploitation dès lors qu'il y disposait de 50% des voix au comité de direction, une telle opération étant contraire aux principes résultant du protocole du 2 mai 1991,

- que les délibérations dont ils demandent l'annulation constituent, en application des articles 1134 et 1988 du Code civil, une violation du pacte d'actionnaires du 2 mai 1991 et du mandat donné dans ce cadre aux gérants commandités,

- qu'elles seraient constitutives d'un abus de majorité résultant de l'opération de sous filialisation qui porterait atteinte à l'objet social et à l'intérêt social des sociétés VH HOLDING et FINANCIERE VH, cette opération étant intervenue alors que l'information et la consultation des associés des sociétés VH HOLDING et FINANCIERE VH n'avait pas été faite,

- que cette opération aboutissant à une modification de l'objet social de VH HOLDING, l'assemblée générale extraordinaire de cette société et son conseil de surveillance auraient du être consultés,

- que les représentants du groupe B. ayant été évincés du conseil de surveillance de la société FINANCIERE VH n'ont pu obtenir les informations qui leur revenaient;

- que l'annulation des décisions de l'assemblée générale extraordinaire du 28 décembre 2001 entraîne nécessairement l'annulation des actes subséquents et donc du traité d'apport du 7 décembre 2001, du bail emphytéotique du 25 mars 2002, de la cession de 47 % du capital de la société CARRIERES DE LA V ALLEE HEUREUSE du 12 janvier 2007.

Ils estiment par ailleurs que la mise en cause des sociétés CARRIERES DE LA V ALLEE HEUREUSE et COTE D OPALE GRANULATS est justifiée au regard de l'article 555 du Code de procédure civile par l'évolution du litige dès lors que c'est après le prononcé du jugement de première instance que la société FINANCIERE VH a vendu 47 % du capital de sa filiale la société CARRIERES DE LA V ALLEE HEUREUSE à la société COTE D OPALE GRANULATS par acte du janvier 2007 et la prescription de l'article 1844 ' 14 du Code civil ne pouvant leur être opposée,la validité de l'opération de filialisation ayant été attaquée par eux avant l'expiration du délai de trois ans;

Quant à la révocation de [D] [K] de ses fonctions de gérant de VH HOLDING, ils font valoir que c'est à juste titre que le premier juge s'est reconnu compétent pour statuer sur la demande qui en application de l'article L226 ' 2 quatrième alinéa du Code de commerce relève exclusivement de la compétence du tribunal de commerce; que [D] [K] a géré la société VH HOLDING en excluant les membres du groupe B. de la vie sociale, qu'il a agi contrairement à l'intérêt de VH HOLDING et en dehors de son objet social, qu'il a perdu la confiance des membres du groupe B.

VU les dernières conclusions de la société en commandite par actions VH HOLDING, de la société anonyme FINANCIERE VH et de M. [D] [K] en date du 30 décembre 011 visant à la confirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il avait retenu sa compétence pour statuer sur la demande de révocation de M. [D] [K] ; ils font valoir:

- que la régularité des opérations d'expertise ne peut être contestée, l'ensemble des documents sur lesquels l'expert s'est fondé pour aboutir à ses conclusions ayant été communiqué par lui alors qu'il lui était impossible d'assurer la communication de toutes les pièces qu'il avait consultées et incluant notamment des pièces comptables; ils précisent en particulier que le traité d'apport, effectivement non communiqué par l'expert, n'a pas été utilisé par lui; s'agissant de l'entretien ayant eu lieu entre l'expert judiciaire et M. [E], géologue, ils soutiennent que l'avis technique donné par M. [E] ayant été produit lors d'une réunion d'expertise, le caractère contradictoire de celle-ci a été respecté,

- que la demande d'annulation des délibérations d'assemblée générale faite par les . consorts [K], en ce qu'elle se fonde sur la violation d'un pacte d'actionnaires, sur un abus de majorité et sur une atteinte à leur droit d'information et de consultation, méconnaît le régime de nullité à caractère restrictif applicable en droit des sociétés résultant en particulier de l'article L235 ' 1 du Code de commerce qui n'admet une telle nullité qu'en cas de violation de dispositions expresses ou impératives du livre deux du code de commerce ou des lois qui régissent les contrats;

