COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIEME CHAMBRE
ARRÊT DU 15 / 06 / 2006
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No R : 04 / 03838
Tribunal de Grande Instance de DUNKERQUE du 03 Mars 2004
REF : EM / MD
APPELANTE
Madame Marie-Thérèse X... épouse Y... née le 10 Septembre 1939 à HOYMILLE (59492) Demeurant... 59492 HOYMILLE
représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assistée de Me Jean-Claude CARLIER, avocat au barreau de DUNKERQUE
INTIMÉE
Madame Brigitte X... épouse DE A... née le 20 Mars 1949 à HOYMILLE (59492) Demeurant... 59492 HOYMILLE
représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour assistée de Me Vincent BUE, avocat au barreau de LILLE DÉBATS à l'audience publique du 12 Avril 2006, tenue par Madame MERFELD et Madame CONVAIN, magistrats chargés d'instruire l'affaire qui ont entendu seuls les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés y qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC) Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Melle HAINAUT
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ Madame MERFELD, Président de chambre Monsieur GAIDON, Conseiller Madame CONVAIN, Conseiller---------------------ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 15 Juin 2006 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame MERFELD, Président, et Madame AMBROZIEWICZ, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 16 Mars 2006
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Sur le rapport de Madame MERFELD, Président de Chambre.
Roger X... et son épouse Yvonne D... sont décédés respectivement les 4 juin 1969 et 16 octobre 1999 laissant pour leur succéder leurs deux filles : Thérèse X... épouse Y... et Brigitte X... épouse DE A....
Sur assignation de Thérèse X... le Tribunal de Grande Instance de DUNKERQUE, par jugement du 3 mars 2004 a :-ordonné l'ouverture des opérations de liquidation et le partage des successions de Roger X... et Yvonne D... ainsi que de la communauté ayant existé entre eux et commis pour y procéder le président de la Chambre Départementale des Notaires du Nord ou son délégué,-dit que l'action en nullité des baux ruraux conclus le 29 novembre 1989 et le 1er décembre 1992 portant sur les parcelles situées à HOYMILLE cadastrées section A no579,633,2201 et 2203 n'est pas prescrite, sur le fond annulé ces baux, ordonné la répétition des loyers réglés par Thérèse X... en exécution de ces conventions, fixé l'indemnité d'occupation due par Thérèse X... au montant des loyers stipulés, constaté en conséquence l'extinction réciproque des créances de restitution,-rejeté la demande d'attribution préférentielle présentée par Thérèse X...,-fixé la valeur des parcelles situées à HOYMILLE et cadastrées section A no 579,633,2201 et 2203,-dit n'y avoir lieu à licitation de la parcelle située à HOYMILLE, au lieudit " le Fort Suisse " cadastrée A no 2166, de la parcelle située à QUAEDYPRE cadastrée B 24 et de la parcelle située à HOYMILLE, cadastrée section A no 567 et no1002,-attribué à Thérèse X... l'appartement indivis situé résidence de la Plage à DUNKERQUE (Malo les Bains) pour une valeur de 98. 177,17 €,-rejeté la demande tendant à la fixation d'une indemnité en contre partie de la détérioration du bâtiment agricole de 224 m ² occupé par Brigitte X...,-fixé l'indemnité due par cette dernière en contrepartie de l'occupation de ce bâtiment à la somme de 640 €,-rejeté les demandes tendant à la fixation d'une indemnité en contrepartie de l'occupation et de la détérioration des bâtiments agricoles loués à Thérèse X....
Thérèse X... épouse Y... a relevé appel de ce jugement le 10 juin 2004.
