COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 30/09/2010
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N° MINUTE :
N° RG : 08/07118
Jugement (N° 2000/6628)
rendu le 05 Février 2004
par le Tribunal de Grande Instance de LILLE
REF : PC/VC
APPELANT
Monsieur [U] [J]
demeurant : [Adresse 5]
Représenté par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour
Assisté de la SCP SOLAND RAPP CORMONT HIETTER LILLE, avocats au barreau de LILLE
INTIMÉS
Monsieur [Z] [I]
demeurant : [Adresse 1]
Représenté par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour
Assisté de Me Anne VOITURIEZ, avocat au barreau de LILLE
S.C.I. BD agissant par son représentant légal domicilié es-qualité audit siège
ayant son siège social : [Adresse 3]
Représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour
Assistée de Me Gérald MALLE, avocat au barreau de LILLE
Monsieur [M] [I]
né le [Date naissance 4] 1955 à[Localité 9])
demeurant : [Adresse 8]
Représenté par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour
Assisté de Me Anne VOITURIEZ, avocat au barreau de LILLE
SA HSBC FRANCE venant aux droits de HSBC [S] agissant par son représentant légal domicilié es-qualité audit siège.
ayant son siège social : [Adresse 2]
Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour
Assistée de Me Guy SIX, avocat au barreau de LILLE
Madame [W] [B] épouse [I]
demeurant : [Adresse 1]
Représentée par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour
Assisté de Me Anne VOITURIEZ, avocat au barreau de LILLE
ASSIGNE EN INTERVENTION FORCÉE
Maître [F] [A] es qualité de liquidateur de la SCCV VENDÔME
demeurant : [Adresse 6]
Représenté par la SELARL LAFORCE, avoué à la Cour
Assisté de Me D'ARGOEUVES, avocat
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Pierre CHARBONNIER, Président de chambre
Catherine CONVAIN, Conseiller
Catherine PAOLI, Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS
DÉBATS à l'audience publique du 26 Mai 2010
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président, et Annie DESBUISSONS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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LA COUR ;
Attendu que [U] [J] a interjeté appel d'un jugement du Tribunal de grande instance de LILLE du 5 février 2004 qui l'a condamné, en qualité d'associé de la société civile de construction vente (S.C.C.V.) VENDÔME, à payer à la société civile immobilière (S.C.I). "B.D." une somme de 205.261,95 € avec intérêts au taux conventionnel à compter du 7 juillet 1995 ; qui a condamné [M] [I], comme caution solidaire de la Société VENDÔME, à payer à cette même S.C.I. une somme de
1.248.676,80 € majorée elle aussi des intérêts au taux conventionnel à dater du 7 juillet 1995 ; a ordonné la capitalisation des intérêts ; et qui a rejeté la demande incidemment formée par [U] [J], [M] [I] et les époux [Z] [I] et [W] [B], ces deux derniers cautions solidaires également de la Société VENDÔME, contre la Société BANQUE [S] CREDITERME afin d'obtenir réparation du dommage que celle-ci leur aurait causé pour avoir abusivement soutenu le crédit de la Société VENDÔME en lui octroyant plusieurs prêts dont la créance de remboursement a été ensuite cédée par l'établissement financier à la S.C.I. "B.D." ;
Attendu que par un arrêt du 18 juillet 2005, la Cour de céans confirmait le jugement de première instance en ce qu'il avait écarté la responsabilité de la Société BANQUE [S] CREDITERME et, y ajoutant, déboutait [U] [J] de sa demande en nullité de la cession des parts de la Société VENDÔME conclue à son profit le 12 avril 1991 et de sa demande corrélative en remboursement de leur prix ; que cette même décision, en même temps qu'elle rouvrait les débats pour vérifier la validité du cautionnement souscrit par [M] [I], sursoyait à statuer sur la demande en paiement formée par la S.C.I. "B.D." dans l'attente du résultat des poursuites pénales actuellement engagées contre la Société [S] CREDITERME pour des faits de corruption ;
