[H] [F] [N]
C/
[T] [V]
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE DIJON
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 27 JUIN 2024
N° RG 21/01422 - N° Portalis DBVF-V-B7F-FZ74
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 27 août 2021,
rendue par le tribunal judiciaire de Chalon sur Saône - RG : 19/01043
APPELANT :
Monsieur [H] [F] [N], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de Supérieur de la Congrégation Bouddhiste mixte [X] [C] [L] [G] (KRTL) ayant fait l'objet d'une reconnaissance légale par décret en date du 23 octobre 2002 pris en application de l'article 13 de la loi du 1er juillet 1901.
né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 8] (INDE)
demeurant provisoirement :
Chez Mr [M] [J]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté par Me Elsa GOULLERET, membre de la SELARL ESTEVE GOULLERET NICOLLE & ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 92
assistée de Me Patrice TACHON, membre de la SCP LARDANS - TACHON - MICALEFF, avocat au barreau de MOULINS
INTIMÉ :
Monsieur [T] [V]
né le [Date naissance 2] 1990 à [Localité 7] (INDE)
domicilié :
[Adresse 6]
[Localité 5]
représenté par Me Carine COUILLEROT, membre de la SELARL CARRE JURIS AVOCATS, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
assistée de Me Gaëlle RUSSO, avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 16 novembre 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Marie-Pascale BLANCHARD, Président de Chambre,
Sophie BAILLY, Conseiller,
Leslie CHARBONNIER, Conseiller,
Après rapport fait à l'audience par l'un des magistrats de la composition, la cour, comme ci-dessus composée a délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG,
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 25 Janvier 2024 pour être prorogée au 28 Mars 2024 au 16 Mai 2024 puis au 27 Juin 2024,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Marie-Pascale BLANCHARD, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PRETENTIONS
La congrégation bouddhiste [X] [C] [R] [G] (KRTL) a été constituée le 29 janvier 2002 entre MM [H] [F] [N], [H] [P], [H] [Z] [D] et [H] [W].
Elle a été reconnue par décret du Premier ministre du 23 octobre 2002 et anime un centre bouddhiste à [Localité 10].
Elle est soumise à l'autorité spirituelle des détenteurs de la lignée du bouddhisme tibétain [Y] [E] [X] dirigée par [S] [T] [V] et à la juridiction de l'ordinaire du Comité des Lamas des monastères de [U] et [A] (Inde).
Les membres religieux de la congrégation composent le Chapitre Conventuel.
Le 22 novembre 2001, M [F] [N] a été désigné en qualité de supérieur de cette congrégation par le Comité des Lamas.
Le 15 mai 2017, M. [F] [N] a été révoqué de son poste de supérieur de la congrégation KRTL et exclu de celle-ci.
Après une instance infructueuse devant le juge des référé du tribunal de grande instance de Montpellier visant à le rétablir dans ses qualité de membre et fonctions de supérieur de la congrégation, M. [F] [N] a fait assigner M. [T] [V] devant le tribunal judiciaire de Chalon sur Saône aux fins de voir constater qu'il est le supérieur de la congrégation, dire que sa démission est nulle, ordonner la libération des locaux de la congrégation et indemniser les préjudices.