Par conclusions du 8 décembre 2005 elle demande à la Cour de :-prononcer la nullité du jugement,-ordonner qu'il soit procédé aux opérations de compte liquidation partage des successions de Roger X... et d'Yvonne D..., son épouse, ainsi que de la communauté ayant existé entre eux, commettre un notaire pour y procéder,-prononcer à son profit l'attribution préférentielle de droit de l'article 832-1 du code civil ou à défaut l'attribution préférentielle de l'article 832, des parcelles cadastrées A no 579,633,2201 et 2203 sur la base de 4. 116,12 € l'hectare,-ordonner la licitation à la barre du tribunal des biens suivants : * parcelle en nature de près, sise à HOYMILLE, cadastrée A no2166 pour 91a 46ca, sur une prix de 3. 000 €, * parcelle en nature de labour, sise à QUAEDYPRE, cadastrées B no 24 pour 2ha 46a 47ca, sur une mise à prix de 9. 000 € * trois bâtiments comprenant hangar, dépendance, ancienne stabulation et bâtiment de stockage avec la parcelle 2202, pour 38a 88ca, sur une mise à prix de 10. 000 €,-ordonner la vente à la barre du tribunal des parcelles sise à HOYMILLE, cadastrées A no 567 et 1002, pour 2ha 00a 08ca, sur une mise à prix de 6. 000 €,-évaluer l'appartement sis à DUNKERQUE section de Malo les Bains à la somme de 98. 177 € et dire que ce bien sera mis en nature dans son lot, à défaut d'accord pour le partage en nature, en ordonner la licitation à la barre du tribunal sur la mise à prix de 80. 000 €,-ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de compte liquidation et partage sauf ceux faits pour parvenir à la vente des biens licités, cette part étant supportés par les acquéreurs, sans diminution de leur prix principal.
Par conclusions du 19 janvier 2006 Brigitte X... épouse DE A... s'en rapporte à l'appréciation de la Cour sur la demande de nullité du jugement et dans l'hypothèse où le jugement serait annulé demande à la Cour de :-ordonner qu'il soit procédé aux opérations de compte liquidation partage par tout notaire qu'il plaira au Président de la Chambre Départementale des Notaires du Nord de désigner à l'exception de Maîtres F... et G...,-prononcer l'annulation des baux portant sur les parcelles sises à HOYMILLE no A 579,633,2201 (ancien 566) et 2203 (ancien 2080) par application des articles 595,1325 du code civil et L 411-35, l 411-36 du code rural,-débouter, par application des articles 832,832-1 en sa rédaction antérieure à la Loi du 4 juillet 1980 et 827 du code civil, Thérèse X... de sa demande d'attribution préférentielle de droit et d'attribution préférentielle facultative des parcelles A no579,633,2201 et 2203,-dire n'y avoir lieu à licitation judiciaire desdits biens, s'agissant de biens partageables en nature,-à titre subsidiaire en cas d'attribution préférentielle accordée à Thérèse X... fixer la valeur des biens " libres " de toute occupation à 8. 100 € l'hectare et à titre infiniment subsidiaire en cas de fixation en valeur " occupés " retenir une somme de 5. 700 € l'hectare,-ordonner le partage en nature des immeubles,-attribuer à Thérèse X... l'appartement de DUNKERQUE Malo les Bains pour la valeur de 142. 000 €, à défaut ordonner une expertise pour en déterminer la valeur vénale, à titre subsidiaire ordonner la licitation de l'immeuble à la barre du tribunal sur la mise à prix de 142. 000 € avec interdiction aux héritiers de porter des enchères,-fixer l'indemnité que Thérèse X... devra rapporter à la succession pour l'avantage dont elle a bénéficié par son occupation des bâtiments agricoles se trouvant sur la parcelle A 2202,-condamner Thérèse X... à payer la somme de 20. 728 € pour le dépérissement des immeubles occupés par elle,-fixer l'indemnité d'occupation dont elle même est redevable depuis le 31 octobre 1998 à la somme de 10 € par mois,-condamner Thérèse X... aux dépens et au paiement d'une somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
SUR CE
1o) Sur la demande d'annulation du jugement
Attendu que Thérèse X... prétend qu'en première instance son conseil a plaidé le 18 décembre 2003 devant Madame JANVIER, vice président, juge rapporteur, alors que le jugement qui a été rendu le 3 mars 2004 mentionne en première page que les débats se sont tenus le 7 janvier 2004 devant Monsieur BIELITZKI, juge qui en a délibéré avec deux autres magistrats, Madame ROBERT, président et Mademoiselle AZRIA, juge ;
