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31/01/2007 | FRANCE | N°06/00530

France | France, Cour d'appel de Douai, Ct0173, 31 janvier 2007, 06/00530


N 93/07
RG 06/00530

JUGTConseil de Prud'hommes de FOURMIESEN DATE DU02 Mars 2006

NOTIFICATION
à parties
le 31/01/07

Copies avocats
le 31/01/07

COUR D'APPEL DE DOUAIChambre Sociale

- Prud'Hommes -

APPELANT :

S.A.R.L. AID'MEDICA54 Rue du Maréchal Joffre59530 LE QUESNOYReprésentée par Me Georges-Henry BOUCHART (avocat au barreau de VALENCIENNES) substitué par Me O'BRIEN

INTIME :

M. Yann Y......59330 HAUTMONTComparant en personneAssisté de M. Edmond Z..., délégué syndical C.G.T, régulièrement mandaté

DE

BATS : à l'audience publique du 12 Décembre 2006
Tenue par J.G. HUGLOmagistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les...

N 93/07
RG 06/00530

JUGTConseil de Prud'hommes de FOURMIESEN DATE DU02 Mars 2006

NOTIFICATION
à parties
le 31/01/07

Copies avocats
le 31/01/07

COUR D'APPEL DE DOUAIChambre Sociale

- Prud'Hommes -

APPELANT :

S.A.R.L. AID'MEDICA54 Rue du Maréchal Joffre59530 LE QUESNOYReprésentée par Me Georges-Henry BOUCHART (avocat au barreau de VALENCIENNES) substitué par Me O'BRIEN

INTIME :

M. Yann Y......59330 HAUTMONTComparant en personneAssisté de M. Edmond Z..., délégué syndical C.G.T, régulièrement mandaté

DEBATS : à l'audience publique du 12 Décembre 2006
Tenue par J.G. HUGLOmagistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré,les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : A. BACHIMONT
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE

JG. HUGLO: PRESIDENT DE CHAMBRE

P. NOUBEL: CONSEILLER

S. MARIETTE: CONSEILLER

ARRET : Contradictoire prononcé par sa mise à disposition au greffe le 31 Janvier 2007,les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du nouveau code de procédure civile, JG. HUGLO, Président, ayant signé la minute avec A. BACHIMONT, greffier lors du prononcéExposé des faits et de la procédure

M.Yann Y... a été engagé par la Société AID'MEDICA suivant contrat à durée indéterminée en date du 1er octobre 2002, en qualité de vendeur livreur.

Par lettre recommandée remise en mains propres, M. Yann B... a été convoqué à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement, le salarié faisant l'objet d'une mise à pied conservatoire.
L'entretien s'est déroulé le 27 mai 2004.
Par lettre recommandée avec accusé réception en date du 2 juin 2004, M.Yann B... a été licencié pour faute grave.
Le 17 février 2005, le salarié, ayant pris le patronyme de Y... suite à une adoption, a saisi le conseil de prud'hommes de Fourmies en contestant son licenciement.
Par jugement du 2 mars 2006, le conseil de prud'hommes a :
- dit que le licenciement de M.Yann Y... ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,- condamné la Société AID'MEDICA à payer à M. Yann Y... :- la somme de 2.616 euros au titre de l'indemnité de préavis, outre celle de 261 euros au titre des congés payés y afférents,- celle de 530 euros à titre d'indemnité de licenciement,- celle de 5.232 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,- celle de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le 10 mars 2006, M. Yann Y... a interjeté appel de la décision.

