COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 01 / 06 / 2006
* * * BAUX RURAUX
No RG : 05 / 07487
Tribunal paritaire des baux ruraux de MONTREUIL SUR MER du 24 Novembre 2005
REF : EM / VD
APPELANTE S. C. I. DE FRANCE Ayant son siège social Château de Maintenay 62870 MAINTENAY
représentée par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour assistée de la SCP JP STERLIN-C STERLIN, avocats au barreau d'AMIENS
INTIMÉ Monsieur René X... né le 02 Août 1946 à MAINTENAY (62870) Demeurant... 62870 MAINTENAY
représenté par Me MEILLIER de la SCP LEFRANC BAVENCOFFE MEILLIER, avocats au barreau d'ARRAS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ Madame MERFELD, Président de chambre Madame CONVAIN, Conseiller Madame BERTHIER, Conseiller---------------------GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame AMBROZIEWICZ
DÉBATS à l'audience publique du 30 Mars 2006, Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 01 Juin 2006 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame MERFELD, Président, et Madame AMBROZIEWICZ, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par acte authentique du 5 février 1974 la SCI de France a donné à bail à ferme à Monsieur René X... diverses parcelles situées à MAINTENAY cadastrées B 433, B 52 et B 53.
Par acte authentique du 27 septembre 1974 elle a donné à bail à ferme à Monsieur X... deux autres parcelles situées à MAINTENAY cadastrées D 128 et D 131 puis par un troisième acte authentique du 4 mars 1980 elle lui a donné à bail à ferme les parcelles B 135 et B 550p sises à MAINTENAY.
Par suite d'opérations de remembrement la SCI de France s'est vue attribuer en contrepartie des parcelles B 52, B 53, B 135 et B 433, une parcelle ZB 35 située sur la commune de SAULCHOY et une parcelle ZI 29 située sur la commune de MAINTENAY. Les droits de Monsieur X... ont en conséquence été reportés sur lesdites parcelles tandis que les baux se sont poursuivis sur les parcelles exclues du remembrement D 128 et D 131, ainsi que sur la parcelle B 550, nouvellement numérotée C 136.
Par requête du 14 mars 2005, Monsieur X... a saisi le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de MONTREUIL-SUR-MER afin d'obtenir l'autorisation de céder son bail à sa fille, Madame Cathy X....
Par acte d'huissier du 23 mars 2005 la SCI de France a fait délivrer à Monsieur X... un congé pour le 30 septembre 2006 sur le fondement de l'article L 411-64 du code rural qui dispose que le bailleur peut refuser le renouvellement du bail au preneur ayant atteint l'âge de la retraite retenu en matière d'assurance vieillesse des exploitants agricoles.
Monsieur X... a contesté ce congé devant le Tribunal Paritaire de MONTREUIL-SUR-MER qu'il a saisi par requête du 5 avril 2005 en renouvelant sa demande d'autorisation de cession du bail à sa fille.
Les deux procédures ont été jointes.
Par jugement du 24 novembre 2005 le Tribunal a :-autorisé Monsieur X... à céder à sa fille Madame Cathy X... les droits qu'il détient, par suite d'opérations de remembrement, sur les parcelles C 136, D 128, D 131, ZI 29 situées sur la commune de MAINTENAY ainsi que sur la parcelle ZB 55 commune de SAULCHOY, aux termes des baux à ferme conclus par actes authentiques des 5 février 1974,27 septembre 1974 et 4 mars 1980,-annulé en conséquence le congé délivré le 23 mars 2005,-rejeté les demandes de la SCI de France,-condamné la SCI de France aux dépens et à verser à Monsieur X... une somme de 800 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Ce jugement a été notifié le 29 novembre 2005 à la SCI de France qui en a relevé appel le 26 décembre 2005.