Par jugement du 27 août 2021, le tribunal judiciaire de Chalon sur Saône a :
- rejeté la demande de M. [F] [N] tendant à lui voir reconnaître la qualité de supérieur de la Congrégation KRTL,
- fait interdiction à M. [F] [N] de se prévaloir de la qualité de supérieur de la Congrégation KRTL,
- rejeté la demande de M. [F] [N] tendant à la libération sous astreinte et à l'expulsion de M. [T] [V], ainsi que de toute personne les occupant de son chef, des lieux de culte de la Congrégation KRTL,
- dit que M. [F] [N] demeure membre de la Congrégation KRTL,
- rejeté la demande de M. [T] [V] tendant à voir interdire à M. [F] [N] de se prévaloir de la qualité de membre de la Congrégation KRTL,
- rejeté la demande de M. [F] [N] tendant à voir annuler l'ensemble des décisions prises par le Chapitre Conventuel de la Congrégation KRTL à compter du 15 mai 2017 au 25 mai 2018,
- annulé les résolutions 1, 3, 5 et 7 de la délibération du Chapitre Conventuel de la Congrégation KRTL en date du 25 mai 2018 et rejeté la demande de M. [T] [V] tendant à la voir déclarer illicite,
- rejeté la demande indemnitaire de M. [F] [N] à l'encontre de M. [T] [V] aux fins d'indemnisation de ses préjudices personnels ;
- rejeté la demande indemnitaire de M. [F] [N] à l'encontre de M. [T] [V] aux fins d'indemnisation des préjudices de la Congrégation KRTL,
- rejeté la demande indemnitaire de M. [T] [V] à l'encontre de M. [F] [N] pour procédure abusive,
- débouté les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,
- dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et rejeté les demandes de MM. [F] [N] et [T] [V] formulée à ce titre,
- condamné MM. [F] [N] et [T] [V] à supporter la part des dépens qu'ils ont, chacun pour leur part, exposés dans le cadre de cette instance,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Suivant déclaration au greffe du 3 novembre 2021, M. [F] [N] a relevé appel de cette décision en ce qu'elle a :
- rejeté la demande de M. [F] [N] tendant à lui voir reconnaître la qualité de supérieur de la Congrégation KRTL,
- fait interdiction à M. [F] [N] de se prévaloir de la qualité de supérieur de la Congrégation KRTL,
- rejeté la demande de M. [F] [N] tendant à la libération sous astreinte et à l'expulsion de M. [T] [V], ainsi que de toute personne les occupant de son chef, des lieux de culte de la Congrégation KRTL,
- rejeté la demande de M. [F] [N] tendant à voir annuler l'ensemble des décisions prises par le Chapitre Conventuel de la Congrégation KRTL à compter du 15 mai 2017 au 25 mai 2018,
- rejeté la demande indemnitaire de M. [F] [N] à l'encontre de M. [T] [V] aux fins d'indemnisation de ses préjudices personnels ;
- rejeté la demande indemnitaire de M. [F] [N] à l'encontre de M. [T] [V] aux fins d'indemnisation des préjudices de la Congrégation KRTL,
- rejeté la demande de M. [F] [N] fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [F] [N] à supporter la part des dépens qu'il a exposés dans le cadre de l'instance.
Prétentions et moyens de M. [F] [N] :
Au terme de ses écritures notifiées par voie électronique le 3 octobre 2023, M. [N] demande à la cour, au visa du décret du 16 août 1901 et de l'article 1240 du code civil, de :
- dire l'appel de [H] [F] [N] recevable et bien fondé ;
- infirmant le jugement,
statuant à nouveau :
- dire et juger qu'il est resté le supérieur légitime de la congrégation KRTL, ainsi que cela a été décidé par la juridiction de l'ordinaire,
- dire et juger que l'exclusion de [H] [F] [N] de la Congrégation KRTL par le Chapitre Conventuel est nulle et de nul effet et n'a pu lui faire perdre la qualité de supérieur de la Congrégation KRTL,
- annuler l'ensemble des décisions prises par le Chapitre Conventuel de la congrégation KRTL depuis le 15 mai 2017 et antérieures au 25 mai 2018,
- ordonner en conséquence à [T] [V] de libérer les lieux de culte de la congrégation KRTL qu'il occupe illégalement, soit personnellement, soit par personne interposée, ce sous peine d'une astreinte de 1.500 euros par jour de retard passé un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir,
- ordonner en tant que de besoin l'expulsion de [T] [V] des lieux de culte de la congrégation KRTL et de toute personne les occupant de son chef,
- condamner [T] [V] à porter et payer à [H] [F] [N] la somme de 15.000 euros en réparation de son préjudice personnel ;
- condamner [T] [V] à porter et payer à [H] [F] [N] en sa qualité de supérieur de la Congrégation KRTL la somme de 15.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
- dire non fondé l'appel incident formé par [T] [V] ;
- dire et juger régulières les décisions prises par le Chapitre Conventuel de la ongrégation KRTL dans sa réunion du 25 mai 2018 ;
- condamner [T] [V] à porter et payer à [H] [F] [N] et à la Congrégation KRTL la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance ;
- condamner [T] [V] à porter et payer à [H] [F] [N] et à la Congrégation KRTL la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;
- condamner [T] [V] aux dépens tant de première instance que d'appel.
