La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/09/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946482

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre civile 1, 12 septembre 2005, JURITEXT000006946482


COUR D'APPEL DE DOUAICHAMBRE 1 SECTION 1ARRÊT DU 12/09/2005*No RG : 04/05367JUGEMENTTribunal de Grande Instance de BETHUNEdu 29 Juin 2004REF : CG/MB APPELANTE Madame Françoise X... épouse Y... née le 20 Août 1927 à LILLE demeurant ... 60150 THOUROTTE représentée par Maître QUIGNON, avoué à la Courassistée de Maître INGELAERE RIBAUCOURT, avocat au barreau de BETHUNE bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 591780020407940 du 12/10/2004 INTIMÉ Monsieur Daniel François Y...né le 23 Juillet 1967 à BRUAY EN ARTOIS demeurant ... 62700 BRUAY LA BUISSIERE représenté pa

r la SCP COCHEME-KRAUT, avoués associés à la Courassisté de Maître Sy...

COUR D'APPEL DE DOUAICHAMBRE 1 SECTION 1ARRÊT DU 12/09/2005*No RG : 04/05367JUGEMENTTribunal de Grande Instance de BETHUNEdu 29 Juin 2004REF : CG/MB APPELANTE Madame Françoise X... épouse Y... née le 20 Août 1927 à LILLE demeurant ... 60150 THOUROTTE représentée par Maître QUIGNON, avoué à la Courassistée de Maître INGELAERE RIBAUCOURT, avocat au barreau de BETHUNE bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 591780020407940 du 12/10/2004 INTIMÉ Monsieur Daniel François Y...né le 23 Juillet 1967 à BRUAY EN ARTOIS demeurant ... 62700 BRUAY LA BUISSIERE représenté par la SCP COCHEME-KRAUT, avoués associés à la Courassisté de Maître Sylvie VANTROYEN, avocat au barreau de BETHUNE DÉBATS à l'audience publique du 26 Mai 2005, tenue par Madame GUIEU magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame HERMANT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉMadame ROUSSEL, Président de chambreMadame HIRIGOYEN, ConseillerMadame GUIEU, ConseillerARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2005 (date indiquée à l'issue des débats) par Madame ROUSSEL, Président, et Madame HERMANT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.ORDONNANCE DE CLÈTURE DU : 5 AVRIL 2005

Par jugement du 29 juin 2004 auquel il est expressément renvoyé pour l'exposé des faits moyens et prétentions antérieurs des parties, le Tribunal de Grande Instance de Béthune a, dans un litige opposant

Madame Françoise X... épouse Y... à Monsieur Daniel François Y... :- condamné Monsieur Daniel Y... à payer à Madame Françoise Y... la somme de 4 820,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2002,- condamné Monsieur Daniel Y... à payer à Madame Françoise Y... la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Par déclaration du 9 août 2004, Madame Y... a relevé appel de la décision.

Par déclaration du 23 septembre 2004, Monsieur Y... a également formé appel.

Les deux appels ont été joints par ordonnance du 8 novembre 2004.

Vu les conclusions déposées par Madame Y... le 9 décembre 2004,

Vu les conclusions déposées par Monsieur Y... le 7 mars 2005,

L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance du 5 avril 2005.

L'analyse plus ample des moyens des parties sera effectuée à l'occasion de la réponse apportée à leurs écritures opérantes.MOTIFSRappel des données utiles du litige

Madame Y... qui a vécu chez son fils Daniel Y... de 1987 à juillet 2001, date à laquelle elle est partie chez son fils Roland, a, courant 1990, perçu à titre d'héritage de son beau-père la somme

de 15 244,90 euros.

Elle a, au cours du mois d'avril 1993, placé sur un livret épargne logement ouvert au nom de son fils Daniel, cette somme. Elle bénéficiait sur ce compte d'une procuration.

Aux motifs qu'elle avait, en suite de son changement de domicile, vainement réclamé cette somme à son fils Daniel qui s'est refusé à la lui restituer, Madame Y... a fait assigner celui-ci, par acte d'huissier du 6 septembre 2002 aux fins d'obtenir paiement de la somme de 14 848,55 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de placement outre paiement de dommages et intérêts.

La décision a été rendue dans ces conditions.

