COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 10/02/2011
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N° de MINUTE :
N° RG : 08/09271
Jugement (N° 08/00017)
rendu le 04 Novembre 2008
par le Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale d'AVESNES SUR HELPE
REF : SVB/CD
APPELANTE
SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN
prise en la personne de ses représentants légaux
Ayant son siège social [Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour
Assistée de Me NINOVE, avocat au Barreau de LILLE substitué par Me FOSSAERT
INTIMÉES
SARL MANUFACTURE PET PRODUCTS
société à responsabilité limitée de droit tunisien
prise en la personne de ses représentants légaux
Ayant son siège social [Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour
Assistée de Me Yves LETARTRE, avocat au barreau de LILLE
SARL MBV DIFFUSION
en dissolution, prise en la personne de son liquidateur amiable Mr [K] [J]
Ayant son siège social [Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour
Assistée de Me Yves LETARTRE, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Christine PARENTY, Président de chambre
Jean Michel DELENEUVILLE, Conseiller
Sophie VALAY-BRIERE, Conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Véronique DESMET
DÉBATS à l'audience publique du 16 Décembre 2010 après rapport oral de l'affaire par Sophie VALAY-BRIERE
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 10 Février 2011 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Christine PARENTY, Président, et Véronique DESMET, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11/10/2010
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Vu le jugement contradictoire du 4 novembre 2008 du tribunal de grande instance à compétence commerciale d'Avesnes-sur-Helpe qui statuant sur les seules demandes principales et reconventionnelles, a rejeté pour partie la demande en paiement de dommages et intérêts formée par la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN au titre des mesures conservatoires et l'a déboutée sur ce chef pour le surplus, a débouté la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN de sa demande en paiement de dommages et intérêts fondée sur le non respect des engagements de non concurrence et en ce qui concerne le préjudice invoqué du fait de la distribution de produits contrefaits, a condamné la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN, avec exécution provisoire, à payer à la société MPP la somme de 655 236,91 € avec intérêts au taux légal à compter de la réception de chacune des mises en demeure des 11 octobre, 2 novembre et 3 décembre 2007 pour les montants y étant mentionnés et de l'assignation du 9 janvier 2008 pour le solde restant dû, ordonné la capitalisation des intérêts, débouté la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN de sa demande en résiliation judiciaire aux torts exclusifs des sociétés MPP et MBV DIFFUSION, condamné la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN à payer à la société MPP la somme de 3500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et débouté la société MBV DIFFUSION à ce titre ;
Vu l'appel interjeté le 12 décembre 2008 par la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN ;
Vu les conclusions déposées le 29 avril 2010 pour cette dernière ;
Vu les conclusions déposées le 3 juin 2010 pour la SARL MANUFACTURE PET PRODUCTS (MPP) et la SARL MBV DIFFUSION en liquidation ;
Vu l'ordonnance de clôture du 11 octobre 2010 ;
La SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN a interjeté appel aux fins d'infirmation du jugement entrepris. Elle sollicite de la Cour qu'elle prononce la résiliation judiciaire du contrat de fourniture exclusive contenu dans l'acte de cession du 18 janvier 2006 aux torts de la société MPP, à tout le moins qu'elle juge que le comportement de la société MPP est d'une telle gravité qu'il a justifié la résiliation unilatérale par la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN de son contrat de fourniture exclusive, qu'elle condamne la société MPP à lui payer la somme de 150 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis, de lui donner acte qu'elle a payé à la société MPP la somme de 655 236,91 € au titre des factures impayées, qu'elle condamne la société MPP à lui rembourser la somme de 155 534,39 € au titre des erreurs de facturation et celle de 3 000 € allouée par le tribunal sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'à lui payer 400 000 € à titre de dommages et intérêts pour saisies abusives et 10 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle soutient pour l'essentiel qu'en suite de la délocalisation de la production au profit de la société MPP, celle-ci a commis de nombreuses erreurs sur les quantités, les facturations et les délais de livraison, n'a pas respecté la clause de non concurrence, a augmenté ses prix au mépris de la convention et lui a livré des produits comportant un tissu BURBERRYS contrefait ; que ces manquements contractuels l'ont contraint à s'adresser à d'autres fournisseurs pour ne pas perdre sa clientèle et justifient sa demande de résiliation judiciaire du contrat de fournitures aux torts de la société MPP. Elle ajoute que pour garantir les créances dont elle se prévalait (483 751,74 € et 189 543,17 €), la société MPP a fait procéder entre les mains de ses banques et de l'un de ses clients à deux séries de saisies et a bloqué abusivement plus d'un million d'euros lui occasionnant ainsi un préjudice.
