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31/03/2011 | FRANCE | N°10/01395

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 7 section 2, 31 mars 2011, 10/01395


République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 7 SECTION 2
ARRÊT DU 31/ 03/ 2011

****
No MINUTE :
No RG : 10/ 01395
Jugement (No 07/ 08234)
rendu le 12 Janvier 2010
par le Juge aux affaires familiales de LILLE
REF : CA/ VV

APPELANTE

Madame Sarra X...
née le 03 Mars 1981 à MONASTIR (TUNISIE)
demeurant ...

représentée par la SCP CARLIER REGNIER, avoués à la Cour
assistée de Me Corinne RIGALLE-DUMETZ, avocat au barreau de LILLE
bénéficie d'une aide juridictionnelle

Totale numéro 59178/ 002/ 10/ 03329 du 06/ 04/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI

INTIMÉ

Monsieur ...

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 7 SECTION 2
ARRÊT DU 31/ 03/ 2011

****
No MINUTE :
No RG : 10/ 01395
Jugement (No 07/ 08234)
rendu le 12 Janvier 2010
par le Juge aux affaires familiales de LILLE
REF : CA/ VV

APPELANTE

Madame Sarra X...
née le 03 Mars 1981 à MONASTIR (TUNISIE)
demeurant ...

représentée par la SCP CARLIER REGNIER, avoués à la Cour
assistée de Me Corinne RIGALLE-DUMETZ, avocat au barreau de LILLE
bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/ 002/ 10/ 03329 du 06/ 04/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI

INTIMÉ

Monsieur Guillaume A...
né le 09 Février 1977 à HAUBOURDIN (59320)
demeurant ...

représenté par la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués à la Cour
assisté de Me Christian MARMU, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience en chambre du Conseil du 17 Février 2011, tenue par Cécile ANDRE magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Christine COMMANS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Patrick BIROLLEAU, Président de chambre
Hervé ANSSENS, Conseiller
Cécile ANDRE, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 31 Mars 2011 après prorogation du délibéré en date du 24 mars 2011 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Patrick BIROLLEAU, Président et Christine COMMANS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur Guillaume A... et Madame Sarra X... se sont mariés le 10 août 2002 à MONASTIR (Tunisie), sans contrat préalable, et un enfant est issu de cette union :

- Ryan, né le 23 octobre 2005.

Statuant sur la requête en divorce présentée par l'épouse, le Juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de LILLE, par ordonnance de non conciliation du 10 janvier 2008, a entre autres dispositions :

- Attribué à l'épouse la jouissance du domicile conjugal à titre gratuit ;

- Constaté l'accord des parties sur la prise en charge par l'époux seul du prêt immobilier afférent au domicile conjugal ;

- Fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile de sa mère, dans le cadre de l'exercice conjoint de l'autorité parentale ;

- Dit qu'à défaut d'accord amiable, Monsieur A... exercera son droit de visite et d'hébergement selon les modalités suivantes :

* en dehors des périodes de vacances scolaires : les première, troisième et cinquième fins de semaine de chaque mois du vendredi à 17 heures au dimanche à 18 heures, ;

* pendant les périodes de vacances scolaires : durant la première moitié de toutes les vacances scolaires de plus de cinq jours les années impaires et durant la seconde moitié des dites vacances les années paires ;

- Condamné Monsieur A... à verser à Madame X... une pension alimentaire mensuelle de 200 Euros au titre de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de Ryan ;

- Condamné Monsieur A... à payer à son épouse une pension alimentaire mensuelle de 100 Euros pour elle-même, en exécution de son devoir de secours.

Par acte du 27 mai 2008, Madame X... a fait assigner son époux en divorce sur le fondement de l'article 242 du Code civil. Elle a demandé 6. 000 Euros de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et 5. 000 Euros au titre de l'article 266 du même code, une prestation compensatoire de 20. 000 Euros en capital, la commise d'un notaire aux fins de procéder aux opérations de liquidation et partage, le maintien des modalités d'exercice de l'autorité parentale ainsi qu'une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant de 350 Euros par mois.

