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20/06/2024 | FRANCE | N°22/00507

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 20 juin 2024, 22/00507


[W] [J]





C/



S.E.L.A.S. PHARMACIE [B]

























C.C.C le 20/06/24 à



-Me GOULLERET



-Me SOULARD



-Me BARRE



















































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE S

OCIALE



ARRÊT DU 20 JUIN 2024



MINUTE N°



N° RG 22/00507 - N° Portalis DBVF-V-B7G-F72L



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DIJON, section EN, décision attaquée en date du 27 Juin 2022, enregistrée sous le n° F 21/00307





APPELANTE :



[W] [J]

[Adresse 4]

[Localité 2]



représentée par Me Els...

[W] [J]

C/

S.E.L.A.S. PHARMACIE [B]

C.C.C le 20/06/24 à

-Me GOULLERET

-Me SOULARD

-Me BARRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 20 JUIN 2024

MINUTE N°

N° RG 22/00507 - N° Portalis DBVF-V-B7G-F72L

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DIJON, section EN, décision attaquée en date du 27 Juin 2022, enregistrée sous le n° F 21/00307

APPELANTE :

[W] [J]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Elsa GOULLERET de la SELARL ESTEVE GOULLERET NICOLLE & ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON

INTIMÉE :

S.E.L.A.S. PHARMACIE [B] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Florent SOULARD de la SCP SOULARD-RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON, Me Charlotte BARRE de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mai 2024 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Olivier MANSION, Président de chambre chargé d'instruire l'affaire et qui a fait rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, président de chambre,

Fabienne RAYON, présidente de chambre,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Juliette GUILLOTIN,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Juliette GUILLOTIN, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Mme [J] (la salariée) a été engagée le 1er juin 2005 par contrat à durée indéterminée, à temps partiel, en qualité de pharmacienne par la société pharmacie [B] (l'employeur).

Elle a été sanctionnée par un avertissement le 23 juillet 2020 et par une mise à pied de trois jours notifiée le 26 janvier 2021.

Elle a démissionné par la suite.

Estimant ces sanctions infondées, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes qui, par jugement du 27 juin 2022, a rejeté toutes ses demandes.

La salariée a interjeté appel le 19 juillet 2022.

Elle demande l'infirmation du jugement, l'annulation des deux sanctions et le paiement des sommes de :

- 536,74 euros de rappel de salaires pour la période de mise à pied,

- 53,67 euros de congés payés afférents,

- 3 639,66 euros de dommages et intérêts,

- 3 639,66 euros de dommages et intérêts,

- 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'employeur conclut à la confirmation du jugement et sollicite le paiement de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties échangées par RPVA les 19 mars et 17 avril 2024.

MOTIFS :

Sur les sanctions :

1°) L'avertissement du 23 juillet 2020 :

La salariée conteste cette sanction et soutient qu'elle se heurte à l'exercice légitime de sa liberté d'expression.

Il est jugé que sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression et que le caractère illicite du motif de la sanction prononcée, même en partie, en raison de l'exercice, par le salarié de sa liberté d'expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité de cette sanction.

Ici, la lettre valant avertissement ne comporte aucun reproche quant à l'exercice de cette liberté.

L'employeur rappelle que le 1er juillet, il a communiqué une note de service relative aux congés payés établie par un cabinet comptable, accompagnée d'une liste d'émargement pour matérialiser la prise de connaissance de cette note.

Le 2 juillet, la salariée a déclaré devant l'équipe qu'elle ne signerait jamais cette note en affirmant : 'je ne signe pas, autant signer son arrêt de mort'.

Puis, la salariée a écrit sur le cahier de transmission, à la suite de cette demande : 'c'est hors de question, je vais voir avec le mien d'avocat ou l'inspecteur du travail'.

Enfin, l'employeur souligne que la salarié a signé ce document le 18 juillet 2020 sans aucune réserve.

Par ailleurs, la lettre précitée indique que la salariée a déclaré que la cabinet comptable gérant les paies était : 'un cabinet nul qui faisait tout le temps des erreurs'.

De plus, elle reproche à la salariée d'avoir écrit une note portant des accusations sans fondement.

Sur le second grief, force est de constater que le reproche ne s'adresse pas à l'employeur mais à un tiers et reste sans incidence sur l'exécution du contrat de travail.

Ce grief ne peut donc fonder une sanction.

Sur le premier point, il convient de relever une attitude contradictoire de la salariée qui après des reproches véhéments sur la note l'a finalement contresignée, sans que la preuve des pressions qu'elle allègue ne soit apportée.

