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19/01/2012 | FRANCE | N°11/00998

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 19 janvier 2012, 11/00998


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 19/01/2012

***

N° MINUTE :

N° RG : 11/00998

Jugement (N° 08/01224)

rendu le 16 Décembre 2010

par le Tribunal de Grande Instance de CAMBRAI

REF : HB/VC

APPELANTS



Monsieur [R] [H]

né le [Date naissance 4] 1966 à [Localité 6]

demeurant : [Adresse 2]

Représenté par Me Philippe Georges QUIGNON, avoué à la Cour



Madame [N] [M] épouse [H]

©e le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 6]

demeurant : [Adresse 2]

Représentée par Me Philippe Georges QUIGNON, avoué à la Cour



INTIMÉES



CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL agissant par son re...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 19/01/2012

***

N° MINUTE :

N° RG : 11/00998

Jugement (N° 08/01224)

rendu le 16 Décembre 2010

par le Tribunal de Grande Instance de CAMBRAI

REF : HB/VC

APPELANTS

Monsieur [R] [H]

né le [Date naissance 4] 1966 à [Localité 6]

demeurant : [Adresse 2]

Représenté par Me Philippe Georges QUIGNON, avoué à la Cour

Madame [N] [M] épouse [H]

née le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 6]

demeurant : [Adresse 2]

Représentée par Me Philippe Georges QUIGNON, avoué à la Cour

INTIMÉES

CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL agissant par son représentant légal domicilié es-qualité audit siège.

ayant son siège social : [Adresse 3]

Représentée par la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assistée de la ASS DE BERNY & FOLLET, avocats au barreau de LILLE,

CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE agissant par son représentant légal domicilié es-qualité audit siège.

ayant son siège social : [Adresse 5]

Représentée par la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assistée de la ASS DE BERNY & FOLLET, avocats au barreau de LILLE,

DÉBATS à l'audience publique du 02 Novembre 2011 tenue par Hélène BILLIERES magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre CHARBONNIER, Président de chambre

Benoît PETY, Conseiller

Hélène BILLIERES, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2012 , après prorogation du délibéré du 12 janvier 2012 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

La CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI a, par acte sous seing privé du 9 février 2001, consenti à l'EURL ESCAUTRANS, dirigée par Monsieur [R] [H], une ouverture de crédit à durée indéterminée destinée à assurer les besoins courants de trésorerie de l'entreprise d'un montant de 100 000 francs, soit 15 244,90 euros, au taux nominal de 8 %, renouvelée par courrier du 18 octobre 2002 pour un montant de 15 000 euros.

Suivant actes des 14 mars 2001 et 14 octobre 2003, Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, se sont portés cautions solidaires de ces engagements dans la limite d'un montant de 120 000 francs, soit 18 293,88 euros, pour le premier et de 22 500 euros pour le second, couvrant le paiement du principal des obligations garanties ainsi que tous intérêts, commissions, frais et accessoires.

Les 20 septembre et 20 décembre 2005, la banque a en outre accordé à l'EURL ESCAUTRANS, sous le cautionnement solidaire des époux [H], deux prêts, le premier d'un montant de 124 200 euros destiné notamment au financement de containers à volaille et d'un chariot MOFFETT, remboursable en 36 mensualités de 3 639,32 euros chacune, incluant des intérêts au taux nominal de 3,5 % l'an, et le second, d'un montant de 33 000 euros, destiné au financement d'un semi-frigo d'occasion, remboursable par 48 mensualités de 742,16 euros chacune, incluant des intérêts au taux nominal de 3,80 %.

Par actes des 25 avril et 26 juillet 2006, la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE s'est par ailleurs portée caution solidaire de la société ESCAUTRANS au profit de l'un de ses fournisseurs, la société DMS, à concurrence de la somme globale de 50 000 euros, Monsieur et Madame [H] donnant à l'opération leur caution solidaire à hauteur de 39 600 euros pendant dix ans.

À la suite du placement en redressement judiciaire de la société ESCAUTRANS par jugement du 29 octobre 2007 du tribunal de commerce de Cambrai, procédure qui a abouti à l'adoption d'un plan de continuation le 20 octobre 2008, la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE s'est acquittée de ses engagements envers la société DMS puis s'est retournée contre Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, en leur demandant paiement de la somme qu'elle a versée à la société DMS.