Monsieur A... a formé une demande reconventionnelle en divorce aux torts partagés des époux, a conclu au débouté des demandes de dommages et intérêts et à la « confirmation » de toutes les mesures provisoires prises par le magistrat conciliateur concernant l'enfant.

Il a également demandé que soit ordonnée l'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents.

C'est dans ces circonstances que par jugement du 12 janvier 2010, le Juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de LILLE a :

- Prononcé le divorce des époux A...-X... à leurs torts partagés, avec toutes ses conséquences de droit quant à la publicité et à la liquidation des droits patrimoniaux des parties ;

- Désigné le Président de la Chambre des notaires ou son délégataire pour procéder s'il y a lieu aux opérations de liquidation et de partage du régime matrimonial ;

- Donné acte aux époux de leurs propositions de règlement de leurs intérêts pécuniaires et patrimoniaux ;

- Débouté Madame X... de sa demande de prestation compensatoire ;

- Débouté Madame X... de ses demandes de dommages et intérêts ;

- Fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile de sa mère, dans le cadre de l'exercice conjoint de l'autorité parentale ;

- Dit qu'à défaut d'accord amiable, Monsieur A... exercera son droit de visite et d'hébergement selon les modalités suivantes :

* en dehors des périodes de vacances scolaires : les première, troisième et cinquième fins de semaine de chaque mois du vendredi à 17 heures au dimanche à 18 heures ;

* pendant les périodes de vacances scolaires : durant la première moitié de toutes les vacances scolaires les années impaires et durant la seconde moitié des dites vacances les années paires ;

- Condamné Monsieur A... à verser à Madame X... une pension alimentaire mensuelle de 200 Euros au titre de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de Ryan ;

- Débouté Monsieur A... de sa demande d'inscription sur le passeport de l'enfant de l'interdiction de sortie du territoire français sans l'autorisation des deux parents ;

- Débouté Madame X... de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Madame X... a formé appel général de cette décision le 25 février 2010 et par ses dernières conclusions signifiées le 14 février 2011, elle demande à la Cour, par réformation, de :

- prononcer le divorce aux torts exclusifs du mari ;

- condamner Monsieur A... à lui payer 6. 000 Euros de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et 5. 000 Euros au titre de l'article 266 du même code ;

- condamner Monsieur A... à lui payer une prestation compensatoire de 20. 000 Euros en capital ;

- fixer le montant de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant la somme mensuelle de 600 Euros.

Elle conclut au rejet des prétentions de l'intimé tendant au transfert de résidence de l'enfant et subsidiairement sollicite le plus large droit de visite et d'hébergement à son profit.

Enfin, elle conclut à la confirmation des autres dispositions du jugement entrepris, à la condamnation de l'intimé aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à une indemnité de 2. 000 Euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 26 janvier 2011, Monsieur A..., formant appel incident, sollicite le transfert de la résidence habituelle de Ryan à son domicile, ainsi qu'un droit de visite et d'hébergement « classique » accordé à la mère, l'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents et la confirmation de toutes les autres dispositions du jugement entrepris, à l'exception des dépens de première instance et d'appel qu'il demande de mettre à la charge de l'appelante.

SUR CE

Sur les demandes en divorce

Attendu qu'au soutien de sa demande en divorce, Madame X... réitère ses griefs initiaux et fait essentiellement valoir que son mari a manqué à son devoir de fidélité à plusieurs reprises et vit en concubinage ; qu'il s'est montré insultant et colérique à son égard ;

Attendu qu'en concluant au prononcé du divorce aux torts partagés des époux, Monsieur A... admet implicitement le bien-fondé de la demande formée par son épouse et ne remet pas en cause la décision du premier juge qui, par des motifs pertinents que la Cour adopte a fait droit à cette demande ;

Attendu que pour fonder sa demande reconventionnelle, Monsieur A... reproche à son épouse d'avoir changé de comportement à partir de la naissance de leur fils, lui imposant de respecter les règles strictes du Coran, lui interdisant tout contact avec sa famille qu'elle dénigrait sans retenue, et lui refusant toute relation sexuelle ;

