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02/07/2024 | FRANCE | N°24/00071

France | France, Cour d'appel de Dijon, 1re chambre civile, 02 juillet 2024, 24/00071


S.A.S.U. SNCTP



C/



S.C. IMMO NOVAREA



























































































expédition et copie exécutoire

délivrées aux avocats le











COUR D'APPEL DE DIJON



1re chambre civi

le



ARRÊT DU 02 JUILLET 2024



N° RG 24/00071 - N° Portalis DBVF-V-B7I-GKWA



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : ordonnance du 19 décembre 2023,

rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Dijon - RG : 23/00948











APPELANTE :



S.A.S.U. SNCTP immatriculée au RCS de Dijon sous le n°017 050 667, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exerc...

S.A.S.U. SNCTP

C/

S.C. IMMO NOVAREA

expédition et copie exécutoire

délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

1re chambre civile

ARRÊT DU 02 JUILLET 2024

N° RG 24/00071 - N° Portalis DBVF-V-B7I-GKWA

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : ordonnance du 19 décembre 2023,

rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Dijon - RG : 23/00948

APPELANTE :

S.A.S.U. SNCTP immatriculée au RCS de Dijon sous le n°017 050 667, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Assistée de Me Michel SIMONET, avocat au barreau de PARIS, plaidant, et représentée par Me Delphine HERITIER, membre de la SCP LDH AVOCATS, avocat au barreau de DIJON, postulant, vestiaire : 16

INTIMÉE :

S.C. IMMO NOVAREA immatriculée au RCS de Dijon sous le n°834 265 183, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés de droit en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Assistée de Me Stéphanie de LAROULLIERE, avocat au barreau de PARIS, plaidant, et représentée par Me Marie CHAGUE-GERBAY, avocat au barreau de DIJON, postulant, vestiaire : 24

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 mai 2024 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et Sophie BAILLY, Conseiller. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre,

Sophie BAILLY, Conseiller,

Leslie CHARBONNIER, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Aurore VUILLEMOT, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 02 Juillet 2024,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Aurore VUILLEMOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SAS SNCTP et la SCCV Immo Novarea ont conclu un marché de construction, le 29 novembre 2017 portant sur la construction d'un ensemble immobilier d'activités et de bureaux [Adresse 5] à [Localité 4].

La SAS SNCTP a sous traité les travaux de gros oeuvre au BET CBIM lequel a établi divers plans qui ont été utilisés pour réaliser les travaux de construction.

Le contrôleur technique SOCOTEC a établi le 17 aout 2018 une fiche ' avis suspendu' concernant le carnet de ferraillage des poutres du plancher haut du sous-sol.

Les vérifications de cet avis ont confirmé le sous-dimensionnement important du ferraillage pour 39 poutres à démolir et à reconstruire.

Les réparations ont été prévues dans un délai d'exécution de 10 mois.

Par acte du 2 juin 2020, la SNCTP a saisi le président du tribunal de commerce, en référé, d'une demande d'expertise, au visa de l'article 145 du code de procédure civile.

La SCCV Immo Novarea est intervenue volontairement à l'instance.

Par ordonnance du 15 juillet 2020, le président du tribunal de commerce de Dijon a fait droit à la demande d'expertise, donnant notamment à l'expert mission de :

- se prononcer sur le sous-dimensionnement des ouvrages de gros-oeuvre,

- donner son avis sur :

. la matérialité, la cause et l'imputabilité de ce sous-dimensionnement,

. les responsabilités encourues à raison de ce sous-dimensionnement,

. la conception, la réalisation et le coût des travaux de reprise,

- à défaut d'accord unanime des parties sur le quantum des dommages arrêtés dans le procès-verbal du 12.12.2019, donner son avis sur les préjudices allégués par les parties,

- évaluer le retard dans l'exécution du marché ; en rechercher les causes, en préciser les raisons et déterminer leur imputabilité,

- analyser les surcoûts occasionnés à la SNCTP, après la signature du procès-verbal du 12.12.2019,

- examiner les conséquences financières de tous les retards et les préjudices qui ont pu en découler pour la SCCV Immo Novarea,

- 'tenter de concilier les parties sur les responsabilités, l'imputabilité et la répartition du quantum à chacune des parties aux désordres et les conséquences afférentes sur la base du rapport d'expertise définitif ainsi que les éventuels coûts supplémentaires supportés par la SAS SNCTP, liés à la réalisation des travaux de réparation',

- 'en tout état de cause, et en cas d'échec de la conciliation dans un délai de 6 mois à compter de la proposition de quantum faite aux parties par l'expert judiciaire, fournir à la juridiction tout élément de nature à permettre la détermination des responsabilités susceptibles d'être encourues, de l'imputabilité et de la répartition du quantum à chacune des parties quant aux désordres et les conséquences afférentes'.

Par ordonnance sur requête du 15 février 2023, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Dijon a autorisé la SNCTP à prendre une inscription d'hypothèque judiciaire sur l'immeuble [Adresse 2] appartenant à la SCCV Immo Novarea pour garantie et sûreté d'une créance évaluée à 1 642 090,47 euros, le juge de l'exécution précisant la nécessité pour la SNCTP d'introduire une procédure aux fins d'obtenir un titre exécutoire dans le mois de l'exécution de la mesure conservatoire.

