COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 11/02/2010
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N° de MINUTE :
N° RG : 07/08250
Jugement (N° 06/1314)
rendu le 06 décembre 2007
par le Tribunal de Commerce
de SAINT OMER
REF : NO/CP
APPELANTE
SA CLINIQUE DES 2 CAPS prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 1]
Représentée par la SCP COCHEME-LABADIE-COQUERELLE, avoués à la Cour
Assistée de Me Michel DUBREUIL, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉ
Monsieur [V] [F]
demeurant [Adresse 4]
Représenté par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour
Assisté de Me Hervé LECLERCQ, avocat au barreau de BOULOGNE SUR MER
DÉBATS à l'audience publique du 17 décembre 2009 tenue par Nicole OLIVIER magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marguerite-Marie HAINAUT
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Nicole OLIVIER, Président de chambre
Dominique CAGNARD, Conseiller
Véronique NEVE DE MEVERGNIES, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 11 février 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Nicole OLIVIER, Président et Marguerite-Marie HAINAUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 8 décembre 2009
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La SA CLINIQUE CHIRURGICALE DE LA LORRAINE, constituée le 16 décembre 1996, avait pour objet l'exploitation d'une clinique chirurgicale à [Localité 2] ; elle a fait l'objet le 2 juin 2004 d'une fusion absorption par la SA CLINIQUE DE LA TAMISE, devenue SA CLINIQUE [3].
La SA CLINIQUE CHIRURGICALE DE LA LORRAINE, représentée par son président directeur général, le Docteur [F], a conclu le 30 mars 1989 un contrat d'exercice avec les docteurs [T] [M] et [I] [M], leur attribuant l'exclusivité des actes de radiologie générale et spécialisée, pour une durée de 20 années à compter du 1er avril 1989, renouvelable par tacite reconduction par période de 10 ans. Ce contrat a été cédé, avec agrément par le directeur de la clinique de la Lorraine, à la SELARL Centre d'imagerie médicale du Calaisis des docteurs [T] [M] et [I] [M], ci-après désignée CIMC. Il a été résilié le 27 février 2006 par la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS.
La résiliation de ce contrat a généré un litige entre la société CIMC et SA CLINIQUE DES DEUX CAPS devant le Tribunal de Grande Instance de Boulogne sur Mer puis devant la Cour d'appel de Douai. Aux termes de l'arrêt partiellement infirmatif rendu le 9 septembre 2009, la Cour a condamné la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS au paiement de diverses sommes à la société CIMC, à titre notamment d'indemnité de préavis et d'indemnité contractuelle de rupture.
Sur assignation délivrée le 29 septembre 2006 à la requête de SA CLINIQUE [3] à Monsieur [V] [F], le Tribunal de Commerce de Saint Omer, par jugement en date du 6 décembre 2007, a débouté la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS de toutes ses demandes et l'a condamnée au paiement de la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Vu l'appel interjeté le 21 décembre 2007 par SA CLINIQUE DES DEUX CAPS.
Dans ses dernières conclusions en date du 2 décembre 2009, la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS demande à la Cour de réformer le jugement, de dire son action recevable et bien fondée, de condamner Monsieur [V] [F] à lui payer la somme de 484 488,71 €, de le débouter de l'ensemble de ses prétentions et de le condamner au paiement de la somme de 15 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Elle expose qu'elle a un intérêt à agir au vu de l'arrêt intervenu le 9 septembre 2009, que son action n'est pas prescrite dans la mesure où elle n'a eu connaissance du courrier du 4 juin 2003 sur lequel elle fonde son argumentation que le 24 juillet 2006, sur le fond, que Monsieur [V] [F] est demeuré PDG de la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS pendant la période intermédiaire entre le protocole de cession d'actions de la SA CLINIQUE CHIRURGICALE DE LA LORRAINE et la cession effective, soit du 7 mai 2003 au 4 juillet 2003 avec des pouvoirs aménagés par le protocole, qu'il a engagé sa responsabilité en ne répondant pas au courrier remis par la SELARL CIMC le 4 juin 2003, courrier présenté par cette dernière comme élément déterminant de la preuve d'un accord sur la manière dont il fallait interpréter le contrat d'exercice au regard du mode de calcul des indemnités contractuellement prévues, et en ne sollicitant pas l'accord des cessionnaires.