Attendu que Madame X... conteste ces griefs et réplique qu'elle n'a pas imposé à son futur époux sa conversion à la religion musulmane mais qu'il s'agissait d'une condition de validité de leur mariage célébré en Tunisie ; que la conversation que sa belle-mère prétend avoir eu avec elle au sujet de l'intimé sexuelle du couple n'a jamais eu lieu ;

Attendu qu'au soutien de ses différentes allégations, Monsieur A... se contente de verser aux débats deux attestations, l'une rédigée par sa mère, l'autre par sa s œ ur ; qu'eu égard à ces liens étroits de parenté, la réalité des propos qu'auraient tenus Madame X... à sa belle-mère, en dehors de la présence de tout témoin, selon lesquels elle serait désormais « une mère et plus une femme », qu'elle n'avait « plus le temps de s'occuper de lui » ne sont nullement avérés ; que de surcroît il ne peut en être déduit pour autant que le couple n'aurait plus de relation sexuelle ; qu'enfin, il ne résulte pas de ce témoignage peu circonstancié que la mère de l'époux aurait personnellement constaté les reproches constants que subissait son fils ;

Attendu que le témoignage de la s œ ur de l'époux est tout autant dépourvu d'objectivité et de neutralité ; qu'il ne précise nullement dans quelles circonstances Monsieur A... aurait été contraint de suivre le ramadan et de respecter les interdits alimentaires posés par le Coran ; qu'il convient d'observer qu'il s'était converti à l'Islam au moment de son mariage et que rien ne permet d'affirmer au vu de ce seul témoignage que l'observance de ces préceptes lui ait été imposée, et a fortiori par son épouse ;

Attendu que Monsieur A... ne rapporte la preuve d'aucune violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage imputable à son épouse ; qu'il convient de le débouter de sa demande en divorce ;

Attendu qu'il convient donc de confirmer le jugement entrepris sur le principe du divorce, mais de le réformer quant aux torts, imputable exclusivement à l'époux ;

Attendu qu'il convient de confirmer la décision des chefs relatifs aux conséquences de droit du divorce quant à la publicité et à la liquidation des droits patrimoniaux des parties et à la désignation d'un notaire, lesquels ne sont pas critiqués ;

Sur la demande en dommages et intérêts

Attendu que sur le fondement de l'article 266 du Code civil, des dommages-intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint ; que, par ailleurs, un époux, s'il a subi du fait des fautes de son conjoint un préjudice distinct de celui né de la dissolution du mariage, peut en obtenir réparation sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que Madame X... expose qu'originaire de Tunisie, elle a interrompu ses études et quitté son pays pour suivre son époux ; qu'elle se retrouve isolée en France ; que son état dépressif est lié à cette situation ; qu'elle ne peut retourner en Tunisie sauf à couper l'enfant de son père ;

Attendu qu'elle indique par ailleurs que le préjudice moral qu'elle subit du fait de l'adultère de son mari est très fort, du fait de l'importance de ses convictions morales ;

Attendu que Monsieur A... réplique que son épouse est la principale responsable de l'échec de leur mariage, par son changement de comportement, et qu'il convient de la débouter de ses demandes de dommages et intérêts ;

Attendu que l'état dépressif de Madame X... en lien avec ses difficultés conjugales n'est attesté par son médecin généraliste que jusqu'en mai 2008 ; qu'aucun élément médical récent n'est rapporté par l'appelante ;

Attendu que Monsieur A... ne conteste pas pour autant l'isolement de l'appelante, arrivée en France à l'âge de 21 ans avec son mari, sans aucun repère amical ou familial sur le territoire français ; qu'il ne soutient pas qu'elle se serait créée un réseau social pendant la vie commune ; qu'elle ne dispose pas de qualification professionnelle ni de diplôme reconnu en France et a repris des études ; qu'elle se retrouve seule avec un enfant en bas-âge et fait justement valoir qu'un retour dans son pays d'origine aurait des conséquences graves sur les relations de Ryan avec le parent chez lequel il ne résiderait pas habituellement ;

Attendu que ces circonstances caractérisent des conséquences particulièrement graves subies par l'épouse du fait de la rupture de l'union ; qu'il convient toutefois de limiter les dommages et intérêts réclamés à la somme de 2. 000 Euros que Monsieur A... sera condamné à lui payer sur le fondement de l'article 266 du Code civil ; que le jugement entrepris sera réformé en ce sens ;