L'hypothèque judiciaire a été inscrite le 3 mars 2023.

Par acte du 9 mars 2023, l'ordonnance sur requête et l'inscription de l'hypothèque judiciaire ont été dénoncées à la SCVV Immo Novarea.

Le 31 mars 2023, la SAS SNCTP a fait délivrer une assignation au fond à la SCCV Immo Novarea devant le tribunal judiciaire de Dijon aux fin d'obtenir sa condamnation au paiement de diverses sommes au titre du marché de construction du 29 novembre 2017.

Par conclusions d'incident, la SCCV Immo Novarea a demandé au juge de la mise en état de déclarer irrecevable l'action introduite par la SAS SNCTP.

Elle a soulevé la fin de non recevoir tirée du défaut de recours préalable à la procédure de médiation ou de conciliation, prévue à l'article 21.2 'Règlement des contestations' de la norme AFNOR NF P 03-001 du 20 octobre 2017, à laquelle le marché du 29 novembre 2017 renvoie expressément.

Elle a également argué que l'instance avait été introduite sans attendre le dépot du rapport de l'expert désigné en référé lequel avait notamment pour mission de concilier les parties.

En réponse aux conclusions d'incident, la SNCTP a conclu à la recevabilité de son action faisant valoir que :

- une tentative de règlement amiable était intervenue, précisant que sous l'égide de la LCDP gérant de la SCCV Immo Novarea, des réunions s'étaient tenues pour traiter le DGD, le sinistre et les réclamations des parties, que cela résultait notamment de la correspondance adressée le 10 juin 2022 à la société SNCTP ,

- cette réunion faisait suite à une demande de M. [D] [R], secrétaire général de la société SNCTP lequel avait écrit à M.[N] [Z] président de la SCCV Immo Novarea le 23 mai 2022 en ces termes 'Tu trouveras ci-joint un projet de courrier de demande de médiation avant saisine du tribunal concernant le litige du DGD de SNCTP. / A ce stade, nous suspendons l'envoi de ce courrier sous réserve que l'on se rencontre avec [P] [B] dans la quinzaine pour avancer sur la résolution amiable du contentieux.

Dans l'attente de ton retour ...'.

- l'expert a spécifiquement mission de concilier les parties.

Par ordonnance du 19 décembre 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Dijon a :

- déclaré irrecevable l'action engagée par la SAS SNCTP à l'encontre de la SCCV Immo Novarea,

- condamné la SAS SNCTP aux dépens et à payer à la SCCV Immo Novarea la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a considéré que :

- il se déduisait de la correspondance datée du 23 mai 2022 que la lettre de demande de médiation n'avait jamais été envoyée, les pourparlers évoqués n'ayant pas abouti.

- la SNCTP ne pouvait prétendre que la tentative de médiation préalable obligatoire telle que prévue au contrat avait bien eu lieu, étant observé que la mission de conciliation impartie à l'expert contrevenait aux dispositions de l'article 240 du code de procédure civile, de sorte qu'elle est inopérante.

La SAS SNCTP a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration du 10 janvier 2024.

Aux termes du dispositif de ses conclusions notifiées le 26 avril 2024, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien de ses prétentions, la SAS SNCTP demande à la cour, au visa notamment des articles R.121-11, R.511-1 à R. 512-3 et R.532-6 du code des procédures civiles d'exécution et de l'article 2.2 de la norme AFNOR P 03 3001, d'infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état dont appel en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de :

- rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la société SCCV Immo Novarea,

- déclarer son action en paiement recevable et bien fondée,

- surseoir à statuer dans l'attente du rapport de l'expert judiciaire,

- prendre acte de ce qu'elle n'entend pas renoncer à ses demandes tirées de son décompte général définitif tacite,

- condamner la SCCV Immo Novarea à payer à la société SNCTP :

' 5000 euros au titre de la procédure devant le juge de la mise en état,

' 5000 euros au titre de la présente procédure.

' 2 500 euros à titre de remboursement de la somme réglée en exécution de l'ordonnance du juge de la mise en état.

- la débouter de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner en tous les dépens tant de première instance que d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par Maître Delphine Héritier, avocat au barreau de Dijon.

Aux termes du dispositif de ses conclusions notifiées le 2 mai 2024, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien de ses prétentions, la SCCV Immo Novarea demande à la cour, au visa notamment de l'article 789 du code de procédure civile, de la norme AFNOR NF P 03-00 , et de l'article 377 du code de procédure civile, de :

- confirmer l'ordonnance dont appel en toutes ses dispositions,

A titre incident, et subsidiairement,

Statuant à nouveau,

- surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport de Mme Isabelle Guingand et de l'issue de la conciliation ordonnée par ordonnance du 15 juillet 2020 (RG 2020002469),

En tout état de cause,

- condamner la SNCTP aux entiers dépens de la procédure d'appel et à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la SNCTP de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, présentée à son encontre.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mai 2024 juste avant l'ouverture des débats.