Après avoir déclaré auprès de Maître [W], représentant des créanciers, sa créance et mis les cautions en demeure d'honorer leurs engagements, la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI, à laquelle s'est jointe la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE, a saisi le tribunal de grande instance de Cambrai qui, par jugement contradictoire du 16 décembre 2010, a solidairement condamné Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, à payer à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI :

la somme de 53 336,74 euros assortie de l'intérêt conventionnel au taux de 3,50 % entre le 25 juillet 2007 et le 4 décembre 2007, et au taux majoré conventionnel de 8,50 % ensuite, au titre du prêt de 124.200 euros ;

la somme de 21 207,89 euros assortie de l'intérêt conventionnel au taux de 3,80 % entre le 25 juillet 2007 et le 4 décembre 2007, et au taux majoré conventionnel de 8,80 % ensuite, au titre du prêt de 33.000 euros ;

la somme de 44 793,88 euros assortie des intérêts au taux de 8 % l'an à compter de la mise en demeure du 4 décembre 2007 au titre du solde du compte courant.

Il les a par ailleurs condamnés solidairement à payer à la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE la somme de 39 600 euros au titre du cautionnement de la garantie bancaire, assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 décembre 2007.

Le tribunal de grande instance de Cambrai a en outre ordonné la capitalisation des intérêts échus pour une année entière et condamné solidairement Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, à payer à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI et à la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE la somme globale de 450 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, ont relevé appel de ce jugement le 9 février 2011.

S'agissant de la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI, ils demandent à la cour de déchoir la banque du droit de se prévaloir de leurs engagements de caution au visa de l'article L. 341-4 du code de la consommation, subsidiairement, de constater l'absence d'exigibilité de la créance réclamée au titre du solde du compte courant, très subsidiairement, de déchoir la banque du droit au paiement des pénalités et intérêts de retard au visa de l'article L.341-1 du code de la consommation et enfin, à titre infiniment subsidiaire, de substituer au taux d'intérêt contractuel le taux légal, la banque devant être renvoyée à recalculer sa créance en réintégrant les intérêts pratiqués par elle et en appliquant le seul intérêt légal.

S'agissant de la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE, Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, exposent, qu'en l'absence de déclaration de créance régulière à l'égard du débiteur principal, la banque leur a fait perdre le bénéfice de leur subrogation et ne peut donc les rechercher en leur qualité de cautions. Ils concluent en conséquence au rejet de ses demandes.

Ils sollicitent en tout état de cause la condamnation de la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI et de la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI et la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE concluent à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation solidaire de Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

I.. Sur les demandes en paiement présentées par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI

A. Sur le moyen tiré de la disproportion des engagements de caution

Attendu que les appelants soutiennent, au visa de l'article L. 341-4 du code de la consommation que leurs engagements de caution étaient hors de proportion avec leurs facultés financières ;

Mais attendu que l'article L. 341-4 du code de la consommation étant issu de la loi n°2003-721 du 1er août 2003 entrée en vigueur le 6 février 2004, ses dispositions ne sont pas applicables aux cautionnements souscrits par Monsieur et Madame [H] les 14 mars 2001 et 14 octobre 2003 ;

Qu'il convient toutefois de leur appliquer le régime issu de la jurisprudence antérieure ;

Qu'il apparaît à cet égard que Monsieur [R] [H] les a souscrit alors qu'il était le gérant de l'EURL ESCAUTRANS ; qu'il est en conséquence présumé être une caution avertie disposant d'un degré de connaissance suffisant sur la situation de la société cautionnée ;

Qu'il lui appartient donc de prouver que la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI disposait de connaissances sur ses charges, ressources et facultés de remboursement raisonnablement prévisibles que lui-même ignorait ;

Qu'à défaut pour Monsieur [R] [H] de faire cette démonstration, la cour ne peut reconnaître la disproportion des engagements de caution consentis les 14 mars 2001 et 14 octobre 2003 ;

Que s'agissant de Madame [N] [M], épouse [H], elle n'était ni dirigeante ni associée de l'entreprise cautionnée ; qu'il n'est par ailleurs pas démontré ni même prétendu qu'elle ait exercé une fonction quelconque dans l'entreprise de sorte qu'elle doit, au contraire, être considérée comme une caution profane et non avertie à l'égard de laquelle la banque était tenue de s'assurer que ses engagements étaient proportionnés à ses capacités financières ;

