République Française Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 7 SECTION 2 ARRÊT DU 30/ 06/ 2011
*** No MINUTE : No RG : 10/ 07759 Jugement (No 10/ 05252) rendu le 20 Octobre 2010 par le Juge aux affaires familiales de LILLE
REF : CA/ LL
APPELANTS Monsieur André X...né le 31 Janvier 1962 à THUMERIES (59239) demeurant ...
représenté par Me QUIGNON, avoué à la Cour assisté de Me Jean-pierre COLPAERT, avocat au barreau de BETHUNE
Madame Valérie E...épouse X...née le 02 Février 1968 à HENIN LIETARD (62110) demeurant ...
représentée par Me QUIGNON, avoué à la Cour assistée de Me Jean-pierre COLPAERT, avocat au barreau de BETHUNE
INTIMÉS CENTRE HOSPITALIER DE SECLIN agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Centre hospitalier BP 109 59471 SECLIN CEDEX
représentée par la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués à la Cour
Monsieur François X...demeurant ...
Assigné le 17 janvier 2011 à sa personne, n'ayant pas constitué avoué
Monsieur Pierre A...demeurant ...
Assigné et réassigné à l'étude les 27 janvier et 17 mars 2011, n'ayant pas constitué avoué
Madame Liliane X...épouse A...demeurant ...
Assignée et réassignée à l'étude les 27 janvier et 17 mars 2011, n'ayant pas constitué avoué
Monsieur Arnaud B...demeurant ...
Assigné à domicile le 27 janvier 2011, n'ayant pas constitué avoué
Madame Françoise X...épouse B...demeurant ...
Assignée à personne le 27 janvier 2011, n'ayant pas constitué avoué
DÉBATS à l'audience en chambre du Conseil du 26 Mai 2011, tenue par Cécile ANDRE magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Karima HACHID
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ Patrick BIROLLEAU, Président de chambre Hervé ANSSENS, Conseiller Cécile ANDRE, Conseiller
ARRÊT RENDU PAR DÉFAUT prononcé, en Chambre du Conseil, par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011, (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Patrick BIROLLEAU, Président et Christine COMMANS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Le 18 juin 2009, Madame MichelineF... épouse X...a été admise à l'unité de soins de longue durée du Centre Hospitalier de SECLIN.
Par requête enregistrée le 15 juin 2010, les ressources de Madame Micheline X...ne lui permettant pas de faire face à ses frais d'hébergement, le Centre Hospitalier de LESQUIN a saisi le Juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de LILLE sur le fondement de l'article L 6145-11 du Code de la santé publique pour que soit fixée l'obligation alimentaire de son époux François X..., et de ses descendants et de leurs conjoints, Pierre A..., Liliane X...épouse A..., Arnaud B..., Françoise X...épouse B..., André X...et Valérie E...épouse X....
Par jugement du 20 octobre 2010, le Juge aux affaires familiales de LILLE a fixé la contribution alimentaire de chacun des débiteurs d'aliments selon les modalités suivantes :
- François X...: 400 Euros par mois avec indexation-Pierre A...: 85 Euros par mois avec indexation-Liliane X...épouse A...: 30 Euros par mois avec indexation-Arnaud B...: 75 Euros par mois avec indexation-Françoise X...épouse B...: 75 Euros par mois avec indexation-André X...: 190 Euros par mois avec indexation-Valérie E...épouse X...: 10 Euros par mois avec indexation
Les défendeurs ont été condamnés aux dépens.
Monsieur André X...et son épouse Madame Valérie E...ont formé appel de cette décision le 8 novembre 2010 et par leurs dernières conclusions signifiées le 20 mai 2011, ils demandent à la Cour, par réformation :- de réduire à la somme de 40 Euros par mois la participation de Monsieur André X...aux frais de séjour de Madame F... épouse X...ou à défaut de la réduire dans de très larges proportions-de confirmer la participation de Madame Valérie E...fixée à la somme de 10 Euros par mois ;- de condamner le Centre Hospitalier de LESQUIN aux dépens d'appel.
Ils font valoir que le premier juge n'a pas tenu compte de l'importance de leurs charges, et notamment des dépenses d'appareillage auditif de Madame Valérie E..., au regard des salaires dont dispose le foyer, incluant deux enfants scolarisés.
Par ailleurs, s'agissant de l'appel incident du Centre Hospitalier de SECLIN portant sur la rétroactivité de la demande d'obligation alimentaire, ils observent qu'il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel laquelle est donc irrecevable ; que subsidiairement cette demande n'a été formée que le 9 juin 2010, ce dont il ressort que le point de départ de leurs obligations alimentaires ne saurait être antérieur à cette date.
Par ses dernières conclusions signifiées le 25 mai 2011, le Centre Hospitalier de LESQUIN, formant appel incident, demande à la Cour de condamner Monsieur François X...ainsi que les enfants de Madame MichelineF... épouse X...à payer la contribution alimentaire telle que fixée par le jugement entrepris à compter du jour de son hospitalisation soit le 18 juin 2009.
