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28/10/2010 | FRANCE | N°09/04903

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 28 octobre 2010, 09/04903


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 2



ARRÊT DU 28/10/2010



***



N° de MINUTE :

N° RG : 09/04903 et 09/05137

(Ordonnance de jonction du 19 novembre 2009)



Jugement rendu par le tribunal de commerce de DUNKERQUE le 3 avril 2006

Arrêt (N° 06/02736) rendu le 18 mars 2008 par la Cour d'Appel de DOUAI

Arrêt de la Cour de Cassation du 6 mai 2009



REF : SVB/CPRenvoi après cassation



PROCÉDURE N° 09/04903



APPELANTE



S.A.R.L. FRANCE Q

GROUP

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 7]



Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assistée de Maître DEROT, avocat au barreau de PARIS



I...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 28/10/2010

***

N° de MINUTE :

N° RG : 09/04903 et 09/05137

(Ordonnance de jonction du 19 novembre 2009)

Jugement rendu par le tribunal de commerce de DUNKERQUE le 3 avril 2006

Arrêt (N° 06/02736) rendu le 18 mars 2008 par la Cour d'Appel de DOUAI

Arrêt de la Cour de Cassation du 6 mai 2009

REF : SVB/CPRenvoi après cassation

PROCÉDURE N° 09/04903

APPELANTE

S.A.R.L. FRANCE Q GROUP

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assistée de Maître DEROT, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

S.A. FILIERE PLASTIQUE INTERNATIONAL représentée par ses dirigeants légaux

ayant son siège social [Adresse 11]

Représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour

Assistée de Me VANSTEELANT, avocat au barreau de LILLE

Madame [X] [F]

née le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 9] ([Localité 9])

demeurant [Adresse 3]

Maître [G] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société AUXICAD

demeurant [Adresse 4]

Représentés par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour

Assistés de Me Hugues FEBVAY, avocat au barreau de DUNKERQUE

Monsieur [E] [B]

demeurant [Adresse 5]

Assigné le 15 décembre 2009 (PV 659 du CPC)

Monsieur [Z] [B]

demeurant [Adresse 6]

Assigné le 20/10/06 (PV de recherches)

Assigné le 23/11/09 (PV de recherches infructueuses)

PROCEDURE N° 09/05137

APPELANTES :

La SA FILIERE PLASTIQUE INTERNATIONALE représentée par ses dirigeants légaux

idem voir ci dessus

La SARL FRANCE Q GROUP représentée par ses dirigeants légaux

idem voir ci dessus

INTIMES :

Madame [F] [X]

Monsieur [B] [E]

Monsieur [B] [Z]

Me [G], ès qualités

idem voir ci dessus

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Nicole OLIVIER, Président de chambre

Dominique CAGNARD, Conseiller

Sophie VALAY-BRIERE, Conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marguerite-Marie HAINAUT

DÉBATS à l'audience publique du 16 septembre 2010 après rapport oral de l'affaire par Sophie VALAY-BRIERE

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT PAR DÉFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 28 octobre 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Nicole OLIVIER, Président, et Marguerite-Marie HAINAUT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 30 juin 2009

***

La SA AUXICAD exerce une activité d'ingénierie industrielle. En 2001, elle avait pour représentant légal Madame [X] [F] et son capital social était réparti ainsi :

* SARL FRANCE Q GROUP : 8 000 parts

* Madame [X] [F] : 1 995 parts

* Monsieur [Z] [B] : 1 part

* Monsieur [E] [B] : 1 part

* Monsieur [O] [A] : 1 part

* Monsieur [K] [T] : 1 part

* Monsieur [K] [U] : 1 part.

La SARL France Q GROUP est une société holding dont le représentant légal est Monsieur [Z] [B].

La SA FILIERE PLASTIQUE INTERNATIONALE (FPI) est la holding de la société ABMI qui exerce également une activité dans le domaine de l'ingénierie industrielle.

