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30/04/2008 | FRANCE | N°776/08

France | France, Cour d'appel de Douai, Ct0045, 30 avril 2008, 776/08


N 776 / 08
RG 07 / 01999

JUGT Conseil de Prud'hommes de ROUBAIX EN DATE DU 12 Juillet 2007

COUR D'APPEL DE DOUAI Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

ASSOCIATION DANS LA RUE LA DANSE 139 Rue des Arts 59100 ROUBAIX Représentant : Me Jean- Louis BROCHEN (avocat au barreau de LILLE), en présence de M. Antoine X..., Président

INTIME :

M. Saïd Y......... Comparant en personne Assisté de : Me BUFFETAUD substituant Me Philippe TALLEUX (avocat au barreau de LILLE)

DEBATS : à l'audience publique du 04 Mars 2008
Tenue par

JG HUGLO magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs re...

N 776 / 08
RG 07 / 01999

JUGT Conseil de Prud'hommes de ROUBAIX EN DATE DU 12 Juillet 2007

COUR D'APPEL DE DOUAI Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

ASSOCIATION DANS LA RUE LA DANSE 139 Rue des Arts 59100 ROUBAIX Représentant : Me Jean- Louis BROCHEN (avocat au barreau de LILLE), en présence de M. Antoine X..., Président

INTIME :

M. Saïd Y......... Comparant en personne Assisté de : Me BUFFETAUD substituant Me Philippe TALLEUX (avocat au barreau de LILLE)

DEBATS : à l'audience publique du 04 Mars 2008
Tenue par JG HUGLO magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré, les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : S. BLASSEL
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE

JG. HUGLO : PRESIDENT DE CHAMBRE

P. RICHEZ : CONSEILLER

C. CARBONNEL : CONSEILLER

ARRET : Contradictoire prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 avril 2008, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par JG. HUGLO, Président et par N. CRUNELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure ;

M. Saïd Y... a été engagé par contrat à durée déterminée pour trois spectacles ayant lieu les 28 août 1994, 3 et 4 septembre 1994 par l'association DANS LA RUE LA DANSE en qualité de danseur ;
Il était engagé par la suite par 357 contrats à durée déterminée par la même association pour divers spectacles ou répétitions ou pour des créations chorégraphiques de quelques minutes en qualité de danseur chorégraphe ;
A la suite d'une altercation avec M. Xavier B..., délégué culturel de l'association le 16 mai 2006, M. Y... recevait une lettre recommandée avec accusé de réception datée du 30 mai 2006 ainsi rédigée : " suite à l'agression caractérisée de votre part sur la personne de notre collaborateur M. Xavier B..., le mardi 16 mai 2006 au soir, dans les locaux de Dans la Rue La Danse, nous, membres du Conseil d'Administration, estimons que cet incident grave, dont vous êtes responsable constitue une faute lourde qui nous oblige à rompre toute collaboration avec vous. Tous les contrats en cours qui nous lient sont donc dénoncés d'office. " et signée du président de l'association ;
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 2 juin 2006 M. Y... a été convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 13 juin 2006 ;
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 juin 2006 l'association DANS LA RUE LA DANSE écrivait à M. Y... :
" Nous vous avons convoqué à un entretien préalable le mardi 13 juin 2006 à 18H auquel vous n'avez pas jugé bon de venir. Aussi, notre conseil d'administration réuni le lundi 19 juin 2006 a décidé de confirmer ce licenciement qui, bien sûr, prend effet immédiatement. " ;