Madame Y..., au soutien de son appel, fait valoir :- que le virement de la somme perçue à titre d'héritage sur le compte de son fils, a été effectué par ses soins car elle craignait de se voir abuser par son autre fils Roland, qu'elle n'avait donc aucunement l'intention de se dépouiller irrévocablement de son argent, mais simplement la volonté de le mettre à l'abri,- qu'elle n'avait donc pas davantage l'intention d'opérer un don manuel au profit de son fils Daniel, mais a entendu lui donner mandat de préserver les

fonds,- qu'eu égard au lien familial les unissant, elle ne peut prouver l'existence de ce mandat par écrit.- qu'en disposant cependant de ces sommes, son fils a dépassé les pouvoirs qu'il tenait du mandat et qui se limitaient à la conservation desdites sommes.

Plus précisément, Madame Y... reconnaît qu'une somme de1 524,49 euros a été prélevée par elle de la somme initialement déposée afin de financer un caveau familial, que d'ailleurs, elle a tenu compte de ce paiement dans la détermination du montant réclamé à hauteur de 14 848,55 euros.

A l'affirmation de son fils selon laquelle elle lui aurait fait un don de 5 335,72 euros, elle rétorque que son intention libérale n'est pas démontrée.

Sur le solde de 9 152,82 euros, elle souligne que son fils ne présente aucun justificatif permettant d'affirmer que ces sommes auraient été dépensées dans l'intérêt de sa mère, et qu'en réalité il a fait un usage personnel des sommes déposées.

Monsieur Daniel Y... quant à lui fait valoir :- réfuter l'existence d'un quelconque mandat même verbal, consenti par Madame Y...,- qu'en effet, sa mère ne lui a pas confié le mandat d'accomplir un quelconque acte en son nom puisqu'elle a juste placé la somme d'argent qu'elle possédait sur un compte tiers, ouvert à cet effet, gardant tout pouvoir sur la somme versée en ayant procuration sur le compte,- qu'elle demeurait ainsi en possession de l'argent en conservant la libre disposition,- qu'en réalité, elle a elle-même disposé de la totalité de la somme pendant les 14 annéesoù elle a vécu chez lui,- qu'en effet s'il reconnaît que sa mère a déposé 107

400 francs sur son compte en 1993, il explique que sur cette somme, sa mère lui a donné 35 000 francs (5 335,72 euros) afin qu'il s'achète une maison,- que, s'agissant d'un don manuel, aucun remboursement ne peut lui être réclamé, d'autant que sa mère ne rapporte pas la preuve de l'absence d'un tel don,- sur la somme de 9 152,82 euros, Monsieur Daniel Y... explique que cet argent a été utilisé par sa mère pour subvenir à ses besoins, sa retraite mensuelle de 442 euros étant insuffisante à lui permettre de faire face à ses dépenses courantes.

Sur la somme de 1 524,49 euros (10 000 francs)

Les parties conviennent que la somme de 1 524,49 euros a été utilisée par Madame Y... afin de financer un monument funéraire. Il s'avère que ce montant est effectivement déduit de sa demande totale.Sur la somme de 5 335,72 euros (35 000 francs)

Il ressort des écritures concordantes des parties sur ce point qu'il était acquis entre elles que la somme litigieuse déposée par Madame Y... sur le compte de son fils (compte sur lequel elle bénéficiait d'une procuration) demeurait la propriété de Madame Y..., cette dernière devant, selon les termes employés par son fils "en conserver la libre disposition".

Néanmoins Monsieur Y... expose que sur cette somme, 35 000 francs

lui ont été donnés par sa mère, à titre de don manuel pour qu'il s'achète une maison.

Il fait valoir qu'il bénéficie d'une présomption qu'il appartient à sa mère de renverser, par la preuve de l'absence de don.

L'examen du compte sur livret de Monsieur Daniel Y... révèle qu'une somme de 35 000 francs en a bien été retirée en espèces le 15 juillet 1993 , sans qu'il soit toutefois possible d'identifier l'auteur du retrait et sans qu'il soit justifié de l'affectation de la somme ainsi retirée.

Le possesseur qui prétend avoir reçu une chose en don manuel bénéficie d'une présomption et il appartient à celui qui revendique la chose de rapporter la preuve de l'absence d'un tel don, ou que la possession ne réunit pas les conditions légales pour être efficace.

