ARRET DU
29 Septembre 2006 N 266/06 RG 05/01522 RD/JO
JUGT
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ARRAS
EN DATE DU
18 Avril 2005 NOTIFICATION à parties
le Copies avocats
le 29/09/06
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Sécurité Sociale - APPELANT : Caisse d'Epargne du Pas de Calais ... Représentant : Me Sophie X... (avocat au barreau de LYON) INTIME : Caisse O.R.G.A.N.I.C. Recouvrement Route des Dolines 06913 SOPHIA ANTIPOLIS CEDEX Représentant : Me Régis Y... (avocat au barreau de HAUTS DE SEINE) DEBATS :
à l'audience publique du 06 Juin 2006
Tenue par R. DEBONNE
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe. GREFFIER :
N. BERLY COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE N. OLIVIER :
PRESIDENT DE CHAMBRE R. DEBONNE : CONSEILLER T. VERHEYDE : CONSEILLER ARRET :
Contradictoire prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2006 N. OLIVIER, Président, ayant signé la minute
avec K. HACHID, greffier lors du prononcéVu le jugement rendu le 18 avril 2005 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'Arras qui a : - rejeté le recours formé par la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais, - débouté celle-ci de ses demandes, fins et conclusions, - condamné la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais à payer à la Caisse Organic la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ; Vu l'appel régulièrement interjeté le 24 mai 2005 par la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais ; Vu les conclusions visées par le greffier le 24 août 2005 et soutenues oralement à l'audience par lesquelles la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais demande à la Cour, infirmant le jugement déféré, de : - déclarer la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais recevable et bien fondée en son action, en conséquence : - Sur la prescription : de dire et juger que la contribution sociale de solidarité exigible au 1er mars 2001 et visée par la mise en demeure en date du 15 avril 2004 (reçue le 20 avril 2004) est prescrite et, en conséquence de prononcer la nullité de redressement opéré, - sur le fond : de dire et juger que l'Organic Recouvrement est mal fondé à demander le recouvrement de la somme totale de 203.911,43 euros, - en conséquence, condamner l'Organic Recouvrement au remboursement de la somme de 203 911,43 euros majorée des intérêts légaux au titre desdits dégrèvements à compter de la date du paiement effectif des sommes réclamées sur la mise en demeure, - En tout état de cause, condamner l'Organic Recouvrement à verser à la Caisse d'épargne du Pas-de-Calais la somme de 7.000 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, - condamner l'Organic Recouvrement aux entiers dépens, en faisant valoir pour l'essentiel : - que la mise en demeure concernant la contribution
sociale de solidarité 2001 qui lui a été adressée par l'Organic Recouvrement le 15 avril 2004 est nulle ; qu'en effet, par application de l'article L. 244-3 du Code de la Sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi du 18 décembre 2003 entrée en vigueur le 23 décembre 2003, la "mise en demeure avant poursuites" du 15 avril 2004 ne peut porter que sur la contribution sociale de solidarité exigible dans les trois années qui précèdent, soit le 15 avril 2001 au plus tard, qu'or la contribution sociale de solidarité 2001 (assise sur le chiffre d'affaires 2000) était exigible au 1er mars 2001 (article D.651-9 du Code de la Sécurité Sociale), qu'elle est donc couverte par la prescription ; que c'est bien l'ancien délai qui reste applicable en l'espèce puisqu'il a commencé à courir avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi et que sa date d'expiration est antérieure à celle du nouveau délai de reprise ; - qu'a compter du 1er janvier 1996 (date d'entrée en vigueur de la loi du 4 août 1995), en tant que membre d'un réseau bancaire coopératif, elle a bénéficié de l'exonération prévue à l'article L 651-3 alinéa 8 du Code de la Sécurité sociale spécialement adopté par le législateur afin d'éviter une double taxation des opérations de centralisation des ressources financières au sein des réseaux bancaires coopératifs ; que si de par la loi du 25 juin 1999 portant statut des Caisses d'Epargne elle est devenue à compter du 13 juillet 2000 une Société coopérative à forme anonyme, elle ne peut être considérée à partir de cette date comme visée par l'alinéa 1er de l'article L. 651-1 du Code de la Sécurité sociale qui ne concerne que les sociétés anonymes simples et comme telle redevable d'un complément de contribution sociale de solidarité ; que son statut prééminent de coopérative ne peut être ignoré, qu'en conséquence elle entre bien dans la catégorie prévue à l'alinéa 9 de l'article L. 651-1 du Code de la Sécurité sociale, c'est-à-dire celle des "organismes non visés aux 1o et 8o