Le 7 juillet 2006 M. Y... saisissait le Conseil de prud'hommes de Roubaix en contestant son licenciement et en demandant la requalification de la relation de travail en un contrat de travail à durée indéterminée ;
Par jugement en date du 12 juillet 2007, le Conseil de prud'hommes disait le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamnait l'employeur à payer à M. Y... les sommes de 25000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 1000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; il rejetait en revanche la demande de requalification des contrats de travail à durée déterminée ;
Le jugement était notifié le 16 juillet 2007 et l'association DANS LA RUE LA DANSE en interjetait appel le 23 juillet 2007 ;
Vu l'article 455 du nouveau code de procédure civile, tel qu'il résulte du décret n 98- 1231 du 28 décembre 1998 ;
Vu les conclusions de l'association DANS LA RUE LA DANSE en date du 4 mars 2008 et celles de M. Y... en date du 15 février 2008 ;
Les conseils des parties ayant été entendus en leurs plaidoiries qui ont repris les conclusions écrites ;
Attendu que l'association DANS LA RUE LA DANSE demande l'infirmation du jugement, sauf en ce qui concerne la demande de requalification des contrats de travail, et le rejet des demandes du salarié ;
Attendu que M. Y... demande la confirmation du jugement, sauf en ce qui concerne la demande de requalification des contrats de travail, de dire son licenciement non fondé par une cause réelle et sérieuse, de condamner l'association DANS LA RUE LA DANSE à lui verser les sommes de 76455 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 10000 euros au titre du préjudice moral, 3000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'il sollicite également la remise d'un certificat de travail, d'une attestation ASSEDIC et d'un reçu pour solde de tout compte sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
Sur ce, la Cour ;
Sur la demande de requalification des contrats de travail à durée déterminée ;
Attendu que, s'il résulte de la combinaison des articles L 122- 1, L 122- 1- 1, L 122- 3- 10, alinéa 2 et D 121- 2 du code du travail que, dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats de travail à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord- cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive 1999 / 70 / CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi ;
Attendu que M. Y... fait valoir qu'il n'a eu qu'un seul employeur pendant douze années, l'association DANS LA RUE LA DANSE ; qu'il occupait un emploi lié à l'activité normale de l'association ; qu'il était engagé en qualité de danseur et de chorégraphe ; que l'activité de l'association est de promouvoir la danse en direction des jeunes des quartiers populaires ; que, si les spectacles et les actions culturelles sont visées à l'article D 121- 2 du code du travail, la nature temporaire de son emploi n'est pas démontrée ; qu'il faisait des encadrement de stages, des répétitions, des spectacles amateurs, des cours de danse ; que le travail était fourni tout au long de l'année ;
Attendu que la cour constate que M. Y... a été engagé par 357 contrats à durée déterminée par l'association DANS LA RUE LA DANSE pour des spectacles ponctuels, des répétitions portant sur quelques jours ou pour des créations chorégraphiques de quelques minutes (2 minutes, 8 minutes ou 20 minutes) en qualité de danseur chorégraphe ;
Que l'altercation avec M. B..., délégué culturel, résulte du rapport d'activité 2005 faisant état d'une baisse considérable des spectacles organisés ;
Que M. Y... bénéficie du statut d'intermittent du spectacle ;
Qu'à l'analyse des contrats de travail, la cour ne conclut pas comme le salarié l'affirme que son activité était en majorité tournée vers l'enseignement ;
Que, par ailleurs, l'enseignement est également visé par l'article D 121- 1 du code du travail parmi les secteurs pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée ;
Que l'association DANS LA RUE LA DANSE qui est subventionnée par un certain nombre de personnes publiques et notamment la commune de Roubaix n'a pas la maîtrise de son budget ;
Que la cour estime que les emplois occupés par M. Y... étaient des emplois par nature temporaire puisque liés à l'organisation d'un spectacle ou d'un stage déterminé ;
Que la demande de requalification sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef ;
Que la demande d'une somme de 10000 euros pour préjudice moral du fait de la succession de contrats à durée déterminée sera dès lors rejetée ;

Sur la rupture du contrat de travail ;

Attendu que la faute lourde comme la faute grave est celle qui par sa nature rend impossible sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur la continuation des rapports de travail même pendant la durée limitée du préavis ;
Qu'elle suppose en outre l'intention de nuire du salarié ;
Attendu que M. Y... fait valoir qu'il n'a été licencié que par la lettre du 29 juin 2006 qui ne comporte aucune motivation ; que son licenciement est dès lors sans cause réelle et sérieuse ;
Mais attendu que la lettre recommandée avec accusé de réception datée du 30 mai 2006 ainsi rédigée : " suite à l'agression caractérisée de votre part sur la personne de notre collaborateur M. Xavier B..., le mardi 16 mai 2006 au soir, dans les locaux de Dans la Rue La Danse, nous, membres du Conseil d'Administration, estimons que cet incident grave, dont vous êtes responsable constitue une faute lourde qui nous oblige à rompre toute collaboration avec vous. Tous les contrats en cours qui nous lient sont donc dénoncés d'office " et signée du président de l'association constitue une lettre notifiant la rupture des contrats à durée déterminée conclus entre le salarié et l'association ;
Que le salarié n'a pas donné son accord à l'association pour que la procédure de licenciement, irrégulière faute de convocation à un entretien préalable, soit ultérieurement régularisée ; qu'il ne s'est d'ailleurs pas présenté à l'entretien préalable organisé postérieurement à la lettre de rupture du 30 mai 2006 par l'employeur ;
Que la lettre de rupture du 30 mai 2006 est motivée ;
Qu'il appartient dès lors à la cour d'apprécier la réalité des griefs visés dans cette lettre ;

