COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 27/01/2011
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N° MINUTE :
N° RG : 09/06108
Jugement (N° 05/249)
rendu le 07 Mai 2009
par le Tribunal de Grande Instance de LILLE
REF : PC/VC
APPELANTE
S.A. DUBUS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
ayant son siège social : [Adresse 4]
Représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour
Assistée de Me Eric DELFLY, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉS
Madame [I] [Y] épouse [H]
demeurant : [Adresse 5]
Représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour
Assistée de Me PERICARD, avocat au barreau de PARIS
Monsieur [O] [H]
demeurant : [Adresse 6]
Représenté par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour
Assisté de Me PERICARD, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS à l'audience publique du 26 Octobre 2010 tenue par Pierre CHARBONNIER magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Pierre CHARBONNIER, Président de chambre
Catherine CONVAIN, Conseiller
Sophie VEJUX, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 27 Janvier 2011 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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LA COUR ;
Attendu que la société de bourse DUBUS a interjeté appel d'un jugement du Tribunal de grande instance de LILLE du 2 mai 2009 qui a condamné les époux [O] [H] et [I] [Y] in solidum à lui payer, après compensation avec les dommages-intérêts dont elle est elle-même tenue envers eux pour avoir enfreint les règles applicables au marché à terme, les sommes de 58.499,30 € et de 8.271,39 € au titre respectivement de l'insuffisance de couverture de leurs comptes portefeuilles n°[XXXXXXXXXX02] et n°[XXXXXXXXXX03] ;
Attendu que la Société DUBUS, réitérant devant la Cour les prétentions qu'elle avait antérieurement soumises au premier juge, demande la condamnation solidaire des époux [H]/[Y] à lui verser les sommes de 527.128,40 € et 181.689,51 € correspondant à l'insuffisance de couverture des comptes n°[XXXXXXXXXX02] et n°[XXXXXXXXXX03] au 14 septembre 2007 « sauf à parfaire en fonction de l'évolution du cours boursier », outre 4.000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que les époux [H]/[Y] qui reprochent à la Société DUBUS d'avoir passé des ordres de bourse en leur nom sans s'être munie d'un mandat à cette fin, et d'avoir manqué à ses devoirs d'information et de conseil envers eux, demandent que le déficit de leurs comptes soit entièrement pris en charge par la société de bourse en réparation des fautes dont elle est responsable ; qu'ils réclament reconventionnellement la condamnation de la Société DUBUS à leur régler une indemnité de 262.212,30 € égale au montant global des investissements boursiers dont ils ont essuyé la perte, ainsi qu'une somme de 10.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il ressort des éléments du dossier que les époux [H]/[Y] ont, par acte sous seing privé des 22 et 30 mai et 8 août 2000, souscrit trois conventions d'ouverture de compte de dépôt ordinaire sous les numéros [XXXXXXXXXX01] pour la femme, [XXXXXXXXXX02] au nom des deux conjoints et [XXXXXXXXXX03] pour le mari seul ; qu'à la demande des deux époux formulée le 7 mars 2001 le compte n°[XXXXXXXXXX01] a été clôturé et son contenu viré sur le compte n°[XXXXXXXXXX02] ; que les conventions successivement passées par les époux [H]/[Y] leur donnaient accès au marché à règlement mensuel, devenu depuis, à partir de septembre 2000, le marché à règlement différé régi par la Décision Générale du Conseil des Marchés Financiers (C.M.F.) n°2000-04 qui fixe les seuils minimaux de couverture exigibles pour ce type d'opérations ; que lors de l'ouverture du compte n°[XXXXXXXXXX03], transformé ultérieurement en compte joint entre le mari et la femme le 28 avril 2001, [O] [H] avait, le 8 août 2000, opté pour la possibilité de conclure des ventes dites à découvert ; que gérant ainsi personnellement leurs portefeuilles, les époux [H]/[Y] ont, du 21 août 2000 au 14 juin 2001, procédé à l'acquisition de nombreuses valeurs mobilières sur le marché du règlement mensuel telles que STMICROELECTRONICS, FRANCE TÉLÉCOM, SANOFI-AVENTIS, ALCATEL, THOMSON, EQUANT et CANAL + ; que parallèlement, leurs portefeuilles se dégradaient de manière sensible au point que leurs positions, reportées de mois en mois avec l'accord de la Société DUBUS qui acceptait de différer la liquidation des opérations laissées en suspens, n'étaient bientôt plus couvertes dans les proportions prescrites par la décision C.M.F. n°2000-04, de 20 % en espèces, 25 % en obligations ou 40 % en titres de capital ;