Attendu que s'agissant de sa demande fondée sur l'article 1382 du Code civil, il convient d'observer que Madame X..., qui établit certes la relation adultère de son mari, ne rapporte pas la preuve d'un préjudice tel qu'il ne serait pas suffisamment réparé par le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son époux ;

Qu'il y a lieu de confirmer de ce chef la décision déférée ;

Sur la prestation compensatoire

Attendu que la prestation qu'un époux peut être tenu de verser à l'autre est destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux ; qu'elle est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ;

Attendu que pour fonder sa demande de prestation compensatoire, Madame X... fait valoir que :

- ses possibilités de retrouver un emploi en France sont limitées compte-tenu de son manque de qualification et de diplôme reconnu ;

- elle suit une formation universitaire et a néanmoins trouvé un contrat à durée déterminée de quelques semaines tandis que son époux a des revenus professionnels stables ;

- les époux ne retireront quasiment aucun profit de la liquidation du régime matrimonial ;

- elle vit seule alors que son époux partage ses charges avec sa compagne ;

Attendu que Monsieur A... estime qu'il n'existe aucune disparité entre les conditions de vie respectives des époux ; que l'appelante a délibérément choisi de quitter la Tunisie pour venir vivre en France ; qu'elle n'a pas repris d'études une fois arrivée en France, ni recherché un emploi, alors que son niveau intellectuel élevé n'y faisait pas obstacle ; qu'enfin elle est en bonne santé et bénéficie de la jouissance gratuite de l'immeuble commun ;

Attendu que le mariage aura duré 8 ans mais la vie commune seulement 5 ans ; que Monsieur A... est âgé de 34 ans et Madame X... de 30 ans ; qu'un enfant encore mineur est issu de cette union ;

Attendu que Madame X... n'exerce aucune activité professionnelle et n'a déclaré à l'administration fiscale aucun revenu autre que les pensions alimentaires versées par l'époux pour l'année 2009 ; qu'elle justifie avoir suivi un cursus universitaire en Tunisie, jusqu'en 3eannée, et s'être inscrite en faculté à LILLE en première année ; qu'elle a obtenu un contrat à durée déterminée de trois semaines en qualité de vendeuse en juin 2010 ; qu'elle perçoit, au vu de l'attestation de la Caisse d'Allocations Familiales du mois de décembre 2010, le Revenu de Solidarité Active (279 Euros par mois) ;

Attendu qu'il ne peut lui être reproché de ne pas s'inscrire sur les listes de demandeurs d'emploi, alors que cette inscription ne lui ouvrirait aucun droit à allocation et qu'elle a repris des études ;

Attendu que la jouissance gratuite du domicile conjugal dont bénéficie l'épouse cessera lorsque le divorce prendra force de chose jugée, au profit d'une jouissance divise, et n'a donc pas à être prise en compte dans l'appréciation de la disparité ;

Attendu que Monsieur A... est employé comme chef de secteur et a déclaré des salaires imposables de 30. 927 Euros au vu de son avis d'impôt sur le revenu 2010, soit en moyenne 2. 577 Euros par mois ; que cette situation professionnelle demeure identique au vu des cumuls de son bulletin de paie de septembre 2010 ; qu'il bénéficie de l'avantage en nature que représente le véhicule mis à sa disposition par son employeur ;

Attendu qu'il démontre rembourser le prêt immobilier pour l'immeuble commun par mensualités de 568 Euros ;

Attendu qu'il partage ses charges avec sa concubine, au chômage indemnisé (environ 960 Euros par mois) et notamment leur loyer d'un montant résiduel de 127 Euros par mois ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de retenir au titre de ses charges les frais d'entretien des enfants de sa compagne à l'égard desquels il n'a aucune obligation ;

Attendu que son impôt sur le revenu s'élève à 2. 073 Euros par an ;

Attendu qu'il devra contribuer encore pendant de nombreuses années à l'entretien et à l'éducation de son enfant ;