Attendu que par un arrêt subséquent du 1er décembre 2005, la Cour, sans revenir sur le sursis à statuer, rejetait la contestation élevée par [M] [I] relativement à la validité de son engagement de caution ;
Attendu que le pourvoi formé par les consorts [I] contre l'arrêt précité du 18 juillet 2005 a fait l'objet d'un arrêt de déchéance et de rejet rendu par la Cour de cassation le 30 octobre 2007 ;
Attendu qu'il ressort des circonstances de l'espèce que par acte du 22 octobre 1990 la Société BANQUE [S] CREDITERME a consenti à la S.C.C.V. VENDÔME, pour servir à l'acquisition faite par celle-ci le même jour d'un immeuble sis [Adresse 7], un prêt d'un montant de 3.000.000 F [457.347,05 €] ultérieurement suivi les 9 avril 1991 et 28 janvier 1992 de deux crédits complémentaires d'un montant respectif de 1.000.000 F [152.449,02 €] et 4.400.000 F [670.775,67 €], destinés à financer la réalisation de travaux de réhabilitation ou d'aménagement du bâtiment ; que les époux [I]/[B] et [M] [I] se portaient cautions solidaires envers la Société BANQUE [S] CREDITERME du remboursement des différents prêts souscrits par la S.C.C.V. VENDÔME ; que dans l'entrefaite, [U] [J], le 12 avril 1991, acquérait douze des cent parts de capital de la S.C.C.V. VENDÔME, laquelle a été ensuite placée en redressement puis en liquidation judiciaire par deux jugements successifs du tribunal de commerce de PARIS des 7 juillet et 13 octobre 1995 ; qu'aux termes d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 28 août 1995 la Société BANQUE [S] CREDITERME produisait sa créance au passif de la procédure de la S.C.C.V. VENDÔME pour un montant de 11.220.252 F [1.710.516,40 €] ;
Attendu que, parallèlement, l'immeuble financé par la Société BANQUE [S] CREDITERME était, sur les poursuites de saisie immobilière diligentées par celle-ci, vendu le 7 décembre 1994 à une société "C.D.F." ou, à défaut d'immatriculation de la personne morale, à ses associés solidairement, parmi lesquels figurait [U] [J] ; qu'en l'absence de paiement du prix d'adjudication, la banque poursuivante remettait l'immeuble en vente sur folle enchère ; que la Société "C.D.F." et ses associés ont alors fait assigner le 29 mars 1995 la Société BANQUE [S] CREDITERME et la S.C.C.V. VENDÔME en nullité de l'adjudication ; que, le 19 décembre 1997, la Société "C.D.F." et [U] [J] portaient plainte avec constitution de partie civile pour publicité trompeuse préalable à la vente sur saisie immobilière ; que la procédure de vente sur folle enchère était en conséquence suspendue dans l'attente du résultat de l'instance pénale qui devait aboutir ultérieurement à une décision de non lieu après le rejet d'un pourvoi, prononcé par un arrêt de la Cour de cassation du 10 janvier 2001 ; que c'est dans ce contexte que la Société BANQUE [S] CREDITERME a, par un acte authentique du 13 février 1997, cédé à la S.C.I. "B.D." la créance de 11.220.252,70 F dont elle était titulaire contre la
S.C.C.V. VENDÔME, son emprunteur, pour la somme de 1.950.000 F [297.275,58 €] ; que suivant acte du 19 janvier 1998, la S.C.I. "B.D." a attrait [U] [J] devant le Tribunal de grande instance de LILLE et demandé sa condamnation ainsi que celle des époux [I]/[B] et de [M] [I] à lui régler les sommes dont la S.C.C.V. VENDÔME était redevable vis-à-vis de la Société BANQUE [S] CREDITERME au titre des prêts précités ;
Attendu qu'à l'appui de son recours [U] [J] observe, de première part que la Société HSBC FRANCE venant aux droits de la BANQUE [S] CREDITERME est irrecevable à le poursuivre en sa qualité d'associé de la S.C.C.V. VENDÔME alors que celle-ci, qui est solvable, serait parfaitement en mesure d'acquitter elle-même sa dette ; de deuxième part, que pour fonder sa décision de sursis à statuer du 18 juillet 2005, la Cour de céans, après avoir relevé que la Société BANQUE [S] CREDITERME était prévenue de faits de corruption passive qui faisaient l'objet d'une instance pénale en cours, a jugé que, par voie de conséquence,
« la S.C.I. "B.D." ne pourrait conserver par devers elle les sommes reçues en vertu de la cession de créance si cet acte devait être sanctionné