Les SARL MPP et MBV DIFFUSION, en liquidation, sollicitent la Cour de :
à titre principal,
- débouter la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN de l'ensemble de ses demandes,
- juger que la société MPP n'a commis aucune faute contractuelle susceptible de justifier la résiliation du contrat de fourniture exclusive à ses torts,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN de sa demande de résiliation judiciaire ou en tant que de besoin, constatant que la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN a rompu ses relations commerciales de manière unilatérale, de juger que cette résiliation est à ses torts exclusifs,
- juger que la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN est irrecevable et mal fondée à solliciter sa condamnation à lui payer 400 000 € à titre de dommages et intérêts pour saisies abusives et l'en débouter,
à titre incident,
- réformer le jugement en ce qu'il a déduit de la créance de la société MPP la somme de 18 023 € et d'ordonner le paiement de cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2007 et capitalisation,
- condamner la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN à payer à la SARL MPP la somme de 673 294,91 €,
- donner acte à la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN de ce qu'elle a déjà payé 655 236,91 €,
en toute hypothèse,
- condamner la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN à leur payer à chacune 10.000€ pour la couverture de leurs frais irrépétibles.
Elles demandent à la Cour de prendre acte que la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN reconnaît expressément qu'elle a rompu unilatéralement le contrat de fourniture exclusive dont la résiliation judiciaire est sollicitée. Elles font valoir que la société MPP n'a commis aucune des prétendues fautes contractuelles invoquées quant à la qualité des produits, aux retards de livraison, à la violation de la clause de non concurrence, au dénigrement, à l'augmentation des tarifs, aux contrefaçons susceptibles d'entraîner la résiliation du contrat. Elles ajoutent que la preuve d'erreurs de facturation n'est pas rapportée et rappellent que les jugements relatifs aux saisies pratiquées, rendus tant par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance d'Avesnes sur Helpe statuant commercialement que par Madame le juge de l'exécution, ont autorité de la chose jugée.
Il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens, selon ce qu'autorise l'article 455 du Code de procédure civile.
SUR CE
Les sociétés ETABLISSEMENTS RENE MARTIN et MBV DIFFUSION étaient des filiales de la SAS MBJFI.
La société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN a pour activité le commerce en gros de produits et fournitures destinés aux animaux de compagnie et notamment les chiens et les chats.
Elle était dirigée par Monsieur [K] [J] également dirigeant des sociétés MBV DIFFUSION et MPP, SARL de droit tunisien, lesquelles ont pour activité la fabrication et la commercialisation d'articles et d'accessoires pour animaux.
Par convention en date du 16 janvier 2006, Monsieur [J], agissant en son nom personnel et au nom des co-actionnaires de la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN ainsi que de la société MBJFI, a conclu avec la SAS ADELIE INVEST dont Monsieur [U] [L] ancien directeur commercial de la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN est le président, un acte de cession de la totalité des actions de cette dernière.
Cet acte prévoyait que Monsieur [J] bénéficierait d'un contrat de travail en qualité de directeur au sein de la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN jusque fin décembre 2006.
Une clause était également stipulée aux termes de laquelle la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN s'engageait à se fournir exclusivement et pendant cinq années auprès des sociétés MPP et MBV DIFFUSION s'agissant des articles de cuir et de confection canine en contrepartie de quoi les cédants et la société MPP s'engageaient, d'une part, à fabriquer tous les articles de la gamme MARTIN au meilleur prix calculé sur les mêmes bases que les années précédentes et, d'autre part, à ne pas concurrencer pendant la même durée la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN auprès de la clientèle de détaillants et de grossistes dans le domaine de l'animalerie, de la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN arrêtée au 31 décembre 2005, sur l'ensemble du territoire français.