Attendu, sur ce point, que l'association DANS LA RUE LA DANSE, produit une photographie de M. B... montrant des blessures à l'oeil gauche et un oeil tuméfié ; que cette photographie est datée du 17 mai 2006 ; qu'elle produit une déclaration d'accident du travail qui mentionne que M. B... a été conduit aux urgences de l'hôpital ; que M. Z..., président de l'association, a fait une déclaration de main courante aux services de police le 18 mai 2006 ; qu'il n'a pas assisté toutefois à l'altercation n'étant pas présent à l'association ce jour- là ; qu'elle produit une lettre d'une responsable de l'Université de Lille III l'informant de la décision d'une étudiante en stage à l'association de mettre fin à son stage compte tenu des difficultés graves rencontrées sur le lieu de stage ; qu'elle produit enfin un Email d'une employée de l'association, Mme C..., qui indique qu'elle refuse dorénavant de travailler avec Saïd ;

Attendu que M. Y... fait valoir que le coup de poing qu'il a donné à M. B... est une réaction de défense à l'agression de celui- ci qui lui a donné un coup de triple décimètre sur le cuir chevelu et sur le bras ; qu'il produit un certificat médical daté du 16 mai 2006 mentionnant la présence d'une plaie de 1, 5 cms du cuir chevelu sur la zone frontale gauche qui a nécessité une suture par agrafe et une incapacité totale de travail de 48 heures ; qu'il a porté plainte le 17 mai 2006 aux services de police de Lille ; que Mme D..., présente sur les lieux, atteste avoir vu M. Y... sortir du bureau de M. B... blessé à la tête en disant : " pourquoi tu m'as frappé avec ta règle ; je ne suis pas un gamin " ; que Mme E..., appelée par le salarié quelque temps après, témoigne qu'il saignait de la tête ;
Attendu que, la rupture des contrats de travail ayant été prononcée pour faute lourde, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve des griefs visés dans la lettre de rupture ;
Que l'association ne démontre pas que M. Y... est à l'origine de l'agression mutuelle des deux salariés ;
Que la rupture des contrats de travail est dès lors sans cause réelle et sérieuse ;
Que le jugement sera confirmé sur ce point ;
Attendu, toutefois, que M. Y... était titulaire lors de la rupture du contrat de travail de quatre contrats à durée déterminée ; que l'indemnité due est celle visée à l'article L 122- 3- 8 du code du travail, c'est- à- dire celle au moins égale aux salaires restant à courir jusqu'au terme du contrat ;
Que la cour estime que l'indemnité due à ce titre doit être fixée à la somme de 10000 euros ;
Que le jugement sera réformé en ce sens ;

Sur la demande de remise d'un certificat de travail, d'une attestation ASSEDIC et d'un reçu pour solde de tout compte sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

Attendu qu'il y a lieu d'ordonner la remise d'un certificat de travail, d'une attestation ASSEDIC et d'un reçu pour solde de tout compte ;
Qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur la demande formée par M. Y... au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il convient à cet égard de lui allouer pour l'ensemble de la procédure une indemnité dont le montant sera précisé au dispositif de la présente décision sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile par confirmation du jugement ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité due et l'astreinte ;
Rejette la demande de requalification des contrats de travail ;
Dit la rupture des contrats de travail à durée déterminée contraire à l'article L 122- 3- 8 du code du travail ;
Condamne l'association DANS LA RUE LA DANSE à verser à M. Saïd Y... la somme de 10000 euros (dix mille euros) au titre de l'indemnité de l'article L 122- 3- 8 du code du travail et celle de 1000 euros (mille euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Ordonne la remise d'un certificat de travail, d'une attestation ASSEDIC et d'un reçu pour solde de tout compte ;
Dit n'y avoir lieu à astreinte de ce chef ;
Rejette les autres demandes ;
Condamne l'association DANS LA RUE LA DANSE aux entiers dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Ct0045
Numéro d'arrêt : 776/08
Date de la décision : 30/04/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Roubaix, 12 juillet 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2008-04-30;776.08 ?
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