Il demande à la Cour de lui donner acte de ce qu'il s'en rapporte à justice sur l'appel des époux E...-X...et sollicite leur condamnation aux dépens d'appel.
L'intimé expose que le conseil Général du département du Nord a initialement notifié un refus d'aide sociale au bénéfice de Madame F... épouse X..., mais qu'à la suite du jugement entrepris, il a accepté de modifier sa position et de prendre en charge ses frais d'hébergement à la condition expresse que les obligations alimentaires fixées par le premier juge soient payées par chacun d'eux à compter de la date d'entrée en établissement de la créancière d'aliments, soit le 18 juin 2009 ; que cette condition est très favorable aux débiteurs d'aliments en ce qu'elle apurerait en partie la dette de Madame F... épouse X...à son égard, d'un montant de plus de 30. 000 Euros.
Il précise qu'il ne s'agit pas d'une demande nouvelle mais d'une demande complémentaire ou accessoire à la demande principale de contribution alimentaire.
Enfin, quant à l'application de la règle " aliments ne s'arréragent pas ", il fait valoir qu'il a opéré toutes diligences pour obtenir le règlement de sa créance, l'instruction de la demande d'aide sociale ayant duré un an, délai pendant lequel il a informé chaque obligé alimentaire de ses devoirs alimentaires envers la créancière d'aliments ; que dans l'attente de l'instruction du dossier d'aide sociale, il ne peut engager d'exécution forcée.
Assigné à personne 17 janvier 2011, Monsieur François X...n'a pas constitué avoué.
Assignés et réassignés à l'Etude les 27 janvier et 17 mars 2011, Pierre A...et Liliane X...épouse A...n'ont pas constitué avoué.
Assignés respectivement à domicile et à personne le 27 janvier 2011, Arnaud B...et Françoise X...épouse B...n'ont pas constitué avoué.
SUR CE
Attendu que ne sont pas contestées les dispositions du jugement autres celles relatives à la contribution alimentaire mise à la charge de Monsieur André X..., et à la date de prise d'effet de la contribution alimentaire de chacun des débiteurs ; qu'il convient donc de les confirmer purement et simplement ;
Attendu que si, selon l'article L. 6145-11 du Code de la santé publique, les établissements publics de santé disposent, par voie d'action directe, d'un recours contre les débiteurs des personnes hospitalisées et, spécialement, contre leurs débiteurs alimentaires, ce recours est à la mesure de ce dont ces débiteurs sont redevables ;
Attendu que l'état de besoin de Madame MichelineF... épouse X...n'est pas contesté par les appelants ; qu'il résulte des pièces versées aux débats par le Centre Hospitalier de SECLIN qu'elle dispose en effet de ressources mensuelles moyennes de 305 Euros, alors que les frais de son hébergement au Centre Hospitalier de SECLIN sont de 1. 833 Euros par mois ;
Attendu que le bénéfice de l'Aide Sociale a été refusée à Madame F... épouse X...par décision du Conseil Général du 27 juillet 2010 ;
Attendu que Monsieur André X...est salarié de la SA AGFA et a perçu des salaires imposables cumulés de 27. 559 Euros en 2010 selon son dernier bulletin de paie de l'année, niveau de revenu que confirme son avis d'impôt sur le revenu 2010 ; que son revenu mensuel moyen s'établit donc à 2. 296 Euros ;
Attendu que Madame Valérie E...épouse X...n'exerce aucune activité professionnelle ;
Attendu qu'ils s'acquittent d'un loyer mensuel de 401 Euros ainsi que de toutes les charges habituelles de la vie quotidienne (eau, électricité, assurances, téléphone...) ;
Attendu que les époux X...ne sont pas imposables sur le revenu ; qu'ils versent une taxe d'habitation annuelle de 558 Euros en 2010 ;
Attendu qu'ils ont deux enfants âgés de 19 et 11 ans, qui sont tous deux scolarisés et résident à leur domicile ; qu'ils justifient de frais de demi-pension d'environ 50 Euros par mois ;
Attendu qu'ils font état d'un crédit à la consommation, cependant utilisable par fractions et remboursable par mensualités dont le montant dépend de l'utilisation des financements, qui n'a aucun caractère prioritaire au regard de leur obligation alimentaire envers un ascendant ;
Attendu que Monsieur André X...justifie de frais de transport pour se rendre sur son lieu de travail (environ 50 kilomètres par jour), qu'il ne chiffre cependant pas ; qu'il fait état encore de la nécessité de prévoir le remplacement du véhicule familial qui a plus de dix ans, dépense qui demeure à ce jour hypothétique ;
Attendu que le coût d'entretien et de renouvellement de l'appareillage auditif de Madame E...épouse X..., après prise en charge par la sécurité sociale et la mutuelle santé, n'est pas justifié ;
Attendu qu'il convient de tenir compte enfin de la contribution de 10 euros par mois mise à la charge de Madame E...épouse X..., laquelle n'a pas été contestée ;
