La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/2002 | FRANCE | N°2001/6244

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 19 septembre 2002, 2001/6244


COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 19 / 09 / 2002

*
* *

N° RG : F 01 / 06244

Contredit de compétence

DEMANDERESSES :

la société L. S.
ayant son siège social à RIGA (LETTONIE)

Représentée par la SCP MASUREL-THERY, avoués à la Cour
Assistée de Maître SIMON, avocat au barreau de PARIS

la société Z. S. C.
ayant son siège social à LIMASSOL (CHYPRE)

Représentée par la SCP MASUREL-THERY, avoués à la Cour
Assistée de Maître SIMON, avocat au barreau de PARIS
>DEFENDERESSES :

la société de droit polonais S. G. (en liquidation)
représentée par son liquidateur amiable, Monsieur X...
ayant son siège social ...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 19 / 09 / 2002

*
* *

N° RG : F 01 / 06244

Contredit de compétence

DEMANDERESSES :

la société L. S.
ayant son siège social à RIGA (LETTONIE)

Représentée par la SCP MASUREL-THERY, avoués à la Cour
Assistée de Maître SIMON, avocat au barreau de PARIS

la société Z. S. C.
ayant son siège social à LIMASSOL (CHYPRE)

Représentée par la SCP MASUREL-THERY, avoués à la Cour
Assistée de Maître SIMON, avocat au barreau de PARIS

DEFENDERESSES :

la société de droit polonais S. G. (en liquidation)
représentée par son liquidateur amiable, Monsieur X...
ayant son siège social à GDANSK (POLOGNE)

Assistée de Maître de RICHEMONT, avocat au barreau de PARIS
Convoquée par LRAR-AR signé le 27. 11. 2001

la société de droit anglais L. S. (UK) LIMITED
ayant son siège social à LONDRES (ANGLETERRE)

Assistée de Maître DE RICHEMONT, avocat au barreau de PARIS
Convoquée par LRAR

la société de droit des Bermudes L. S. L. B.
ayant son siège social à HAMILTON (BERMUDES)

Assistée de Maître DE RICHEMONT, avocat au barreau de PARIS
Convoquée par LRAR-AR signé le 7. 12. 2001

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DELIBÉRÉ
Mme GEERSSEN, Président de chambre
M. TESTUT, Conseiller
M. CHOLLET, Conseiller
---------------------
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DORGUIN

DÉBATS à l'audience publique du 21 Février 2002,

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 19 septembre 2002, après prorogation du 25 Avril 2002, date indiquée à l'issue des débats par Mme GEERSSEN, Président, qui a signé la minute avec Mme DORGUIN, Greffier, présents à l'audience lors du prononcé de l'arrêt.

*****

Données devant la Cour.

La décision attaquée :

Par un jugement contradictoire du 5 novembre 2001, le Tribunal de Commerce de Dunkerque :

· a constaté que le juge du fond a été saisi à l'étranger quant à la créance alléguée,
· a renvoyé les parties à mieux se pourvoir

Procédure :

Les sociétés L. S. et Z. S. ont formé contredit de cette décision le 8 novembre 2001.

Par ordonnance du 15 novembre 2001, le Premier Président de la Cour de céans a fixé au 21 février 2002 la date des débats.

Les prétentions de l'appelant :

Dans leurs conclusions en date du 21 février 2002, la société L. S. et sa filiale Z. S. demandent à voir :

· infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

· dire que le tribunal de commerce de Dunkerque est compétent pour connaître des demandes de dommages intérêts pour saisie abusive de navire sur des saisies qu'il a autorisées,

· évoquer l'affaire et enjoindre aux parties de conclure au fond,

· condamner la société S. G. et les armements L. S. à payer aux concluantes 10. 000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Les prétentions de l'intimé

La société S. G. et les armements L. S., par conclusions du 21 février 2002, demandent à voir :

· confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

· dire que seul le juge de l'exécution est compétent pour connaître des demandes de dommages intérêts pour saisie abusive,

· dire en tout état de cause que les tribunaux de Dunkerque sont incompétents pour connaître des demandes de dommages intérêts pour saisie abusive, relatives aux saisies pratiquées à Dieppe et Bordeaux,

· dire n'y avoir lieu à évocation,

· condamner la société L. S. et sa filiale Z. S. à leur payer les sommes de 10. 000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

II-Argumentation de la Cour

Sur les circonstances du litige :

La Cour n'est saisie que d'un problème de compétence quant à des mesures de saisies conservatoires et leurs conséquences ultérieures, les circonstances détaillées du litige opposant la société L. S. et son groupe à la société S. G. et aux armements L. S. étant sans effet sur la décision à intervenir, les sommes en jeu étant de l'ordre de 20. 000. 000 de US $.

Il sera simplement rappelé que la société S. G. est un chantier naval polonais qui a vendu à la société L. S. des coques de navires en 1992, que le contrat a ultérieurement été résilié et que le litige au fond, impliquant aux cotés de la société L. S. diverses sociétés émanations de son groupe maritime, a été porté devant les juridictions anglaises, qu'il s'est partiellement dénoué par une décision de la Chambre des Lords du 26 février 1998.

Pour préserver ses droits, durant le cours de la procédure au fond la société S. G. et les armements L. S. ont procédé, (ou tenté selon les cas), à des saisies conservatoires dans différents ports français de navires de la flotte de la société L. S. et de sa filiale Z. S., mesures ayant fait l'objet d'appel et de recours en cassation.