- qu'il n'y a aucun abus de majorité, celui-ci devant être défini comme la décision prise contrairement à l'intérêt général de la société et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, la cession de l'activité l'exploitation des carrières à une filiale spécialement dédiée présentant l'intérêt de sécuriser le patrimoine foncier de la société VH HOLDING au regard des risques d'exploitation, de permettre la mise en place de stocks options en faveur des cadres salariés et de rechercher un partenariat à long terme pour l'exploitation des carrières qui demeuraient propriété de la société FINANCIERE VH, une redevance emphytéotique étant due par l'exploitant comprenant une partie fixe et une partie variable tenant compte :du volume de matériaux commercialisés,

- que l'opération n'a pas altéré l'objet social de la société VH HOLDING ni de la société FINANCIERE VH,

- que l'opération n'a pas porté atteinte à l'intérêt social de ces deux sociétés,

- que le droit des consorts [K] à information et consultation n'a pas été méconnu, les dispositions qu'ils invoquent ' les articles R236 ' 1 et suivants du Code de commerce relevant des opérations de fusions et scissions et n'étant pas applicables, le seul apport d'un fonds de commerce ne constituant pas un transfert de patrimoine seul concerné par ces dispositions

- que les gérants commandités de la société VH HOLDING n'avaient pas, en application des statuts, à consulter le conseil de surveillance ou à soumettre à une assemblée générale extraordinaire le sens du vote de la société VH HOLDING dans le cadre de l'assemblée générale extraordinaire de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE pour statuer sur le projet d'apport ;

ils soutiennent également que s'opposent à l'annulation des délibérations la ratification de juin 2010 ainsi que l'irrégularité de la mise en cause, opérée tardivement devant la cour d'appel, de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE, la prescription de trois années prévus par l'article 1844 ' 14 du Code civil étant d'ailleurs acquise;

s'agissant de la demande relative à l'annulation des contrats du 7 décembre 2001 (traité d'apport), 25 mars 2002 (bail emphytéotique) et 12 janvier 2007 (cession d'actions) pris en application ou en conséquence des délibérations dont l'annulation est demandée, ils font valoir qu'elles sont irrecevables comme constituant des demandes nouvelles au sens de l'article 564 du Code de procédure civile; sur le fond, ils contestent le bien-fondé de la demande;

s'agissant de la demande de révocation de M. [D] [K], ils demandent la réformation du jugement du tribunal de commerce au motif qu'elle relève de la clause compromissoire résultant de l'article 41 des statuts de la société VH HOLDING mais aussi en raison de la liquidation amiable de la société VH HOLDING; sur le fond les raisons de sa demande de révocation sont contestées en l'absence de toute cause légitime ,pouvant résulter d'une décision prise par lui qui serait contraire à l'intérêt social et le seul fait que les consorts [K], associés du groupe B, aient perdu confiance à son égard ne pouvant justifier sa révocation alors qu'il a la qualité de mandataire de la société et non pas d'un groupe d'associés ;

Vu les conclusions de la société CARRIERES DE LA V ALLEE HEUREUSE en date du 17 mars 2011 demandant que sa mise en cause par les consorts [K] soit déclarée irrecevable au motif que les conditions permettant une intervention forcée devant la cour d'appel n'étaient pas réunies, aucune évolution du litige ne pouvant la justifier et une telle intervention forcée la privant du double degré de juridiction; elle fait également valoir que la demande d'annulation de l'assemblée générale serait atteinte par la prescription de trois ans prévue par l'article 1844 - 14 du Code civil; une somme de 5000 euros est demandée au titre des frais irrépétibles ;

Vu les dernières conclusions de la société COTE D'OPALE GRANULATS en date du 2 février 2011 demandant que soit déclarée irrecevable sa mise en cause opérée par les consorts [K] devant la cour d'appel, celle-ci constituant une atteinte au principe du double degré de juridiction et aucune évolution du litige devant la cour ne la justifiant, la prise de participation dans le capital de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE constituant une modification d'ordre économique et non pas des données juridiques du litige; elle fait également valoir à titre subsidiaire que la demande d'annulation de l'assemblée extraordinaire du 28 décembre 2001 ne peut avoir d'effets sur le traité d'apport du 7 décembre 2001 ni sur le bail emphytéotique consenti par la FINANCIERE VH à la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ni sur l'acte de cession d'actions intervenu à son profit le 12 janvier 2007 ; une somme de 50000 euros est demandée au titre des frais irrépétibles ;