Le 30 juin 2006, la société MBV DIFFUSION était dissoute par décision de son assemblée générale extraordinaire, Monsieur [J] étant désigné en qualité de liquidateur amiable. A compter de cette date, la production de la société MBV DIFFUSION a été délocalisée en Tunisie au profit de la société MPP.
Considérant que la SA ETABLISSEMENTS RENE MARTIN lui devait paiement de factures impayées et avait manqué à ses obligations contractuelles résultant de la convention de fourniture exclusive, la société MPP a saisi le Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale d'Avesnes sur Helpe pour obtenir paiement et réparations des préjudices subis.
La société MBV DIFFUSION est intervenue volontairement à la procédure.
Par deux jugements en date du 4 novembre 2008, le tribunal a ordonné la disjonction de l'instance l'une sur les demandes principales et reconventionnelles et l'autre sur les demandes additionnelles dans laquelle une expertise était ordonnée.
L'expert a déposé son rapport courant novembre 2009.
1- Sur la demande de résiliation du contrat de fourniture exclusive formée par la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN
Dans ses écritures, la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN demande tout à la fois à la Cour de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de fourniture exclusive contenu dans l'acte de cession du 18 janvier 2006 et de juger que le comportement fautif de la société MPP a justifié la résiliation unilatérale par elle-même du contrat de fourniture exclusive.
Au demeurant, il ressort du jugement qu'il a été dit à l'audience devant les premiers juges que les parties avaient cessé leurs relations commerciales.
Par suite, la Cour ne peut se prononcer sur la résiliation d'un contrat qui a déjà été résilié de fait mais doit rechercher si les motifs qui ont conduit la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN à le résilier unilatéralement étaient fondés.
A l'appui de sa demande, la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN invoque des problèmes de qualité et de livraison et prétend que la SARL MPP n'a pas respecté ses obligations relatives à la clause de non concurrence, à l'augmentation des prix, et lui a fourni des tissus contrefaits.
* la qualité des produits et les délais de livraison
Il ressort des échanges de mails et de l'expertise (page 18) versés aux débats que la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN a été amenée à signaler un certain nombre de défauts et de problèmes de livraison. A titre d'exemples, l'expert a retenu 7 mails relatifs à des problèmes de qualité entre le 20 juin 2006 et le 12 septembre 2007 et 10 mails relatifs aux livraisons entre le 13 septembre 2006 et le 20 septembre 2007.
Les photographies produites (pièce 77) et les commentaires joints, dont l'auteur n'est pas mentionné, ne sont pas probants s'agissant manifestement de produits en cours d'élaboration et non de produits finis mis en vente.
Les courriers émanant des clients ANIMALIS et TRUFFAUT en date des 12 février 2007 et 2 mai 2007 ne permettent pas d'imputer les ruptures invoquées à la société MPP.
Certains désordres quant à la qualité ne sont pas sérieusement contestés. Toutefois, leur nombre, bien que légèrement supérieur à celui relevé par l'expert, est très peu important par rapport au volume des échanges entre les parties, le chiffre d'affaire annuel de la société MPP pour les produits vendus à la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN étant de 2 186 620 € en 2006 et de 2 088 338 € en 2007 (page 16 de l'expertise).
Au demeurant, il est établi par les écritures des parties et l'expertise, qu'au moment de la cession de la société RENE MARTIN, celle-ci n'a pas modifié ses modalités d'approvisionnement alors que les deux sociétés n'appartenaient plus au même groupe ni transmis de cahier des charges relatif au travail à façon. Ce dernier n'aurait été établi qu'en juin 2006 selon un mail du 19 juin 2006. En outre, Monsieur [N], qui gérait les approvisionnements de matières premières et encadrait la production n'a pas été remplacé lors de son départ de la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN en septembre 2006.
Enfin, il est reconnu par la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN dans un mail du 23 novembre 2006 qu'un défaut de qualité est imputable non à la société MPP mais à un fournisseur de tissus.