Des pourparlers relatifs à l'achat par FPI des actions composant le capital social de AUXICAD se sont engagés courant 2001, les parties signant le 21 décembre 2001, une 'promesse synallagmatique de cession de droits sociaux' et, le 21 janvier 2002, au terme d'une discussion de plusieurs heures, un ensemble d'actes comportant une cession des actions, une garantie d'actif et de passif et une cession de créance. Tant la promesse synallagmatique de cession que l'acte de garantie d'actif et de passif comportaient en annexe une mention selon laquelle l'entreprise cédée n'était pas en état de cessation des paiements.

Saisi par Madame [X] [F], le Tribunal de Commerce de Dunkerque a, par jugement réputé contradictoire du 3 avril 2006, notamment :

- déclaré valides les cessions d'actions intervenues au 22 janvier 2002, de même que les cessions simultanées de créances et la garantie de passif,

- dit que les conditions d'application de la garantie de passif ne sont pas réunies,

- condamné la SA FPI à payer à Madame [X] [F] la somme de 45 734,71 € outre intérêts au taux légal à compter du 11 février 2002 avec capitalisation et une indemnité procédurale de 5 000 €,

- condamné la SA FPI à payer à la SARL France Q GROUP les sommes principales de 182 938,82 € pour la cession des actions et de 589 675,15 € pour la cession de créances outre intérêts au taux légal à compter du 11 février 2002 et 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire moyennant garantie sous forme de caution,

- débouté les parties du surplus de leurs prétentions.

Les sociétés SARL FRANCE Q GROUP et FPI ayant interjeté appel de cette décision, la Cour d'Appel de Douai a, par arrêt du 18 mars 2008, rendu par défaut, infirmé en toutes ses dispositions le jugement et statuant à nouveau, a prononcé la nullité des actes de cession et de garantie de passif en date du 21 janvier 2002 conclus entre d'une part la SARL FRANCE Q GROUP, Madame [X] [F] et, le cas échéant, Messieurs [Z] et [E] [B], d'autre part la SA FPI, a condamné in solidum la SARL FRANCE Q GROUP et Madame [X] [F] à payer à la SA FPI la somme de 4 000€ en application de l'article 700 du Code de procédure civile, a enfin rejeté les autres demandes.

Sur le pourvoi de la SARL FRANCE Q GROUP et de Madame [X] [F], la Cour de Cassation a, par arrêt du 5 mai 2009, cassé et annulé dans toutes ses dispositions pour défaut de base légale l'arrêt susvisé et remis en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la Cour d'appel de Douai autrement composée au motif qu'en évaluant au 31 décembre 2001 l'actif disponible de la société AUXICAD puis en retenant que le passif exigible de cette dernière à cette date était supérieur à son actif disponible de sorte qu'elle était en état de cessation des paiements au 21 janvier 2002, la Cour s'est déterminée par des motifs impropres à établir que la société AUXICAD se trouvait, au 21 janvier 2002, dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.

Le 2 juillet 2009, la SARL FRANCE Q GROUP a saisi la présente Cour.

Le 10 juillet 2009, la SA FPI a également saisi la Cour de sorte qu'une ordonnance de jonction a été rendue le 19 novembre 2009.

Selon exploits d'huissier en date du 20 et du 25 novembre 2009, du 2, du 10 et du 15 décembre 2009, la SA FPI a fait assigner devant cette Cour Maître [G] es qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société AUXICAD (à personne habilitée), Monsieur [Z] [B] (article 659 du code de procédure civile ), Madame [X] [F] (à l'étude de l'huissier de justice) et Monsieur [E] [B] (article 659 du code de procédure civile).