Qu'elle invoque une violation de l'article 447 du nouveau code de procédure civile au terme duquel il appartient aux juges devant lesquels l'affaire a été débattue d'en délibérer ;
Attendu que par arrêt avant dire droit du 10 novembre 2005 la Cour a invité le greffier en chef du Tribunal de Grande Instance de DUNKERQUE à produire aux débats une copie certifiée conforme du registre de l'audience civile au cours de laquelle l'affaire X...épouse Y... contre X...épouse DE A... a été plaidée ;
Que cette pièce a été versée au dossier de la Cour le 17 novembre 2005 ; qu'il en résulte que l'affaire a été plaidée, ainsi que l'appelante le soutient, le 17 décembre 2003 et non le 7 janvier 2004 ; qu'il est indiqué en première page de la feuille d'audience que le tribunal était composé comme suit : Président : Madame JANVIER, Assesseurs : Monsieur BIELITZKI, Monsieur SEITE ; qu'il n'est pas précisé que l'audience s'est tenue devant un juge rapporteur alors que cette mention résulte du jugement ;
Qu'en toute hypothèse dès lors qu'il a été signé par Madame ROBERT, vice-président, qui n'a ni assisté aux débats, ni participé au délibéré, le jugement doit être annulé pour violation des articles 447 et 456 du nouveau code de procédure civile ;
2o) Sur le fond
Attendu que la Cour qui a annulé le jugement doit statuer sur le fond du litige par application de l'article 562 du nouveau code de procédure civile, les parties s'étant d'ores et déjà mises en état ;
Attendu que les parties s'accordent sur l'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession de leurs parents, Roger X... et Yvonne D... ainsi que de la communauté ayant existé entre eux ;
Qu'il convient de commettre pour y procéder le Président de la Chambre des Notaires du Département du Nord ou son délégataire qui pourra être tout autre notaire à l'exception de Maître F..., Maître G... et Maître I... qui ont déjà connu de l'affaire pour le compte de l'une ou l'autre des parties ;
a) Sur la demande d'annulation des baux ruraux
Attendu que par acte sous seing privé du 29 novembre 1989 Yvonne D... veuve X...copropriétaire et usufruitière et Thérèse X... épouse Y..., nu propriétaire ont donné à bail à ferme, pour une durée de neuf années à Jean Y... et à son épouse Thérèse X... deux parcelles situées à HOYMILLE cadastrées A no 579 et 633 ;
Attendu que par acte sous seing privé du 1er décembre 1992 Yvonne D... veuve X...a donné à bail à ferme à Monsieur et Madame Jean Y...-X..., pour une durée de neuf années deux parcelles sises à HOYMILLE cadastrées A no 566 (devenue 2201) et A no 2080 (devenue 2203) ;
Attendu que Brigitte DE A... nue propriétaire de ces parcelles, en indivision avec sa soeur Thérèse depuis le décès le 4 juin 1969 de leur père, demande à la Cour d'annuler ces deux conventions par application du dernier alinéa de l'article 595 du code civil qui dispose que l'usufruitier ne peut, sans le concours du nu-propriétaire, donner à bail un fonds rural ;
Attendu qu'à titre liminaire il convient d'observer que Jean Y..., co-titulaire du bail n'est pas partie à l'instance et que quelle que soit la décision rendue, elle le lui sera pas opposable ;
Attendu que Thérèse X... soutient que la demande est prescrite par application de l'article 1304 du code civil qui soumet les actions en nullité à une prescription quinquennale ;
Que le délai de prescription de l'action en nullité pour non respect de l'article 595 alinéa 4 ne court qu'à compter de la connaissance par le nu-propriétaire de l'existence de l'acte incriminé ; qu'il appartient au preneur qui invoque la prescription d'établir la date à laquelle le nu-propriétaire a eu connaissance de l'acte ;
Que la circonstance que Brigitte X... soit domiciliée à proximité des terres louées ne suffit pas à démontrer qu'elle avait connaissance de la passation des baux des 29 novembre 1989 et 1er décembre 1992 ; que la fin de non recevoir fondée sur la prescription quinquennale doit être rejetée ;
-sur le bail portant sur les parcelles A no579 et 633
