ARRET DU 30 Mars 2007
N 658 / 07
RG 06 / 00709
Contredit
JUGT Conseil de Prud'hommes de TOURCOING EN DATE DU 25 Janvier 2006
NOTIFICATION
à parties
le 30 / 03 / 07
Copies avocats
le 30 / 03 / 07
COUR D'APPEL DE DOUAI Chambre Sociale
-Prud'Hommes-
APPELANT :
M. Jean-Claude X......... 59000 LILLE Comparant en personne assisté de Me Dominique GUERY-SEKULA (avocat au barreau de LILLE)
INTIMEE :
SA TRANSPOLE 908, Avenue de la République 59700 MARCQ EN BAROEUL Représentant : Me QUANDALLE-BERNARD substituant Me Patrick LOSFELD (avocat au barreau de LILLE)
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE
JG. HUGLO : PRESIDENT DE CHAMBRE
P. NOUBEL : CONSEILLER
P. RICHEZ : CONSEILLER
GREFFIER lors des débats : M. ROUE
DEBATS : à l'audience publique du 06 Février 2007
ARRET : Contradictoire prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Mars 2007, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du nouveau code de procédure civile, JG. HUGLO, Président, ayant signé la minute avec M. ROUÉ, greffier lors du prononcéFaits et procédure ;
Le 6 février 2006 M. Jean-Claude X... a formé contredit contre le jugement rendu le 25 janvier 2006 par le Conseil de prud'hommes de Tourcoing dans le litige qui l'oppose à la SA TRANSPOLE, lequel s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de grande instance de Lille et a condamné les demandeurs à la somme de 200 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Par arrêt du 30 juin 2006 la cour a infirmé le jugement, dit le conseil de prud'hommes compétent pour statuer sur les demandes, évoqué l'affaire au fond et invité les parties à conclure pour l'audience des débats du 31 octobre 2006 ;
L'affaire a été renvoyée à l'audience du 6 février 2007, les parties n'étant pas en état ;
Vu l'article 455 du nouveau code de procédure civile, tel qu'il résulte du décret n 98-1231 du 28 décembre 1998 ;
Vu les conclusions de M. X... en date du 6 février 2007 et celles de la société TRANSPOLE en date du 6 février 2007 ;
Les conseils des parties ayant été entendus en leurs plaidoiries qui ont repris les conclusions écrites ;
Attendu que M. X... demande à la Cour " vu les dispositions de l'article L 212-4 du code du travail ", de dire que le temps d'habillage et de déshabillage de la tenue de travail des conducteurs receveurs de TRANSPOLE constitue un temps de travail effectif qui doit être rémunéré ; en conséquence de condamner la SA TRANSPOLE à lui payer la somme de 5814,60 euros à titre de rappels de salaire et de congés payés y afférents du 1er janvier 2000 au 31 octobre 2006 majoré des intérêts judiciaires à compter du jour de la demande ; de condamner la SA TRANSPOLE à lui payer la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ; subsidiairement de condamner la SA TRANSPOLE à lui verser la somme de 6000 euros à titre de dommages et intérêts sur la fondement des articles L 121-1 du code du travail et 1147 du code civil ; de condamner la SA TRANSPOLE à lui verser la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que la SA TRANSPOLE demande le rejet des prétentions du salarié et sa condamnation à lui verser la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Sur ce, la Cour ;
Sur l'application de l'article L 212-4 du code du travail ;
Attendu qu'aux termes de l'article L 212-4 du code du travail, lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions législatives ou réglementaires, par des clauses conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage fait l'objet de contreparties soit sous forme de repos, soit financières, devant être déterminées par convention ou accord collectif ou à défaut par le contrat de travail " ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que l'article 11. 8 du contrat de travail impose le port d'un uniforme ; qu'aucun accord collectif n'existe au sein de la société TRANSPOLE en ce qui concerne le temps d'habillage et de déshabillage ;
Que, dans ses conclusions, le salarié fait valoir que la société TRANSPOLE n'a pas encore voulu négocier sur ce point ; que l'article L 212-4 du code du travail n'impose pas une condition cumulative comme la cour de cassation l'a indiqué dans son arrêt CONNEX du 26 janvier 2005 ; qu'il importe peu dès lors que les salariés ne soient pas tenus de s'habiller sur le lieu de travail ; qu'en l'espèce, les conducteurs receveurs de la société TRANSPOLE s'habillent chez eux car ils ne disposent pas de vestiaires suffisants sur les sites de la société, seuls 20 vestiaires étant prévus pour 200 salariés ; qu'il importe peu également que les syndicats n'aient pas effectué de demandes collectives de négociation ; que le temps d'habillage doit être considéré comme du temps de travail effectif ;