pénalement » ; que ces motifs, à caractère décisoire, s'imposent aujourd'hui à la Cour qui ne peut que constater que la culpabilité de la Société BANQUE [S] CREDITERME, après le rejet par un arrêt du 9 septembre 2009 du pourvoi en cassation dirigé contre l'arrêt de condamnation rendu par la chambre des appels correctionnels de ce siège du 3 juillet 2008, a été définitivement établie ; que cet arrêt du 3 juillet 2008 qui a reconnu l'existence d'un pacte de corruption passé entre la Société BANQUE [S] CREDITERME et [P] [H], mandataire judiciaire, dont la Société "B.D." n'était qu'une émanation formelle créée pour les seuls besoins de la cession de créance litigieuse, a l'autorité de la chose jugée ; qu'il en résulte que le transport de la créance de la Société BANQUE [S] CREDITERME, fondé sur une cause illicite, est vicié d'une nullité absolue et ne saurait avoir le moindre effet ; de quatrième part, que la Société "B.D." qui était en cours d'immatriculation au jour de la cession de créance et n'a ultérieurement jamais approuvé cet acte ni justifié d'un mandat qu'elle aurait donné au signataire intervenu prétendument en son nom, ne peut valablement se présenter comme le titulaire actuel des droits cédés ;
Attendu que [U] [J] conclut en conséquence au débouté des prétentions adverses ; que, formant appel incident, il
réclame la condamnation de la Société "B.D." à lui verser une indemnité de 1.000.000 € en dédommagement des nombreuses procédures d'exécution forcée auxquelles elle a injustement recouru contre lui, outre une somme de 20.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'il sollicite sur le fondement de ce même texte l'allocation, à la charge de la Société HSBC FRANCE, d'une somme de 2.000 € également ;
Attendu que [M] [I] invoque l'irrecevabilité de l'intervention de la Société HSBC FRANCE, faute pour celle-ci de démontrer qu'elle se trouve effectivement aux droits de la Société HSBC BANQUE [S], elle-même aux droits de la Société BANQUE [S] CREDITERME ; qu'il conclut pour le surplus dans un sens identique à celui de [U] [J] ; qu'il demande reconventionnellement la condamnation de la Société "B.D." à lui régler une somme de 1.000.000 € de dommages-intérêts en réparation de son préjudice professionnel et personnel ;
Attendu que les époux [I]/[B] rappellent qu'aux termes d'un protocole transactionnel du 21 mars 2003, la S.C.I. "B.D." et eux-mêmes se sont chacun désistés de leurs instances et actions réciproques ; qu'ils sollicitent néanmoins la condamnation de la S.C.I. "B.D." à leur verser une somme de 30.000 € de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral ; qu'ils réclament encore, cette fois avec [M] [I], le paiement par la S.C.I. "B.D." et la Société HSBC FRANCE d'une somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que la S.C.I. "B.D." fait valoir en réponse que le moyen de défense tiré par [U] [J] et [M] [I] de la nullité de la cession de créance conclue entre elle et la Société BANQUE [S] CREDITERME le 13 février 1997 n'est pas recevable, les débiteurs cédés n'ayant en l'occurrence aucun intérêt à mettre en cause la validité de cet acte qui n'affecte pas l'existence de la dette ; que, subsidiairement, elle soutient que [U] [J] ne peut être admis à soulever aujourd'hui la nullité de la cession de créance ; qu'il lui faillait invoquer ce fondement en temps utile devant la juridiction répressive saisie de son action civile, ce qu'il s'est abstenu de faire, en sorte que sa défense se heurte désormais à la chose précédemment jugée par l'arrêt de la chambre des appels correctionnels du 3 juillet 2008 ; qu'elle conclut, partant, à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de [U] [J] et de [M] [I] in solidum à lui régler la somme de 100.