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17/11/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006945767

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre civile 2, 17 novembre 2005, JURITEXT000006945767


COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 2 ARRÊT DU 17/11/2005 * * * No RG : 05/02690 Tribunal de Grande Instance d'AVESNES SUR HELPE statuant commercialement le 08 Avril 2004 REF : TF/CP APPELANTE S.A. CEREC prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 2 rue René Fourchet 59245 RECQUIGNIES Représentée par Me QUIGNON, avoué à la Cour Assistée de Maître MEUNIER François, Avocat au Barreau de PARIS INTIMÉE S.A.R.L. UNIFONDS prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 30 rue Josquin Deprez 59300 VALENCIENNES Représentée par l

a SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Assistée de Maître D'HA...

COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 2 ARRÊT DU 17/11/2005 * * * No RG : 05/02690 Tribunal de Grande Instance d'AVESNES SUR HELPE statuant commercialement le 08 Avril 2004 REF : TF/CP APPELANTE S.A. CEREC prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 2 rue René Fourchet 59245 RECQUIGNIES Représentée par Me QUIGNON, avoué à la Cour Assistée de Maître MEUNIER François, Avocat au Barreau de PARIS INTIMÉE S.A.R.L. UNIFONDS prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 30 rue Josquin Deprez 59300 VALENCIENNES Représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Assistée de Maître D'HAUTUILLE, Avocat au Barreau de PARIS DÉBATS à l'audience publique du 04 Octobre 2005, tenue par Monsieur FOSSIER magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe. GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme NOLIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ Monsieur FOSSIER, Président de chambre M. ZANATTA, Conseiller M. REBOUL, Conseiller ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2005 (date indiquée à l'issue des débats) par Monsieur FOSSIER, Président, et Mme NOLIN, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire. **** Par ordonnance contradictoire en date du 8 avril 2005, le juge des référés du Tribunal de grande instance d'Avesnes-sur-Helpe ayant compétence commerciale a débouté la S.A. CEREC de la demande qu'elle dirigeait contre la SARL UNIFONDS aux fins de voir cesser tous actes de débauchage de salariés, de faire interdiction à la même SARL d'embaucher lesdits salariés, de démarcher les clients de CEREC dénommés sur une liste jointe à la demande et enfin d'autoriser la SA

CEREC à aviser sa clientèle des prohibitions sus-énoncées et à faire constater par huissier les infractions éventuelles.

Le juge des référés a également débouté CEREC de la demande d'expertise qu'elle formulait pour chiffrer son préjudice.

La même ordonnance a aussi débouté la SARL UNIFONDS de la demande d'amende civile et de répétition de frais de procédure que celle-ci dirigeait reconventionnellement contre la demanderesse.

Pour se déterminer comme il l'a fait, le premier juge a notamment relevé que CEREC n'établit pas la désorganisation de son activité commerciale à la suite des débauchages qu'elle impute à son adversaire.

Par acte de son avoué en date du 28.4.2005, la société anonyme CEREC a interjeté appel principal et général de la décision intervenue. A l'attention du second degré de juridiction, la partie appelante a déposé des conclusions conformes aux articles 915 et 954 du nouveau code de procédure civile dont les dernières en date sont du 23.9.2005 et dans lesquelles il est demandé à la Cour, dans les mêmes termes et pour les mêmes motifs qu'en première instance, d'ordonner à UNIFONDS que cessent tous actes de débauchage de salariés, de faire interdiction à la même SARL d'embaucher lesdits salariés ou de démarcher les clients de CEREC dénommés sur une liste jointe à la demande et enfin d'autoriser la SA CEREC à aviser sa clientèle des prohibitions sus-énoncées et à faire constater par huissier les infractions éventuelles. L'appelante a réitéré en outre la demande d'expertise pour chiffrer son préjudice. Enfin, CEREC a demandé la répétition de ses frais de procédure

La partie intimée, la S.A.R.L. UNIFONDS, a conclu le 9.9.2005 à la confirmation pure et simple de l'ordonnance critiquée, renonçant ainsi à ses propres prétentions de première instance.

Selon ce qu'autorise l'article 455 du nouveau code de procédure

civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens. SUR QUOI LA COUR, - Au principal

Attendu qu'aux termes de l'article 873 NCPC, expressément visé par la SA CEREC dans ses conclusions tant de première instance que d'appel, le président peut, dans les limites de la compétence du tribunal, mais même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;

Qu'il appartient au juge, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, de relever d'office le défaut d'une des conditions auxquelles sont soumises les mesures accessibles en référé ;

Attendu que la mesure conservatoire s'entend de la disposition urgente, indispensable et réversible ;

Qu'en demandant au premier juge et à la Cour de l'autoriser à aviser la clientèle des prohibitions que les juges auraient fulminées contre la S.A.R.L. UNIFONDS, la S.A. CEREC cherche à créer une situation définitivement défavorable à sa concurrente, excède ainsi la notion de mesure conservatoire, donc le pouvoir du juge des référés ;

Attendu que pour le surplus, la SA CEREC demande que cessent tous actes de débauchage de salariés, que soit fait interdiction à la même SARL d'embaucher lesdits salariés ou de démarcher les clients de CEREC dénommés sur une liste jointe à la demande et que soit constatées par huissier les infractions éventuelles ;