SUR CE

Attendu que les CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE, situées entre [Localité 16] et [Localité 17], sont exploitées pour leur gisement de calcaire depuis les années 1880 par une société anonyme des CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ET DU HAUT BANC dirigée initialement par deux frères [C] et [L] [K] ; qu'après le décès d'[C] [K], le capital de la société s'est trouvé réparti en trois groupes : le groupe familial d'[C] [K] ([A] [M], son épouse, [D],. [V] et [S] [K] ses enfants, ainsi que le mari de [S] [K]), le groupe familial de [L] [K] ([L], [O] et [U] [K] ainsi que [R] , [T] et [G] [K]) et enfin une entreprise concurrente la société des carrières du boulonnais;

Qu'en application d'un protocole du 2 mai 1991 était constituée la société en commandite par actions VH HOLDING à laquelle les deux branches de la famille [K] apportaient la totalité de leurs actions dans la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE , le capital de la société holding étant réparti à hauteur de 30 % en faveur du groupe familial de [L] [K] (actions du groupe A) et à hauteur de 70 % en faveur du groupe familial d'[C] [K] (actions du groupe B.). La société holding était gérée par deux gérants commandités relevant l'un du groupe A [O] [K] et l'autre du groupe B. [D] [K]. La holding détenait les deux tiers du capital de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE;

Que le protocole d'accord du 2 mai 1991 prévoyait également que, au sein de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE, le président du conseil de surveillance soit issu du groupe B. et que deux membres du conseil de surveillance soient issus de chacun des groupes. Parmi les objectifs du protocole figurait celui de conserver le contrôle d'au moins les deux tiers de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE;

Qu'il est à noter que les dissensions entre les associés du groupe A et du groupe B, exception faite dans ce dernier groupe de [D] [K], se sont traduites par divers événements notamment procéduraux; qu'ainsi : en octobre 1995 est intervenu le licenciement de [V] [K] par la société des CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE, en décembre 1996 un tribunal arbitral désignait un mandataire ad hoc pour participer aux assemblées de VH HOLDING et pour voter en lieu et place des associés du groupe B. en vue de procéder aux élections des membres du conseil de surveillance de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE;

Que le 28 décembre 2001, une assemblée générale extraordinaire de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE approuvait une opération consistant pour cette société à apporter son fonds d'industrie et de commerce à une société filiale à 99,9 %, la société STARDOUZE, elle-même conservant la propriété des terrains d'extraction. qu'ultérieurement, la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE prenait la dénomination de FINANCIERE VH et la société STARDOUZE celle de société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE.; qu'un bail emphytéotique avec convention de fortage était conclu entre la FINANCIERE VH et la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE le 25 mars 2002;

Qu'enfin, le 12 janvier 2007, la société FINANCIERE VH cédait 46,67 % du capital de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE à la société LAFARGE GRANULATS ARMORIQUE qui allait prendre ultérieurement la dénomination de COTE D'OPALE GRANULATS. La société VH HOLDING a quant à elle fait l'objet d'une liquidation amiable, les consorts [K] ayant refusé de proroger la durée de la société constituée pour 18 ans le 7 mai 1991;

Que c'est cette opération d'apport approuvée par l'assemblée générale extraordinaire du 28 décembre 2001 qui fait l'objet de la présente procédure dans le cadre de laquelle est également demandée la révocation de M. [D] [K], en sa qualité de cogérant de la société FINANCIERE VH; que cette opération est en effet contestée par le groupe familial d'[C] [K] (groupe B. ci-après dénommé les consorts [K]) à l'exception toutefois de M. [D] [K] qui est mis en cause par ceux-ci ;

Que les consorts [K] avaient demandé l'ajournement de l'assemblée générale extraordinaire. qu'ils en ont été déboutés par ordonnance du 26 décembre 2001 confirmée le 6 février 2003 par cette cour; qu'à leur demande, une ordonnance du 2 avril 2002 ordonnait une mesure d'expertise destinée à analyser les conditions économiques et financières des opérations intervenues entre les sociétés VH HOLDING, FINANCIERE VH, CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE . L'expert déposait son rapport le 25 juillet 2003 dont il ne ressortait selon lui aucune opération susceptible de porter atteinte à l'intérêt social ni aux intérêts des actionnaires ni aucune opération suspecte pas plus qu'il ne décelait d'opérations de nature à mettre en cause la responsabilité des cogérants Messieurs [D] et [O] [K] dont la gestion était qualifiée par l'expert de « tout à fait saine » et agissant « au mieux les intérêts des actionnaires » ;