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que la Société HSBC FRANCE développe une argumentation semblable à celle de la S.C.I. "B.D. " ; qu'elle souligne que l'arrêt du 9 septembre 2009 par lequel la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé par [P] [H] contre l'arrêt de la chambre des appels correctionnels du 3 juillet 2008 a concurremment constaté l'extinction de l'action publique à l'égard de la Société HSBC [S], entre temps absorbée par la Société HSBC FRANCE et dissoute ; que c'est donc à tort que [U] [J] et [M] [I] se prévalent de la nullité de la cession de créance comme découlant d'une condamnation pénale, laquelle est inexistante pour ce qui concerne la banque ; qu'elle réclame que [U] [J], [M] [I] et les époux [I]/[B] soient tenus chacun de lui payer une somme de 5.000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que Me [A] es qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la S.C.C.V. VENDÔME, assigné à la requête de [U] [J] en déclaration d'arrêt commun par acte du 13 avril 2010, demande à la Cour de lui donner acte des précisions qu'il apporte sur le déroulement des faits de la cause ; qu'il réclame la condamnation de toute partie succombante à lui régler la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu qu'en l'absence d'une cause grave de révocation de l'ordonnance de clôture prononcée le 14 mai 2010, la pièce produite par [M] [I] le 25 mai 2010 sous le numéro 50 de son bordereau de communication de pièces, doit être écartée des débats comme irrecevable conformément à l'article 783 du code de procédure civile ;
Attendu que [U] [J] fournit un bordereau énumérant cent trente neuf pièces produites par ses soins à la date du 14 mai 2010 qui sont venues s'ajouter aux douze pièces visées initialement sur le bordereau joint en annexe à son deuxième jeu de conclusions du 7 avril précédent ; qu'il ne donne toutefois aucune indication sur la date à laquelle ces documents qui sont issus de la procédure pénale ou consistent en des décisions de justice, auraient été communiqués par ses soins à ses adversaires ; que dans ses dernières écritures du 12 mai 2010 [U] [J] laisse sans réponse les allégations de la Société HSBC FRANCE, contenues dans les conclusions de cette dernière signifiées la veille, 11 mai 2010, selon lesquelles la production des pièces numérotées au delà du chiffre 12 ne lui a été notifiée qu'en accompagnement des écritures de [U] [J] déposées le 10 mai 2010, qui lui ont été signifiées à cette date sans que ces pièces lui soient communiquées ;
Attendu qu'il suit de là que le défaut de communication de ses pièces par [U] [J], quand même il concernait des documents qui, pour certains, pouvaient avoir été détenus déjà par la Société HSBC FRANCE, a empêché celle-ci, en raison de leur nombre et de la date tardive à laquelle ils étaient invoqués bien qu'étant d'une origine souvent ancienne, de les retrouver, de les examiner et d'émettre à leur sujet toutes observations utiles ; qu'il y a lieu, dès lors, par respect du principe de la contradiction posé par l'article 16 du code de procédure civile, d'écarter du dossier les pièces litigieuses ainsi que la Société HSBC FRANCE en fait la demande dans ses dernières conclusions ;
Attendu que, contrairement à ce que soutient la S.C.I. "B.D.", l'article 555 du code de procédure civile laissait la possibilité à [U] [J] d'appeler Me [A] es qualités devant la Cour afin de lui rendre commun l'arrêt à intervenir, conformément à l'article 333 §2 du même code ; que la S.C.I. "B.D.", si elle oppose à l'intervention de Me [A] la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'une évolution du litige impliquant la mise en cause tardive de celui-ci, ne justifie d'aucune atteinte à ses droits qui résulterait pour elle de la présence du mandataire judiciaire à l'instance ; que, spécialement, l'intervention de Me [A] es qualités ne recouvre aucune prétention nouvelle émise par son auteur comme par l'intervenant , qui risquerait de retarder le jugement sur le tout ; que la S.C.I. "B.D." est donc sans intérêt à discuter cette intervention qui pour le reste, en ce qu'elle concerne la débitrice principale dont le recouvrement de la dette constitue l'enjeu du procès, se rattache par un bien suffisant à l'objet du litige ;