Suivant arrêt du 30 novembre 2006, la Cour d'Appel de Douai a ordonné la réouverture des débats et le renvoi de l'affaire à l'audience du 12 décembre 2006, date à laquelle les parties ont été entendues.
Vu l'article 455 du nouveau code de procédure civile,
Vu les conclusions de la Société AID'MEDICA en date du 3 novembre 2006 et celles de M. Yann Y... en date du 2 juillet 2006,
Les parties, reprenant leurs conclusions écrites ayant été entendues en leurs plaidoiries,
La Société AID'MEDICA demande :
-à voir prononcer la nullité du jugement entrepris pour violation du principe du contradictoire,- à voir dire et juger que le licenciement de M. Yann Y... repose sur plusieurs fautes graves,- à voir débouter M. Yann Y... de l'ensemble de ses demandes,- à voir condamner M. Yann Y... à payer à la Société AID'MEDICA la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile- à titre subsidiaire,- à voir dire et juger que le licenciement de M. Yann Y... repose sur une cause réelle et sérieuse,- à voir réduire à de plus justes proportions les demandes de M. Yann Y....

M. Yann Y... demande à voir confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Sur ce, la Cour

Sur la nullité du jugement entrepris

Attendu que l'affaire a été appelée à l'audience du 8 septembre par devant le bureau de jugement, puis renvoyée le 20 octobre 2005 et le 2 février 2006 ;

Que le conseil de la Société AID'MEDICA qui avait formé une demande de remise ne s'est pas fait substituer à cette dernière audience pour soutenir sa demande de renvoi, alors que le conseil du salarié s'était opposé à un renvoi ;
Que la décision de renvoi appartient à la seule juridiction et non aux conseils des parties ;
Qu'en ne se faisant pas substituer lors de l'audience des débats, le conseil de la société AID'MEDICA a pris le risque que l'affaire soit retenue par la juridiction et que son client soit non comparant ;
Qu'il n'y a pas lieu à prononcer l'annulation du jugement ;

Sur le bien fondé du licenciement;

Attendu que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur ;
Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article L.122-14-2 du code du travail, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre prévue à l'article L.122-14-1 du même code ;
Que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux énoncés dans celle-ci, peu important les motifs allégués antérieurement ou en cours de procédure ;
Attendu qu'en l'espèce, la lettre de licenciement est ainsi motivée :
"(...) Le 17 mai, nous vous avons remis contre décharge une lettre vous signifiant votre mise à pied à titre conservatoire et vous convoquant à un entretien le jeudi 27 mai 2007 à 9h30.
Lors de notre entretien du 27 mai, nous vous avons fait part des griefs que nous étions amenés à formuler à votre encontre.
Ces griefs se rapportent à :
- Utilisation de l'ordinateur de l'entreprise pendant le temps de travail pour aller consulter des sites informatiques au détriment de votre travail. Sites concernant le tuning, les sports d'hiver, les affiches de films, les aquariums, des sites marchands et des sites pornographiques.Les images pornographiques montrées par les fichiers temporaires restées sur le disque dur sont telles qu'il ne peut s'agir de simples photos situées sur les pages d'accueil de ces sites. Leur caractère oblige à entrer sur les sites concernés, ce que prouve par ailleurs la présence de cookies.