qui entrent dans le champ d'application de la contribution des institutions financières prévues à l'article 235 ter Y du Code général des impôts" et devait toujours bénéficier de l'exonération prévue à l'article L. 651-3 alinéa 8 du Code de la Sécurité sociale ; que cette analyse est d'ailleurs formellement confirmée par la Loi de Financement de la Sécurité Sociale du 20 décembre 2004 dont l'article 8 - II a apporté d'utiles précisions quant au champ d'application de l'exonération visée à l'article L. 651-3 alinéa 8 du Code de la Sécurité sociale en supprimant le renvoi au 9o de l'article L. 651-1 du Code de la Sécurité sociale, que cette modification législative ainsi que les débats parlementaires de 2004 démontrent incontestablement que le texte antérieur n'était pas clair et devait être amendé pour éviter toute interprétation contraire à la volonté du législateur, ce qui confère en tout état de cause au nouveau texte un caractère rétroactif ; Vu les conclusions visées par le greffier le 23 mai 2005 et soutenues oralement à l'audience par lesquelles la Caisse Organic Recouvrement demande à la cour de : - confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, - condamner la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile en cause d'appel, en faisant valoir pour l'essentiel : - que le délai de prescription d'une créance civile est celui prévu par la loi nouvelle sous une seule condition : que lors de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, la prescription ne soit pas d'ores et déjà acquise en application de la loi ancienne ; que tel est le cas en l'espèce concernant la fraction de la contribution sociale de solidarité exigible le 1er mars 2001 et payable le 15 avril 2001 ; - qu'alors même que leur fonctionnement est inspiré de principes sociaux particuliers, les sociétés coopératives ne constituent pas une forme spécifique de Société ; - que tout en soumettant les Caisses
d'Epargne au statut de la coopération (loi du 10 septembre 1947), l'article 3 de la loi du 25 juin 1999 leur a imposé d'adopter la forme juridique d'une Société commerciale régie par les dispositions de droit commun de la loi du 24 juillet 1966, que les Caisses d'Epargnes sont donc des sociétés commerciales, et, plus précisément, des sociétés anonymes ; que seule cette forme juridique doit donc être prise en considération au regard de l'article L. 651-1 du Code de la Sécurité sociale ; que son appartenance au secteur coopératif ne confère à la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais aucun titre à se prévaloir du 9o de l'article L 651-1 du Code de la Sécurité Sociale, qui ne fait aucune allusion au statut de la coopération; qu'en l'état des textes légaux en vigueur à la date d'exigibilité des contributions litigieuses (loi du 4 août 1995 et 30 décembre 1995), la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais se trouvait donc exclue du bénéfice de la réduction d'assiette ; - que contrairement à ce que tente de soutenir la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais, les textes précédemment en vigueur étaient clairs ; que la loi du 21 décembre 2004, dont l'entrée en vigueur a été expressément fixée au 1 janvier 2005 modifie l'état du droit antérieur et ne présente pas un caractère interprétatif, qu'elle ne peut donc pas faire l'objet d'une application rétroactive ; SUR CE : Attendu que le 20 avril 2004 la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais a reçu notification d'une mise en demeure délivrée le 15 avril 2004 par la Caisse Organic Recouvrement pour avoir paiement d'une somme de 262.883,43 euros au titre de la contribution sociale de solidarité pour les années 2001, 2002 et 2003 ; Que le 27 avril 2004 la Caisse d'Epargne a effectué le paiement de cette somme "avec réserves" ; Que le 13 septembre 2004 Organic Recouvrement a notifié à la Caisse d'Epargne sa décision de remise totale des majorations de retard, soit la somme de 58.972 euros ; Que le 11 juin 2004 la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais a saisi le
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'Arras en vue de contester le redressement opéré ; Que le 18 avril 2005 le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale a rendu la décision dont appel ; Sur la prescription pour n'année 2001 : Attendu qu'en application de l'article L. 651-7 du Code de la Sécurité sociale, les sociétés assujetties à la contribution sociale de solidarité sont soumises aux dispositions de l'article L. 244-3 alinéa 1 dudit code ; Attendu que l'article L. 244-3 du Code de la Sécurité sociale a été modifié par la loi no 2003-1199 du 18 décembre 2003, (article 70-III), laquelle dispose que "l'avertissement ou la mise en demeure ne peut concerner que les cotisations exigibles au cours des trois années civiles qui précédent l'année de leur envoi ainsi que les cotisations exigibles au cours de l'année de leur envoi" ; Attendu que la contribution sociale de solidarité revêt la nature d'une cotisation de sécurité sociale ; que s'agissant d'une créance civile, le délai de prescription est celui prévu par la loi nouvelle à condition qu'à la date d'entrée en vigueur de cette dernière la prescription ne soit pas d'ores et déjà acquise en application de la loi ancienne ; Que si la loi nouvelle allonge le délai ancien (cas de la loi susvisée), non accompli à la date de son entrée en vigueur, le temps déjà écoulé est pris en compte, mais la prescription n'est acquise qu'à l'expiration du délai nouveau ; Attendu que la loi du 18 décembre 2003 est entrée en vigueur le 20 décembre 2003, soit à un moment où les contributions réclamées n'étaient pas prescrites sous l'empire de la loi ancienne (le 20 décembre 2003, il s'était écoulé moins de trois ans depuis le 15 avril 2001, point de départ du délai de prescription) en sorte que le service de recouvrement de la Caisse Organic était fondé à notifier, à la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais, le 15 avril 2004, une mise en demeure ( reçue le 20 avril 2004) concernant les contributions exigibles au cours des trois années civiles précédentes
