République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 7 SECTION 2
ARRÊT DU 30/06/2011
No MINUTE :
No RG : 10/00357
Jugement (No 08/00397)
rendu le 28 Septembre 2009
par le Juge aux affaires familiales de LILLE
REF : HA/VV
APPELANT
Monsieur Henri X...
né le 14 Octobre 1967 à MALO LES BAINS (59240)
demeurant ...
représenté par la SCP CARLIER REGNIER, avoués à la Cour
assisté de Me Christian COCHET, avocat au barreau de LILLE
bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 59178/002/10/01014 du 09/02/2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI
INTIMÉE
Madame Véronique Renée Victorine B... épouse C...
née le 19 Juin 1970 à LILLE (59000)
demeurant ... EN BAROEUL
représentée par la SCP DELEFORGE ET FRANCHI, avoués à la Cour
assistée de Me Virginie STIENNE-DUWEZ, avocat au barreau de LILLE
bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 59178/002/10/04337 du 04/05/2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI
DÉBATS à l'audience en chambre du Conseil du 25 Mai 2011, tenue par Hervé ANSSENS magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maryline MERLIN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Patrick BIROLLEAU, Président de chambre
Hervé ANSSENS, Conseiller
Cécile ANDRE, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé, en Chambre du Conseil, par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011, (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Hervé ANSSENS, conseiller, conformément aux dispositions de l'article 452 du code de procédure civile et Maryline MERLIN, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Henri X... et Véronique B... ont entretenu des relations desquelles sont issus trois enfants qu'ils ont tous deux reconnus :
- Mélanie née le 05 septembre 1991,
- Caroline née le 06 septembre 1994,
- Antoine né le 04 septembre 1997.
Le 08 janvier 2000, Véronique B... a saisi le Juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Lille d'une demande tendant à l'organisation des modalités d'exercice de l'autorité parentale sur ses enfants.
C'est dans ces conditions que par ordonnance du 13 février 2001, le Juge a ordonné avant dire droit une enquête sociale, fixant provisoirement par ailleurs la résidence habituelle d'Antoine et Mélanie chez leur mère et celle de Caroline chez son père, avec organisation du droit de visite et d'hébergement de chacun des deux parents.
Le Juge condamnait par ailleurs provisoirement le père au paiement d'une pension alimentaire mensuelle de 650 francs pour chacun de ses deux enfants Mélanie et Antoine.
L'enquêtrice sociale désignée a procédé à sa mission, faisant notamment ressortir que le père était plus capable d'organisation, de suivis scolaires, manifestant une autorité certaine tandis que la mère était plus à l'aise dans les périodes ludiques et de détente.
C'est ainsi que par jugement du 30 octobre 2001, le Juge a fixé la résidence des enfants en alternance au domicile de chacun de leurs deux parents.
Par jugement du 04 juin 2002, les parties étant alors à nouveau en opposition quant aux modalités d'exercice de l'autorité parentale, le Juge aux affaires familiales de Lille a ordonné avant dire droit une mesure de médiation familiale.
Aux termes de cette mesure Henri X... a fait valoir que Caroline vivait toujours à son domicile, que la résidence alternée n'avait jamais fonctionné et que la médiation avait échoué.
Il demandait essentiellement en conséquence que la résidence habituelle de Caroline et Antoine soit fixée à son propre domicile.
Véronique B... s'opposait à cette réclamation et demandait que la résidence habituelle des trois enfants soit fixée chez elle.
C'est dans ces conditions que par jugement du 07 janvier 2003, le Juge a fixé la résidence habituelle de Mélanie et d'Antoine chez leur mère et celle de Caroline chez son père dans le cadre de l'exercice conjoint de l'autorité parentale, chaque parent bénéficiant d'un droit de visite et d'hébergement réglementé.
Ce jugement fut confirmé par arrêt de la Cour de ce siège du 12 février 2004.
Par jugement du 12 juin 2007, le Juge aux affaires familiales de Lille a transféré la résidence habituelle de Caroline chez sa mère et fixé la part contributive du père à l'entretien et à l'éducation de chacun de ses trois enfants à la somme mensuelle de 80 €.
Le 17 janvier 2008, Véronique B... a de nouveau saisi le Juge aux affaires familiales de Lille d'une demande tendant à ce que le père ne puisse plus exercer qu'à l'amiable son droit de visite et d'hébergement sur Caroline et qu'il ne puisse plus par ailleurs exercer qu'un simple droit de visite hebdomadaire en journée sur Antoine.