Attendu que la SA TRANSPOLE soutient que l'article L 212-4 du code du travail n'est pas applicable car les salariés n'ont pas l'obligation de s'habiller et de se déshabiller sur le lieu de travail ; que l'article L 212-4 impose une double condition comme les travaux parlementaires le démontrent ; que l'arrêt rendu par la cour de cassation le 26 janvier 2005 institue une interprétation contra legem et constitue une violation de la séparation des pouvoirs ;
Attendu qu'il résulte des débats parlementaires que le législateur a entendu en effet imposé une double condition à l'application de l'article L 212-4 du code du travail ; que Mme la Ministre de l'emploi a ainsi déclaré lors des débats parlementaires : " le Gouvernement est favorable à cet amendement. Je souhaiterais qu'il soit simplement précisé que, bien évidemment, le temps nécessaire à l'habillage et le déshabillage est considéré comme du temps de travail lorsque ces opérations doivent être réalisées sur le lieu de travail ", " D'une part le salarié doit porter une certaine tenue de travail, d'autre part il doit la mettre sur le lieu de travail. La condition est double. ", " s'ils mettent cette tenue chez eux, ce n'est pas du temps de travail ", " Je le dis très clairement : dès lors que les salariés se voient imposer le port d'une tenue sur le lieu de travail, et ce quel que soit l'emplacement de ce lieu, le temps nécessaire à l'habillage et au déshabillage doit donner lieu à contrepartie. Si la pointeuse se trouve après le vestiaire, il faudra la déplacer pour la mettre avant ou prendre en compte le temps nécessaire à l'habillage ou au déshabillage. Je partage l'avis de M. D... mais il doit comprendre que celui qui enfile une blouse chez lui ne peut pas prétendre à ce que le temps nécessaire à cette opération soit décompté comme du temps de travail " ; que M. E... a déclaré : " le Gouvernement et le rapporteur se sont aperçu que les amendements proposés nuitamment par notre collègue F... étaient dangereux. Il nous avait expliqué dans son " amendement Disney " que s'habiller en Mickey demandait du temps et qu'il fallait inclure dans le temps de travail effectif le temps d'habillage et de déshabillage. Dans les industries laitières, cette disposition revient, pour 60000 salariés, à offrir l'équivalent de trois semaines de congés supplémentaires, alors que l'on augmente déjà le coût du travail de 11,40 % " ;
Attendu que le texte de l'article L 212-4 du code du travail est clair et impose une double condition ;
Qu'il n'est pas contesté que les salariés de la société TRANSPOLE ne doivent pas revêtir la tenue TRANSPOLE qui consiste en un costume de ville, une chemise, une cravate et une parka verte, sur le lieu de travail ; qu'avant comme après la loi du 19 janvier 2000, les conducteurs receveurs revêtent la tenue chez eux et se déshabillent chez eux ;
Que, dès lors, l'article L 212-4 du code du travail ne leur est pas applicable ;
Que la société TRANSPOLE n'était donc pas tenue à une obligation de négociation ;
Qu'il serait loisible au juge, pour le cas où un employeur exigerait le port d'une tenue qui ne peut manifestement être revêtue que sur le lieu de travail tout en obligeant ses salariés à la revêtir à leur domicile aux fins de ne pas voir appliquer l'article L 212-4 du code du travail, de retenir l'existence d'une fraude à la loi et d'en tirer les conséquences ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ;
Que la demande doit en conséquence être rejetée ;
Sur la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile formulée par le salarié ;
Attendu que la partie succombe dans ses prétentions et est condamnée aux entiers dépens ;
Qu'il convient donc de rejeter sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Sur la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile formulée par la SA TRANSPOLE ;
Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la partie les frais exposés par elle et non compris dans les dépens, compte tenu de la situation économique de la partie condamnée aux dépens ;
Qu'il convient de débouter la partie de sa demande formulée au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Rejette les demandes de M. Jean-Claude X... ainsi que celle de la SA TRANSPOLE au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Condamne M. X... aux entiers dépens de première instance et d'appel.