Au soutien de ses demandes, M. [N] se prévaut de la décision prise le 4 mai 2018 par le Comité des Lamas des monastères de [U] et [A] (Inde) auquel il a soumis le litige, par laquelle il a été confirmé dans ses fonctions de supérieur de la congrégation et considère que cette décision s'impose aux juridictions civiles françaises, cette instance ayant accepté d'assurer la juridiction de l'ordinaire de la congrégation et sa décision ne heurtant pas l'ordre public interne.
Il soutient que cette soumission à cette juridiction de l'ordinaire constituant une formalité indispensable à la reconnaissance légale de la congrégation, il est indifférent que les statuts n'en fassent pas mention.
Il conteste que la décision puisse constituer un faux et fait valoir que le différent l'opposant à la congrégation relève de la compétence de cette juridiction de l'ordinaire, que la révocation des lamas la composant, alléguée par l'intimé, est postérieure à sa décision.
A titre subsidiaire, il considère que les décisions de révocation et d'exclusion prises à son encontre sont illégales aux motifs que :
- le chapitre conventuel de la congrégation n'a pas été régulièrement convoqué,
- les droits de la défense n'ont pas été respectés.
Il relève que l'autorité spirituelle n'a pas exercé son pouvoir de révocation mais simplement entériné la décision irrégulière du chapitre conventuel auquel les statuts ne conféraient pas ce pouvoir.
Prétentions et moyens de M. [T] [V] :
Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 octobre 2023, M. [V] entend voir au visa de la loi du 1er juillet 1901, du décret n°2007-807 du 11 mai 2007, des articles 1103, 1241 et 1984 et suivants du code civil :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Chalon-sur-Saône le 27 août 2021 en ce qu'il a :
rejeté la demande de M. [F] [N] tendant à lui voir reconnaître la qualité de supérieur de la congrégation KRTL ;
fait interdiction à M. [F] [N] de se prévaloir de la qualité de supérieur de la congrégation KRTL ;
rejeté la demande de M. [F] [N] tendant à la libération sous astreinte et à l'expulsion de M. [T] [V], ainsi que de toute personne les occupant de son chef, des lieux de culte de la congrégation KRTL ;
dit que M. [F] [N] demeure membre de la congrégation KRTL ;
rejeté la demande de M. [T] [V] tendant à voir interdire à M. [F] [N] de se prévaloir de la qualité de membre de la congrégation KRTL ;
rejeté la demande de M. [F] [N] tendant à voir annuler l'ensemble des décisions prises par le chapitre conventuel de la congrégation KRTL à compter du 15 mai 2017 au 25 mai 2018 ;
annulé les résolutions 1, 3, 5 et 7 de la délibération du chapitre conventuel de la congrégation KRTL en date du 25 mai 2018 ;
rejeté la demande indemnitaire de M. [F] [N] à l'encontre de M. [T] [V] aux fins d'indemnisation de ses préjudices personnels ;
rejeté la demande indemnitaire de M. [F] [N] à l'encontre de M. [T] [V] aux fins d'indemnisation des préjudices de la congrégation KRTL ;
débouté les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires ;
ordonné l'exécution provisoire de la décision.
- dire l'appel incident de l'intimé recevable et bien fondé ;
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Chalon-sur-Saône le 27 août 2021 en ce qu'il a :
rejeté, pour le surplus, la demande de M. [T] [V] de voir déclaré illicite et nulle l'ensemble des décisions prises par le chapitre conventuel du 25 mai 2018.
rejeté la demande indemnitaire de M. [T] [V] à l'encontre de M. [F] [N] pour procédure abusive ;
dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et rejeté les demandes de Messieurs [F] [N] et [T] [V] formulées à ce titre ;
condamné Messieurs [F] [N] et [T] [V] à supporter la part des dépens qu'ils ont, chacun pour leur part, exposés dans le cadre de cette instance,
statuant à nouveau :
- annuler l'ensemble des délibérations du chapitre conventuel de la Congrégation KRTL en date du 25 mai 2018 en ce qu'il est irrégulièrement convoqué ;
- condamner M. [F] [N] au versement d'une somme de 500 euros au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- condamner M. [F] [N] à payer à l'intimé la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ce qui concerne la procédure de première instance ;
- condamner M. [F] [N] à payer à l'intimé la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ce qui concerne la procédure d'appel ;
- condamner M. [F] [N] aux entiers dépens tant de première instance que d'appel.