Dans ses dernières conclusions en date du 17 novembre 2009, la SA FPI demande à la Cour de réformer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Dunkerque en ce qu'il a considéré que les cessions étaient valides, de dire que les cessions sont nulles à titre principal pour dol et à titre subsidiaire par application des dispositions de l'article L621-19 du code de commerce, à titre infiniment subsidiaire de dire que les sommes mises à sa charge ne sauraient excéder la partie fixe du prix de cession soit 182 938,82 €, à défaut d'ordonner une expertise afin de chiffrer la valeur réelle des parts au 21 janvier 2002. Elle sollicite en outre la condamnation des appelantes au paiement solidaire de 30000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle soutient pour l'essentiel que son consentement a été vicié par les manoeuvres des cédants dès lors que la société AUXICAD était lors de la cession en état de cessation des paiements. Elle rappelle à cette fin que la juridiction n'est pas tenue par la date de cessation des paiements fixée par le tribunal qui a ouvert ultérieurement la procédure collective de la société qui a cédé ses parts, considère que l'expertise de l'expert désigné par le juge-commissaire ne lui est pas opposable et est au demeurant très critiquable aux motifs notamment que le rapport du 12 juillet 2002 ne semble pas considérer un découvert bancaire non autorisé ni un compte courant non bloqué comme étant des passifs exigibles, que celui du 8 juillet 2003 repose sur des dires de la dirigeante non justifiés et que l'expert n'a pas relevé que les salaires étaient impayés depuis au moins le 30 novembre 2001, l'état salarial dressé par le mandataire judiciaire s'élevant à la somme de 1 100 066 €. Elle précise qu'à la date du 7 février 2002, le passif de la société AUXICAD s'élevait à la somme de 8 174 211,77 €, le passif exigible étant de l'ordre de 2 000 K€ et l'actif disponible de 231 K€. Elle ajoute que les associés de la société AUXICAD lui ont délibérément occulté la situation réelle de la société, laquelle était telle que si elle l'avait connue, elle n'aurait pas acquis ou au moins pas dans ces conditions. Elle explique, enfin, qu'il existe des anomalies au niveau des registres des mouvements de titres et des significations.

Dans ses conclusions en date du 26 janvier 2010, la SARL FRANCE Q GROUP sollicite de la Cour qu'elle confirme le jugement en ce qu'il a déclaré valide la cession par Madame [F] et par elle-même de 9500 actions de la société AUXICAD à la société FPI ainsi que les cessions simultanées de créances, dit que ces actes forment un tout indissociable et que les conditions d'application de la garantie convenues ne sont pas remplies, condamné la société FPI au paiement de différentes sommes mais qu'elle l'infirme pour le surplus et sur son appel incident, qu'elle condamne la société FPI à payer le surplus du prix de cession des créances sur la société AUXICAD soit les sommes de 172 724,59 € et 228 673,53 € correspondant aux fractions du prix exigibles les 31 mars et 31 juin 2002, ces sommes devant être majorées des intérêts capitalisés au taux légal à compter du 3 avril 2006, date du jugement outre 30 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile. Elle demande enfin qu'il lui soit donné acte qu'elle se réserve la possibilité de compléter ses demandes au titre d'un éventuel complément de prix à calculer selon l'issue du litige en cours et des préjudices consécutifs.

Elle prétend notamment que la société AUXICAD n'était pas en état de cessation des paiements au 31 décembre 2001 comme au 21 janvier 2002, que les cédants ne se sont rendus coupables d'aucune manoeuvre dolosive de nature à bouleverser le consentement de la société FPI, laquelle en sa qualité de professionnelle était parfaitement informée de la situation financière de la société cédée et a fait preuve de mauvaise foi en refusant d'exécuter le contrat.