Attendu que les pièces versées aux débats par l'appelante montrent que l'acte du 29 novembre 1989 constitue le renouvellement d'un bail antérieur du 5 août 1978 qui a lui même été conclu en renouvellement d'un bail initial du 10 mars 1966 ;
Qu'en effet par acte du 10 mars 1966 Roger X... et son épouse Yvonne D..., propriétaires, ont donné à bail à ferme à Jean Y... et à son épouse Thérèse X... les parcelles A no579 et 633 pour une durée de neuf années à compter du 11 novembre 1965 ;
Qu'à défaut de congé ce bail s'est poursuivi par tacite reconduction ;
Que le 5 août 1978 Yvonne D..., Thérèse X... et Brigitte X... ont donné à bail à ferme aux époux Y... et Thérèse X... les parcelles A no 579 et 633 que les preneurs ont déclaré bien connaître " les occupant déjà ", pour une durée de neuf années à compter du 11 novembre 1977 ; que Brigitte X..., nu-propriétaire est signataire de cet acte ;
Qu'à défaut de congé le bail s'est poursuivi par tacite reconduction ;
Attendu qu'il est vrai que Brigitte X... n'a pas été partie à l'acte du 29 novembre 1989 ; que cependant en matière de bail rural le concours du nu-propriétaire à l'acte de renouvellement n'est pas requis puisque le bail se renouvelle automatiquement par le seul effet de la loi et notamment de l'article L 411-46 du code rural qui dispose que le preneur a droit au renouvellement du bail nonobstant toutes clauses, stipulations et arrangements contraires ;
Que Brigitte X... doit être déboutée de sa demande de nullité du bail du 29 novembre 1989 ;
-sur le bail portant sur les parcelles A no 2201 et 2203
Attendu que les pièces versées aux débats par l'appelante montrent que l'acte du 1er décembre 1992 constitue le renouvellement d'un bail antérieur du 20 mai 1983 qui a lui-même été conclu en renouvellement d'un bail du 23 décembre 1973 ;
Qu'en effet par acte du 23 décembre 1973 Yvonne D... veuve X..., usufruitière, Thérèse X..., nu-propriétaire et Brigitte X..., nu-propriétaire ont donné à bail ferme à Jean Y... et à son épouse Thérèse X... les parcelles A 566 (devenue 2201) et A 798 (devenue 2080 puis 2203) pour une durée de neuf années et deux mois à compter du 11 septembre 1973, se terminant le 11 novembre 1982 ;
Que le 20 mai 1983 Yvonne D..., Thérèse X... et Brigitte X... ont donné à bail aux époux Jean Y... et Thérèse X... les parcelles A 566 et 798 que les preneurs ont déclaré bien connaître " les occupant déjà " pour une durée de neuf années du 11 novembre 1982 au 11 novembre 1991 ;
Que Brigitte X... est signataire de ces deux contrats ; qu'il importe peu qu'elle n'en ait pas personnellement reçu un exemplaire puisque l'article 1325 du code civil n'impose l'établissement d'un original que pour chaque partie ou groupe de partie ayant un intérêt distinct ; que bailleresse à l'acte du 23 décembre 1973 et à celui du 20 mai 1983 Brigitte X... avait le même intérêt que sa mère usufruitière et sa soeur nu-propriétaire ;
Attendu qu'il est vrai que Brigitte X... n'a pas été partie à l'acte du 1er décembre 1992 qui a été signé pour le bailleur par Yvonne D... seule ; Que cependant à défaut de congé pour le 11 novembre 1991 le bail précédent s'est renouvelé par tacite reconduction ;
Qu'ainsi qu'il l'a été précédemment indiqué en matière de bail rural le concours du nu-propriétaire à l'acte de renouvellement n'est pas requis puisque le bail se renouvelle automatiquement par le seul effet de la loi ;
Que Brigitte X... doit être déboutée de sa demande de nullité du bail du 1er décembre 1992 ;
b) Sur la demande d'attribution préférentielle
Attendu que Thérèse X... demande l'attribution préférentielle des parcelles A 579 pour 5ha 79a 4ca, A 633 pour 3ha 10a 70ca, A 2201 pour 6ha 5a 82ca et A 2203 pour 20a 17ca qui lui ont été données à bail ainsi qu'à son époux ;
Attendu que Brigitte X... s'y oppose au motif que les immeubles en cause ne constituent pas une unité économique telle qu'exigée par les article 832 et 832-1 du code civil ;
Que cependant il résulte du rapport d'expertise de Monsieur K... commis par ordonnance du juge de mise en état du 23 mars 2002 et des plans versés aux débats que ces quatre parcelles sont contiguës, la parcelle A 579 étant seulement séparées des trois autres par la rue du Pont à Poissons ; que la condition relative à l'unité économique ou quote-part indivise d'exploitation agricole est remplie ;