Attendu que la HSBC FRANCE verse aux débats un extrait Kbis du registre du commerce et des sociétés du Tribunal de commerce de BOURGES délivré le 3 septembre 2008 ; qu'il résulte de cette pièces que la Société BANQUE [S] CREDITERME, dénomination sous laquelle la personne moral cédante a comparu devant la chambre des appels correctionnels pour y répondre des faits de corruption qui lui étaient reprochés, a été radiée à compter du 31 juillet 2008 de ce registre et a cessé son activité à la suite de sa fusion absorption par la Société HSBC FRANCE ; que la qualité de la Société HSBC FRANCE à intervenir en cours d'instance pour y exercer les droits de la Société BANQUE [S] CREDITERME entre temps dénommée HSBC [S], est ainsi avérée ; que le moyen d'irrecevabilité formulé de ce chef par [M] [I] doit donc être rejeté ;
Attendu que cette Cour, dans le dispositif de son précédent arrêt du 18 juillet 2005, s'est bornée à surseoir à statuer « sur la demande en paiement formée par la Société Civile Immobilière "B.D." , sur les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les demandes en dommages-intérêts pour procédure abusive jusqu'à l'issue de l'instance pénale en cours sur les faits de corruptions reprochés à la Banque [S] » ; que la Cour, quand même dans sa motivation, elle envisage à l'appui de ce sursis l'hypothèse où la cession de créance devrait être annulée en raison de l'illicéité de sa cause, n'a pas tranché expressément ce point dans son dispositif ; que l'opinion de la Cour exprimée dans les motifs de l'arrêt, qui anticipe sur les développements ultérieurs de l'affaire en prévision desquels l'instance a été suspendue, est dépourvue, dès lors, de l'autorité de la chose jugée ; que [U] [J] et [M] [I] ne peuvent donc soutenir valablement que la Cour se serait déjà définitivement prononcée dans sa décision du 18 juillet 2005 sur la nullité du transport de la créance de la Société BANQUE [S] CREDITERME ;
Attendu que c'est par des motifs pertinents et que la Cour adopte que le premier juge, rappelant qu'aux termes de l'article L.211-2 du code de la construction et de l'habitation l'associé d'une société civile de construction vente est tenu du passif social sur tous ses biens à proportion de ses droits sociaux dès lors que le créancier a adressé à la société débitrice une mise en demeure restée infructueuse, et que celle-ci en l'espèce était inutile du fait de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la S.C.C.V. VENDÔME, a déclaré que la S.C.I. "B.D." était recevable à agir en paiement des dettes sociales contre [U] [J] sans avoir à justifier qu'elle avait au préalable vainement poursuivi la personne morale ;
Attendu que par son arrêt précité du 1er décembre 2005, la Cour de céans, tout en laissant subsister le sursis à statuer qu'elle avait précédemment prononcé, a rejeté la contestation élevée par [M] [I] relativement à la validité de son engagement de caution ; que ce point n'est par conséquent plus susceptible aujourd'hui d'être remis en cause ;
Attendu que selon l'article 31 du code de procédure civile, l'action en justice est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ;
Attendu que, comme le premier juge l'a retenu, le transfert de la créance des mains de la Société BANQUE [S] CREDITERME à celles de la S.C.I. "B.D." apparaît en tout état de cause indifférent à l'obligation qui pèse sur [U] [J] et sur [M] [I], quelle que soit la personnalité de leur créancier, de s'acquitter des sommes dont ils sont tenus en qualité d'associés ou de cautions ;
Attendu que [U] [J] et [M] [I] font valoir en réponse à l'allégation des sociétés "B.D." et HSBC FRANCE qui leur objectent qu'ils n'ont aucun intérêt à se prévaloir de la nullité prétendue de la cession de créance du 13 février 1997, en premier lieu qu'en cas d'annulation de cet acte, la créance cédée ne saurait revenir à la Société HSBC FRANCE puisque celle-ci, lorsqu'elle a absorbé la Société BANQUE [S] CREDITERME devenue HSBC [S], créancière originaire, a recueilli le patrimoine de la société absorbée privé du droit de créance précédemment transporté par l'effet de la cession dans le patrimoine de la S.C.I. "B.D." ; en second lieu que l'action en recouvrement de la créance, à supposer que celle-ci revienne à la Société HSBC FRANCE, serait de toute façon prescrite, cette société n'ayant jusqu'à présent jamais exercé d'action à leur encontre ; qu'ainsi la nullité qui entache la cession de créance aujourd'hui détenue par la S.C.I. "B.D." aura pour conséquence de les exonérer de leur dette ;
