République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 26/05/2011
N° de MINUTE :
N° RG : 10/00405
Jugement (N° 1354/09)
rendu le 17 décembre 2009
par le Tribunal de Commerce
de [Localité 7] [Localité 8]
REF : JMD/CP
APPELANTE
S.A.R.L. DELQUIGNIES TRANSPORTS agissant en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
ayant son siège social [Adresse 2]
Représentée par la SCP DELEFORGE ET FRANCHI, avoués à la Cour
Assistée de Me Hervé MORAS, avocat au barreau de VALENCIENNES
INTIMÉES
Société NEXANS FRANCE agissant par son représentant légal domicilié es-qualité audit siège
ayant son siège social [Adresse 4]
Société de droit britannique ACE EUROPEAN GROUP LIMITED prise en la personne de sa succursale pour la France
ayant son siège social [Adresse 1]
EC3A 3BP GRANDE BRETAGNE
Représentés par Me QUIGNON, avoué à la Cour
Assistés de Me LOPIN Rozenn, avocat au barreau de PARIS
S.A. GROUPAMA TRANSPORT prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 3]
Représentée par la SCP COCHEME LABADIE COQUERELLE, avoués à la Cour
Assistée de Me BODDAERT substituant Me Jean-François CORMONT, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS à l'audience publique du 23 mars 2011 tenue par Jean Michel DELENEUVILLE magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Véronique DESMET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Christine PARENTY, Président de chambre
Jean Michel DELENEUVILLE, Conseiller
Philippe BRUNEL, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 26 mai 2011 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Christine PARENTY, Président et Véronique DESMET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 2 mars 2011
***
Vu le jugement contradictoire du 17 décembre 2009 du tribunal de commerce de Roubaix-Tourcoing qui, après avoir débouté la société DELQUIGNIES TRANSPORTS de l'ensemble de ses moyens, a condamné cette dernière, avec exécution provisoire, à payer à la société NEXANS FRANCE la somme de 2 500 € (montant de la franchise) avec intérêts au taux légal à compter du 22 février 2007 (assignation) et anatocisme, à la société ACE EUROPEAN GROUP LIMITED la somme de 41 962,93 € (en remboursement de la somme versée à son assurée, la société NEXANS FRANCE) avec intérêts au taux légal à compter du 22 février 2007 (assignation) ainsi qu'à payer aux sociétés NEXANS FRANCE et GROUPAMA TRANSPORT la somme de 2 600 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu l'appel interjeté le 19 janvier 2010 par la SARL DELQUIGNIES TRANSPORTS ;
Vu les conclusions déposées le 1er décembre 2010 pour cette dernière ;
Vu les conclusions déposées le 31 décembre 2010 pour la SAS NEXANS FRANCE et pour la société de droit britannique ACE EUROPEAN GROUP LIMITED ;
Vu les conclusions déposées le 9 septembre 2010 pour la SA GROUPAMA TRANSPORT ;
Vu l'ordonnance de clôture du 2 mars 2011 ;
***
Attendu que la société DELQUIGNIES TRANSPORTS a interjeté appel aux fins d'infirmation, constatation que la société NEXANS FRANCE n'avait pas qualité à agir à son encontre par application des clauses du contrat de vente ayant transféré le risque à l'acquéreur de la marchandise détournée, que la société de droit britannique ACE EUROPEAN GROUP LIMITED n'a jamais été partie à l'instance et qu'elle ne justifie pas avoir payé son assurée en exécution du contrat d'assurance, en conséquence, condamnation de la société NEXANS FRANCE à lui payer 5 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, subsidiairement, débouté de la société NEXANS FRANCE de l'ensemble de ses prétentions dès lors qu'aucune faute n'est démontrée à la charge la société DELQUIGNIES TRANSPORTS en sa qualité de commissionnaire ;
Attendu que la société GROUPAMA TRANSPORT sollicite la confirmation en ce que les premiers juges ont débouté les demandeurs de leurs prétentions à son encontre, constatation que la société NEXANS FRANCE ne justifie pas de sa qualité de partie au contrat de transport et que la société de droit britannique ACE EUROPEAN GROUP LIMITED ne prouve pas qu'elle est subrogée dans les droits de la société NEXANS FRANCE en vertu du contrat d'assurance la liant à cette dernière, condamnation de chacun des succombants à lui payer 3 500 € pour la couverture de ses frais irrépétibles, subsidiairement, constatation que les conditions de la garantie qu'elle doit à la société DELQUIGNIES TRANSPORTS ne sont pas remplies ;
Attendu que la société NEXANS FRANCE et la société de droit britannique ACE EUROPEAN GROUP LIMITED sollicitent la confirmation, sauf en ce que les premiers juges ont estimé que la garantie de la société GROUPAMA TRANSPORT n'était pas due, condamnation de cette dernière solidairement avec la société DELQUIGNIES TRANSPORTS au paiement des sommes mises à la charge de son assurée, ainsi qu'à leur payer 5 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
SUR CE :