S'agissant des problèmes de livraison, l'expert indique qu'ils semblent provenir de causes multiples dont deux imputables à la société MPP, à savoir : difficultés d'approvisionnement en matières premières de la société MPP et transfert des commandes de la société MBV DIFFUSION à MPP, et deux autres imputables à la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN soit : utilisation par cette dernière de stock de matières dans ses ateliers et demande d'une livraison unique par commande, laquelle ne pouvait pas être respectée comme rappelé par la société MPP dans un mail du 22 janvier 2007 eu égard à sa capacité de stockage.
Les parties ne justifient d'aucun document négocié entre elles sur des délais de livraison à respecter, les bons de commande témoignant au contraire que la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN imposait parfois des délais de livraison très, voire trop, courts notamment en été (cf. Bons de commande du 8 novembre 2006 pour une livraison entre le 13 et le 18 novembre 2006, du 4 avril 2007 pour le 30 avril 2007, du 4 juillet pour le 1 août 2007, 5 juillet pour le 6 juillet 2007 ou 5 juillet pour le 31 août 2007) .
Par suite, ces désordres ne pouvaient pas justifier la résiliation unilatérale du contrat de fourniture exclusive.
Le jugement sera donc confirmé de ce chef.
* la clause de non concurrence
Aux termes de l'article V 2°), intitulé 'clause de non concurrence' de l'acte de cession, 'les cédants et la société MPP SARL...s'interdisent formellement, pendant un délai de cinq (5) ans à compter du 4 janvier 2006, de concurrencer la société 'Ets RENE MARTIN' auprès de la clientèle de détaillants et de grossistes, dans le domaine de l'animalerie, de la société 'ETS RENE MARTIN' arrêtée au 31 décembre 2005, sur l'ensemble du territoire français, à peine de tous dépens, dommages et intérêts ...La présente clause ne trouvera pas à s'appliquer pour les société MBV DIFFUSION, EURO SELECTION, MPP SARL pour les clients ci-après limitativement énumérés, savoir....Pour le client TRUFFAUT, la société MPP s'oblige à ne pas commercialiser et fabriquer directement tout article en cuir'.
La société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN soutient que la société MPP a violé cette clause en fournissant la société FLAMENGO qui a créé une filiale en France, toutefois la preuve n'est pas rapportée que la société MPP a livré la SARL FLAMMINGO FRANCE en produits MARTIN selon ce qu'ont expliqué les premiers juges dans une motivation que la Cour adopte sans changement.
S'agissant de la société LOVELY DOG, si le mail du 4 juillet 2006 établi par Monsieur [J] mentionne 'lors de mon dernier voyage en Tunisie, je me suis rendu compte que le client LOVELY DOG (oublié dans le protocole comme client MPP) avait passé une petite commande, j'ai demandé à MPP de ne plus le livrer et de l'orienter chez MARTIN', constitue la reconnaissance d'un manquement à ses obligations contractuelles, il est démontré qu'il a remédié à la situation puisque le 4 décembre 2006 la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN lui demandait par mail les prix MARTIN de la gamme LOVELY DOG.
Au demeurant, la preuve de l'importance de cette commande et de ses conséquences éventuelles n'étant pas démontrée, elle ne peut justifier la résiliation unilatérale du contrat.
Contrairement à ce qui est soutenu, le mail de Madame [C] de la société JARDILAND ne démontre pas l'existence de démarches par la société MPP des clients de la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN.
Selon l'appelante, 'la comparaison réalisée par l'expert entre l'inventaire du stock appartenant à RENE MARTIN établi en décembre 2007 et celui établi en juin 2009 montre qu'entre les deux dates des articles ont disparus, ce qui laisse à penser que la société MPP a vendu ces articles pourtant appartenant exclusivement à société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN' . Outre qu'il ne s'agit que d'une hypothèse non démontrée, l'expert indique dans son tableau comparatif en rouge qu'en juin 2009, il y avait de nouveaux articles en stock qui n'étaient pas présents en décembre 2007 et évalue ce stock à 377 477,67 € supérieure à l'évaluation de l'appelante.