Par ailleurs, il n'appartient pas à la cour d'apprécier 'la légalité' ou la validité de cette note mais seulement l'existence d'un fait matériellement vérifiable justifiant le prononcé d'une sanction.

De plus, il convient de relever, également, que la salariée n'avait aucune obligation d'émerger pour approuver cette note.

Il lui incombait seulement d'exprimer son refus en des termes polis et sans excès ni abus.

Force est de constater que le fait d'écrire qu'elle va en référer à son avocat ou l'inspection du travail n'est pas abusif.

Il en va de même lorsqu'elle déclare que signer cette note c'est signer son arrêt de mort, formule excessive mais non abusive, qui peut facilement s'expliquer par une réaction sur le vif.

Enfin, sur le dernier point, il est reproché à la salariée, après avoir noté, le 18 juillet 2020, sur la feuille 'heure en plus et moins avec accord' le chiffre + 0,5 à la suite de sept dates et d'avoir écrit, après demande d'explication : 'faux, archi faux, plannings faits par vos soins pendant cette période (vous voulez voir les copies ') + nous n'avons rien demandé, journée de chômage imposée aussi, c'est vous qui n'êtes pas en conformité avec la loi pendant cette période. Décidemment quand il s'agit de payer...inutile de déchirer, copie est faite'.

La cour relève qu'il s'agit d'une réclamation portant sur la période de confinement, qu'elle n'a pas à se prononcer sur le bienfondé ou non des heures complémentaires réclamées mais doit seulement apprécier si l'écrit émanant de la salariée à l'aide duquel elle dénonce une absence de conformité à la loi doit ou non être sanctionné.

Par ailleurs, il convient de noter que l'inspection du travail est intervenue, mais postérieurement à ces faits, les 28 et 9 novembre 2021, contestant la validité de la récupération dite heure pour heure, pour les heures supplémentaires et complémentaires dues.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que dans ce contexte, le fait pour la salariée d'écrire que l'employeur n'est pas en conformité avec la loi pour le paiement d'heures supplémentaires sur une période donnée, n'est ni abusif ni excessif et ne constitue pas un comportement fautif devant entraîner une sanction.

L'avertissement sera donc annulé.

Par ailleurs, la salariée demande le paiement de dommages et intérêts fixé à un mois de salaire mais ne démontre pas l'existence d'un préjudice direct, personnel et certain permettant l'indemnisation.

Cette demande sera donc rejetée.

2°) La mise à pied notifiée le 26 janvier 2021 :

Cette sanction résulte, selon la lettre de notification, de la manifestation d'un mécontentement, le 31 décembre 2020, dans l'espace vente et dans l'arrière-boutique en tenant les propos suivants, à l'encontre de la gérante de la pharmacie: 'vous nous infantilisez avec ces post-il collés partout', 'vous avez besoin d'employés qui rampent devant vous', 'vous ne comprenez rien, mais alors rien du tout', 'même [K] maintenant se rebiffe'.

La salariée admet qu'une altercation a eu lieu ce jour-là, mais après la fermeture de l'office à la clientèle et sans présence de celle-ci.

Elle précise que les post-it laissés ne portaient pas sur la nouvelle tarification des masques mais étaient de : 'mièvres recommandations' comme : 'éteindre les écrans et les imprimantes', 'reposer les téléphones sur leurs socles' ou encore 'éteindre la clim' et se reporte à l'attestation de Mme [Z] qui indique que : 'Mme [B] nous prenait pour des imbéciles et mettait des post-it partout'.

Il importe peu que l'altercation ait eu lieu en présence ou non de la clientèle, dès lors qu'il convient seulement d'apprécier si les propos émis et non contestés dans leur teneur justifient ou non la sanction prononcée et non d'examiner si le comportement de Mme [B] est ou non déloyal.

Force est de constater que les propos tenus sont abusifs, peu important les mentions figurant sur les post-it, et ne sont pas justifiés par les reproches ou les récriminations de la salariée.

Cette sanction proportionnée à la faute commise est donc justifiée.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes d'annulation et de paiement de dommages et intérêts corrélatifs.

Sur les autres demandes :

Les demandes formées au visa de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

Chaque partie supportera la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :

- Infirme le jugement du 27 juin 2022 uniquement en ce qu'il rejette la demande d'annulation de l'avertissement du 23 juillet 2020 et en ce qu'il statue sur les dépens;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

- Annule l'avertissement du 23 juillet 2020 ;

Y ajoutant :

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

- Dit que Mme [J] et la société Pharmacie [B] supporteront, chacune, la charge de leurs propres dépens de première instance et d'appel ;

Le greffier Le président

Juliette GUILLOTIN Olivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00507
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.00507 ?
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