-sur l'attribution préférentielle de droit (article 832-1 du code civil)
Attendu que Roger X... étant décédé le 4 juin 1969 les terres litigieuses sont en indivision depuis cette date ; que les dispositions de la loi du 4 juillet 1980 sur l'attribution préférentielle ne sont pas applicables aux successions ouvertes et non liquidées avant son entrée en vigueur ;
Qu'il convient donc de se référer aux disposition issues de la loi no 61-1378 du 19 décembre 1961 selon lesquelles l'attribution préférentielle de droit n'est possible que si l'exploitation réunit cumulativement des conditions de limite de superficie et de valeur vénale fixées par arrêté ; que Thérèse X... ne démontre, ni même ne prétend que la condition relative à la valeur vénale est remplie ; que sa demande au titre de l'attribution préférentielle de droit doit être rejetée ;
-sur l'attribution préférentielle facultative (article 832 du code civil)
Attendu que Brigitte X... s'oppose à l'attribution préférentielle facultative au motif que les parcelles ont une situation privilégiée avec une forte pression foncière, que Thérèse X... née en 1939 et son époux né en 1935 sont en âge de bénéficier d'un avantage vieillesse et ont cessé de cultiver, que leur fils qui a repris l'exploitation est décédé accidentellement en janvier 2005 et qu'accorder à l'un des héritiers la plus grande partie des terres serait de nature à perturber l'économie globale du partage ;
Attendu qu'il est indéniable que Thérèse X... remplit les conditions pour bénéficier de l'attribution préférentielle facultative qui peut être demandée par tout héritier copropriétaire qui participe ou a participé effectivement à la mise en valeur de l'exploitation agricole, cette participation pouvant se situer à un moment quelconque, antérieur ou postérieur à l'indivision et qu'il est donc indifférent que Thérèse X... ait à présent atteint l'âge de la retraite dès lors qu'il ne peut être contesté qu'elle a travaillé sur l'exploitation agricole avec son mari depuis 1965 et pendant près de trente ans ;
Qu'il convient en outre de noter que Brigitte X... ne sollicite pas l'attribution préférentielle à son profit, se contentant de demander le partage en nature alors que le voeu du législateur tel qu'il apparaît à la lecture de l'article 832 du code civil est " d'éviter de morceler les héritages et de diviser les exploitations " ;
Attendu que les époux Y... avaient cédé leur exploitation en 1995 à leur fils Philippe Y... qui y avait réunit la ferme de la famille de son épouse ; que Philippe Y... est décédé en janvier 2005 dans un accident survenu dans la chambre froide de son exploitation ; qu'il est légitime pour Thérèse X... de soutenir qu'il lui appartient de veiller à l'avenir des enfants de son fils aujourd'hui disparu et de ne pas porter atteinte à la pérennité de l'exploitation ;
Qu'il y a lieu de faire droit à sa demande d'attribution préférentielle ;
-sur la valeur des terres objet de l'attribution préférentielle
Attendu que les terres étant données à bail elles doivent être estimées en valeur " occupés ; qu'en effet :-en sa qualité d'usufruitière Yvonne D... avait qualité pour consentir seule à la cession des baux au profit de Philippe Y... ; que selon l'article L 411-34 du code rural en cas de décès du preneur le bail à ferme se poursuit normalement au profit de la succession dès lors qu'aucun congé n'a été donné ;
-en toute hypothèse même si l'on considère que la cession de bail n'est pas régulière il faudrait alors admettre que les terres sont toujours louées aux époux Y...-X...; que l'attribution préférentielle à Thérèse X... n'entraîne, par l'effet de la réunion sur sa tête des qualités de propriétaire et de locataire, que la disparition du bail qui lui a été consenti ; que son époux demeurant titulaire du bail, le bien ne peut être évalué comme s'il était libre de toute occupation ;
Attendu que par ordonnance du 23 avril 2002 le juge de la mise en état du Tribunal de Grande Instance de DUNKERQUE a commis Monsieur K... en qualité d'expert pour donner son avis sur la valeur des biens ruraux composant les successions ;