Que si la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI ne justifie certes pas s'être informée, préalablement à la signature des actes de cautionnement des 14 mars 2001 et 14 octobre 2003, des revenus, patrimoine et charges de Madame [H], il appartient toutefois aux appelants de rapporter la preuve de la disproportion manifeste entre l'engagement de l'épouse, caution profane, et ses ressources et son patrimoine ;

Que force est de constater à cet égard que les époux [H] se contentent d'invoquer la charge d'un enfant commun et de verser aux débats la copie de quatre contrats de prêts souscrits par eux les 15 novembre 1997, 6 février 2003 et 11 juillet 2003 ;

Qu'en l'absence d'informations sur le montant de leurs ressources et sur la consistance de leur patrimoine lors de leur souscription, la cour ne peut davantage retenir que les engagements de caution souscrits les 14 mars 2001 et 14 octobre 2003 par Madame [H] étaient disproportionnés à ses ressources et patrimoine ;

Attendu en revanche que l'article L. 341-4 du code de la consommation qui prévoit que le créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution au moment où celle-ci est appelée ne lui permette de faire face à son obligation, est applicable aux engagements de caution souscrits par les époux [H] les 20 septembre 2005 et 20 décembre 2005 ;

Que la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI produit aux débats une fiche de renseignements non signée, ni datée, relative à la situation patrimoniale des cautions, manifestement établie à l'occasion de l'examen du crédit d'investissement de 124 200 euros souscrit le 20 septembre 2005 ;

Que Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, ne contestent pas les éléments d'informations y figurant ;

Qu'il apparaît à la lecture de ce document que le couple percevait des ressources mensuelles de l'ordre de 8 880 euros et faisait face à des charges de remboursement d'emprunts à hauteur de 3 705 euros par mois ; qu'il y était également indiqué que le couple disposait d'un patrimoine immobilier d'une valeur de 305 000 euros, outre qu'il détenait des parts dans les sociétés ESCAUVRAC et ESCAUTRANS ;

Que si aucune précision n'est apportée concernant la première de ces sociétés, il apparaît que lorsqu'il s'est engagé, Monsieur [R] [H] était l'associé unique de la société ESCAUTRANS ;

Que l'examen des comptes sociaux édités le 24 août 2005 fait apparaître que cette société, spécialisée dans le transport régional et national de marchandises et employant 14 salariés, réalisait un chiffre d'affaires annuel de l'ordre de 1 300 000 euros et avait généré un résultat net de 44.051 euros au 30 juin 2001, 40 770 euros au 30 juin 2002 et 49 771 euros au 30 juin 2003 ;

Qu'au regard des éléments du patrimoine de Monsieur et Madame [H], l'établissement bancaire a ainsi pu légitimement considérer que les engagements de caution successivement souscrits par les époux [H], dans la limite totale de 204 593,88 euros, n'étaient pas manifestement disproportionnés aux capacités financières de ces derniers ;

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté les époux Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, de leur demande de décharge de leurs engagements de caution ;

B. Sur le moyen tiré du défaut d'exigibilité des sommes dues au titre de l'ouverture sur compte courant :

Attendu que les appelants soutiennent que la somme réclamée par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI au titre du solde débiteur du compte courant de la société cautionnée, n'étant pas exigible à l'égard de la débitrice principale, ne saurait l'être à leur égard, en raison du caractère accessoire du cautionnement ; qu'ils soulignent que le compte courant n'a pas été clôturé et que ni l'ouverture de la procédure collective ni le plan de continuation n'ont eu pour effet de rendre cette somme exigible ;

Que la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI conclut en réplique à l'irrecevabilité de ce moyen de défense, résultant de l'autorité de la chose jugée attachée à la décision d'admission des créances de la banque par le juge-commissaire à la procédure collective de l'EURL ESCAUTRANS ;

Attendu que ce qui a été définitivement jugé entre le créancier et le débiteur principal s'impose à la caution solidaire qui n'est plus recevable à contester l'existence, le montant et l'exigibilité de la dette telle que résultant de la décision de justice ; qu'ainsi, l'autorité de chose jugée qui s'attache à la décision définitive d'admission de la créance au passif du débiteur principal en redressement ou liquidation judiciaire ne permet plus à la caution solidaire de contester la validité de la déclaration de créance ni d'opposer au créancier les exceptions inhérentes à la dette ;