Dans ses conclusions déposées le 31 mars 2010, Madame [X] [F] demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société FPI à lui payer la partie fixe du prix de vente des actions avec intérêts et anatocisme outre une indemnité procédurale, et y ajoutant de constater que la société FPI est également débitrice envers elle de la partie variable et complémentaire du prix de vente des actions au prorata de la fraction du capital détenue par elle, de constater qu'elle verse aux débats les pièces permettant de fixer cette fraction variable du prix, de lui donner acte cependant qu'elle n'a pas cause d'opposition à l'orchestration d'une mesure d'expertise judiciaire le cas échéant sur ce point, de lui donner acte qu'elle se réserve expressément la faculté de solliciter du tribunal compétent, l'indemnisation du préjudice qu'elle a subi et du fait du refus de FPI d'exécuter et de mettre en application les actes de cession susvisés et de condamner l'appelante à lui payer 25 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir pour l'essentiel que la mise en oeuvre de la procédure collective sur saisine d'office du tribunal n'était pas consécutive à un état ancien de cessation des paiements mais aux difficultés majeures auxquelles la société AUXICAD a été confrontée par suite du refus de la société FPI de mettre à exécution les actes de cession et de prendre la direction effective de l'entreprise alors que les administrateurs précédents avaient démissionné ; qu'il résulte du rapport établi par [H] & [V], opposable à la société FPI dès lors qu'il est versé aux débats et discuté contradictoirement, qu'en réalité au 31 décembre 2001 la société AUXICAD n'était pas en état de cessation des paiements pas plus d'ailleurs qu'au 21 janvier 2002 ; que la preuve contraire n'est pas rapportée par la société FPI alors que le tribunal qui a ouvert la procédure n'a pas reporté la date de cessation des paiements antérieurement au 24 janvier 2002. Elle ajoute qu'aucune manoeuvre dolosive n'est démontrée, la SA FPI ayant acquis les parts en pleine connaissance de la situation tendue de la société AUXICAD, et précise que les dispositions du code de commerce n'interdisent pas ni n'affectent de nullité, la signification après l'ouverture d'une procédure collective d'actes de cessions de parts sociales ou d'actions du capital de la société protégée intervenue antérieurement à l'ouverture de la procédure collective.

Dans des conclusions déposées le 30 mars 2010, Maître [G] es qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société AUXICAD demande à la Cour de constater qu'aucune demande n'est formulée à son encontre par la société FPI et de lui donner acte qu'il se réserve de solliciter l'indemnisation de la société AUXICAD du fait des agissements ou des fautes ou des négligences commis par les parties à la présente procédure dans le cadre de la reprise de la société AUXICAD et qui auraient conduit à sa ruine.

Messieurs [E] et [Z] [B], régulièrement assignés autrement qu'à leur personne, n'ont pas constitué avoué. Il y a donc lieu de statuer par défaut en application de l'article 474 du Code de procédure civile, la présente décision n'étant pas susceptible d'appel.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 30 juin 2010.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens, selon ce qu'autorise l'article 455 du Code de procédure civile.

SUR CE 

La société FPI soutient que la société AUXICAD était en état de cessation des paiements, le 21 janvier 2002, lors de la signature des actes, étant rappelé que l'annexe I à la convention de garantie du passif contient dans son paragraphe 7-b, une mention selon laquelle la SA AUXICAD n'est pas en état de cessation des paiements, et que les cédants ont usé de manoeuvres frauduleuses afin d'obtenir son consentement lequel a de ce fait été vicié.

La Cour n'est liée ni par la décision du magistrat instructeur ayant jugé, à l'issue de l'information dont il était chargé, qu'il n'y avait pas lieu à poursuites du chef d'escroquerie ni par celle du tribunal de commerce de Dunkerque fixant provisoirement au 24 janvier 2002 la date de cessation des paiements lors de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la SA AUXICAD.

L'article L 621-1 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005, alors applicable, définit l'état de cessation des paiements comme la situation de l'entreprise qui est dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible. La cessation des paiements procède donc d'une insuffisance de l'actif disponible par rapport au passif exigible à un instant T.

Il convient dès lors de rechercher dans les éléments produits si, à la date du 21 janvier 2002, la SA AUXICAD était ou non en état de cessation des paiements, étant entendu que contrairement à ce qui est soutenu par les parties, il est loisible à la présente juridiction de puiser des éléments dans les rapports de [H]&[V], expert désigné par le juge-commissaire, et de Monsieur [N], établi à la demande de la société France Q Group, dès lors que ceux-ci ont été régulièrement versés aux débats et soumis à la discussion contradictoire des parties.

Le cabinet [H]&[V] a établi une première note en juillet 2002 dans laquelle il a notamment listé un certain nombre de postes créances. Après avoir recueilli les observations de Madame [F], il a établi une synthèse de la situation au 31 décembre 2001, datée du 8 juillet 2003. Seules les indications étayées par des pièces seront retenues.

1- L'actif disponible

Il s'entend de toutes les liquidités de l'entreprise et des valeurs immédiatement réalisables ou à tout le moins à très court terme.