Par conclusions déposées le 2 févier 2006 et soutenues oralement à l'audience la SCI de France a demandé à la Cour d'infirmer le jugement, de valider le congé, en conséquence d'ordonner l'expulsion de Monsieur X... sous astreinte et de le condamner au paiement d'une somme de 1. 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle soutient :-que la cession de bail est une faveur exceptionnelle, réservée au preneur de bonne foi, qui a totalement et constamment respecté ses obligations, ce qui n'est pas le cas de Monsieur X...,-que Madame Cathy X..., candidate à la reprise, ne remplit pas les conditions pour bénéficier de la cession, qu'elle a travaillé dans le domaine de la coiffure, qui n'a rien à voir avec l'activité agricole, qu'elle ne justifie pas posséder le matériel et le cheptel nécessaires, ni les moyens pour les acquérir, qu'elle n'est pas domiciliée à proximité des parcelles litigieuses et n'est pas en règle avec le contrôle des structures, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal,-qu'en réalité Monsieur X... souhaite faire exploiter les terres par une tierce personne, par le biais d'un GAEC dit GAEC de Libessart sur le compte duquel il n'a pas fourni la moindre information,-qu'elle-même a un intérêt légitime à faire exploiter les terres par Monsieur François Guislain de Y... dont l'exploitation est de taille moyenne et qui tente d'en augmenter la superficie.
Monsieur X... a conclu le 27 mars 2006 à la confirmation du jugement par adoption des motifs des premiers juges. Il se porte demandeur d'une somme de 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
SUR CE :
Attendu que l'article L 411-64 du code rural permet au preneur évincé en raison de son âge de céder son bail à l'un de ses descendants ayant atteint l'âge de la majorité, dans les conditions prévue à l'article L 411-35 ;
Attendu que la SCI de France qui conteste la bonne foi de Monsieur X... au motif qu'il n'aurait pas rempli ses obligations contractuelles n'apporte aucun justificatif, ni même aucune explication à ce titre ;
Attendu que Madame Cathy X..., née le 26 novembre 1976, a obtenu le 22 juillet 1997 le brevet professionnel agricole option " responsable d'exploitation agricole ", diplôme attestant de sa capacité professionnelle en vertu de l'article R 331-1 du code rural ;
Attendu qu'elle justifie d'une promesse de cession du matériel et du cheptel rachetés à son père et d'une demande d'attribution d'aide à l'installation des jeunes agriculteurs déposée à la CNASEA le 14 juin 2005 dans laquelle elle s'engage à exercer la profession d'agriculteur à titre principal pendant une durée minimale de dix ans ; qu'elle a fait réaliser une étude prévisionnelle d'installation pour la reprise de l'exploitation familiale ; que son père s'est engagé à lui consentir un bail à ferme sur les bâtiments d'exploitation ;
Attendu que le fait que Madame Cathy X... dispose d'un diplôme lui permettant d'exercer le métier de coiffeuse ne met pas en doute le sérieux et la crédibilité de son projet d'installation agricole qui sont justifiés par les pièces produites ;
Attendu qu'elle verse aux débats un courrier du Préfet du Pas-de-Calais en date du 1er février 2005 duquel il résulte qu'elle dispose de l'autorisation d'exploiter les terres constituant l'exploitation de son père et qu'elle est en règle au regard du contrôle des structures ;
Qu'il est mentionné sur la lettre au Préfet qu'elle est domiciliée ... à MAINTENAY, donc à proximité immédiate des biens litigieux ;
Attendu qu'ainsi que les premiers juges l'ont relevé la circonstance qu'elle souhaite s'associer au sein d'un GAEC à disposition duquel elle mettra ces parcelles n'est pas un motif de refus de cession du bail puisqu'une telle mise à disposition est permise par l'article L 411-37 du code rural ;
Attendu que Madame Cathy X... réunit les conditions lui permettant de reprendre le bail ;
Que l'intérêt légitime du bailleur qui s'apprécie uniquement au regard de la bonne foi du cédant et des conditions de mise en valeur de l'exploitation par le cessionnaire est sauvegardé ;
Qu'il convient de confirmer le jugement ;
Attendu que la SCI de France qui succombe sera condamnée à verser à Monsieur X... une somme de 900 € pour ses frais irrépétibles d'appel qui s'ajoutera à celle accordée par les premiers juges ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant en audience publique et contradictoirement,
Confirme le jugement,
Condamne la SCI de France aux dépens d'appel et à verser à Monsieur X... une somme de 900 Euros par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile en cause d'appel.