Qu'il résulte en l'espèce des pièces régulièrement produites par les parties que les créances de la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI afférentes aux deux prêts litigieux et au solde débiteur du compte courant dont la société cautionnée était titulaire ont été admises, à titre chirographaire, pour leur montant déclaré, en vertu d'une ordonnance du juge-commissaire à la procédure collective de l'EURL ESCAUTRANS en date du 21 novembre 2008 ;

Que Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, n'allèguent pas avoir saisi, dans le délai de quinze jours à compter de la publication de l'avis de dépôt de l'état de créances au BODACC, le juge commissaire d'une réclamation à l'encontre de l'admission des créances de la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI ; qu'il ne justifient pas davantage d'une contestation de l'EURL ESCAUTRANS dans le délai requis ;

Que faute de réclamation élevée par la débitrice principale ou les cautions dans le délai requis, l'autorité de la chose jugée attachée à la décision d'admission s'impose donc aux époux [H] qui ne peuvent ainsi plus contester l'existence de la créance dans son principe ;

Qu'il s'ensuit que la contestation soulevée par Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, quant à l'exigibilité de la dette au titre du solde débiteur du compte courant de la société ESCAUTRANS, est irrecevable et que la somme réclamée par la banque à ce titre est bien exigible à l'égard des cautions solidaires ;

Que c'est dès lors à juste titre que le premier juge a déclaré la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI fondée à se prévaloir des deux actes de cautionnement souscrits les 14 mars 2001 et 14 octobre 2003 par les époux [H] en garantie du paiement du solde débiteur du compte courant de la société ESCAUTRANS ;

C. Sur le moyen tiré du manquement de la banque à l'obligation d'information de la caution de la défaillance du débiteur principal

Attendu que Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, font valoir que la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI ne les aurait pas informés de la défaillance de la société débitrice principale dès le premier incident de paiement non régularisé des prêts cautionnés ; qu'ils sollicitent en conséquence la perte, pour la banque, des pénalités et intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle ils ont été informés ;

Que la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI soutient au contraire avoir informés annuellement les cautions et les avoir prévenues dès le premier incident de paiement, notamment par lettres recommandées avec avis de réception du 4 décembre 2007 ;

Attendu qu'aux termes de l'article L. 341-1 du code de la consommation, sans préjudice des dispositions particulières, toute personne physique qui s'est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement ; que si le créancier ne se conforme pas à cette obligation, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retards échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée ;

Attendu que le moyen de défense articulé par Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, est recevable dès lors qu'il constitue une exception personnelle de la caution, et non inhérente aux créances cautionnées ;

Qu'en ce qui concerne les prêts de 124 200 euros et de 33 000 euros, il se déduit de l'examen comparatif des tableaux d'amortissement, des relevés des échéances en retard et de la déclaration de créance du 4 décembre 2007 que le premier incident de paiement de l'EURL ESCAUTRANS non régularisé a concerné la 23ème mensualité pour le premier, et la 20ème mensualité pour les second, soit les échéances du 25 juillet 2007 pour les deux contrats ;

Que la seule correspondance adressée par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI à Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, et produite par la banque est la mise en demeure du 4 décembre 2007 reçue par ces derniers le 6 décembre suivant ;

Qu'il est ainsi établi que la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI a manqué envers les époux [H], cautions, à son obligation d'information de la défaillance de la débitrice principale et que c'est en conséquence à juste titre que le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux pénalités et intérêts de retard échus entre le 25 juillet et le 4 décembre 2007 ;

D. Sur le moyen tiré de l'inexactitude du taux effectif global appliqué au compte courant et aux prêts

Attendu que Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, font valoir d'une part que la banque n'établit pas avoir informé son contractant du taux effectif global appliqué au compte courant et d'autre part que le taux effectif global des prêts de 124 200 euros et 33 000 euros est inexact dès lors qu'il n'intègre pas les frais inhérents à l'information de la caution ; qu'ils se prévalent en conséquence de la nullité de la clause d'intérêt conventionnel pour solliciter la substitution du taux légal d'intérêt au taux contractuel ;