Dans ses dernières conclusions en date du 4 décembre 2009, Monsieur [V] [F] demande à la Cour de confirmer le jugement, de rejeter l'intégralité des prétentions et de condamner la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS au paiement de la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de celle de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Il fait valoir que la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS n'a aucun intérêt à agir et que son action est prescrite. Sur le fond, il souligne que le non-respect invoqué du protocole a une nature contractuelle alors qu'il est excipé d'une responsabilité délictuelle et conteste avoir commis la moindre faute. Il expose que la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l'existence d'une telle faute, que le simple cachet de réception du courrier qui avait été remis en mains propres ne vaut nullement approbation et rappelle qu'en sa qualité de dirigeant de la société, il n'avait pas la qualité de commerçant. Il relève que la Cour d'Appel n'a, à aucun moment, confirmé l'analyse qui est faite de ce courrier par la société appelante, le courrier n'étant pas la cause de la condamnation. Il relève que l'agrément de la SELARL CIMC remontait au 14 mars 2003 et avait été acceptée par les associés et non par lui seul.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 décembre 2009.
MOTIVATION :
- Sur la recevabilité de l'action :
La SA CLINIQUE DES DEUX CAPS, qui recherche la responsabilité personnelle de l'ancien dirigeant de la société cédante, a incontestablement un intérêt à agir, l'intérêt à agir n'étant pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action.
- Sur la prescription :
Aux termes de l'article L 225-254, l'action en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général, tant sociale qu'individuelle, se prescrit par trois ans, à compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé, de sa révélation.
En l'espèce, la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS fait valoir qu'elle n'a eu connaissance du courrier litigieux que le 24 juillet 2006, date de réception d'un courrier à elle adressé par la SELARL CICM . Monsieur [V] [F] soutient pour sa part que le courrier à lui remis en main propre le 4 juin 2003 faisait partie des éléments remis dans le cadre de la cession le jour de celle-ci, soit le 4 juillet 2003.Il convient toutefois de relever qu'il ne le démontre pas, le courrier ne figurant pas dans les documents annexés à l'acte de cession. En l'état, il convient de rejeter l'exception de prescription soulevée par Monsieur [V] [F].
- Sur le fond :
La SA CLINIQUE DES DEUX CAPS recherche la responsabilité de Monsieur [V] [F] sur le fondement de l'article L 225-251 du code de commerce à raison de fautes de gestion qu'il aurait commises, essentiellement en se contentant d'avoir un rôle passif lors de la remise du courrier du 4 juin 2003 (apposition d'un visa et non réponse à ce courrier ) et en donnant son agrément à la cession du contrat d'exercice de la société CIMC.
Il sera relevé en premier lieu que l'agrément de la société CIMC, successeur des docteurs [M], est en date du 31 mars 2003, soit antérieurement au protocole de cession et qu'il a été donné par l'ensemble des associés et non par Monsieur [V] [F] seul. La SA CLINIQUE DES DEUX CAPS ne précise pas en quoi cet agrément serait fautif ni lui serait préjudiciable.
Sur le courrier remis le 4 juin 2003, il apparaît que les griefs formulés par la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS ne sont pas établis ; le visa apposé sur ce courrier remis en main propre ne saurait valoir acceptation et approbation de son contenu, la jurisprudence citée ne pouvant s'appliquer en l'espèce, Monsieur [V] [F] n'étant pas commerçant.
Par ailleurs, il convient de constater que ce courrier n'appelait aucune réponse, ses rédacteurs y rappelant leur propre interprétation du contrat d'exercice précédemment conclu.
En tout état de cause, le fait de n'avoir pas répondu à ce courrier ne peut être considéré comme fautif dans la mesure où il ne s'agissait, du propre aveu de la société appelante, que d'un problème d'interprétation des termes du contrat initial qui avait vocation à se poursuivre, Monsieur [V] [F] ne pouvant anticiper de la décision prise par la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS de le rompre brutalement plus de deux ans plus tard.
Il convient dès lors de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS de ses demandes.
- Sur les demandes accessoires :
La SA CLINIQUE DES DEUX CAPS qui succombe en son recours sera condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés par Monsieur [V] [F] en cause d'appel, l'indemnité allouée en première instance étant confirmée.
En revanche, il n'est démontré aucune faute dans l'exercice normal du droit d'agir en justice et d'exercer un recours à l'appui de la demande à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive laquelle ne pourra, en conséquence, qu'être rejetée.
La SA CLINIQUE DES DEUX CAPS sera déboutée de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Rejette les exceptions de procédure formées par Monsieur [V] [F] ;
Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS et l'a condamnée à une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'infirme pour le surplus
Déboute Monsieur [V] [F] de sa demande à titre de dommages et intérêts ;
Y ajoutant
Condamne la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS à payer à Monsieur [V] [F] la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SA CLINIQUE DES DEUX CAPS aux dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP LEVASSEUR CASTILLE, avoués, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
Marguerite-Marie HAINAUTNicole OLIVIER