En l'espèce, il est acquis que Monsieur Y... ne possédait pas la somme totale versée en avril 1993, pour lui-même mais pour le compte de sa mère, de sorte que sa possession de la somme de 35 000 francs est équivoque et ne remplit pas les conditions d'efficacité requises.

En effet, quand on a commencé à posséder pour autrui, on est toujours présumé posséder au même titre s'il n'y a de preuve du contraire.

Cette preuve contraire n'est en l'espèce pas rapportée faute de détermination de l'auteur du retrait et de la destination des sommes, et au vu des explications de Madame Y... qui dénie avoir fait don d'une quelconque somme à son fils.

Monsieur Daniel Y... est donc mal fondé à se prévaloir de la présomption et, ne prouvant pas avoir possédé dès l'origine, la somme de 35 000 francs pour son compte, doit être condamné à payer cette somme à sa mère. Le jugement doit être réformé.

Sur le solde de 9 152,82 euros

Monsieur Daniel Y... affirme que le solde de la somme initialement versée (déduction faite des 5 335,72 euros), a été utilisé par sa mère pour subvenir à ses propres besoins tandis que celle-ci soutient qu'il n'en est rien et que ses revenus lui permettaient de faire face à ses dépenses courantes. Elle souligne que son fils ne verse aucun justificatif.

Alors que Monsieur Y... n'était que détenteur précaire de sommes placées sur son compte, il n'est pas établi que ces fonds aient été utilisés par Madame Y... et dans l'intérêt exclusif de celle-ci,

alors même que cette dernière qui était hébergée par son fils, justifie qu'elle percevait une retraite de l'ordre de 450 euros par mois et que l'examen de ses relevés de compte courant du Crédit Lyonnais ne laisse apparaître aucune opération de crédit correspondant (quant aux dates et montants) aux retraits du compte livret de Monsieur Daniel Y.... Au contraire, il s'avère qu'avec un solde toujours créditeur, Madame Y... opérait des retraits de son compte, en rapport avec les ressources qu'elle percevait, et de nature à lui permettre de faire face aux dépenses courantes.

Aussi, faute de preuve de l'utilisation des sommes dans l'intérêt de Madame Y..., il convient de condamner Monsieur Daniel Y... au paiement de la somme de 9 152,82 euros. Le jugement doit être réformé sur le montant de la condamnation prononcée.

La somme totale de 14 488,54 euros sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2002, date d'assignation conformément à l'article 1153 du code civil.

Madame Y... ne justifie pas d'un préjudice distinct indépendant de celui réparé par les intérêts moratoires de la créance, de sorte qu'elle doit être déboutée de sa demande en dommages et intérêts. Le jugement mérite confirmation.

L'équité commande d'indemniser Madame Y... des frais irrépétibles exposés par elle et non compris dans les dépens. Une somme de 400 euros lui sera allouée à ce titre en cause d'appel, mise à la charge de Monsieur Daniel Y..., les dispositions du jugement sur ce point devant être confirmées.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en ses dispositions relatives aux dommages et intérêts, à l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux dépens,

Le réforme pour le surplus,Statuant à nouveau,

Condamne Monsieur Daniel Y... à payer à Madame Françoise Y... la somme de 14 488,54 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2002,Y ajoutant,

Le condamne à lui payer 400 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Le condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l'aide juridictionnelle.

Le Greffier,N. HERMANT

Le Président, B. ROUSSEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946482
Date de la décision : 12/09/2005
Type d'affaire : Civile

Analyses

DONATION - Don manuel - Preuve - Présomption - Preuve contraire - Possession viciée

Le possesseur qui prétend avoir reçu une chose en don manuel bénéficie d'une présomption et il appartient à celui qui revendique la chose de rapporter la preuve de l'absence d'un tel don, ou que la possession ne réunit pas les conditions légales pour être efficace.En l'espèce, il est acquis que la possession est équivoque et ne remplit pas les conditions d'efficacité requises car quand on a commencé à posséder pour autrui, on est toujours présumé posséder au même titre s'il n'y a de preuve du contraire


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Mme Roussel, Président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2005-09-12;juritext000006946482 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award