Attendu que l'insuffisance de couverture des engagements pris par les époux [H]/[Y] a été définitivement constituée les 3 février 2001 et 17 janvier 2002 pour les comptes n°[XXXXXXXXXX02] et [XXXXXXXXXX03], dates auxquelles l'avoir réalisable inscrit sur ces comptes est devenu négatif ; que ce découvert s'est graduellement élevé au 14 septembre 2007 à la somme non contestée de 527.128,40 € pour le compte n°[XXXXXXXXXX02] et de 181.689,51 € pour le compte n°[XXXXXXXXXX03], montants sur lesquels le tribunal a imputé, par voie de compensation, les dommages-intérêts dus par la Société DUBUS à ses
clients ;
Attendu que c'est par des motifs pertinents et que la Cour adopte que le premier juge, relevant d'une part que les conventions souscrites par les époux [H]/[Y] leur permettaient d'investir sur le marché à terme, d'autre part que le mari avait, à l'ouverture du compte n°[XXXXXXXXXX03], sollicité l'autorisation spéciale de procéder à des ventes à découvert et enfin que tous deux avaient été destinataires d'avis d'opérés relatifs aux opérations exécutées sur les valeurs mobilières au reçu desquels ils n'avaient pas élevé de protestations, en a déduit que lesdits époux n'étaient pas justifiés à alléguer que la Société DUBUS aurait de sa seule initiative passé des ordres qui ne lui avaient pas été antérieurement transmis par les titulaires des comptes ;
Attendu que pendant la période de reports successifs des opérations effectuées par les époux [H]/[Y], la Société DUBUS était actuellement propriétaire des titres achetés par ses donneurs d'ordre et détentrice du prix de vente des titres cédés dont ceux-ci repoussaient la livraison ; que l'entreprise d'investissement, quand même elle attendait que ses clients aient reconstitué la couverture pour dénouer les opérations en cours, n'était donc pas dans la situation d'un établissement dispensant un crédit à son cocontractant ; que le débit du compte qui résulte de l'imputation immédiate des pertes virtuelles sur la couverture, ne se réalise, pour autant que ces pertes soient confirmées, qu'au dénouement effectif de la position concernée ;
Attendu que, comme le premier juge l'a retenu à bon droit, les époux [H]/[Y] sont donc bien débiteurs de l'insuffisance de couverture qui ne procède ni de spéculations contraires à leur volonté, ni de l'octroi irrégulier d'un prêt dont ils n'auraient pas sollicité le bénéfice ;
Attendu que les époux [H]/[Y], lorsqu'ils ont souscrit les conventions d'ouverture des comptes des 22 et 30 mai et 8 août 2000, sous l'intitulé "la Charte DUBUS SA", ont opté pour la possibilité de passer eux-mêmes des ordres à la société de bourse plutôt que de confier à celle-ci la gestion de leurs portefeuilles ; qu'ils ont, à l'annexe 1 du contrat, apposé une mention manuscrite aux termes de laquelle ils déclaraient avoir des connaissances suffisantes, boursières et techniques, pour « passer des ordres en direct avec ou sans fil sur les marchés boursiers » ; que par deux autres mentions de leur main ils ont, à l'article 18 et au pied de l'annexe 3, certifié avoir pris connaissance des règles relatives aux positions qu'ils étaient susceptibles de prendre sur les différents marchés et, plus généralement, de la totalité de la charte et de ses trois annexes ; que la Société DUBUS, à l'article 6 de chaque convention, exposait à ses clients les obligations auxquelles ils devraient se soumettre ;
Mais attendu que sur la « Fiche d'identité client » jointe à chacun des contrats et remplie le même jour, les époux [H]/[Y] se présentaient, le mari comme « dentiste » et, la femme, comme « expert comptable » ; que cette seule précision ne permet pas d'inférer que les intéressés aient alors exercé une activité professionnelle qui les aurait mis en rapport avec le monde des affaires en les assurant d'une culture financière minimale ; qu'il n'apparaît pas davantage, dans la convention souscrite par les parties, que l'un ou l'autre des époux se soit déjà livré de manière directe et régulière et durant un temps significatif à des opérations d'achat et de cession de titres sur le marché boursier à terme ou à des spéculations d'une nature approchante ; que sur le contrat, [O] [H] et [I] [Y], s'ils qualifiaient de « suffisante » leur connaissance de certains instruments financiers et indiquaient se fixer pour objectif prioritaire la constitution d'un « portefeuille classique » et, par ce moyen, l'augmentation de leurs revenus, ne fournissaient à la société de bourse aucun élément sur leur situation financière ; que la convention