Que, par arrêt du 4 décembre 2003, la cour d'appel de Douai confirmait un jugement du 1er avril précédent ayant refusé la demande de remplacement d'expert faite par les consorts [K]. Cet arrêt était toutefois cassé le 15 décembre 2005;

Que les consorts [K], sur le fond, assignaient le 21 février 2002 les sociétés VH HOLDING et FINANCIERE VH ainsi que M. [D] [K] devant le tribunal de commerce de Calais pour demander l'annulation des délibérations adoptées lors de l'assemblée générale extraordinaire de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE du 28 décembre 2001 et de toutes les décisions qui en sont la conséquence ainsi que la révocation de M. [D] [K] de ses fonctions de gérant commandité de la société VH HOLDING. Ils sollicitaient également l'annulation des opérations de l'expert judiciaire.

Sur la demande d'annulation du rapport d'expertise;

Attendu que les consorts [K] reprochent en premier lieu à l'expert judiciaire de s'être rendu seul au siège social des CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ; que l'expert a rendu compte en page cinq de son rapport de cette visite et a précisé y avoir consulté sur place des pièces comptables pour les vérifier au regard des écritures comptables ; qu'il indiquait : « ces investigations ont été conduites seul eu égard à leur caractère purement matériel. » ; que, compte tenu de la mission qui était fixée à l'expert qui était relative à l'analyse des conditions économiques et financières des conventions passées entre ces sociétés ainsi qu'avec des sociétés tierces, il lui était nécessaire de procéder préalablement à des constatations à caractère comptable qui n'ont pas donné lieu à observations particulières de sa part ni de la part des parties; que compte tenu de leur caractère ponctuel et limité, il ne peut être considéré qu'elles ont porté atteinte au caractère contradictoire de l'expertise ;

Que les consorts [K] reprochent ensuite à l' expert de ne pas avoir communiqué aux parties l'intégralité des documents et pièces comptables consultés par lui ; que l'expert a, à bon droit, assuré la communication des seuls documents qui lui sont apparus pertinents pour la conduite de sa mission, la production de l'ensemble des documents et pièces comptables consultés par lui ne pouvant être raisonnablement envisagée ; qu'une telle communication de masse se serait avérée non seulement inutile mais également de nature à compliquer sans raison particulière la tâche des parties et de leur conseil ;

Attendu que les consorts [K] font grief à l'expert de ne pas avoir assuré la communication du traité d'apport du 7 décembre 2001 ; que, s'il est exact de que ce traité constituait en toute hypothèse une pièce pertinente pour l'exercice de sa mission par l'expert, il est également constant qu'elle pouvait être librement consultée au greffe du tribunal de commerce où elle avait été déposée ; que certes, les consorts [K] soutiennent que la communication du traité s'entend de celui-ci mais également des annexes qui y sont rattachées ; que toutefois, il n'a pas été demandé à l'expert au cours de ces opérations, d'assurer la communication de ces annexes;