°les disponibilités

Le rapport [H]&[V] a chiffré ce poste (banques : 3 K€, factors : 228 K€, CCF : 119 K€) à 231 000€ au 31 décembre 2001 après déduction de la somme de 119 000 €, non disponible car correspondant à une créance sur la société Dalkia prise par le CCF comme garantie sur le découvert existant.

La SARL FRANCE Q GROUP soutient qu'elles étaient à la même date de 448 K€ soit 231 K€ + 96 K€ (créance Dalkia nette de découvert) +121 K€ (affacturage BDPME).

Les relevés du compte AUXICAD dans les livres du CCF font apparaître un découvert de 158 343,93 € au 15 janvier 2002 et de 114 622,60 € au 21 janvier 2002. Par suite, la déduction de la créance DALKIA est justifiée.

Il n'est pas contesté que les créances clients de la société AUXICAD étaient pour la plupart mobilisées auprès de différentes sociétés d'affacturage et que la facturation était établie à chaque fin de mois pour une cession au début du mois suivant, les délais de paiement prévus par les contrats ne sont toutefois pas précisés.

Les opérations d'affacturage ont évolué entre le 31 décembre 2001 et le 21 janvier 2002, date à laquelle les sommes disponibles étaient au vu des pièces produites de 316 767,92 € soit

BDPME : 160 707,35 €

CGA : 146 902 €

PME AFFACTURAGE (Caisse d'Epargne) : 9 158,62 €.

°les réserves de crédit

Le cabinet [H]&[V] a pris en considération une somme de 270 734 € comme limite totale de découvert pour les trois banques Caisse d'Epargne, CCF et Crédit Industriel or il précise que seul le découvert du CIC a fait l'objet d'une autorisation écrite justifiée à hauteur de 45 734,71 €.

La société FRANCE Q GROUP et Madame [F] font valoir que le plafond de découverts autorisés s'élevait à 841 000 € pour un découvert global de 547 000 € soit une réserve de crédit utilisable de 294 000 €.

Toutefois en l'absence d'accord écrit des banques correspondantes rien ne permet de retenir comme réserve sur des découverts bancaires les sommes avancées de 75 000 € pour la Caisse d'Epargne, de 150 000 € pour le CCF et de 570 000 € pour la Société Générale. La tolérance par ces établissements d'un découvert ne constitue pas la preuve de l'existence d'une ouverture de crédit ou d'un concours bancaire, même tacite, dès lors que le solde peut être réclamé à tout moment.

S'agissant du découvert du CIC, il a été vérifié que cette autorisation de crédit avait été utilisée à hauteur de 21 937 € seulement soit une réserve disponible de 23 797 € au 31 décembre 2001 et dont rien n'établit qu'elle aurait été modifiée au 21 janvier 2002.

°la mobilisation de créances clients

Le cabinet [H]&[V] a retenu une somme de 230 000 € à ce titre, ce qui correspond à peu près à l'équivalent en euros de la ligne DAILLY accordée par la Caisse d'Epargne dont l'existence est justifiée par la production d'une lettre datée du 10 août 2001 émanant de cette banque. Il a cependant émis une réserve à la prise en compte de ce poste dès lors qu'il n'a pas pu vérifier que la société AUXICAD 'disposait effectivement de créances clients non cédées et remplissant les conditions posées par la Caisse d'Epargne'.

Bien que Madame [F] et la SARL FRANCE Q GROUP ne s'expliquent pas sur l'existence ou non de créances susceptibles d'en remplir les conditions, cette somme sera reprise au titre de l'actif disponible.

2- Le passif exigible

Il regroupe les dettes échues à l'exclusion de celles pour lesquelles le débiteur a expressément obtenu un moratoire de la part de son créancier.

°les emprunts bancaires

Les échéances de l'emprunt auprès de la société FINORPA n'ont pas été respectées pour un montant échu de 159 000 € au 31 décembre 2001.

Madame [F] et la société FRANCE Q GROUP soutiennent que cette somme doit être exclue du passif exigible en raison du moratoire confirmé par FINORPA le 14 janvier 2002.