M. [V] soutient que la révocation de [F] [N] de ses fonctions de supérieur de la congrégation a été régulièrement prise par l'autorité spirituelle conformément aux statuts et non par le chapitre conventuel.
Il considère que le Comité des Lamas, juridiction de l'ordinaire, n'a ni compétence, ni pouvoirs pour statuer sur cette révocation, sa juridiction ne concernant que les questions de gestion religieuse de la congrégation et que sa décision du 4 mai 2018 est inefficace.
Il relève que les lamas composant ce comité ont tous été révoqués par l'Autorité Spirituelle.
Il fait valoir que le supérieur de la congrégation est titulaire d'un mandat d'administration, révocable ad nutum sans formalités, que le Chapitre Conventuel qui s'est réuni le 15 mai 2017 était régulièrement constitué pour prendre sa décision d'exclusion de M. [N], que les décisions prises à partir du 25 mai 2018 par le Chapitre Conventuel sont irrégulières ce dernier ayant été convoqué par M. [N] au mépris de la décision de révocation de ses fonctions de supérieur de la congrégation.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des moyens des parties.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 17 octobre 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
1°) sur la révocation de [H] [F] [N] :
Les statuts de la congrégation KRTL prévoient dans leur article 4 que le supérieur qui la gouverne est désigné par l'autorité spirituelle pour une durée de 6 ans renouvelable et que ses fonctions prennent fin : « par expiration du mandat, décès, démission ou révocation par l'Autorité Spirituelle ».
L'article 8 de ces mêmes statuts stipule que : « la Congrégation est soumise à l'autorité des détenteurs de la Lignée du bouddhisme tibétain [Y] [E] [X], et plus particulièrement à son Eminence [S] [T] [V] ayant son siège au Monastère de [U] (West Bengal-Inde) sous tutelle actuellement jusqu'à sa majorité du Très Vénérable Bokar [V] ayant son siège au monastère de [9] (...) ».
Il en résulte que seule l'autorité spirituelle dispose du pouvoir de révocation du mandat dont elle a elle-même investi le supérieur désigné et que cette autorité désignée par le statut de la congrégation KRTL est [S] [T] [V].
L'attestation établie le 22 novembre 2001 par le comité des lamas responsables des monastères de [U] et [A], dans le cadre de la demande de reconnaissance légale de la congrégation par le ministère de l'intérieur, confirme que [S] [T] [V] est bien l'autorité spirituelle de la congrégation KRTL.
Si par cette attestation, le Comité des lamas a également déclaré : « prendre la congrégation et ses membres sous sa juridiction », cette déclaration ne peut avoir pour effet de l'investir des pouvoirs dévolus par les statuts à l'autorité spirituelle, mais uniquementde le désigner comme juridiction religieuse dont relèvent les membres de la congrégation.
En conséquence, la décision prise le 15 mai 2017 par [T] [V] de révoquer [H] [F] [N] de son poste de supérieur émane de l'autorité compétente pour y procéder, sans qu'aucun des éléments soumis à la cour ne permettent d'établir que le document établi à cette date soit un faux.
Par déclaration prise le 4 mai 2018, les lamas du Monastère Samdrub Darjay Choling à [U] ont indiqué détenir, en vertu de la juridiction exercée sur la congrégation KRTL, l'entière autorité spirituelle et la responsabilité de gouvernance du centre [Y] [E] [X] de Montepellier, n'avoir jamais donné leur consentement à la révocation de [H] [F] [N] et le confirmer dans ses fonctions de supérieur légitime de la congrégation KRTL.
Si le comité des lamas, en sa qualité de juridiction de l'ordinaire à laquelle est soumise la congrégation, a pu prendre une telle décision, cette dernière, qui n'intéresse que la dimension religieuse de la congrégation ne s'impose pas aux juridictions étatiques qui, dès lors qu'elles se sont saisies du litige, ne peuvent le trancher qu'en application du droit commun laïc.
Or, au regard des dispositions régissant le contrat d'association telles qu'elles résultent de la loi du 1er juillet 1901, les statuts de la congrégation constituent la convention formée entre ses membres et leur tiennent lieu de loi.