Sur la juridiction compétente :

Attendu que le tribunal de commerce de Dunkerque a été saisi par la société L. S. et sa filiale Z. S. d'une demande de condamnation de la société S. G. et des armements L. S. au titre du préjudice subi par la saisie de navires à Dunkerque, Dieppe et Bordeaux, ainsi que la désignation d'un expert aux fins d'évaluer le dit préjudice,

Attendu que le premier juge pour se déclarer incompétent a retenu que le juge du fond ayant été préalablement saisi en Angleterre les conséquences d'une saisie conservatoire relevait de son appréciation, les deux litiges se trouvant nécessairement liés,

Attendu qu'il est de principe de droit international qu'en matière d'exécution des décisions les tribunaux de l'Etat membre du lieu d'exécution sont seuls compétents, sans considération de domicile de l'une quelconque des parties,

Attendu que tout créancier peut pratiquer une mesure conservatoire pour assurer la sauvegarde de ses droits, une saisie conservatoire ayant le caractère d'une mesure d'exécution en application de l'article 1er de la loi du 9 juillet 1991,

Attendu que les conséquences d'une saisie conservatoire suivent nécessairement les règles de compétence internationale de la saisie abusivement ordonnée,

Qu'ainsi le jugement entrepris ne pouvait renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant une juridiction étrangère, qu'il sera donc infirmé,

Attendu que, si en matière de navire une compétence particulière est donnée au Président du tribunal de commerce pour autoriser une saisie conservatoire par application conjointe des articles 69 de la loi du 9 juillet 1991, 70 de la loi du 3 janvier 1967 et 29 du décret du 27 octobre 1967, cette compétence est limitée à cette seule autorisation ressortant des pouvoirs juridictionnels du Président, et ne saurait s'étendre à l'examen des suites de la saisie par la juridiction du tribunal,

Attendu que les demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageable des mesures conservatoires sont de la compétence exclusive du juge de l'exécution en application de l'article L 311-12-1 alinéa 3 du code de l'organisation judiciaire,

Attendu que, si le débiteur demeure à l'étranger, ce qui est présentement le cas puisque toutes les parties au litige sont étrangères, le juge de l'exécution territorialement compétent est celui du lieu où la mesure conservatoire a ou aurait dû être exécutée, en application de l'article 9 alinéa 2 du décret du 31 juillet 1992,

Attendu que dans les évaluations des conséquences dommageables des saisies conservatoires ordonnées, trois lieux d'exécution situés dans le ressort de 3 cours d'appel différentes, sont concernés,

Attendu que les conséquences dommageables d'une saisie conservatoire abusive d'un navire ne peuvent être que les frais directs inhérents à la saisie et les coûts indirects résultant de celle ci, qui sont essentiellement les pertes de revenus consécutives à la non exploitation du navire durant le temps de la saisie,

Attendu que les navires immobilisés étant différents dans chaque port, les pertes de revenus doivent être évaluées séparément,

Attendu donc que le juge de l'exécution de Dunkerque ne peut statuer que sur les effets des saisies pratiquées dans son ressort, le préjudice éventuel des sociétés L. S. et Z. S. étant divisible navire par navire,

Attendu qu'il n'y a pas lieu de priver les parties d'un premier degré de juridiction,

Qu'ainsi l'instance sera renvoyée devant le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Dunkerque pour les saisies conservatoires pratiquées dans son ressort,

Attendu que les demandes de la société L. S. et de sa filiale Z. S. concernant les dommages découlant des saisies pratiquées à Bordeaux et Dieppe sont indéterminées dans leur montant dans l'assignation introductive d'instance devant le tribunal de commerce de Dunkerque, qu'il convient donc que la société L. S. et sa filiale Z. S. saisissent dans le cadre d'une nouvelle instance les juges de l'exécution territorialement compétents en précisant leurs demandes,

Sur les frais irrépetibles :

La société L. S. et sa filiale Z. S. dirigeant mal leurs demandes en première instance, la société S. G. et les armements L. S. ont du engager en commun des frais irrépétibles en cause d'appel que la Cour fixe à 1. 524 Euros.

Sur les dépens :

Pour les mêmes motifs, la société LATVIAN SHIPPING et sa filiale ZOJA SHIPPING supporteront les dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

III-Décision de la Cour

Par ces motifs, La Cour

Infirme le jugement du 5 novembre 2001,

Statuant à nouveau,

Rejette la demande d'évocation

Dit que le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Dunkerque est compétent pour connaître des suites de la saisie conservatoire des navires de la société L. S. et sa filiale Z. S. pratiquées dans le port de Dunkerque,

Renvoie l'instance pour le seul litige dunkerquois devant le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de DUNKERQUE
Invite la société L. S. et sa filiale Z. S. à saisir les juges de l'exécution territorialement compétent pour les autres navires, en précisant le montant de ses préjudices,

Condamne la société L. S. et sa filiale Z. S. à payer aux sociétés S. G. et L. S. la somme de 1. 524 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Met à la charge de la société L. S. et sa filiale Z. S. les dépens.

Le GreffierLe Président

J. DORGUINI. GEERSSEN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 2001/6244
Date de la décision : 19/09/2002

Analyses

JUGE DE L'EXECUTION - Compétence - Compétence territoriale - Saisie conservatoire - Navire étranger - Lieu où la mesure conservatoire a ou aurait dû être exécutée -

En matière de saisie conservatoire ordonnée à l'égard d'un navire étranger, le juge de l'exécution territorialement compétent est celui du lieu où la mesure conservatoire a ou aurait dû être exécutée.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de Commerce de Dunkerque, 05 novembre 2001


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2002-09-19;2001.6244 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award