Attendu qu'il résulte de l'article 1844-4 du code civil que la fusion absorption d'une société par une autre entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société absorbée à la société absorbante ; qu'en l'espèce, dans l'hypothèse où l'acte de cession de créance serait, par l'effet de la nullité, rétroactivement anéanti, la créance cédée, en contrepartie de la restitution du prix de cession à la société cessionnaire, réintégrerait le patrimoine de la société cédante dont elle serait réputée n'avoir cessé de faire partie ; que ce patrimoine étant acquis par absorption à la Société HSBC FRANCE, celle-ci bénéficierait donc contre [U] [J] et [M] [I] du droit d'agir en justice attaché à la créance de la Société BANQUE [S] CREDITERME dont l'exercice lui serait désormais dévolu ;
Attendu qu'il n'est pas prétendu que la créance de la Société BANQUE [S] CREDITERME ait été atteinte par la prescription lorsque celle-ci, le 13 février 1997, l'a cédée à la S.C.I. "B.D." ; que si la Société BANQUE [S] CREDITERME puis la HSBC FRANCE se sont abstenues l'une et l'autre de toute action en paiement engagée contre [U] [J] et [M] [I], la raison en est que la créancière initiale, à partir du moment où elle s'était dépossédée de sa créance, ne disposait plus d'aucun droit à faire valoir contre les associés ou les cautions de son ancienne débitrice ;
Attendu que la prescription ne peut courir qu'à compter du jour où celui contre lequel on l'invoque a pu agir valablement ; que la cession de créance du 13 février 1997, aussi longtemps qu'aucune décision de justice n'est venue l'annuler, s'analyse bien en une circonstance constitutive d'une impossibilité d'agir pour la créancière cédante qui s'était dépouillée de son droit au profit d'un tiers ; qu'il s'ensuit que la Société HSBC FRANCE, dans l'hypothèse où sa créance lui reviendrait après annulation de la cession, ne pourrait se voir opposer son inertie pendant la période où le droit d'agir appartenait à la cessionnaire ;
Attendu que [U] [J] et [M] [I], sauf le projet exclusivement dilatoire de repousser autant que possible la date d'exécution de leur dette dont ils ne contestent d'ailleurs pas le montant, ne justifient d'aucun intérêt légitime à préférer, de la S.C.I. "B.D." ou de la Société HSBC FRANCE, l'une de ces créancières plutôt que l'autre ;
Attendu que [U] [J] reconnaît dans ses écritures que la chambre des appels correctionnels n'a jamais été saisie tant au pénal que sur l'action civile, de la nullité de la cession de créance ; qu'aux termes de l'arrêt du 3 juillet 2008 le pacte de corruption sanctionné par la Cour a consisté de la part de [P] [H], sous le couvert de la S.C.I. "B.D.", société écran constituée à l'instigation de celui-ci, à solliciter le rachat de la créance détenue par la Société BANQUE [S] CREDITERME sur la S.C.C.V. VENDÔME pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir des actes de sa mission de mandataire judiciaire ou de ses mandats dans les liquidations judiciaires où [S] CREDITERME avait déclaré ses
créances ; que la Société [S] s'est vu reprocher quant à elle d'avoir cédé aux exigences de [P] [H] pour protéger ses intérêts dans les procédures collectives dont il avait la charge ;
