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04/07/2024 | FRANCE | N°23/01339

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 04 juillet 2024, 23/01339


[V] [N]



C/



[K] [Z] veuve [G]

































































































Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON



2ème chambre civile



ARRÊT DU

04 JUILLET 2024



N° RG 23/01339 - N° Portalis DBVF-V-B7H-GJEV



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 12 octobre 2023,

par le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Dijon - RG : 23/282









APPELANT :



Monsieur [V] [N]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 7] (21)

domicilié :

[Adresse 3]

[Localité 11]



représenté par Me Maxence PERRIN, avoc...

[V] [N]

C/

[K] [Z] veuve [G]

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème chambre civile

ARRÊT DU 04 JUILLET 2024

N° RG 23/01339 - N° Portalis DBVF-V-B7H-GJEV

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 12 octobre 2023,

par le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Dijon - RG : 23/282

APPELANT :

Monsieur [V] [N]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 7] (21)

domicilié :

[Adresse 3]

[Localité 11]

représenté par Me Maxence PERRIN, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 108

assisté de Me Benoît VERGER, membre de la SELARL VERGER, avocat au barreaud de PARIS

INTIMÉE :

Madame [K] [Z] veuve [G]

née le [Date naissance 4] 1927 à [Localité 10] (42)

domicilié :

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126

assistée de Me Olivier GARDETTE, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 février 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Marie-Pascale BLANCHARD, Présidente de chambre,

Sophie BAILLY, Conseiller,

Bénédicte KUENTZ, Conseiller,

Après rapport fait à l'audience par l'un des magistrats de la composition, la cour, comme ci-dessus composée a délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 11 Avril 2024 pour être prorogée au 23 mai 2024, au 6 juin 2024, au 20 juin 2024 et au 04 Juillet 2024,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Marie-Pascale BLANCHARD, Présidente de chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

Mme [K] [Z] veuve [G] a, entre 2009 et 2014, investi dans des placements consistant en des collections de livres, lettres, manuscrits, dessins, objets et oeuvres d'art constituées par la SAS Aristophil.

Le 16 février 2015, cette société a été placée en redressement judiciaire converti en liquidation le 5 août suivant, ruinant les investissements réalisés par Mme [G].

Une information judiciaire a en outre été ouverte contre la société Aristophil, ses dirigeants et d'autres personnes pour escroqueries en bande organisée, abus de confiance et abus de faiblesse, procédure pénale dans laquelle Mme [G] s'est constituée partie civile.

Ayant souscrit certains des placements par l'intermédiaire d'un courtier, M. [V] [N], Mme [G] a engagé une action en responsabilité à son encontre par un acte du 3 octobre 2018 délivré selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 19 mars 2019, le tribunal de grande instance de Dijon a :

- rejeté les demandes de Mme [G] fondées sur les contrats datés du 24 juillet 2010 et du 16 février 2011, qui n'ont pas été souscrits avec M. [N],

- déclaré recevable l'action de Mme [G] pour le surplus,

- dit que M. [N] n'a pas accompli les diligences imposées par le code monétaire et financier et le règlement général de l'autorité des marchés financiers à l'occasion de la souscription des contrats conclus les 9 mars 2010 et 5 juillet 2010,

- rejeté les demandes indemnitaires de Mme [G] fondées sur les contrats conclus les 9 mars et 5 juillet 2010 en l'absence de lien de causalité direct et certain entre les fautes commises et les préjudices subis,

- dit que M. [N] a engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de Mme [G] à l'occasion de la souscription des contrats conclus le 17 octobre 2013 et le 17 avril 2014,

- condamné M. [N] à verser à Mme [G] la somme totale de 45 000 euros de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2016,

- condamné M. [N] aux dépens et à payer à Mme [G] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [G] du surplus de ses demandes.

Le jugement a été signifié à M. [N] le 2 mai 2019 selon les modalités prévues à l'article 659 du code de procédure civile, par procès-verbal de recherches infructueuses.

M. [N] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 3 mars 2023.

Par conclusions d'incident du 19 avril 2023, Mme [G] a soulevé l'irrecevabilité de cet appel.

Par ordonnance du 12 octobre 2023, le conseiller de la mise en état a :

- déclaré recevable l'appel interjeté le 3 mars 2023 par M. [V] [N] à l'encontre du jugement rendu le 19 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Dijon dans le litige l'opposant à Mme [K] [G],

- condamné Mme [K] [G] aux dépens de l'incident,

- débouté Mme [G] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant requête déposée au greffe le 25 octobre 2023, Mme [G] a déféré cette décision à la cour.