Attendu enfin que il est loisible à l'expert de recueillir auprès d'un technicien d'une spécialité distincte de la sienne l'avis qu'il estimerait nécessaire à l'exercice de sa mission ; qu'en l'espèce d'ailleurs les appelants avaient demandé à l'expert de se prononcer sur l'avis donné par un technicien géologue, M. [E], sur les conditions dans lesquelles certaines opérations de vente ou d'échange de terrains étaient intervenues entre la société des CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE et un certain nombre d'autres sociétés ; que l'expert s'est entretenu avec ce technicien hors la présence des parties ; que toutefois, comme l'a indiqué le premier juge, l'avis technique de M. [E] a été produit lors de la réunion d'expertise du 28 septembre 2002 et a pu faire l'objet d'un débat contradictoire ; que par ailleurs, l'expert a rendu compte aux parties dans le cadre de son pré-rapport des éléments techniques obtenus auprès de ce technicien ; que les parties ont disposé d'un délai suffisant pour y apporter la contradiction et demander le cas échéant toute investigation complémentaire à l'expert; qu'il ne peut donc être soutenu par les consorts [K] que l'expert aurait mené ses opérations "en concertation" avec M [E]; que le grief fait au rapport d'expertise ne peut être retenu étant observé que la circonstance que le technicien géologue M. [E] ait précédemment été le « conseil » de la société VH HOLDING est sans incidence puisque c'est précisément parce que les consorts [K] remettaient en cause le travail de ce technicien, que l'expert judiciaire a obtenu auprès de lui les explications strictement techniques qu'il a ensuite introduites dans le débat contradictoire ; que la cour note enfin que les conditions dans lesquelles les échanges et ventes de terrains au titre desquels l'expertise de l'avis donné par M. [E] a été opérée ne sont plus critiquées devant la cour dans le cadre de la présente instance ;

Attendu en conséquence que c'est à juste titre que le premier juge a rejeté la demande d'annulation des opérations d'expertise présentée par les consorts [K] ; que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Sur la demande d'annulation des délibérations d'assemblée générale;

Attendu que, en application de l'article L 235-1 du Code de commerce la nullité des actes modifiant les statuts d'une société ne peut résulter que de la violation des dispositions expresses du livre deux du Code de commerce sur les sociétés commerciales ou des lois qui régissent la nullité des contrats ; que la nullité des autres actes ou délibérations ne peut résulter que de la violation des dispositions impératives du livre deux de ce même Code ou des lois qui régissent les contrats ; que ces dispositions, qui dérogent au régime général régissant la nullité des actes et conventions prévues notamment par les articles 1108 à 1133 du Code civil ainsi que par les articles 1134 et 1988 de ce même Code invoqués par les consorts [K], ont un caractère limitatif qui s'explique par la nature institutionnelle de la société et des actes et délibérations qui y sont pris et par les lourdes conséquences résultant de leur annulation;

Attendu en premier lieu que les consorts [K] soutiennent que les gérants de la société VH HOLDING et spécialement [D] [K] auraient méconnu la lettre et l'esprit du pacte d'actionnaires du 2 mai 1991 en votant le 28 décembre 2001, dans le cadre de l'assemblée générale extraordinaire de la société FINANCIERE VH., en faveur de l'autorisation d'apport de la société FINANCIERE VH. à la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE et également le 22 juin 2006 pour ratifier l'opération ainsi autorisée ; que toutefois, à supposer établie la violation du pacte d'actionnaires du 2 mai 1991, une telle violation ne pourrait, au regard des dispositions de l'article L 235-1 ci-dessus rappelées aboutir à l'annulation des deux délibérations litigieuses, le pacte d'actionnaires ne pouvant être considéré comme relevant d'une disposition expresse ou impérative du livre deux du Code de commerce ou des lois qui régissent la nullité des contrats ; que la violation du pacte d'actionnaires alléguée serait seulement de nature à justifier une action en responsabilité à l'égard des mandataires, le succès d'une telle action étant subordonné à la preuve du préjudice qui résulterait de la violation alléguée; qu'en outre, les gérants commandités de la société VH HOLDING n'avaient pas, contrairement à ce que soutiennent les consorts [K], la qualité de mandataire de l'un ou de l'autre des deux groupes d'associés constituant le capital ; qu'au contraire, nommés par les statuts de la société VH HOLDING, il étaient les représentants et mandataires de cette société dont ils devaient défendre les intérêts ; que le pacte d'actionnaires du 2 mai 1991, même s'il prévoyait que la gérance serait exercée par deux gérants issus de l'un et de l'autre des groupes d'associés ne pouvait avoir pour effet de substituer au mandat social le mandat purement contractuel donné par les associés du groupe B ;