Or le fax daté du 14 janvier 2002, adressé par FINORPA à la société FPI, se contente d'indiquer que le rachat envisagé d'AUXICAD par FPI n'entraînera pas de sa part, une demande de remboursement des deux prêts en cours sous réserve de trois conditions dont le paiement rapide des intérêts de retard (24 239,41 €) et une proposition raisonnable pour le règlement de l'arriéré.

La réalisation de ces conditions n'étant pas démontrée, cette proposition ne constitue nullement un accord express du créancier sur un moratoire.

Il s'agit donc bien d'un poste du passif exigible au 31 décembre 2001 et, en l'absence d'évolution, au 21 janvier 2002.

°les dettes fournisseurs

La totalité des sommes dues aux fournisseurs serait de 353 833 € ou de 139 000 €, s'il est tenu compte des observations de Madame [F], au 31 décembre 2001 selon le rapport [H]&[V].

L'utilisation du conditionnel par le rédacteur de ce rapport qui indique 'en tenant compte de l'ensemble des observations de Madame [F], le montant de retard fournisseur au 31 décembre 2001 sur l'échantillon analysé serait de 139 K€' démontre, que contrairement à ce qui est soutenu par la SARL FRANCE Q GROUP, toutes les affirmations n'ont pas été démontrées par des pièces, lesquelles n'ont pas plus été produites devant la Cour.

A l'appui de ses observations en date du 13 juin 2003, Madame [F] a adressé au cabinet [H]&[V] un certain nombre de pièces dont une seule est relative aux dettes fournisseurs, s'agissant d'un accord sur les conditions de paiement de la créance de 74 507 € de la société SOLIDWORKS EUROPE.

En l'absence d'autre élément, le passif exigible à ce titre au 31 décembre 2001 est de 353 833 €-74 507 €= 279 326 €. Il ressort des écritures de la SARL FRANCE Q GROUP qu'aucun élément n'est venu modifier cette somme, avec laquelle elle est en accord, au 21 janvier 2002.

°les dettes fiscales et sociales

Le cabinet [H]&[V] a listé, en dernière partie de son rapport du 8 juillet 2003, les échéances de charges fiscales et sociales échues entre le 31 décembre 2001 et le 15 janvier 2002 et impayées au jour de l'ouverture du redressement judiciaire. Le montant total en est, d'après lui de 165 565,76 € échu au 15 janvier 2002 mais, d'après les éléments figurant dans le tableau détaillé de ces créances avec leurs montants et dates d'échéance, le montant total est en réalité, au 20 janvier 2002 de 191 986,11 € se répartissant comme suit :

Nom du créancier Date d'échéance Montant Recette des Impôts de [Localité 10] après transaction 20 janvier 2002 26 420,35 €

ASSEDIC d'[Localité 8] 5 janvier 2002 4 021,76 €

GIRS 4ème trimestre 2001 15 janvier 2002 91 080 €

GIRCACIC 4ème trimestre 2001 15 janvier 2002 55 978 €

GENERALI 4ème trimestre 2001 1er janvier 2001 14 486 €

Il ressort là encore des écritures de la SARL FRANCE Q GROUP qu'aucun élément n'est venu modifier cette somme, avec laquelle elle est en accord, au 21 janvier 2002.

°Les découverts bancaires

Le rapport a chiffré ce poste à 889 K€ au 31 décembre 2001.

Les relevés de compte de la société AUXICAD démontrent l'existence de soldes débiteurs au 21 janvier 2002 de 114 622,60 € dans les livres du CCF, de 378 953,73 € auprès de la Société Générale et de 43 899,95 € auprès de la Caisse d'Epargne soit une somme totale de 537 476,28 €.

°les comptes courants d'associés

Il est indiqué que ce poste était de 913 000 € au 31 décembre 2001.Aucun document ne montre une évolution de ce chiffre au 21 janvier 2002. Le paiement d'un compte courant d'associé étant immédiatement exigible, ils doivent figurer dans le passif exigible.