Attendu que l'actif de la communauté se compose essentiellement de l'immeuble commun, acquis en octobre 2003 par un prêt immobilier de 82. 850 Euros ; que le passif est donc encore très élevé, de sorte que la masse à partager entre les époux sera réduite ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de prendre en considération les droits à retraite des parties s'agissant d'une échéance encore très éloignée ;

Attendu que si les parties admettent toutes deux être en bonne santé, la situation professionnelle de l'époux est stable depuis plusieurs années, ainsi que le démontrent ses avis d'imposition depuis le mariage, au contraire de celle de l'épouse ; qu'elle ne dispose d'aucune expérience professionnelle ni diplôme reconnu en France, ce qui rend incontestablement son insertion dans le monde du travail plus délicate ;

Attendu que ces éléments démontrent une disparité nette entre les situations des époux ; que cependant, la durée relativement brève du mariage et l'absence de patrimoine de l'un comme de l'autre doivent conduire à minorer sérieusement le montant du capital réclamé par l'appelante ;

Attendu qu'il convient de réformer le jugement entrepris et de condamner Monsieur A... à payer à Madame X... un capital de 8. 000 Euros à titre de prestation compensatoire ;

Sur la résidence habituelle de l'enfant et le droit de visite et d'hébergement

Attendu que pour la première fois en cause d'appel, Monsieur A... sollicite le transfert de la résidence habituelle de l'enfant à son domicile ; qu'il dit s'interroger sur les capacités éducatives de la mère, au vu de son comportement irresponsable et du suivi médical de Ryan ; qu'il soutient enfin que l'enfant a fait part de façon répétée de son souhait de vivre avec lui ;

Attendu que Madame X... estime que cette demande n'est pas de l'intérêt de Ryan qui évolue favorablement auprès d'elle, tandis que son père affiche une instabilité affective et ne cesse de la dénigrer en tant que mère ;

Qu'elle conteste les reproches émis par Monsieur A..., en totale contradiction avec les observations de la nourrice de l'enfant qui l'accueille régulièrement ;

Attendu qu'il n'est nullement établi que la prescription de semelles orthopédiques pour l'enfant serait liée au port de chaussures d'une taille inadaptée, le témoignage de la concubine de Monsieur A... sur ce point apparaissant dénué de la neutralité nécessaire ; que surtout, le carnet de santé de l'enfant et le médecin traitant confirme la régularité du suivi médical et l'absence de toute négligence de la mère sur ce point ;

Attendu que s'il est établi que Monsieur A... a du garder Ryan quelques jours en septembre 2010 après la fin de son droit de visite et d'hébergement du mois d'août, il n'est pas démontré que cette situation ne résultait pas d'un accord entre les parents d'autant que la nourrice de l'enfant en était prévenue ; qu'elle ne révèle pas un désintérêt de la mère pour son enfant ;

Attendu que l'attestation de l'assistante maternelle de Ryan qui déclare le garder depuis 2007 décrit une mère très présente et attentive aux besoins de l'enfant ; que deux amies attestant les qualités éducatives de Madame X... ;

Attendu qu'aucune de ces pièces n'est de nature à donner crédit aux doutes émis par l'intimé quant à la prise en charge satisfaisante dont bénéficie Ryan auprès de sa mère ; qu'il vit avec elle depuis la séparation ; qu'il n'existe aucun élément sérieux qui justifierait le transfert de sa résidence habituelle au domicile du père ;

Attendu qu'il convient donc de confirmer le jugement entrepris et en ce qu'il a fixé la résidence habituelle de Ryan chez sa mère, et en ses dispositions relatives au droit de visite et d'hébergement qui correspondent exactement à l'intérêt de l'enfant ;

Sur la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant

Attendu que conformément à l'article 371-2 du Code civil, les parents contribuent à l'entretien et à l'éducation de l'enfant en fonction des besoins de celui-ci et de leurs ressources respectives ; que cette obligation n'est pas limitée à la minorité et se poursuit au bénéfice de l'enfant majeur dans le besoin ou demeuré à charge, notamment du fait de la poursuite de ses études ou de la recherche d'un emploi ;