Elle réclamait par ailleurs une pension alimentaire mensuelle de 100 € pour chacun de ses trois enfants.
Aux termes d'un jugement du 24 juillet 2008, le Juge a alors provisoirement suspendu le droit de visite et d'hébergement du père sur Caroline et Antoine.
Ces derniers ont été entendus le 15 janvier 2009 et le Juge a demandé communication d'un dossier d'assistance éducative alors ouvert par le Juge des enfants.
Véronique B... a maintenu sa demande d'augmentation de pension alimentaire mais a demandé que le père ne puisse plus exercer qu'amiablement son droit de visite et d'hébergement sur leurs deux enfants mineurs.
Henri X... s'est opposé à de telles prétentions et c'est dans ces conditions que par jugement du 28 septembre 2009, rectifié par jugement du 08 février 2010, le Juge aux affaires familiales de Lille a porté la part contributive du père à l'entretien et à l'éducation de chacun de ses trois enfants à la somme mensuelle indexée de 100 € et a dit qu'Henri X... exercera désormais sur ses deux enfants mineurs Caroline et Antoine un simple droit de visite les dimanches des semaines paires de 10 h 00 à 18 h 00.
Le Juge a par ailleurs condamné chaque partie aux dépens par moitié.
Henri X... a interjeté appel de cette décision le 18 janvier 2010 et a demandé à la Cour de l'infirmer, de dire qu'il exercera son droit de visite et d'hébergement sur Caroline et Antoine les première, troisième et cinquième fins de semaine de chaque mois ainsi que durant la moitié des vacances scolaires et de ramener par ailleurs la pension alimentaire dont il est redevable pour chacun de ses trois enfants à la somme mensuelle de 60 €.
Véronique B... s'est opposée aux prétentions d'Henri X... et, formant elle-même appel incident du chef du droit de visite et d'hébergement de celui-ci, a demandé à la Cour, par réformation, de dire que le père exercera son droit de visite à l'égard de Caroline et Antoine "exclusivement à l'amiable".
Elle a enfin réclamé par ailleurs une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 28 octobre 2010, la Cour de ce siège a réformé le jugement déféré du chef de la pension alimentaire et dit n'y avoir lieu à modification de celle-ci telle que fixée par le jugement précité du 12 juin 2007, en déboutant dès lors l'une et l'autre parties de leurs prétentions respectives à cet égard.
Avant dire droit par ailleurs sur le droit de visite et d'hébergement du père sur ses deux enfants mineurs Caroline et Antoine, la Cour a ordonné une expertise psychologique.
Elle a enfin réservé les dépens ainsi que l'application éventuelle de l'article 700 du code de procédure civile.
L'expert désigné a procédé à sa mission et déposé un rapport le 31 décembre 2010.
A la demande de Caroline, il fut procédé à son audition par le conseiller rapporteur le 11 mai 2011 et celui-ci a rendu compte le même jour aux parties de cette audition.
Par conclusions signifiées le 24 mars 2011, Henri X... demande à la Cour, par réformation, de dire qu'il exercera son droit de visite et d'hébergement sur Caroline et Antoine les première, troisième et cinquième fins de semaine de chaque mois du vendredi soir au dimanche soir ainsi que durant la moitié des vacances scolaires.
Par conclusions en réponse signifiées le 19 mai 2011, Véronique B... demande quant à elle à la Cour, par réformation, d'octroyer au père un droit de visite et d'hébergement sur Antoine une fin de semaine sur deux pendant la période scolaire, durant la moitié des petites vacances scolaires ainsi que durant une semaine au mois de juillet et une semaine au mois d'août.
Elle demande également à la Cour, par réformation encore, de supprimer le droit de visite et d'hébergement du père sur Caroline ou, à défaut, de fixer celui-ci à l'amiable.