qui les renvoyait dans son annexe 1 à consulter la rubrique « Evaluez vos aptitudes » sur le site Internet ou le service Minitel de l'établissement, ne leur proposait pour le reste qu'un rappel des caractéristiques et risques des différents modes d'investissement et techniques du marché, parmi lesquelles l'effet de levier du Règlement Mensuel et le report des achats ou des ventes à la fin du mois boursier ; que cette information rédigée en termes généraux à l'intention de toute espèce de clientèle, ne comportait aucune mise en garde spécifique répondant aux besoins particuliers de l'investisseur signataire ;
Attendu qu'il n'apparaît par suite pas que la Société DUBUS ait, lors de l'ouverture des comptes, ainsi que le lui prescrivaient les articles L.533-4 du Code Monétaire et Financier et 3-3-5 du règlement général du Conseil des Marchés Financiers, alors applicables, procédé à l'évaluation de la compétence de ses clients, s'agissant de la maîtrise des opérations spéculatives envisagées et des risques courus dans ces opérations, ni qu'elle leur ait fourni une information adaptée en fonction de cette évaluation ;
Attendu que le manquement de la Société DUBUS à son devoir d'information a privé les époux [H]/[Y] d'une chance de renoncer au projet d'effectuer des opérations à terme, et d'échapper ainsi au risque de perte qui s'est finalement réalisé et a provoqué leur appauvrissement ;
Attendu que les époux [H]/[Y], pour caractériser dans toutes ses composantes, la faute de la Société DUBUS, allèguent encore que celle-ci aurait manqué également à son obligation d'information pendant l'exécution du contrat où elle aurait dû les mettre en garde contre le danger auquel ils s'exposaient, d'abord en investissant de manière intensive dans la valeur ALCATEL et ensuite en ajournant la liquidation de leurs positions
débitrices ;
Attendu que, cependant, le reproche fait par les époux [H]/ [Y] à la Société DUBUS de leur avoir laissé ignorer les dangers d'un report de leurs engagements non couverts, n'est pas détachable du défaut de décision prise par l'intermédiaire financier pour liquider les positions de ses clients, abstention dont ceux-ci prétendent être totalement indemnisés ;
Attendu, d'autre part, que si le prestataire de service d'investissements est tenu, quelle que soit la nature juridique du contrat, d'informer son client des risques courus dans les opérations spéculatives sur les marchés à terme, il n'a pas, en l'absence de mandat de gestion, et sauf à s'immiscer dans les affaires de son client, à conseiller l'investisseur sur des opérations particulières dont celui-ci a le libre choix ; qu'au surplus les époux [H]/[Y] qui prétendent qu'il existait une incompatibilité entre les opérations qu'ils ont effectuées et les objectifs prioritaires révélés par les mentions figurant sur les conventions d'ouverture des comptes, n'expliquent pas en quoi un investissement même massif sur la valeur ALCATEL, cotée au CAC 40, aurait fait perdre à leurs portefeuilles leur caractère « classique » ;
Attendu que par une lettre du 5 mars 2001 les époux [H]/[Y] indiquaient à la Société DUBUS que, si leurs trois comptes étaient effectivement « à découvert », toutefois ils possédaient un portefeuille d'assurance-vie GROUPAMA qui leur procurait « une couverture financière largement supérieure » ; qu'ils annonçaient le déblocage des fonds nécessaires au renflouement de leurs comptes dans un délai de quelques semaines ; que le 18 avril 2001, les époux [H]/[Y] écrivaient à la Société DUBUS pour lui confirmer que, suivant leur accord, ils lui verseraient chaque mois une somme de 50.000 F « jusqu'à couverture totale du débit » et que, dans l'hypothèse où le solde n'aurait pas été apuré en mars 2003, le passif subsistant serait acquitté « lors du déblocage de l'assurance-vie GROUPAMA » ; que dans ce même courrier, les intéressés affirmaient à leur interlocutrice qu'ils lui seraient « reconnaissants de ne pas clôturer les comptes » ; que le 23 avril 2001 ils adressaient à la Société DUBUS un chèque de 500.000 F [76.224,51 €] afin d'en voir déposer la valeur sur le compte n°[XXXXXXXXXX03] ; que par des courriers recommandés avec demande d'avis de réception des 5 septembre 2001 pour le compte n°2235130700 et 4 avril 2002 pour le compte n°[XXXXXXXXXX02], la Société DUBUS attirait de nouveau l'attention de ses clients sur la quotité de leurs engagements qui excédait les limites autorisées eu égard à l'actif en dépôt ; qu'elle renouvelait ces rappels les 22 octobre 2001 et 15 mars 2002 et les 23 et 24 octobre 2003 où elle invitait les époux [H]/[Y] à résorber leur débit par un plan de versements échelonnés ;