Attendu que la société NEXANS FRANCE a vendu à la société TRÉFILERIE ET CÂBLERIE DU HAVRE 18 tonnes de fil d'alliage cuivre/aluminium en 10 colis, d'une valeur de 44 462,93 €, dont elle a, par courriels des 23 et 28 février 2006, confié le transport depuis ses ateliers de [Localité 6] à destination du Havre à la société DELQUIGNIES TRANSPORTS, laquelle a sous-traité la prestation à la société LORY SERVICE qui a enlevé la marchandise le 1er mars 2006 mais ne l'a jamais livrée à son destinataire ; qu'une plainte a été déposée le 3 mars 2006 par la société NEXANS FRANCE au commissariat de [Localité 6] ; qu'une expertise a été organisée le même jour à l'initiative de la société GROUPAMA TRANSPORT, assureur de la société DELQUIGNIES TRANSPORTS ; que l'enquête n'ayant pas permis de récupérer la marchandise, la société NEXANS FRANCE a assigné la société DELQUIGNIES TRANSPORTS en paiement du prix de la marchandise volée puis son assureur, la société GROUPAMA TRANSPORT, par actes des 22 février 2007 et 21 février 2008 ; que le tribunal a rendu le jugement entrepris ;
Sur la recevabilité de l'action engagée par la société NEXANS FRANCE
Attendu que la société DELQUIGNIES TRANSPORTS soulève l'exception d'irrecevabilité de l'action engagée par la société NEXANS FRANCE à son encontre au constat que le contrat de vente que cette dernière a conclu avec sa cliente, la société TRÉFILERIE ET CÂBLERIE DU HAVRE, contenait un incoterm (' CPT ') ayant transféré le risque du transport sur l'acheteur, pour en déduire que l'action en paiement appartenait exclusivement à ce dernier ;
Attendu que si le recours aux incoterm est habituellement réservé aux ventes internationales, rien n'interdit d'en faire usage dans des contrats purement nationaux, contrairement à ce que prétend la société NEXANS FRANCE ; que par application de l'incoterm ' CPT ' le risque lié au transport de la marchandise a été transféré, dès sa sortie des magasins de la société NEXANS FRANCE, à la société TRÉFILERIE ET CÂBLERIE DU HAVRE ; que les pièces du dossier établissant que la société LORY SERVICE a détourné la marchandise au cours de son transport entre [Localité 6] et [Localité 5], il s'ensuit que la société destinataire avait seule qualité pour agir contre le commissionnaire, la société DELQUIGNIES TRANSPORTS, et le transporteur qu'il s'est substitué ; que la société DELQUIGNIES TRANSPORTS est fondée à s'en prévaloir ;
Attendu que la société NEXANS FRANCE invoque un avoir qu'elle a émis au bénéfice de la société TRÉFILERIE ET CÂBLERIE DU HAVRE à raison du fait que, n'ayant naturellement jamais été payée du prix de la marchandise détournée, elle a annulé cette vente ;
Attendu cependant qu'elle a joint à son dossier un document qui se présente sous la forme d'un tableau à plusieurs colonnes, manifestement extrait de sa propre comptabilité ; qu'en l'état cette pièce n'a pas permis à la société TRÉFILERIE ET CÂBLERIE DU HAVRE d'annuler la facture que la société NEXANS FRANCE a émise en mars 2006 ; qu'elle est au surplus dépourvue de date, sauf à retenir celle du 8 juin 2007 qui a été apposée à l'occasion d'un envoi par télécopie à un destinataire non identifié ;
Attendu que le défaut de qualité à agir d'une partie constitue une fin de non recevoir, susceptible d'être relevée d'office (article 125 alinéa 2 du Code de procédure civile) ; qu'elle peut être régularisée si sa cause a disparu au moment où le juge statue, à la condition que cette régularisation intervienne avant expiration du délai de prescription ;
Attendu que le transport litigieux remonte au 1er mars 2006 ; que ' l'avoir ' dont la société NEXANS FRANCE se prévaut a été émis, au plus tôt, le 8 juin 2007 ; que si la société NEXANS FRANCE a récupéré une qualité à agir contre la société DELQUIGNIES TRANSPORTS à cette date, c'est au delà du délai d'un an édicté par l'article L. 133-6 du Code de commerce, rendant cette régularisation tardive ;
Attendu que la société de droit britannique ACE EUROPEAN GROUP LIMITED, assureur de la société NEXANS FRANCE, subrogée dans les droits de cette dernière pour l'avoir indemnisée à hauteur de 41 962,93 € le 15 mars 2007, n'ayant pas plus de droit que son assurée subrogeant, son action doit être déclarée tout autant irrecevable ;
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Attendu qu'il est équitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, par arrêt mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris, statuant à nouveau,
Accueille la fin de non recevoir élevée par la SARL DELQUIGNIES TRANSPORTS, en conséquence déboute la SAS NEXANS FRANCE et la société de droit britannique ACE EUROPEAN GROUP LIMITED de l'ensemble de leurs prétentions,
Laisse à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles,
Condamne la SAS NEXANS FRANCE et la société de droit britannique ACE EUROPEAN GROUP LIMITED aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés, pour ceux d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
Véronique DESMETChristine PARENTY