°le passif salarial

L'état des créances montre que le CGEA a déclaré une créance de 1 100 066,26 € dont 77 020,39 € seulement à titre chirographaire. L'observation portée par le représentant des créanciers précise 'salaire superprivilégié (sous réserve des paiements ultérieurement effectués)'.

Néanmoins, la société AUXICAD employant environ deux cent soixante salariés, en l'absence de détail quant aux dates des salaires impayés, aucune somme ne sera retenue à ce titre.

Au vu de ces éléments, la balance entre passif exigible et actif disponible s'établit de la manière suivante :

- emprunts bancaires : 159 000 €

- dettes fournisseurs : 279 326 €

- dettes fiscales et sociales : 191 986,11 €

- découverts bancaires : 537 476,28 €

- comptes courants d'associés : 913 000 €

TOTAL PASSIF EXIGIBLE : 2 080 788,39 €

- disponibilités : 316 767,92 €

- réserves bancaires :23 797 €

- ligne Dailly (sous les réserves ci-dessus) : 230 000 €

TOTAL ACTIF DISPONIBLE : 510 564,92 €

Balance en faveur du passif exigible :1 570 223,47 €.

Il résulte de ces éléments que, le passif exigible étant supérieur à l'actif disponible, la SA AUXICAD était en état de cessation des paiements à la date du 21 janvier 2002, date où les cessions litigieuses son intervenues.

En signant des actes de cession qui comportaient en annexe une déclaration selon laquelle la société AUXICAD n'était pas en état de cessation des paiements, la SARL FRANCE Q GROUP et Madame [F] ont menti sur la situation réelle de cette société.

Si la preuve est rapportée de ce que la société FPI connaissait le manque de trésorerie de la SA AUXICAD, aucun élément en revanche ne démontre qu'elle était informée de l'état de cessation des paiements.

Cette fausse information constitue une manoeuvre destinée à provoquer une erreur d'appréciation de nature à vicier le consentement de la SA FPI dès lors que l'absence d'état de cessation des paiements était une condition essentielle de la vente des actions sans laquelle la société FPI n'aurait pas contracté ou à des conditions différentes puisqu'il n'y avait pour elle aucun intérêt à prendre le contrôle d'une société pour laquelle une procédure collective avait vocation à être ouverte à très court terme.

Il convient par suite de faire droit à la demande et de prononcer la nullité pour dol de la cession des actions en date du 21 janvier 2002. Les autres cessions intervenues entre les mêmes parties le même jour ainsi que l'acte de garantie de passif formant, selon les parties, un tout indivisible doivent connaître le même sort.

Le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions.

Il n'y a pas lieu par conséquent d'examiner les demandes subsidiaires de la SA FPI comme les demandes principales de la SARL FRANCE Q GROUP et de Madame [F] tendant à l'exécution par la SA FPI de ses engagements.

En l'absence de valeur juridique du 'donner acte', il ne sera pas donné suite à la demande de Maître [G] es qualité.

La SARL FRANCE Q GROUP et de Madame [F] qui succombent seront condamnées aux dépens et déboutées de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA FPI les frais exposés par elle en cause d'appel et non compris dans les dépens ; il lui sera alloué la somme de 8 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par défaut, par arrêt mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Prononce la nullité des actes de cession et de garantie de passif en date du 21 janvier 2002 conclus entre d'une part la SARL FRANCE Q GROUP, Madame [X] [F], le cas échéant, Messieurs [Z] et [E] [B], et d'autre part la SA FPI ;

Y ajoutant

Condamne in solidum la SARL FRANCE Q GROUP et Madame [X] [F] à payer à la SA FPI la somme de 8 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Déboute la SARL FRANCE Q GROUP et Madame [X] [F] de l'ensemble de leurs demandes ;

Condamne in solidum la SARL FRANCE Q GROUP et Madame [X] [F] aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoué, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

Marguerite Marie HAINAUTNicole OLIVIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 2
Numéro d'arrêt : 09/04903
Date de la décision : 28/10/2010

Références :

Cour d'appel de Douai 22, arrêt n°09/04903 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-10-28;09.04903 ?
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