(2001, 2002, 2003), c'est-à-dire depuis le 1er janvier 2001, ce qui englobait la fraction exigible le 15 avril 2001 ; Qu'il convient en conséquence de débouter le Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais de ses prétentions à ce titre et de confirmer la décision déférée sur ce point ; Sur le fond : Attendu que l'article L. 651 -1 du Code de la Sécurité Sociale, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 1995, institue "au profit du régime d'assurance maladie maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles et des régimes d'assurance vieillesse des professions mentionnées aux 1o, 2o et 4o de l'article L.651-3, ainsi qu'au profit du Fonds de solidarité du régime d'assurance maladie maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles et des régimes d'assurance vieillesse des professions mentionnées aux 1o, 2o et 4o de l'article L.651-3, ainsi qu'au profit du Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L.135-1 et du Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L.135-6, une contribution sociale de solidarité à la charge : 1o des sociétés anonymes et des sociétés par actions simplifiées (...) 9o des organismes non visés aux 1o à 8o qui entrent dans le champ d'application de la contribution des institutions financières prévues à l'article 235 ter Y du Code général des impôts (...) ; Attendu que selon l'article L .651-3, alinéa 8, du même code, dans sa rédaction antérieure à la loi du 21 décembre 2004, "pour les redevables visés au 9o de l'article L.651-1 affiliés à l'un des organismes centraux mentionnés à l'article 20 de la loi du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, la part de chiffre d'affaires correspondant à des intérêts reçus à raison d'opérations de centralisation, à l'échelon national ou local, de leurs ressources financières n'est pas soumise à la contribution dans la limite du montant des intérêts servis en contrepartie de ces mêmes opérations" ; Attendu en l'espèce qu'il est
contant qu'à partir du 13 juillet 2000 la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais constituée sous forme d'une société civile, a été transformée en société anonyme à forme coopérative conformément aux dispositions de la loi du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financières ; Attendu que le critère d'assujettissement clairement posé par l'article L.651-1 du Code de la Sécurité sociale est celui de la forme juridique des personnes morales visées ; Qu'il s'ensuit que la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais, par suite de la modification de sa forme juridique à compter du 13 juillet 2000, relève en tant que société anonyme du 1o de l'article L 651-1 du Code de la Sécurité sociale et, cessant d'appartenir à la catégorie des redevables visées au 9o de ce même article, a perdu ipso facto le bénéfice de la réduction d'assiette prévue à l'article L 651-3 alinéa 8 du Code de la Sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la loi du 21 décembre 2004, sans pouvoir utilement opposer son statut coopératif; Attendu que l'article 8 de la loi no 2004-1370 du 20 décembre 2004, déclarée applicable à compter du 1er janvier 2005, a certes modifié la rédaction de l'alinéa 8 de l'article L.651-3 du Code de la sécurité sociale en supprimant la référence au 9o de l'article L.651-1, de sorte que bénéficient désormais de la réduction d'assiette tous les redevables qui, à l'instar des Caisses d'Epargne, sont affiliés à l'un des organes centraux mentionnés à l'article L.511-30 du Code monétaire et financier, quelle que soit leur forme juridique ; Que toutefois la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais ne peut se prévaloir de ces dispositions des lors d'une part que cette loi précise que les dispositions du présent article entrent en vigueur pour la contribution due à compter du 1er janvier 2005 et dans la mesure où, d'autre part, cette loi qui modifie l'état du droit pré-existant en consacrant pour l'avenir un droit nouveau à réduction d'assiette jusque là clairement exclu par les dispositions
légales en vigueur, ne peut être considérée comme interprétative et, en l'absence de disposition expresse conférant à l'article 8 un caractère interprétatif, se voir conférer un effet rétroactif (la volonté du législateur ne pouvant se déduire des seuls travaux parlementaires) ; Attendu en conséquence qu'il convient de dire la Caisse d'Epargne du Pas-de-Calais mal fondée en son recours, de la débouter de ses demandes, et de confirmer la décision déférée sur ce point ; Sur la demande des parties au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile : Attendu que la partie appelante succombe dans ses prétentions et est condamnée aux entiers frais et dépens ; Qu'il convient donc de rejeter sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; Attendu que la partie intimée demande la condamnation de la partie appelante à lui payer la somme de 2.500 euros au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens ; Qu'il convient de lui allouer en complément de celle allouée par les premiers juges une indemnité dont le montant sera précisé au dispositif de la présente décision sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS et ceux non contraires des premiers juges
Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions y compris l'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile allouée en première instance ;
Y ajoutant,
Condamne la partie appelante à payer à la partie intimée sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile la somme complémentaire de 1.500 euros (mille cinq cents euros) ;
Condamne la partie appelante au maximum du paiement du droit prévu à l'article R.144.6 du code de la sécurité sociale liquidé à la somme de 258,90 euros (deux cent cinquante huit euros et quatre vingt dix
centimes). LE GREFFIER, LE PRESIDENT, K. HACHID. N. OLIVIER.
K. HACHID N. OLIVIER