Attendu que Monsieur A... reproche à Madame X... de ne pas faire toute la lumière sur sa situation actuelle d'étudiante, de mère au foyer ou de demandeur d'emploi, notamment au regard de ses frais de garde élevés ;

Qu'il soutient qu'elle bénéficie de revenus occultes ;

Attendu que les ressources et charges des parties ont été exposées ci-dessus ; qu'aucun élément ne conforte les affirmations de l'intimé quant à des revenus dissimulés de son épouse ;

Attendu que Madame X... bénéficie par ailleurs de la Paje pour l'enfant Ryan, d'un montant mensuel de 220 Euros ;

Attendu qu'elle fait état de frais d'assistante maternelle agréée pour Ryan d'environ 350 Euros par mois au cours de l'année 2010 ; que cependant l'enfant âgé de 5 ans est scolarisé ; que la justification de cette charge, très disproportionnée au regard des revenus de l'appelante, parait très contestable en l'absence de toute activité professionnelle rémunérée ;

Attendu qu'au vu des besoins de l'enfant, et des situations financières très disparates des parents, il convient de condamner Monsieur A... à verser une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant d'un montant mensuel de 280 Euros et de réformer en ce sens le jugement entrepris ;

Sur la demande d'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents

Attendu qu'en application de l'article 373-2-6 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi no2010-769 du 9 juillet 2010, le Juge aux affaires familiales peut, pour garantir l'effectivité et la continuité des liens de l'enfant avec chacun de ses parents, le Juge aux affaires familiales peut ordonner l'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents ;

Attendu que Monsieur A... fait valoir que le risque que Madame X... reparte en Tunisie avec l'enfant est sérieux ; qu'en effet elle a déjà exprimé ce souhait ;

Attendu que Madame X... réplique qu'elle s'est rendue à quatre reprises dans son pays avec Ryan depuis la séparation, et qu'ils en sont toujours revenus ; que Ryan a la double nationalité ;

Attendu qu'il est de l'intérêt de Ryan de connaitre sa famille maternelle qui vit en Tunisie ; qu'il ne saurait être reproché à sa mère ses séjours dans ce pays dans cet objectif, voyages à l'issue desquels elle est toujours revenue en France ;

Attendu qu'il n'est démontré par aucune pièce que Madame X... aurait évoqué son intention de revenir vivre en Tunisie avec l'enfant commun ;

Attendu que le risque invoqué par le père n'est donc fondé sur aucun élément sérieux ; qu'il convient de confirmer le jugement entrepris ayant rejeté la demande d'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents ;

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile

Attendu que s'agissant d'un divorce prononcé aux torts exclusifs de l'époux, il convient de le condamner aux dépens de première instance et d'appel ;

Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de débouter Madame X... de sa demande d'indemnité fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé le divorce des époux A...-X... avec toutes ses conséquences de droit quant à la publicité et à la liquidation des droits matrimoniaux des parties ;

L'infirme sur les torts, les chefs des dommages et intérêts, de la prestation compensatoire et de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

Dit que le divorce est prononcé aux torts exclusifs de Monsieur Guillaume A... ;

Condamne Monsieur Guillaume A... à payer à Madame Sarra X... une somme de 2. 000 Euros de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du Code civil ;

Condamne Monsieur Guillaume A... à payer à Madame Sarra X... une prestation compensatoire en capital d'un montant de 8. 000 Euros ;

Condamne Monsieur Guillaume A... à verser à Madame Sarra X... une pension alimentaire mensuelle de 280 Euros au titre de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant Ryan ;

Dit que cette pension alimentaire sera indexée sur l'indice national des prix à la consommation des ménages urbains, série France entière, publié par l'INSEE et révisée chaque année en fonction de la variation de cet indice à la date anniversaire de la décision entreprise ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;

Déboute les parties de toutes demandes distinctes, plus amples ou contraires ;

Déboute Madame Sarra X... de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Monsieur Guillaume A... aux dépens engagés en première instance et en cause d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle ;

Le Greffier, Le Président,

C. COMMANSP. BIROLLEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 7 section 2
Numéro d'arrêt : 10/01395
Date de la décision : 31/03/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2011-03-31;10.01395 ?
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