MOTIVATION

- Sur la fin de non recevoir tirée de l'absence de procédure de conciliation ou de médiation obligatoire avant la saisine du juge du fond

Au soutien de la fin de non recevoir qu'elle soulève, la SC SCCV Immo Novarea se prévaut du fait que le marché de travaux souscrit entre les parties le 29 novembre 2017 renvoie expressément à la norme AFNOR NF P 03-001 du 20 octobre 2017 dont l'article 21-2 consacré au règlement des contestations débute comme suit : ' Les différends relatifs à la validité, à l'interprétation, l'inexécution ou la résiliation du marché, seront soumis, préalablement à toute action en justice, à une médiation ou à une conciliation.'

Il est en l'espèce certain que la SNCTP a saisi le tribunal judiciaire de Dijon sans avoir préalablement effectivement mis en oeuvre une mesure de médiation ou de conciliation.

Toutefois, il résulte de l'ordonnance de référé du 15 juillet 2020 que le président du tribunal de commerce de Dijon a confié, à l'expert qu'il a désigné, la mission de tenter de concilier les parties, sur la base d'une proposition élaborée par ses soins.

S'il est exact que l'article 240 du code de procédure civile interdit au juge de donner une telle mission à l'expert, force est de constater :

- d'une part qu'aucune des parties n'a interjeté appel de l'ordonnance du 15 juillet 2020

- d'autre part que les parties ont accepté le calendrier fixé par l'expert, ce dernier indiquant dans la note aux parties n° 8 datée du 1er février 2014 avoir 'accepté, dans le souci de favoriser les démarches amiables et fort de la participation ( ...) de l'expert/médiateur [M] [F], de prolonger des délais d'échanges (...)', une réunion en présentiel aux fins de tenter une conciliation ayant été fixée le 15 octobre 2024.

Dans ces circonstances, il y a lieu de retenir que des démarches préalables de conciliation consécutives à la mesure d'expertise ordonnée par le juge des référés ont été engagées avant la saisine du tribunal judiciaire de Dijon.

En toute hypothèse, il convient de rappeler que les textes ou les clauses imposant une procédure préalable de médiation ou de conciliation ne peuvent pas faire obstacle à la mise en oeuvre de mesures provisoires ou conservatoires : cf pour une illustration de ce principe Civ 1ère 24 novembre 2021 n°20-15.789 et alinéa 2 de l'article 2065 du code civil.

Or, en l'espèce, la SNCTP a obtenu du juge de l'exécution de Dijon l'autorisation d'inscrire une hypothèque judiciaire sur l'immeuble de l'intimée. Elle a procédé à cette inscription et a dénoncé le tout à l'intimée qui n'a pas contesté cette mesure conservatoire.

Eu égard aux dispositions de l'article R. 511-7 du code des procédures civiles d'exécution, la SNCTP devait introduire son action en paiement dans le mois suivant l'inscription de l'hypothèque judiciaire, à peine de caducité de cette mesure conservatoire.

Il ne peut donc pas en l'espèce lui être opposé la fin de non recevoir tirée de l'absence de procédure préalable de conciliation ou de médiation, sauf à lui interdire de mettre en oeuvre la mesure conservatoire pourtant autorisée par le juge de l'exécution.

En conséquence, l'ordonnance dont appel doit être infirmée en ce qu'elle a accueilli la fin de non-recevoir soulevée par la société Immo Novarea.

- Sur la demande de sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise

Cette demande émane des deux parties, qui l'avaient déjà présentée au juge de la mise en état.

Il convient de faire droit à leur demande conjointe dès lors que d'une part il n'est pas exclu qu'elles parviennent au cours de l'expertise à mettre fin au litige qui les oppose et que d'autre part si le tribunal judiciaire de Dijon doit statuer sur ce litige, il lui sera utile de disposer du rapport d'expertise.

- Sur les frais de procès

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, les dépens de l'incident devant le juge de la mise en état et les dépens d'appel doivent être supportés par la société Immo Novarea, le bénéfice de l'article 699 du même code étant accordé au conseil de la SNCTP.

Les conditions d'application de l'article 700 du code de procédure civile ne sont réunies qu'en faveur de la société SNCTP. L'équité ne commande pas de faire droit à la demande qu'elle a fondée sur ce texte.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme l'ordonnance du juge de la mise en état du 19 décembre 2023 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Déclare recevable l'action en paiement engagée par la SAS SNCTP à l'encontre de la SCCV Immo Novarea devant le tribunal judiciaire de Dijon,

Ordonne le sursis à statuer dans l'affaire pendante devant le tribunal judiciaire de Dijon dans l'attente du dépôt du rapport de l'expertise ordonnée en référé le 15 juillet 2020 par le président du tribunal de commerce de Dijon,

Condamne la SCCV Immo Novarea aux dépens de l'incident et aux dépens d'appel,

Autorise Maître [C] [I] à recouvrer directement à son encontre ceux dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu provision,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 1re chambre civile
Numéro d'arrêt : 24/00071
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;24.00071 ?
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