Enfin, la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN affirme que la société MPP utilise des 'tissus exclusifs RENE MARTIN' pour approvisionner des concurrents. Or comme l'a justement relevé le tribunal, le constat établi le 27 juin 2008 par Maître [T], huissier de justice, est imprécis dès lors que l'identité du fournisseur de la marque ANIFA n'est pas identifié. Le mail du 29 janvier 2006 de Monsieur [L] faisant état de la livraison des mêmes tissus que GIRARD 'qui livre CARREFOUR' n'est pas plus probant en l'absence d'autre élément.
* le dénigrement
La société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN prétend que Monsieur [J] la dénigrerait.
Toutefois la pièce produite à l'appui de ses allégations émane non pas de la société MPP ou de son dirigeant mais de Madame [R] [V] ancienne salarié de la société MBV DIFFUSION actuellement employée par la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN.
Le grief ne peut donc justifier là encore la résiliation unilatérale du contrat.
* les prix
L'article V,3°) intitulé 'obligations commerciales' précise 'la société MPP s'engage à fabriquer tous les articles de la gamme MARTIN au meilleur prix calculé sur les mêmes bases que les années précédentes'.
La société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN invoque une augmentation unilatérale des tarifs de 3 à 20 % selon les articles en violation de cette clause.
Par lettre du 4 mai 2007, la SA RENE MARTIN informe la holding MBJFI de ce qu'elle lui aurait facturé abusivement 83 207 € HT et qu'en raison de la violation de cet engagement, elle va mandater son avocat pour solliciter la résiliation.
Les grilles tarifaires de la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN datent du 16 février 2006 pour la confection et concernent les années 2005 et 2006 pour la sellerie.
Les différentes factures produites par la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN démontrent effectivement une augmentation de certains tarifs entre les années 2002/2003 et 2006/2007.
Toutefois la comparaison des prix entre les bons de commande, les factures et les grilles tarifaires MPP (pièces 87 et 157) connues car appliquées par la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN dans ses bons de commande montre une corrélation, exemples :
Facture du 9 décembre 2005 :collier cuir gras T25/50 Bleu 2,120 € HT
collier intervention poignée T65 noir 11,290 € HT
collier cuir gras marron T30/60 2,77 € HT
Facture du 20 janvier 2006 : collier cuir gras T25/50 Bleu 2,180 € HT
collier cuir gras marron T30/60 2,85 € HT
Bon de commande n°D7020083 du 12 février 2007 :corbeille haute 40 cm 7,10 € HT
Bon de commande n°D7030101 du 20 mars 2007 :corbeille classique tissu 45 cm 2,70 €
Dôme tissu 45 cm 9,50 € HT.
C'est en vain que la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN prétend qu'elle n'a pris conscience des augmentations tarifaires que tardivement à l'occasion de la clôture de l'exercice 2006 dès lors que la vérification opérée par sondage démontre qu'elle même a appliqué les nouveaux tarifs.
Le rôle de Monsieur [J] dans cette augmentation n'est pas plus démontré.
Au demeurant, la clause contractuelle n'interdit pas d'augmenter les prix.
La comparaison des prix proposés par MPP aux sociétés RENE MARTIN et GIRARD tels qu'ils résultent des factures FF0976 du 13 janvier 2006 et FA1004 du 17 février 2006, démontre que si pour certains articles comme par exemple 'série de 7 corbeilles T45 à T80 référence 13000748, coussin relax T53 ref 11160053 ou T77 ref 11160077, série de 6 corbeilles T45 à T65 ref.13000546" les tarifs proposé à GIRARD sont effectivement inférieurs, en revanche pour d'autres comme par exemple 'Corbeille chat ouate T40 ref 13220040 ou T45 ref 13220045 ou T55 ref.132200", ils sont supérieurs.
Enfin, la société MPP répond sans être démentie, que la différence de tarifs est justifiée par l'apposition du logo à son nom exigée par la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN.
* la contrefaçon
La société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN reproche à la société MPP de lui avoir fourni des corbeilles revêtues d'un tissus contrefaisant la marque BURBERRYS.
Cette contrefaçon est contestée par la société MPP qui produit une lettre de son fournisseur attestant que le dessin a été réalisé par sa société sans toutefois en justifier.