Attendu que l'article 4-1-35-1 du Règlement général du C.M.F. dispose que « le prestataire qui reçoit un ordre à règlement ou livraison différés ne peut accepter un tel ordre de la part de l'investisseur que s'il obtient de celui-ci la constitution d'une couverture, soit dans ses livres, soit dans les livres du teneur de compte conservateur s'il n'assure pas lui-même cette fonction » ; que ce texte énonce encore que « lorsque le donneur d'ordre n'a pas, dans le délai requis, constitué ou complété la couverture ou rempli les engagements résultant de l'ordre exécuté pour son compte, le prestataire habilité procède à la liquidation partielle ou totale de ses engagements ou positions » ; que la décision n°2000-04 du C.M.F. en date du 30 août 2000 vient préciser dans ce même sens que la couverture des ordres avec service de règlement et de livraison différés initialement constituée est réajustée en cas de besoin en fonction de la réévaluation quotidienne de la position elle-même et des actifs admis en couverture de cette position, de telle sorte qu'elle corresponde en permanence au minimum réglementaire requis ; que dans cette hypothèse le prestataire met en demeure par tous moyens le client de compléter ou reconstituer sa couverture de marché ; qu'à défaut de complément ou de reconstitution de la couverture dans le délai requis, le prestataire prend les mesures nécessaires pour que la position du client soit à nouveau couverte ; que, sauf à ce que le prestataire et le client soient convenus de modalités différentes, le prestataire commence par réduire la position du client avant de réaliser tout ou partie de la couverture ;
Attendu que les époux [H]/[Y] relèvent que si leurs positions à partir du moment où elles étaient insuffisamment couvertes, avaient été aussitôt liquidées par la Société DUBUS, ils n'auraient pas laissé s'accumuler l'important solde négatif dont il leur est demandé de répondre aujourd'hui ; que la société de bourse qui a accepté de passer pour eux certains ordres alors que la couverture était insuffisante a par là encore contribué à l'aggravation de leur dette dont elle leur doit une entière réparation ;
Mais attendu que les époux [H]/[Y], informés en permanence de la situation de leurs comptes et de la répartition de leurs portefeuilles par le truchement du serveur "Bourse DUBUS on line" auquel il leur était loisible de se connecter à tout instant, et destinataires de courriers par voie électronique ou épistolaires par lesquels l'intermédiaire de bourse, dès avant le 5 mars 2001, a insisté auprès d'eux pour qu'ils remédient au débit de leurs comptes, avaient eux-mêmes le pouvoir, du moment que le solde négatif de ces comptes révélait des pertes, de liquider de leur propre chef leurs positions sans que cette décision les expose à une mise de fonds supplémentaire dont ils n'auraient pas eu la disponibilité ; que c'est donc librement que les époux [H]/[Y], sans plus passer de nouveaux ordres à partir du 26 septembre 2000 pour le compte n°[XXXXXXXXXX02], à l'exception de l'achat à règlement différé de cinq mille neuf cents actions ALCATEL le 20 avril 2001, et à partir du 14 juin 2001 pour le compte n°[XXXXXXXXXX03], ont choisi de reporter la liquidation de leurs engagements dans l'attente d'une conjoncture boursière plus favorable à leur exécution, en proposant à la société de bourse d'effectuer des versements d'espèces périodiques entre ses mains afin de reconstituer la couverture requise ;
Attendu, toutefois, que la Société DUBUS en ne veillant pas à la constitution d'une couverture suffisante en garantie de l'ordre d'achat reçu des époux [H]/[Y] le 20 avril 2001 où l'avoir réalisable du compte n°[XXXXXXXXXX02] était négatif de 52.499,30 €, a enfreint les exigences des articles 58 de la loi n°96597 du 2 juillet 1996 et L.533-4 du Code Monétaire et Financier qui lui faisaient obligation de respecter les règles de bonne conduite destinées à garantir la protection des investisseurs en même temps que l'intégrité du marché ; que, de même, en s'abstenant de liquider les positions de ses clients comme les règles du marché le lui commandaient, la société de bourse a commis une faute dont elle doit répondre dans la mesure de l'aggravation du solde débiteur qui en est résultée ;