Elle réclame enfin une indemnité de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE
Attendu que la Cour n'est plus saisie aujourd'hui que de la question du droit de visite et d'hébergement du père sur ses deux enfants Caroline et Antoine ;
Attendu que sauf contre indication sérieuse et avérée, il est opportun de favoriser les relations que des enfants doivent pouvoir entretenir le plus régulièrement possible avec le parent chez lequel ils n'ont pas leur résidence habituelle ;
Attendu qu'Antoine est actuellement âgé de 13 ans et demi et que ses parents se sont sensiblement rapprochés quant aux modalités d'exercice du droit de visite et d'hébergement du père à son égard ;
Qu'aux termes de son rapport, l'expert psychologue a clairement souligné qu'il paraissait prêt à "réinvestir" son père si des rencontres régulières étaient programmées sans avoir à décider lui-même des visites afin d'être libéré du conflit de loyauté dans lequel il se trouve entre chacun de ses deux parents ;
Que l'expert considère qu'Antoine a besoin de contacts réguliers avec son père en cette phase adolescente ;
Attendu dans ces conditions qu'il convient de dire que le père exercera son droit de visite et d'hébergement sur son fils Antoine selon les modalités définies au dispositif ci-après ;
Qu'il y a lieu de réformer en ce sens la décision déférée ;
Attendu que Caroline est aujourd'hui âgée de presque 17 ans ;
Qu'elle entretient manifestement aujourd'hui des relations problématiques avec son père, qui pourtant s'est dans le passé sérieusement impliqué dans son éducation à une époque où la résidence de celle-ci était fixée à son domicile ;
Attendu qu'au terme de son audition par le conseiller rapporteur, Caroline a évoqué ce qu'elle perçoit chez son père comme des maladresses et même un manque d'intérêt à son égard ;
Qu'elle a exprimé le souhait de ne plus être obligée de lui rendre visite, faisant état du mal être qui est le sien en ces circonstances ;
Mais attendu que dans un tel contexte, il apparaît que l'institution d'un droit de visite et d'hébergement à l'amiable, aurait pour conséquence une rupture des relations entre la fille et son père ;
Attendu qu'aux termes de son rapport, l'expert psychologue relève l'ambiguïté des sentiments de Caroline, qui semble partager dans ses émotions entre les regrets de ne plus voir son père avec la nostalgie des années passées chez lui seule sans frère ni soeur et la colère contre lui suite au conflit survenu à l'adolescente quant elle s'est confrontée aux limites éducatives fermes de celui-ci ;
Que l'expert souligne encore combien est pesant pour Caroline le conflit
constant qui anime ses parents l'un contre l'autre et préconise une aide psycho-thérapeutique individuelle ;
Attendu que l'expert souligne enfin qu'il serait néfaste pour Caroline de laisser peser sur elle seule le poids de la décision de rendre ou non visite à son père ;
Attendu qu'il y a lieu par ailleurs de relever que lorsqu'ils fixent les modalités du droit de visite octroyé sur les enfants au parent non attributaire de la garde, les Juges ne peuvent déléguer sur ce point les pouvoirs que leur confère la loi ;
Attendu que s'agissant de Caroline, il convient de prendre en compte son malaise ainsi que ses difficultés relationnelles avec son père en n'octroyant actuellement à celui-ci qu'un simple droit de visite tel que celui qui fut fixé par le premier Juge dont la décision doit alors être confirmée à cet égard ;
Attendu qu'eu égard à la nature de l'espèce qui concerne des enfants communs et aux circonstances de la cause, il convient de laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens d'appel, les frais afférents à l'expertise psychologique étant partagés par moitié ;
Qu'il y a lieu par ailleurs de confirmer le jugement déféré du chef des dépens de première instance ;
PAR CES MOTIFS
Vu l'arrêt précité du 28 octobre 2010,
Constate que la Cour n'est plus saisie que de la question du droit de visite et d'hébergement d'Henri X... sur ses deux enfants Caroline et Antoine ;
Confirme le jugement déféré du 28 septembre 2009 (rectifié par jugement du 08 février 2010) du chef des modalités du droit de visite octroyé à Henri X... sur sa fille Caroline ;
Par réformation du chef des dispositions relatives au droit de visite et d'hébergement du père sur Antoine,
Dit que sauf accord des parties sur d'autres dispositions, Henri X... exercera son droit de visite et d'hébergement sur son fils Antoine selon les modalités suivantes :
1 - en dehors des périodes de vacances scolaires : les première, troisième et cinquième fins de semaine de chaque mois du vendredi 19 h 00 au dimanche 19 h 00 ;
2 - pendant les périodes de vacances scolaires : durant la première moitié de toutes les vacances scolaires les années paires et durant la seconde moitié des dites vacances les années impaires ;
A charge pour lui d'aller chercher ou de faire chercher son fils et de le ramener ou faire ramener par une personne de confiance au domicile de la mère ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens d'appel, les frais afférents à l'expertise psychologique étant partagés par moitié et le jugement déféré étant par ailleurs confirmé du chef des dépens de première instance.
Le Greffier, P/Le Président empêché,
L'un des conseillers ayant
délibéré (article 456 du
code de procédure civile)
M. MERLIN H. ANSSENS