La décision de révocation de [H] [F] [N] ayant été prise par l'autorité spirituelle habilitée et désignée par les statuts, elle doit produire son plein effet et le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de [H] [F] [N] tendant à se voir reconnaître la qualité de supérieur de la congrégation.
2°) sur la décision d'exclusion de [H] [F] [N] :
Il résulte de la combinaison des articles 6 et 7 des statuts que l'exclusion des membres de la congrégation relève d'une décision du supérieur avec l'assentiment du chapitre conventuel, exprimé à la majorité absolue de ses membres présents ou représentés, qu'elle ne peut intervenir que pour un motif grave et que l'interessé doit être prélablement appelé pour faire valoir son point de vue devant le supérieur et le chapitre conventuel.
Le 15 mai 2017, le chapitre conventuel de la congrégation a décidé l'exclusion de [H] [F] [N] après : « en avoir longuement discuté » et proposé [H] [P] [O] [I] comme nouveau supérieur.
Si cette décision a été prise en la présence de trois membres sur quatre, et à la majorité absolue des membres présents, il est constant qu'elle émane de l'autorité spirituelle qui ne tirait pas des statuts de la congrégation le pouvoir d'exclusion.
En conséquence, cette décision entachée d'irrégularité est inopposable à [H] [F] [N] qui peut se prévaloir de la qualité de membre de la congrégation.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande tendant à lui interdire de faire usage de cette qualité.
3°) sur la nullité des décisions prises par le chapitre conventuel entre le 15 mai 2017 et le 25 mai 2018 :
Si [H] [F] [N] soutient que ces décisions auraient été frappées de nullité, il ne fait valoir à hauteur d'appel aucun moyen au soutien de cette nullité ce qui conduira la cour à confirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande.
4°) sur la validité des délibérations du chapitre conventuel du 25 mai 2018 :
Le 25 mai 2018, le chapitre conventuel de la congrégation KRTL s'est réuni et a délibéré sur sept résolutions.
L'article 6 des statuts de la congrégation stipule que le chapitre conventuel est réuni sur convocation du supérieur ou sur convocation de plus du tiers de ses membres.
Il résulte des mentions du procès-verbal du 25 mai 2018 que le chapitre conventuel a été convoqué par [H] [F] [N], supérieur, alors qu'à cette date, il avait perdu cette qualité pour avoir été révoqué le 15 mai 2017 par l'autorité spirituelle désignée par les statuts.
Il s'en déduit que la tenue de ce chapitre conventuel est irrégulière, entrainant la nullité des délibérations qui y ont été prises.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a limité la demande de nullité aux résolutions 1,3,5 et 7 et la cour prononcera la nullité de toutes les résolutions adoptées le 25 mai 2018.
5°) sur les demandes indemnitaires :
Aucun des préjudices allégués par [H] [F] [N] tant à titre personnel que pour le compte de la congrégation KRTL, ne se trouvent justifiés ni dans leur principe, ni dans leur montant et le jugement devra en conséquence être confirmé en ce qu'il a rejeté l'intégralité de ces prétentions.
6°) sur l'abus de droit :
Il est de principe que l'exercice d'une action en justice ou d'une voie de recours constitue un droit fondamental qui ne peut dégénérer en abus que par l'effet d'une faute qu'il appartient au demandeur de caractériser.
Au cas particulier, aucun des éléments soumis à la cour par [S] [T] [V] n'est de nature à caractériser une telle faute et la demande de condamnation à des dommages et intéréts ne peut qu'être rejetée. Le jugement sera confirmé de ce chef.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Chalon-sur-Saône en date du 27 août 2021 en ce qu'il a rejeté la demande tendant à voir déclarer illicites toutes les décisions du chapitre conventuel prises le 25 mai 2018,
Statuant à nouveau sur ce seul chef,
Annule toutes les résolutions adoptées le 25 mai 2018 par le chapitre conventuel de la congrégation [X] [C] [R] [G],
Confirme le jugement en tous ses autres chefs de dispositifs soumis à la cour,
Y ajoutant,
Condamne [H] [F] [N] aux dépens de l'instance d'appel,
Rejette les demandes réciproques de condamnation fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,