Attendu qu'au vu des capacités contributives de Monsieur André X..., et du caractère prioritaire de l'entretien des enfants et de leur éducation, il convient de limiter sa contribution alimentaire à la somme mensuelle de 140 Euros ;
Attendu que le jugement entrepris sera réformé en ce sens ;
Sur le point de départ de l'obligation alimentaire des descendants
Attendu que le Centre Hospitalier de SECLIN demande que les coobligés alimentaires soient condamnés à payer leur contribution alimentaire à compter du 18 juin 2009, date d'entrée de Madame Micheline F... épouse X...dans l'établissement ;
Attendu qu'en application de l'article 566 du Code de procédure civile, sont recevables les prétentions présentées pour la première fois à hauteur d'appel lorsqu'elles constituent l'accessoire, la conséquence ou le complément des demandes soumises au premier juge ;
Attendu qu'en l'espèce, la demande de rétroactivité de la contribution alimentaire n'a certes pas été expressément présentée au premier juge, lequel a donc condamné les obligés alimentaires au paiement d'une certaine somme à compter de sa décision, mais constitue le complément d'une telle prétention ; qu'elle ne peut donc être qualifiée de demande nouvelle ; qu'il convient de la déclarer recevable et de statuer sur ce point ;
Attendu qu'il est de principe que les aliments ne s'arréragent pas ; qu = il ne s = agit cependant que d = une présomption simple, cédant devant la preuve contraire, notamment si l = établissement démontre qu = il a fait des réclamations répétées et engagé des actes de poursuites exclusifs de toute inaction ;
Attendu que le Centre Hospitalier de SECLIN était en droit de le saisir d'une demande en paiement de la dette alimentaire contractée par Madame MichelineF... épouse X...alors même que la demande d'aide sociale était en cours d'instruction ;
Attendu que l'enquête effectuée en juillet 2009 par le Centre Hospitalier de SECLIN sur les revenus et charges des descendants, dans le cadre de l'instruction de la demande d'aide sociale déposée au profit de Madame F... épouse X..., ne caractérise pas sa volonté d'agir à l'encontre des obligés alimentaires ;
Que l'intimé a attendu le 9 juin 2010 pour déposer une requête aux fins de paiement, alors que dès le mois d'août 2009 plusieurs des coobligés avaient déjà répondu aux demandes de renseignements et de proposition de participation ;
Attendu qu'il convient donc de considérer que le Centre Hospitalier de SECLIN ne rapporte pas la preuve de poursuites ou de son intention d'agir en justice permettant de renverser la présomption susvisée :
Qu'il convient donc de le débouter de sa demande de contribution alimentaire à compter de la date d'entrée de la créancière d'aliments dans l'établissement ; que les obligés alimentaires seront cependant condamnés à payer la contribution fixée par le premier juge-ou par la Cour s'agissant de Monsieur André X..., à compter de l'acte introductif d'instance, soit le 15 juin 2010 ; Attendu le jugement entrepris sera réformé de ce chef ;
Sur les dépens
Attendu qu'eu égard à la nature du litige et aux circonstances de la cause, il convient de laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens engagés en cause d'appel et de confirmer le jugement entrepris du chef des dépens de première instance ;
PAR CES MOTIFS
Déclare recevable la demande de rétroactivité des obligations alimentaires présentée par le Centre Hospitalier de SECLIN ;
Réforme le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'obligation alimentaire de Monsieur André X...et au point de départ de cette obligation alimentaire mise à la charge de l'époux et des descendants de Madame MichelineF... épouse X...;
Fixe la contribution alimentaire de Monsieur André X...aux frais de séjour de sa mère, Madame MichelineF... épouse X..., à la somme mensuelle de 140 Euros à compter du 15 juin 2010 ;
Dit que cette obligation alimentaire sera indexée sur l'indice national des prix à la consommation des ménages urbains, série France entière, publié par l'INSEE et révisée chaque année en fonction de la variation de cet indice à la date anniversaire de la décision entreprise ;
Dit que Madame Valérie E...épouse X..., Monsieur François X..., Monsieur Pierre A..., Madame Liliane X...épouse A..., Monsieur Arnaud B...et Madame Françoise X...épouse B...sont tenus de l'obligation alimentaire fixée par le jugement du Juge aux affaires familiales de LILLE du 20 octobre 2010 à compter du 15 juin 2010 ;
Confirme en toutes ses autres dispositions le jugement entrepris ;
Déboute les parties de toutes demandes distinctes, plus amples ou contraires ;
Laisse à chaque parties la charge de ses propres dépens engagés en cause d'appel ;
Le Greffier, Le Président,
C. COMMANS P. BIROLLEAU