Que selon l'expert qui s'est référé au barème indicatif des valeurs vénales des terres agricoles en 2001 la valeur occupée des parcelles A 579 et A 2201 s'établit à 4. 500 € l'hectare, celle de la parcelle A 633 à 5. 200 € l'hectare et celle de la parcelle A 2203 à 4. 000 € l'hectare ; qu'il n'y a pas lieu de pratiquer une moins value en raison de la texture " assez fortement argileuse des terres et la nécessité d'un drainage " puisque l'expert a déjà tenu compte de ces caractères dans son évaluation ;
Attendu que l'évaluation devant se faire à la date la plus proche du partage il convient, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une nouvelle expertise, de réévaluer les estimations de l'expert en fonction du barème indicatif des valeurs vénales des terres agricoles de 2004 ; que les valeurs des biens objet de l'attribution préférentielle seront fixées comme suit :-parcelle A 579 : 5ha 79a 04ca : 5. 300 € l'hectare,-parcelle A 633 : 3ha 10a 70ca : 5. 700 € l'hectare,-parcelle A 2201 : 5ha 96a 82ca de terre et 9a de sol : 5. 300 € l'hectare,-parcelle A 2203 : 20a 17ca : 4. 700 € l'hectare ;
c) Sur la demande de licitation des autres parcelles (A 567, A 1002, A 2166, A 2202) sises à HOYMILLE et B 24 sise à QUAEDYPRE
Attendu qu'aux termes des articles 826 et 827 du code civil la licitation à la barre du tribunal ne peut être ordonnée que si toutes les parties y consentent ou si les immeubles ne peuvent être commodément partagés en nature ;
Que Brigitte X... s'oppose à la licitation ; que les terres peuvent être commodément partagées en nature ; qu'il convient de débouter Thérèse X... de sa demande ; qu'à défaut d'accord des parties pour un partage amiable des terres, le notaire procédera à la composition de deux lots qui seront ensuite tirés au sort ;
d) Sur l'appartement de la résidence de la Plage à DUNKERQUE Malo Les Bains
Attendu que Thérèse X... demande que cet appartement lui soit attribué pour une valeur de 98. 177 € ; que Brigitte X... ne s'oppose pas à l'attribution de l'appartement à sa soeur mais demande que la valeur en soit fixée à 142. 000 € ;
Qu'à défaut d'accord des parties sur la valeur du bien et devant l'impossibilité de procéder à un partage de ce bien en nature il y a lieu, conformément à l'article 827 du code civil, d'ordonner la licitation aux enchères publiques à la barre du Tribunal de Grande Instance de DUNKERQUE sur une mise à prix de 98. 177 €, somme offerte par Thérèse X... ;
Qu'aucune disposition légale n'autorise le juge à interdire aux héritiers de se porter enchérisseurs ;
e) Sur les demandes au titre des bâtiments agricoles
-sur les bâtiments occupés par Brigitte X...
Attendu que Brigitte X... occupe depuis de nombreuses années un bâtiment agricole de 224 m ² situé sur la parcelle A 2202 ; qu'elle propose de verser, à compter du 31 octobre 1998, cinq ans avant la demande présentée par Thérèse X... par conclusions du 31 octobre 2003, une indemnité d'occupation de 10 € par mois ; que Thérèse X... demande que cette indemnité soit fixée à 45,73 € par mois et que sa soeur soit également condamnée à verser une indemnité en réparation de l'état désastreux dans lequel elle a mis l'immeuble ;
Attendu que le bâtiment dont s'agit a vocation d'écurie, étable, porcherie et de grenier ; que les photographies versées aux débats montrent qu'il s'agit d'un ancien édifice en ruine ; que l'expert a omis de le décrire et qu'aucune partie n'a attiré son attention sur ce point, ni demandé d'investigations complémentaires ; que le bâtiment est décrit par Thérèse X... elle-même comme étant en état désastreux ; qu'il n'est nul besoin de recourir à une nouvelle expertise eu égard au faible intérêt du litige ; qu'au vu des pièces versées aux débats il y a lieu de déclarer satisfactoire l'offre de Brigitte X... de verser une indemnité d'occupation de 10 e par mois ;
Attendu que Brigitte X... n'est pas titulaire d'un bail sur ce bâtiment ; que dès lors elle n'est pas tenue à une obligation d'entretien envers l'indivision et ne doit répondre que des seules dégradations dues à sa faute ; qu'aucune faute n'étant démontrée, Thérèse X... doit être déboutée de sa demande pour la dépréciation de l'immeuble ;
-sur les bâtiments occupés par Thérèse X...