Au terme de ses écritures notifiées par voie électronique le 27 décembre 2023, Mme [G] demande à la cour, au visa des articles 74, 112 et suivants, 410, 659 et 914 du code de procédure civile, de :

- infirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- déclarer l'appel irrecevable,

- condamner M. [V] [N] à payer à Mme [K] [G] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel,

- dire et juger que dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir, l'exécution forcée devait être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier de justice, le montant de l'émolument de recouvrement sur encaissement retenu par l'huissier en application des articles A 444-32 et suivants du code de commerce, doit être mis à la charge de la partie condamnée à titre de dommages et intérêts dont le montant sera liquidé en cas d'exécution forcée, en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [G] soutient que le conseiller de la mise en état a procédé par confusion entre une notification inefficace insusceptible de faire courir le délai d'appel et la notification irrégulière sanctionnée par la nullité que M. [N] n'a pas soulevée devant le conseiller de la mise en état avant toute défense au fond.

Elle relève que l'acte de signification du 2 mai 2019 n'est entaché d'aucune incomplétude et qu'à défaut d'encourir la nullité, il a fait courir le délai d'appel qui a expiré le 2 juin 2019.

En réplique aux conclusions adverses, elle conteste développer de nouveaux moyens au soutien de sa demande d'irrecevabilité de l'appel puisqu'elle considère reprendre les mêmes moyens que ceux soumis au conseiller de la mise en état.

Elle fait valoir que le procès verbal de l'huissier relate minutieusement les diligences accomplies pour tenter de retrouver la trace de M [N], disparu sans laisser d'adresse et que la signification était valable.

Subsidiairement, elle considère que les courriers par lequels M [N] a recherché auprès des huissiers un échéancier de règlement et proposé des versements mensuels de 200 euros, alors que le jugement n'était pas assorti de l'exécution provisoire, démontrent une intention sans réserve d'exécuter valant acquiescement.

Selon ses conclusions notifiées par voie électronique le 21 décembre 2023, M. [N] entend voir :

- confirmer l'ordonnance déférée ;

- y ajoutant,

- condamner Mme [G] aux dépens du déféré qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à M. [N] la somme de 500 euros par application de l'article 700 du même code.

M. [N] soutient que l'incident soulevé par Mme [G] est irrecevable au motif qu'elle se prévaut devant la cour statuant sur déféré d'un moyen nouveau tiré du défaut de demande d'annulation de l'acte de signification et qu'il n'avait pas à soulever préventivement devant le conseiller de la mise en état un incident aux fins de voir statuer sur la recevabilité de son appel.

Il fait valoir que le délai d'appel ne pouvait courir qu'à partir d'une signification régulière, que la signification n'a pas donné lieu à des recherches suffisantes alors que Mme [G] était en possession de ses coordonnées téléphoniques et électroniques, que les services de la mairie de son ancien domicile étaient informés de son déménagement, qu'une recherche dans les pages jaunes permettait de retrouver sa nouvelle adresse et qu'il en avait fait la déclaration auprès de plusieurs administration, qu'enfin les services du tribunal de grande instance de Dijon disposait de sa nouvelle adresse et l'y avait convoqué.

Il estime que l'huissier n'a pas épuisé tous les moyens d'investigation à sa disposition le privant de ses droits à se défendre.

Il fait valoir qu'il ne peut lui être opposé les dispositions de l'article 410 du code de procédure civile qui ne sont applicables que pendant le délai de recours et les sommes versées ayant été versées après que le jugement soit devenu exécutoire par la signification qui en a été faite.

MOTIFS DE LA DECISION :

1°) sur « l'irrecevabilité de l'incident soulevé par Mme [G] » :

Il est de principe que lorsque la cour est saisie sur déféré, elle ne peut statuer que dans le champ de la compétence d'attribution du conseiller de la mise en état et ne peut connaître de prétentions ou d'incidents qui ne lui auraient pas été soumis.

De plus, l'article 914 du code de procédure civile impose à la partie qui soulève l'irrecevabilité de l'appel devant le conseiller de la mise en état, d'invoquer simultanément les moyens y tendant à peine d'irrecevabilité de ceux qui ne l'auraient pas été.

Devant le conseiller de la mise en état, Mme [G] a demandé que soit déclaré irrecevable l'appel formé par M. [N] en invoquant trois moyens, tirés d'une part de sa tardiveté, le jugement lui ayant été signifié par un acte du 2 mai 2019 ; de seconde part, de l'absence de saisine du premier président en relevé de forclusion, de troisième part, de l'acquiescement implicite résultant de ses paiements.

Si Mme [G] maintient la même prétention devant la cour saisie sur déféré, elle soulève un nouveau moyen d'irrecevabilité tiré du défaut d'annulation de la signification du jugement.