Mais attendu que pour les motifs qui précèdent (I.B), ce moyen de défense, qui constitue une exception inhérente aux créances cautionnées et non une exception personnelle de la caution, doit être déclaré irrecevable en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à la décision d'admission des créances de la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI par le juge commissaire à la procédure collective de l'EURL ESCAUTRANS ;

Que c'est donc à juste titre que le premier juge l'a écarté et a solidairement condamné Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, à payer à la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI les sommes de :

53 336,74 euros assortie de l'intérêt conventionnel au taux de

3,50 % entre le 25 juillet 2007 et le 4 décembre 2007, et au taux majoré conventionnel de 8,50 % ensuite, au titre du prêt de 124 200 euros ;

21 207,89 euros assortie de l'intérêt conventionnel au taux de

3,80 % entre le 25 juillet 2007 et le 4 décembre 2007, et au taux majoré conventionnel de 8,80 % ensuite, au titre du prêt de 33 000 euros ;

44 793,88 euros assortie des intérêts au taux de 8 % l'an à compter de la mise en demeure du 4 décembre 2007 au titre du solde du compte courant, compte tenu de la limitation de la garantie des époux [H] ;

Que le jugement sera en outre confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

II. Sur les demandes en paiement présentées par la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE

Attendu que Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, soutiennent que la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE ne justifie pas avoir déclaré sa créance à la procédure collective de l'EURL ESCAUTRANS et que ce défaut de déclaration de la créance leur a fait perdre le bénéfice de la subrogation, ce qui justifie qu'ils soient déchargés de leur obligation en application de l'article 2314 du code civil ;

Que la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE expose qu'elle figure au passif de l'EURL ESCAUTRANS en qualité de subrogée dans les droits de la société DMS-TCA MORY et que sa créance a été admise à hauteur de 50 000 euros pour avoir payé son cautionnement ; qu'elle fait valoir avoir d'ailleurs reçu un premier dividende en vertu de cette admission ;

Attendu que la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE justifie avoir réglé, postérieurement à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société ESCAUTRANS, la dette de cette dernière à l'égard de la société DMS dans la limite de son engagement de caution ;

Qu'elle établit en cause d'appel que la société DMS a elle-même, avant paiement, déclaré sa créance ;

Mais attendu que si, par l'effet de ce paiement et de cette déclaration, la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI, caution, se trouve certes subrogée dans les droits de la société DMS, créancière, contre l'EURL ESCAUTRANS, débiteur principal, sans être tenue de déclarer elle-même sa créance subrogatoire, elle ne peut en revanche, si elle n'a pas déclaré sa créance personnelle, agir contre Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, sous-cautions ;

Qu'à défaut de déclaration de sa propre créance par la caution dans la procédure collective du débiteur principal, cette créance est en effet éteinte à l'égard des sous-cautions qui garantissent, non la créance du créancier à l'égard du débiteur principal, mais celle de la caution à l'égard de ce créancier, lequel, n'étant titulaire d'aucun droit à l'égard des sous-cautions, ne peut pas en transmettre le bénéfice par l'effet de la subrogation ;

Qu'il en résulte que la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE n'est pas fondée à réclamer aux époux [H] le paiement des sommes dues par son débiteur ;

Que le jugement sera en conséquence infirmé de ce chef ;

Attendu qu'il apparaît équitable de mettre à la charge de Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, au titre des frais exposés en première instance et en cause d'appel par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI, la somme de 700 euros ;

Qu'il parait en outre équitable de faire supporter par la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE les frais non taxables de la procédure exposés par les époux [H] à concurrence de la somme de 250 euros ;

PAR CES MOTIFS ;

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, à l'exception de celles relatives à la créance de la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE et à l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

Déboute la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE de sa demande en paiement contre Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse ;

Condamne Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, au titre de l'ensemble des frais non répétibles exposés par la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE CAMBRAI en première instance puis en appel, au paiement de la somme de 700 euros ;

Condamne la CAISSE FÉDÉRALE DE CRÉDIT MUTUEL NORD EUROPE à payer à Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, la somme de 250 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [R] [H] et Madame [N] [M], son épouse, aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit que ces derniers seront recouvrés par la S.C.P. LEVASSEUR CASTILLE avoués, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONSP. CHARBONNIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 11/00998
Date de la décision : 19/01/2012

Références :

Cour d'appel de Douai 81, arrêt n°11/00998 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-19;11.00998 ?
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