Attendu que l'expert a constaté que sur la parcelle A 2202 se trouvait un hangar dont il a estimé la valeur à 3. 315 € ; que ce hangar est occupé par Thérèse X... alors que la parcelle A 2202 ne lui a pas été donnée à bail ; qu'il s'en suit qu'elle est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation à compter du 3 juillet 1996, cinq ans avant les conclusions du 3 juillet 2001 par lesquelles Brigitte X... a présenté cette demande pour la première fois ;
Qu'au vu des photographies versées aux débats et de l'état du hangar décrit par l'expert (bâtiment de 330 m ² de plus de 50 ans, avec couverture en fibrociment en mauvais état) il y a lieu de fixer l'indemnité d'occupation à 5 € par mois ;
Attendu que Brigitte X... demande également que sa soeur soit condamnée à verser à l'indivision successorale une indemnité de 2. 268 € pour dépérissement du hangar et de 18. 360 € pour dépérissement des bâtiments d'élevage se trouvant sur la parcelle A 2201 ;
Que Thérèse X... n'étant pas titulaire d'un bail sur la parcelle A 2202 où se trouve le hangar elle n'est pas tenue d'une obligation d'entretien envers l'indivision et ne doit répondre que des seules dégradations dues à sa faute ; qu'aucune faute n'étant démontrée Brigitte X... doit être déboutée de sa demande pour la dépréciation du hangar ;
Attendu que l'expert décrit le bâtiment d'élevage situé sur la parcelle A no 2201 donnée en location aux époux Y... comme un " bâtiment de 800 m ² d'environ 35 ans avec couverture et charpente en très mauvais état ainsi que la dalle de béton, bâtiment totalement obsolète par sa conception et présentant une vétusté extrême " ;
Que le locataire n'est pas tenu des dégradations dues à la vétusté ni aux grosses réparations affectant le clos et le couvert ; qu'aucune responsabilité ne peut donc être imputée à Thérèse X... dans l'état du bâtiment d'élevage ; que Brigitte X... sera déboutée de sa demande à ce titre ;
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Attendu que les dépens de première instance y compris les frais d'expertise et les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de compte liquidation partage sans qu'il y ait lieu de prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant en audience publique et contradictoirement,
Annule le jugement du 3 mars 2004,
Statuant au fond en application de l'article 562 du nouveau code de procédure civil,
Ordonne l'ouverture des opérations de compte liquidation partage des successions de Roger X... et d'Yvonne D... ainsi que de la communauté ayant existé entre eux et commet pour y procéder le Président de la Chambre des Notaires du Département du Nord ou tout notaire par lui délégué à l'exception de Maître F..., Maître G... et Maître I...,
Débout Brigitte X... épouse DE A... de sa demande de nullité du bail du 29 novembre 1989 portant sur les parcelles cadastrées A 579 et 633 sises à HOYMILLE et de sa demande de nullité du bail du 1er décembre 1992 portant sur les parcelles cadastrées A no 2201 et 2203 sises à HOYMILLE ;
Ordonne l'attribution préférentielle desdites parcelles au profit de Thérèse X... épouse Y... pour les sommes estimées en valeur " terres occupées " comme suit :-parcelle A 579 : 5ha 79a 04ca : 5. 300 euros l'hectare,-parcelle A 633 : 3ha 10a 70ca : 5. 700 euros l'hectare,-parcelle A 2201 5ha 96a 82ca de terre et 9a de sol : 5. 300 euros l'hectare,-parcelle A 2203 : 20a 17ca : 4. 700 euros l'hectare,
Déboute Thérèse X... de sa demande de licitation à la barre du tribunal des parcelles sises à HOYMILLE cadastrées A no 2166, A 2202, A no567, et A no 1002 et de la parcelle sise à QUAEDYPRE cadastrée B 24 et ordonne le partage desdites parcelles en nature,
Ordonne la vente aux enchères publiques à la barre du Tribunal de Grande Instance de DUNKERQUE de l'appartement situé résidence de la Plage à DUNKERQUE Malo les Bains sur la mise à prix de 98. 177 euros,
Dit que Brigitte X... est redevable envers l'indivision successorale d'une indemnité de 10 € par mois à compter du 31 octobre 1998 pour l'occupation du bâtiment agricole situé sur la parcelle A no 2202 sise à HOYMILLE, Dit que Thérèse X... est redevable envers l'indivision successorale d'une indemnité de 5 euros par mois à compter du 3 juillet 1996 pour l'occupation du hangar situé sur la parcelle A no 2202 sise à HOYMILLE,
Déboute Thérèse X... de sa demande pour dépréciation du bâtiment agricole occupé par Brigitte X...,
Déboute Brigitte X... de sa demande pour dépréciation du hangar et du bâtiment d'élevage occupés par Thérèse X...,
Dit que les dépens de première instance y compris les frais d'expertise et les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de compte liquidation partage et que les dépens d'appel pourront être recouvrés directement par les avoués conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile,
Déboute Brigitte X... de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.