Attendu en second lieu que les consorts [K] soutiennent que l'ensemble de l'opération de sous filialisation initiée par l'apport effectué en décembre 2001 par la société FINANCIERE VH. à la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE et qui s'est poursuivi par la prise de participation en 2007 du groupe LAFARGE dans la sous-filiale relèverait d'un abus de majorité justifiant l'annulation des délibérations du 28 décembre 2001 et du 22 juin 2010 de la société FINANCIERE VH. ; que, s'il est exact que les décisions et délibérations des assemblées générales constitutives d'un abus de majorité sont susceptibles d'être annulées, encore est il nécessaire que soit établie la réalité des éléments spécifiques de l'abus de majorité ; que pour être considéré comme relevant d'un abus de majorité, une décision sociale doit d'une part être contraire à l'intérêt général de la société et, d'autre part, avoir été prise dans le but exclusif de favoriser les membres de la majorité au détriment des membres de la minorité ; qu'une opération de sous filialisation telle que celle critiquée en l'espèce ne saurait en elle-même être considérée comme contraire à l'intérêt général de la société ;

Que cette opération s'est traduite, par un processus assez classique, par la dissociation des actifs financiers et immobiliers qui restent la propriété de la société FINANCIERE VH. et de l'activité d'exploitation transférée à la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ; qu'elle permettait, malgré les dénégations en ce sens des consorts [K], de sécuriser le patrimoine foncier en le soustrayant aux aléas de l'activité d'exploitation ; qu'elle permettait également la recherche d'un partenariat à long terme susceptible de garantir le développement de la société ; que la société FINANCIERE VH., après l'opération d'apport, demeurait donc propriétaire d'un patrimoine immobilier très conséquent ; qu'un bail emphytéotique et une convention de fortage étaient prévues au profit de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ; que la redevance attachée au bail prévoyait une partie fixe de 120 000 euros hors-taxes par an assortie d'une clause de révision annuelle et une partie variable correspondant à 0,30 euros hors-taxes par tonne de matériaux commercialisés, assortie elle-même d'une révision annuelle outre le versement d'une redevance minimale d'un million de tonnes ; que les consorts [K] n'établissent pas que la redevance ainsi fixée ne serait pas conforme à la valeur des biens donnés à bail ; que la convention de fortage était en outre de nature à générer au profit de la société FINANCIERE VH. une redevance de l'ordre de 300 000 euros minimum par an ; que par ailleurs, les bénéfices très substantiels générés par l'activité d'exploitation valorisaient la participation détenue par FINANCIERE VH. dans la sous-filiale, une politique de distribution de dividendes permettant en définitive à la société mère et à la société VH HOLDING de tirer les bénéfices de l'activité d'exploitation ; que s'il est exact que l'opération engagée en décembre 2001 avait pour objet la recherche d'un partenariat et donc, à terme, l'ouverture du capital de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE à des tiers au groupe familial, la prise de participation par le groupe LAFARGE survenue en 2007, outre qu'il n'est pas démontré ni même véritablement soutenu qu'elle ait présenté un caractère contraire à l'intérêt de la société FINANCIERE VH., ne résultait pas de plein droit des délibérations du 28 décembre 2001 ; que par ailleurs, l'opération critiquée n'implique aucune altération de l'objet social de la société VH HOLDING ou de la société FINANCIERE VH. ; que s'agissant de la société VH HOLDING, son objet est statutairement défini comme relatif « à la détention majoritaire d'actions de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ... » depuis lors devenue société FINANCIERE VH. ; que force est de constater qu'au terme de l'opération critiquée par les appelants, la société VH HOLDING détient 67,78 % de la société FINANCIERE VH. même si cette société ne constitue plus une société d'exploitation ; que s'agissant de la société FINANCIERE VH., son objet social est statutairement défini de façon très large comme englobant « toute opération commerciale, industrielles et financières qui comportent la mise en valeur et l'exploitation de carrières en France et à l'étranger, l'acquisition, la création, l'exploitation ou la revente de toute usine de toutes voies de communication destinées à favoriser l'exploitation des carrières et en utiliser les produits, l'acquisition et la revente de tout-terrain, la participation à toute affaire similaire (...) Toute prise de participation par voie d'apport ou de rachat dans toute société commerciale ou industrielle ayant un rapport avec les activités de travaux publics, du bâtiment du génie civil et plus généralement toutes les opérations qui sont compatibles avec cet objet.... » ; qu'au regard de l'objet social ainsi largement défini, la transformation de la société d'exploitation directe CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE en société détenant une participation majoritaire dans la société d'exploitation et propriétaire en outre des actifs immobiliers qu'elle lui donne à bail et qui génèrent à son profit les redevances prévues par la convention de fortage, apparaît conforme à cet objet ;