Attendu que contrairement à ce que soutiennent les époux [H]/[Y], le manquement de la Société DUBUS à l'obligation de liquider les positions de son client, si cette inaction a provoqué de mois en mois le report des engagements insuffisamment couverts, ne saurait néanmoins s'analyser comme un fait d'immixtion abusive de la société de bourse dans la gestion des portefeuilles intéressés ;
Attendu que les époux [H]/[Y] sont fondés à réclamer la réparation du dommage qui découle pour eux de l'obligation d'avoir à reconstituer la couverture de leurs engagements dont l'insuffisance s'est progressivement accrue en raison de l'inertie de l'intermédiaire financier, peu important que, comme l'objecte la Société DUBUS, la provision à compléter soit sujette à varier quotidiennement suivant les fluctuations des cours boursiers ;
Attendu qu'il suit de ce qui précède que le débit des comptes doit, à proportion de la faute imputable à la Société DUBUS, peser sur celle-ci pour moitié ;
Attendu que les époux [H]/[Y] ont admis à l'audience l'actualisation de l'insuffisance de couverture au 26 octobre 2010, de 534.322,04 € pour le compte n°[XXXXXXXXXX02] et de 190.916,36 € pour le compte n°[XXXXXXXXXX03] ; que l'aggravation du déficit postérieure à la date à partir de laquelle celui-ci s'est définitivement constitué, soit le 3 février 2001 pour le compte n°[XXXXXXXXXX02] et le 17 janvier 2002 pour le compte n°[XXXXXXXXXX03], ressort respectivement aux sommes de (534.322,04 - 765,52=) 533.557,52 € et (190.916,36 - 8.271,39=) 182644,97 € ; que l'indemnisation pesant à la charge de la Société DUBUS s'élève ainsi à un montant global de (533.557,52 + 182.644,97 = ) 358.101,24 € ;
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Attendu que le défaut d'une information appropriée dispensée par la Société DUBUS à ses clients lors de l'ouverture du compte s'est traduite, pour les époux [H]/[Y], par la perte d'une chance d'échapper par une décision peut être plus judicieuse au risque qui s'est finalement réalisé ; que, les versements qu'ils ont effectués sur leurs comptes s'élevant à la somme non contestée de 262.212,30 €, et le déficit des comptes dont ils doivent assumer la charge à celle de 367.137,15 €, l'indemnité réparatrice de la chance perdue de choisir un placement financier plus prudent doit être évaluée au vu de l'ensemble des éléments de la cause, à la somme de 31.467,47 € correspondant à 5 % de l'assiette de calcul ainsi définie ;
Attendu que par suite de la compensation à opérer entre, d'une part la quotité du déficit du compte portefeuille dont les époux [H]/[Y] sont redevables envers la Société DUBUS et, d'autre part, l'indemnisation pesant sur cette dernière au titre de la perte d'une chance, la dette des clients représente la somme résiduelle de (367.137,15 - 31.467,47 =) 335.669,68 €, sans préjudice de l'application du même pourcentage de 5 % à la moitié des majorations ultérieures du débit, qui découleraient de l'évolution du cours boursier ;
Attendu que l'instance étant de l'intérêt des deux parties, chacune d'elles conservera la charge de ses propres dépens ;
Attendu qu'il n'apparaît pas équitable de faire supporter par les époux [H]/[Y] ou par la Société DUBUS les frais exposés par la partie adverse et non compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS ;
Statuant publiquement et contradictoirement ;
Réformant le jugement déféré ;
Dit que les époux [H]/[Y] sont solidairement débiteurs à l'égard de la Société DUBUS d'une somme de 725.238,40 € correspondant à l'insuffisance de couverture de leurs comptes portefeuilles numéros [XXXXXXXXXX02] et 22354300700 au 26 octobre 2010 ;
Dit que la Société DUBUS est redevable envers les époux [H]/[Y] d'une somme de 389.568,72 € à titre de dommages-intérêts, sans préjudice d'un dommage complémentaire calculé sur les bases ci-avant précisées dans le corps de cet arrêt, qui résulterait d'une majoration du débit consécutive à l'évolution du cours boursier après le 26 octobre 2010 ;
Condamne, après compensation, les époux [H]/[Y] solidairement à payer à la Société DUBUS la somme de 335.669,68 € au titre de l'insuffisance de couverture de leurs comptes portefeuilles numéros [XXXXXXXXXX02] et [XXXXXXXXXX03] arrêtés au 26 octobre 2010 ;
Déboute la Société DUBUS et les époux [H]/[Y], comme non fondés, de toutes prétentions plus amples ou contraires ;
Laisse aux époux [H]/[Y] et à la Société DUBUS la charge de leurs propres dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
A. DESBUISSONSP. CHARBONNIER