- Pollution de cet ordinateur qui n'était pas prévu pour se connecter sur Internet et ne contenait de ce fait ni logiciel anti-virus, ni firewall avec le risque de perte de données et blocage du réseau interne sur lequel se trouvait connecté l'ordinateur via un routeur. L'analyse du disque par Norton antivirus et par Ad-aware montre la présence de 257 fichiers anormaux (spywares, logiciels espions, dll indues installées dans le système).
- Installation de logiciels non autorisés dont livesexcam, logiciel permettant de visualiser via Webcams des scènes pornographiques.
- Risque d'atteinte à l'image de l'entreprise, des fenêtres invitant à aller sur des sites à caractère pornographique s'ouvrant "spontanément", suite à la présence des nombreux fichiers indus, en présence de la clientèle.
- Risque d'enquête policière suite à repérage après connexion et navigation sur des sites à caractère pornographique...
Nous considérons qu'il s'agit de fautes graves.
L'entretien préalable n'a apporté aucun élément nouveau. Vous avez reconnu une connexion en début d'année sur un site, hebus, qui aurait entraîné cette apparition de fenêtres invitant à se connecter et vous avez signalé n'avoir effectué aucune autre connexion depuis.
Les fichiers temporaires présents sur le disque dur, indiquant les jours et heures de connexions, attestent le contraire.
Nous nous voyons dans l'obligation de mettre fin au contrat de travail vous liant à notre entreprise pour fautes graves. (...)"
Attendu que l'ensemble des salariés collègues de M. Yann Y... attestent ne pas avoir utilisé internet sur le matériel informatique de l'entreprise ;
Que le salarié avec lequel travaillait M. Yann Y..., M. Giovanni C..., déclare pour sa part qu'il était en situation de congés du 21 février 2004 au 1er mars 2004 ;
Attendu qu'il apparaît, au vu du nombre de fichiers temporaires retrouvés sur l'ordinateur, que celui-ci avait été utilisé pour accéder à des sites internet à caractère pornographique au moins le 23 février 2004, aux alentours de 18 heures et le 24 février 2004 de 15 heures à 15 heures 32 ainsi que de 18 heures à 18 heures 32, alors que l'intimé était seul en poste ;
Que de très nombreuses images à caractère pornographique ont alors été téléchargées ;
Que les heures de connexion relevées permettent de considérer que les autres salariés présents, occupés auprès de la clientèle, ne pouvaient être concernés par les manipulations en cause, l'employeur produisant les relevés de commande de médicaments ce jour là ;
Que M. Yann Y... ne conteste pas être un adepte de l'aquariophilie, alors que l'ordinateur en question contenait la trace de visites sur des sites spécialisés en la matière ;
Attendu que par courrier du 16 juin 2004, suite à son licenciement , le salarié a interpellé son employeur, en lui demandant si la gravité des faits reprochés n'a pas été majorée et si un avertissement ou une remontrance aurait été largement suffisante ;
Que cette réflexion constitue l'aveu implicite de l'utilisation d'internet via le matériel de l'entreprise ;
Attendu que par ailleurs, il est démontré que le matériel informatique de l'entreprise n'était pas prévu pour être utilisé sur internet, n'étant pas protégé d'éventuels virus ;
Que le logiciel "livesexcam" a été installé sur l'ordinateur ;
Que l'attitude de M. Yann Y... a eu pour effet non seulement d'exposer ledit matériel à des risques de virus mais aussi d'insérer sur son ordinateur des images inconvenantes ;
Attendu que dès lors, le comportement de M.Yann Y... rendait impossible le maintien du contrat de travail en ce compris pendant la durée du préavis ;
Que le licenciement se voit donc fondé sur une faute grave ;
Qu'il y a donc lieu de débouter M. Yann Y... de l'ensemble de ses demandes ;

Sur la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile formulée par la Société AID'MEDICA

Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la partie les frais exposés par elle et non compris dans les dépens, compte tenu de la situation économique de la partie condamnée aux dépens ;
Qu'il convient de débouter la partie de sa demande formulée au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Sur la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile formulée par M.Yann Y...
Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la partie les frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Qu'il convient de débouter la partie de sa demande formulée au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Dit n'y avoir lieu à annuler le jugement déféré,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Dit que le licenciement de M. Yann Y... repose sur une faute grave,
Déboute M. Yann Y... de l'ensemble de ses demandes,
Déboute la Société AID'MEDICA de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne M. Yann Y... aux dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : 06/00530
Date de la décision : 31/01/2007

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Faute du salarié - Faute grave - Applications diverses - / JDF

Est constitutif d'une faute grave le fait pour un salarié d'avoir consulté, à l'occasion du travail et à l'aide du matériel mis à sa disposition, des sites internet à caractère pornographique, après avoir installé des logiciels permettant l'accès à de tels sites, alors que le matériel informatique de l'entreprise n'était pas prévu pour être connecté à internet, n'étant pas protégé d'éventuels virus, une telle attitude ayant eu pour effet non seulement d'exposer ledit matériel à des risques de virus mais aussi d'insérer sur son ordinateur des images inconvenantes


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Fourmies, 02 mars 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2007-01-31;06.00530 ?
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