Que dans ces conditions, les consorts [K] n'établissent pas que l'opération contestée par eux soit contraire à l'intérêt ou à l'objet social de la société FINANCIERE VH. pas plus d'ailleurs qu'à l'intérêt ou à l'objet social de la société VH HOLDING dont les intimés observent à juste titre qu'elle a perçu en 2006 67,53 % des 5 948 670 euros versés à titre de dividendes par la société FINANCIERE VH. et, en mai 2007, la même proportion de 14 642 880 euros complétés en septembre 2007 par une somme de 6 863 850 euros ; que les consorts [K] ne démontrent pas plus, en outre, que l'opération aurait été préjudiciable aux droits des actionnaires minoritaires dès lors que la société VH HOLDING, ayant bénéficié de cette distribution de dividendes, en a assuré la redistribution auprès de ses associés, dont les associés du groupe B., sous forme d'acomptes ; qu'en conséquence, l'abus de majorité n'est pas démontré ;

Attendu que les consorts [K] soutiennent qu'il aurait été porté atteinte à leurs droits d'information et de consultation ; que toutefois, ils ne sauraient utilement se prévaloir des dispositions des articles R236 -1 et suivants du Code de commerce qui prévoient des modalités d'informations spécifiques pour les opérations relevant du régime des fusions prévues par l'article L236 - 1 de ce même Code ; qu'en effet, en l'espèce, l'opération d'apport par la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE à la société STARDOUZE ne portait pas sur l'intégralité de son patrimoine, seul visé par les dispositions ci-dessus rappelées, dès lors qu'elle conservait ses actifs immobiliers dont une partie était donné à bail à la nouvelle société ; qu'au surplus, à supposer qu'un tel régime ait été applicable, la nullité des délibérations critiquées n'aurait pu être retenue compte tenu des dispositions de l'article L 235-1 du Code de commerce ci-dessus rappelées alors que le régime d'information spécifique qui y est attaché présente un caractère réglementaire ;

Qu'ils ne sauraient non plus soutenir que le conseil de surveillance de la société VH HOLDING aurait dû être consulté pas plus qu'ils ne sauraient prétendre que l'assemblée générale extraordinaire de cette société aurait dû délibérer sur le sens du vote qui devait être fait par les gérants lors de l'assemblée générale extraordinaire de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ; qu'en effet, d'une part, le conseil de surveillance, qui n'a qu'un pouvoir de contrôle de la gestion de la société, n'avait pas à donner au gérant d'autorisation préalablement au vote et, d'autre part, les gérants commandités, personnellement et indéfiniment responsables, s'ils devaient en application des articles 7 et 17 des statuts se réunir pour décider ensemble du sens du vote, avaient tout pouvoir pour agir au nom de la société et pour voter au nom de celle-ci lors des assemblées générales de la société FINANCIERE VH. ; que, par ailleurs, comme il a été relevé plus haut, l'opération d'apport sur laquelle devait se prononcer l'assemblée générale extraordinaire de la société FINANCIERE VH. n'affectait pas l'objet social de la société VH HOLDING et n'avait donc pas à être soumis à une délibération de l'assemblée générale extraordinaire de celle-ci ;

Attendu que les consorts [K] soutiennent encore que, dans le cadre de la société FINANCIERE VH., leur droit à l'information aurait été méconnu ; que la cour observe toutefois, comme le premier juge, que, en même temps que leur était remise la convocation à l'assemblée générale extraordinaire qui devait statuer sur l'opération d'apport, ont été mis à leur disposition les projets de résolution, le rapport de gestion du directoire, le tableau des résultats financiers outre un formulaire de vote par correspondance ou par procuration et une formule de demande d'envoi de documents ; que par ailleurs, le traité d'apport et le rapport du commissaire aux apports avaient été déposés au greffe du tribunal de commerce de Calais ; qu'ainsi, le moyen soulevé à ce titre par les consorts [K] ne peut qu'être écarté étant par ailleurs observé que, pas plus que dans la société VH HOLDING, le conseil de surveillance de la société FINANCIERE VH. ne pouvait être investi d'un pouvoir d'autorisation préalable de l'opération envisagée ;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces observations que la demande d'annulation des délibérations de l'assemblée générale présentée par les consorts [K] ne peut être accueillie par la cour ; que le jugement déféré sera donc confirmé à ce titre ; que la cour note en outre que la délibération du 28 décembre 2001 autorisant l'opération d'apport a fait l'objet d'une ratification, le 22 juin 2010 par l'assemblée générale mixte de la société FINANCIERE VH ; que le rejet de la demande d'annulation de ces délibérations rend sans objet les demandes d'annulation du traité d'apport, du bail emphytéotique et de la cession d'actions présentées par les consorts [K] comme étant la conséquence nécessaire de l'annulation des délibérations ainsi écartée ;