En l'absence d'autre élément et de preuve quant au préjudice qui en serait résulté, ce grief ne peut justifier la résiliation du contrat.
S'agissant des contrefaçons des marques AGATHA et CHIPIE, il en est de même, le procès-verbal transactionnel daté du 31 décembre 2007 n'étant pas signé et l'état de la procédure engagée par la SARL AGATHA DIFFUSION selon exploit d'huissier du 10 septembre 2007 n'étant pas justifié par la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN.
Dans ces conditions, la société MPP n'a commis aucune faute contractuelle justifiant la résiliation unilatérale de la convention d'exclusivité à ses torts et c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN de ses demandes en paiement de dommages et intérêts à ce titre.
3- Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour saisies abusives
Il résulte des pièces produites par la SARL MPP qu'à ce jour, elle a donné mainlevée de l'ensemble des saisies conservatoires pratiquées à l'encontre de la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN les 27 décembre 2007 et 5 février 2008, l'intégralité des sommes saisies étant consignées sur un compte séquestre ouvert auprès de la CARPA.
Par jugement du 13 février 2008, le juge de l'exécution provisoire du Tribunal de Grande Instance d'Avesnes SUR HELPE a débouté la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN de sa demande tendant à obtenir le paiement de 400 000 € à titre de dommages et intérêts pour saisies abusives.
Cette décision ayant autorité de la chose jugée, c'est à bon droit que les premiers juges ont débouté la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN de sa demande identique.
4- Sur la demande en paiement de factures impayées formulée par la société MPP
La société MPP sollicite à ce titre la somme de 673 294,91 €.
Le tribunal a fait droit à cette demande à hauteur de 655 236,91 € au motif qu'il existe un certain nombres d'erreurs apparaissant sur les factures produites pouvant être évaluées à 18 023 € HT. S'il précise que ces erreurs relèvent soit d'un prix inexact soit de quantités erronées, il ne les détaille pas.
La société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN évalue le montant des 'erreurs' de facturation dont elle demande le remboursement à 145 114,88 € soit 155 534,39 € TTC, déduction faite de la somme de 18 023 € retenue par le tribunal. Elle en justifie par la production d'un tableau (pièce 71) reprenant les écarts de prix.
Dés lors, qu'il a déjà été dit que l'augmentation des prix était d'une part connue de la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN et d'autre part dépourvue de tout abus, ce document ne peut rapporter la preuve des erreurs invoquées.
S'agissant du tableau non daté et dont le rédacteur n'est pas connu (pièce 70), reprenant des commandes non soldées, des produits non commandés et le nombre de livraisons par commande, il ne peut faute de production des bons de commandes visés et des bons de livraison y afférents justifier des erreurs invoquées, alors au demeurant que l'appelante ne justifie d'aucun retour de produits non commandés et qu'elle reconnaît elle-même dans ses écritures qu'en raison du nombre de livraisons le pointage en était complexe et fastidieux.
Le jugement sera donc réformé sur ce point et la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN condamnée au paiement de la somme de 673 294,91 € soit compte tenu des règlements intervenus (655 236,91 €) un solde de 18 023 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 3 décembre 2007.
5- Sur les autres demandes
La société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN qui succombe sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SARL MPP les frais exposés par elle en cause d'appel et non compris dans les dépens ; il lui sera alloué la somme de 6 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'indemnité allouée en première instance étant confirmée.
En revanche, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SARL MBV DIFFUSION, en liquidation, les frais exposés par elle en cause d'appel et non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris sauf sur le montant de la condamnation au titre des factures impayées ;
Statuant de ce chef,
Condamne la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN à payer à la SARL MPP la somme de 673 294,91 €, soit compte tenu du versement intervenu de 655 236,91 €, un solde de 18 023 € avec intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2007 ;
Condamne la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN à payer à la SARL MPP la somme de 6 000 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
Rejette la demande de frais irrépétibles d'appel de la SARL MBV DIFFUSION, en liquidation ;
Condamne la société ETABLISSEMENTS RENE MARTIN aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le GreffierLe Président
Véronique DESMETChristine PARENTY