Que si ces prétentions relèvent incontestablement de la mesure conservatoire ou de remise en état, elles ne peuvent être accueillies que sur la preuve d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite ;

Que ces notions s'interprètent restrictivement dès lors que, comme il est avéré en la circonstance, les parties peuvent disposer à bref délai d'une juridiction collégiale rendant des décisions dotées de l'autorité de chose définitivement jugée ;

Que notamment, ne constituerait pas un trouble suffisamment manifeste, ni un dommage réellement imminent ou acquis : - le simple risque, a fortiori la tentative de débauchage d'un salarié ; - l'embauche de salariés déjà détachés de l'entreprise concurrente ; - un débauchage unique d'un des très nombreux salariés du concurrent ; - les simples rumeurs de dénigrement d'une entreprise par sa concurrente ;

Attendu que les circonstances de la cause ont été parfaitement exposées par la décision critiquée, dont la Cour adopte les motifs sur ce point ;

Attendu qu'il en résulte d'abord, sur les débauchages, que la S.A.R.L. UNIFONDS a recruté parmi les anciens salariés de la S.A. CEREC : - son directeur, M. Le X..., mis à la retraite par CEREC le 12.09.2002, et étant par conséquent en droit, à défaut de clause contraire dans son ancien contrat de travail, de fonder une société concurrente plus de deux ans après ; - le 1.12.2004, Monsieur Y..., qui avait démissionné par lettre du 11.10.2004 et avait été aussitôt dispensé, sans indemnité, de travailler pendant son temps de préavis; - le même jour, Madame Z..., qui avait reçu le 19.7.2004 une lettre prévoyant son licenciement sous condition et a effectivement été licenciée par transaction du 20.10.2004 ;

Qu'UNIFONDS a aussi envisagé l'embauche d'autres salariés ou anciens salariés de la SA CEREC mais y a renoncé, et échappe de la sorte au reproche d'avoir occasionné un trouble manifeste à sa concurrente ;

Attendu qu'UNIFONDS a embauché aussi Madame A..., qui avait démissionné le 8.11.2004 ; que Mme A... n'ayant pas été dispensée de

préavis et ayant été immédiatement accueillie par UNIFONDS, cette embauche est plus troublante que les précédentes ;

Que cependant, par des motifs adaptés que la Cour reprend sans changement, le premier juge a démontré qu'un tel événement ne pouvait pas à l'évidence désorganiser une entreprise de 162 salariés et que là encore, le trouble de la méthode d'UNIFONDS n'est pas suffisamment manifeste pour justifier la saisine du juge des référés ;

Attendu que de l'exposé du premier juge, adopté également sur c e point par la Cour, et s'agissant maintenant du dénigrement, que la S.A. CEREC n'en a pour preuve ou même présomption, que : - l'attestation de son propre directeur (sa pièce no 22) ou de ses employés (ses pièces no 27 et 30 et attestations Alcaraz et Joly non numérotées) --pièces qui ne peuvent naturellement, étant établies par des subordonnés de l'appelante, emporter la conviction de la Cour-- ; - un télex et un courrier de mécontentement de la société Charot, qui se plaint de difficultés de livraisons et d'une excessive raideur commerciale (pièces no 33 de l'appelante et no 5 de l'intimée)--réaction isolée et qu'au demeurant, seule CEREC prend le risque d'imputer nominativement et exclusivement à l'un des futurs animateurs d'UNIFONDS-- ;

Attendu que du tout il résulte qu'UNIFONDS a sans doute eu une attitude ambige, que le juge du fond aurait pu contribuer à éclairer, au besoin après une expertise sur les circonstances de la naissance d'UNIFONDS, mais dont la qualification de "trouble manifestement illicite" ou de "dommage imminent" n'est nullement acquise;

Que la demande d'expertise elle-même a été axée expressément par la SA CEREC sur l'évaluation du préjudice, et non pas sur les circonstances des débauchages et du dénigrement prétendus ; que cette demande ne peut donc prospérer si la demande principale échoue ;

Que dès lors, le premier juge devait, non point débouter CEREC, mais retenir que toutes les demandes de celle-ci excédaient ses pouvoirs ; Que sa décision sera réformée, sauf en ce qu'elle a imputé les dépens à CEREC; - Accessoires

Attendu que, succombant sur l'essentiel du principal, l'appelante supportera la charge des dépens du présent appel ; PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, en dernier ressort, Infirme l'ordonnance du juge des référés du TGI à compétence commerciale d'Avesnes sur Helpe en date du 8.4.2004, sauf pour ce qui concerne la charge des dépens ; et statuant à nouveau, Dit que les demandes des parties excèdent les pouvoirs du juge des référés ; Condamne la S.A. CEREC à payer les dépens d'appel ; Accorde aux avoués le bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile .

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT

C. Nolin

T. Fossier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006945767
Date de la décision : 17/11/2005
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONCURRENCE DELOYALE OU ILLICITE - Concurrence déloyale - Action en justice - /JDF

L'autorisation d'aviser la clientèle d'une interdiction frappant un concurrent d'embaucher du personnel ou de démarcher cette même clientèle vise à créer une situation définitivement défavorable à ce concurrent. Dès lors cette autorisation qui ne constitue pas une mesure conservatoire excède les pouvoirs du juge des référés


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2005-11-17;juritext000006945767 ?
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