Sur la recevabilité de l'intervention forcée des sociétés CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE et COTE D OPALE GRANULATS;

Attendu que la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE n'a été appelée à la cause que par acte du 1er septembre 2010 alors même qu'elle était directement concernée par la procédure introduite le 21 février 2002 par les consorts [K] qui, après avoir limité leur assignation aux sociétés VH HOLDING et FINANCIERE VH., demandaient toutefois l'annulation de la délibération du 28 décembre 2001 qui avait approuvé l'opération d'apport au profit de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ; que l'évolution du litige qui implique et justifie la mise à cause d'un tiers devant la cour n'est caractérisée que par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit née du jugement ou postérieure à celui-ci modifiant les données juridiques du litige ; qu'en l'espèce, la prise de participation du groupe LAFARGE réalisée en janvier 2007 par la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE ne peut être considérée comme une évolution caractéristique du litige au regard de la stricte nécessité de mettre en cause cette société puisque, aussi bien, l'opération d'apport à laquelle elle avait été partie impliquait nécessairement sa mise en cause préalablement au jugement ; que la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE est donc fondée à soutenir que sa mise en cause, à caractère tardif, devant la cour, est irrecevable ;

Attendu en revanche que la société COTE D OPALE GRANULATS n'est pas fondée à soutenir que sa mise en cause opérée pour la première fois devant la cour, par assignation des consorts [K] du 5 décembre 2007 serait irrecevable ; qu'en effet, c'est le 12 janvier 2007, soit postérieurement au jugement déféré, que la société LAFARGE GRANULATS ARMORIQUE devenue ultérieurement COTE D OPALE GRANULATS a acquis dans la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE une participation de 46,67 % auprès de la société FINANCIERE VH. ; que cette circonstance de fait caractérise en effet une évolution du litige au sens de l'article 555 du Code de procédure civile ; que la fin de non recevoir soulevée à ce titre doit être écartée ;

Sur la demande de révocation de M. [D] [K] en sa qualité de gérant commandité de la société VH HOLDING ;

Attendu que la société VH HOLDING a été constituée pour une durée de 18 ans à compter du 7 mai 1991 date de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés ; que le 5 mai 2009, l'assemblée générale mixte de la société a constaté la dissolution de celle-ci au 7 mai 2009 ainsi que la fin des mandats des gérants commandités, [O] et [D] [K], la société relevant à compter de cette date du régime de la liquidation amiable et M. [O] [K] étant désigné en qualité de liquidateur ; qu'il en résulte que, M. [D] [K] n'étant plus gérant commandité de la société VH HOLDING depuis le 7 mai 2009, la demande des consorts [K] relative à sa révocation est désormais dépourvue de tout objet et présente de ce fait, faute d'intérêt à agir en ce sens, un caractère irrecevable ;

Attendu qu'il serait inéquitable que la société VH HOLDING, la société FINANCIERE VH. et M. [D] [K] conservent à leur charge le montant des frais irrépétibles engagés pour les besoins de la présente instance ; que les consorts [K] seront condamnés à leur payer la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'il n'apparaît pas en revanche inéquitable que les sociétés CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE conservent la charge de ces mêmes frais; que leurs demandes présentées à ce titre seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement par arrêt mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de révocation de M [D] [K],

Déclare irrecevable la mise en cause de la société CARRIERES DE LA VALLEE HEUREUSE

Rejette toutes autres demandes,

Condamne les consorts [K] à payer à la société VH HOLDING, la société FINANCIERE VH. et M. [D] [K] la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne les consorts [K] aux dépens qui pourront être recouvrés directement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

F. RIGOTChristine PARENTY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 10/02255
Date de la décision : 22/03/2012

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°10/02255 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-22;10.02255 ?
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