Ce moyen qui n'a pas été soulevé simultanément aux autres n'est donc pas recevable devant la cour statuant dans le cadre du déféré.


2°) sur la tardiveté de l'appel :

Selon l'article 538 du code de procédure civile, le délai d'appel en matière contentieuse est d'un mois et le jugement a été signifié à M. [N] par acte d'huissier en date du 2 mai 2019.

Cet acte a été établi par procès-verbal de recherches infructueuses sur le fondement des dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, l'huissier indiquant n'avoir pu constater la présence du destinataire au domicile connu de lui au [Adresse 8] à [Localité 6] en l'absence de nom sur la boîte aux lettres.

Dans son procès-verbal, l'huissier relate, ainsi que l'impose l'article 659 du code de procédure civile, les diligences entreprises aux fins de rechercher le destinataire de l'acte mais demeurées vaines :

- rencontre d'une voisine qui lui a indiqué que : « M. [N] serait parti depuis un an sur [Localité 9] » sans pouvoir lui communiquer d'adresse ou de numéro de téléphone,

- recherches sur l'annuaire électronique de son ressort de compétence et sur le département 69,

- recherches sur internet et découverte sur le site « société.com » d'un item [V] [N] né en 1951 en qualité de dirigeant mais sans adresse, ni nom de société,

- découverte sur le réseau social « Linkedin » d'un [V] [N] né en 1951, agent commercial, mais sans adresse, numéro de téléphone, ni boîte mail,

- contact téléphonique avec la mairie d'[Localité 6],

- vérifications auprès de son mandant.

Au terme de ces investigations, l'huissier a procédé aux envois par lettres simple et recommandée exigés par les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile et il résulte des pièces produites que ces courriers n'ont pas touché leur destinataire.

Ainsi que l'a relevé le conseiller de la mise en état, la question soulevée par M. [N] n'est pas celle de la nullité de cette signification, mais de son efficacité à faire courir le délai d'appel.

Or, le principe en la matière étant la signification de l'acte à la personne même de son destinataire, le procès-verbal de recherches infructueuses prévu par l'article 659 du code de procédure civile, ne peut se substituer efficacement à une telle signification à personne que si les diligences entreprises par l'huissier/ commissaire de justice se révèlent pertinentes suffisantes au regard des circonstances de l'espèce pour atteindre leur but qui est de découvrir le destinataire de l'acte et permettre ainsi la délivrance de l'acte à sa personne.

A l'examen des pièces produites par M. [N], la cour ne peut que constater, à l'instar du conseiller de la mise en état, qu'une recherche élargie à la France entière sur le site électronique « pages jaunes » permettait de découvrir la nouvelle adresse de M. [N] à [Localité 11], que son changement de domicile avait été signalé sur le site « changement d'adresse.gouv », mais également que ce changement d'adresse avait été pris en compte par les organismes sociaux RSI et MSA et que la mairie d'[Localité 6] y avait notifié sa radiation des listes électorales.

En outre, il est établi que l'activité professionnelle de M. [N] était exploitée sous la dénomination commerciale: « cabinet de courtage Contact et Patrimoine », figurant dans le jugement du 19 mars 2019, et dans le cadre d'une SARL enregistrée au registre du commerce et des sociétés, qu'il en était le gérant et que cette société avait été placée en liquidation judiciaire, circonstances parfaitement connues de Mme [G] puisqu'elle en faisait état dans son assignation du 3 octobre 2018.

Or, il ne peut qu'être constaté qu'aucune recherche de l'huissier ne s'est appuyée sur ces éléments alors même que la société et son représentant légal était identifiables au travers de son extrait Kbis et que les organes de la procédure collective connaissaient la nouvelle adresse de M. [N] où lui étaient notifiées les décisions s'y rapportant.

Les recherches décrites par l'huissier de justice dans son procès-verbal du 2 mai 2019 ne peuvent donc être considérées, en l'espèce, comme suffisantes et pertinentes, leur caractère lacunaire privant cet acte de son efficacité de telle sorte qu'il n'a pu faire courir le délai d'appel à l'encontre de M. [N].

Par ailleurs, il ne peut pas plus être opposé à ce dernier un quelconque acquiescement au jugement à raison de paiements effectués après signification d'un procès verbal de saisie-vente, le 17 décembre 2019.

En conséquence, il y a lieu de maintenir la décision du conseiller de la mise en état.

PAR CES MOTIFS :

Maintient l'ordonnance juridictionnelle du conseiller de la mise en état en date du 12 octobre 2023,

Renvoie l'affaire et les parties à la mise en état,

Dit que les dépens du déféré suivront le sort des dépens de l'instance au fond,

Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/01339
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.01339 ?
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