Attendu que, partant, c'est vainement que [U] [J] invoque l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 3 juillet 2008 ; que cette décision, si elle incrimine les conditions de prix, issues de la rencontre des volontés de corruption active et passive des parties, moyennant lesquelles la créance a été cédée pour une contrepartie notablement inférieure à sa valeur, n'a pas tranché en revanche la question de la validité du transport de la créance ; que le prix convenu pour la cession de créance est en lui-même indifférent aux intérêts du débiteur cédé ou de ses garants ; qu'à cet égard la chambre des appels correctionnels, examinant les demandes de [U] [J], constitué partie civile, a estimé que l'obligation de celui-ci au paiement du passif social ne constituait pas un préjudice découlant du pacte de corruption ni de sa mise en oeuvre par les prévenus ;
Attendu que la fin de non-recevoir proposée par la Société "B.D." doit donc être rejetée ; qu'à cet égard il est indifférent de rechercher si [G] [X], associé et gérant de la S.C.I. "B.D." en formation ainsi que l'énonçaient les statuts de celle-ci établis le 7 février 1997, disposait d'un pouvoir spécial pour acquérir au nom de la personne morale la créance détenue par la Société [S] CREDITERME ; qu'il est précisé dans l'acte notarié du 13 février 1997 que la S.C.I. cessionnaire comparaît représentée par [G] [X] « agissant en sa qualité de gérant de ladite société et ayant tous pouvoirs à l'effet des présentes aux termes du mandat qui lui a été conféré par l'ensemble des associés et qui est demeuré annexé aux statuts de ladite société » ; que si le notaire instrumentaire, Me [T], d'AVESNES LE COMTE, a, en réponse à l'interpellation de l'avocat de [U] [J], précisé dans une lettre du 15 novembre 2006 que l'acte de constitution de la S.C.I. "B.D." n'était assorti d'aucune annexe, en tout état de cause la société, en exerçant la créance cédée après avoir été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 12 mai 1997, a ratifié l'acte conclu en son nom par son mandataire et repris les engagements contractés par lui, qui ne sont pas contestés par ses associés ;
Attendu qu'il y a lieu par conséquent de confirmer le jugement déféré dont les dispositions, dans les modalités de calcul des sommes dues, ne sont pas critiquées par les parties ;
Attendu que [U] [J] qui succombe en son appel n'est dès lors pas fondé à se faire un grief de ce que la S.C.I. "B.D." ait engagé contre lui diverses procédures pour parvenir au recouvrement de la somme liquidée à son profit par le jugement de première instance, lequel était assorti de l'exécution provisoire ; que [M] [I] qui n'obtient pas davantage gain de cause ne peut utilement prétendre à la réparation d'un dommage résultant du caractère abusif de la procédure ; que de leur côté les époux [I]/[B] arguent d'un préjudice moral dont ils ne décrivent pas le contenu ;
Attendu qu'il n'apparaît pas équitable de faire supporter par l'une ou l'autre des parties à l'instance les frais exposés par la partie adverse et non compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS ;
Statuant publiquement et contradictoirement ;
Rejette des débats la pièce produite par [M] [I] sous le numéro 50 de son bordereau de communication de pièces, et les pièces portant les numéros 13 et suivants du bordereau de communication de pièces dressé par [U] [J] ;
Confirme, en toutes celles de ses dispositions qui ne l'avaient pas été précédemment par les arrêts de cette Cour des 18 juillet et 1er décembre 2005, le jugement déféré du tribunal de grande instance de LILLE du 5 février
2004 ;
Donne acte à Me [A] es qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société Civile Immobilière de Construction Vente VENDÔME de son intervention à la cause ; lui déclare le présent arrêt commun ;
Déboute [U] [J], [M] [I] et les époux [I]/[B], comme non fondés, de leurs demandes respectives en dommages-intérêts formées contre la Société Civile Immobilière (S.C.I.) "B.D." ;
Déboute les parties, comme non fondées, de leurs demandes réciproquement formées par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne [U] [J] et [M] [I] aux dépens d'appel qui seront recouvrés par la S.C.P. LEVASSEUR/CASTILLE/
LEVASSEUR, la S.C.P. DELEFORGE/FRANCHI et la SELARL Eric LAFORCE, avoués, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
A. DESBUISSONSP. CHARBONNIER