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13/06/2024 | FRANCE | N°22/01039

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 13 juin 2024, 22/01039


[R] [L] épouse [M]



C/



SCI LIMMOVA

































































































Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON



2ème chambre civile



ARRÃ

ŠT DU 13 JUIN 2024



N° RG 22/01039 - N° Portalis DBVF-V-B7G-GAMA



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : au fond du 22 juillet 2022,

rendue par le tribunal paritaire des baux ruraux du Creusot - RG : 21/00014







APPELANTE :



Madame [R] [L] épouse [M]

née le 18 Septembre 1972 à [Localité 4] (12)

domiciliée :

[Adresse 1]

[Localité 7]



non comparante, représentée par Me Sophie LITT...

[R] [L] épouse [M]

C/

SCI LIMMOVA

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème chambre civile

ARRÊT DU 13 JUIN 2024

N° RG 22/01039 - N° Portalis DBVF-V-B7G-GAMA

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 22 juillet 2022,

rendue par le tribunal paritaire des baux ruraux du Creusot - RG : 21/00014

APPELANTE :

Madame [R] [L] épouse [M]

née le 18 Septembre 1972 à [Localité 4] (12)

domiciliée :

[Adresse 1]

[Localité 7]

non comparante, représentée par Me Sophie LITTNER-BIBARD, membre de la SCP LITTNER-BIBARD, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE

INTIMÉE :

SCI LIMMOVA

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par M. [N]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 mars 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Marie-Pascale BLANCHARD, Président de chambre,

Leslie CHARBONNIER, Conseiller,

Bénédicte KUENTZ, Conseiller,

Après rapport fait à l'audience par l'un des magistrats de la composition, la cour, comme ci-dessus composée a délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 13 Juin 2024,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Marie-Pascale BLANCHARD, Président de chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par acte sous seing privé du 1er octobre 2016, la SCI Limmova a donné en location à M. [P] [M] et Mme [R] [M] une parcelle A [Cadastre 2] et un bâtiment, sis lieu-dit '[Localité 6]',commune de [Localité 7], pour la période allant du 1er octobre 2016 au 30 septembre 2019, moyennant un loyer annuel de 250 euros payable d'avance et quérable pour la première fois le 1er octobre 2016.

Par lettre recommandée dont réception a été accusée le 22 septembre 2021, la SCI Limmova, par l'intermédiaire de son gérant, M. [U] [N], a notifié à M. et Mme [M] son intention de mettre fin au bail à la date du 30 septembre 2022 et les a mis en demeure de lui régler par chèque la somme de 250 euros et de justifier d'un contrat d'assurance.

Par requête enregistrée au greffe le 1er décembre 2021, Mme [R] [M] a sollicité la convocation de la SCI Limmova devant le tribunal paritaire des baux ruraux du Creusot, aux fins de conciliation, sollicitant que lui soit reconnue la titularité d'un bail à ferme sur la parcelle concernée ayant pris effet le 1er octobre 2016.

L'accusé de réception adressé à la SCI Limmova étant revenu avec la mention 'destinataire inconnu à l'adresse', conformément aux dispositions de l'article 670-1 du code de procédure civile, la demanderesse a fait procéder par voie de citation, délivrée le 04 mars 2022 selon les modalités de l'article 659 du même code.

La SCI Limmova n'a comparu ni à l'audience du 21 mars 2022, au terme de laquelle a été constatée la non-conciliation des parties, ni à l'audience de jugement du 23 mai 2022.

Par jugement du 22 juillet 2022, le tribunal paritaire des baux ruraux du Creusot a :

- déclaré en totalité irrecevable l'action formée par Mme [R] [M],

- condamné Mme [R] [M] aux dépens,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Par déclaration du 12 août 2022, Mme [R] [M] a relevé appel de ce jugement.

Selon conclusions notifiées le 11 octobre 2022, auxquelles elle s'est expressément référée à l'audience, Mme [R] [M] demande à la cour, au visa des articles 16, 542, 562 et 568 du code de procédure civile, de :

- rejetant toutes conclusions contraires,

- annuler le jugement rendu par le tribunal paritaire des baux ruraux du Creusot le 22 juillet 2022,

- évoquer le fond du dossier ;

- juger qu'elle est titulaire d'un bail à ferme ayant pris effet le 1er octobre 2016 relativement à la parcelle cadastrée section A n° [Cadastre 2] sur la commune de [Localité 7],

- juger que le courrier du 18 septembre 2021 par lequel la SCI Limmova entend mettre un terme à l'occupation par elle de la parcelle section A n° [Cadastre 2] sur la commune de [Localité 7], à effet du 30 septembre 2022, est nul et de nul effet,

A titre subsidiaire,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable en totalité l'action entreprise par ses soins à l'encontre de la SCI Limmova et l'a condamnée aux dépens, avec exécution provisoire de droit.

en conséquence,

statuant à nouveau,

- la déclarer recevable en ses demandes dirigées contre la SCI Limmova,

Evoquant le fond,

- juger qu'elle est titulaire d'un bail à ferme ayant pris effet le 1er octobre 2016 relativement à la parcelle cadastrée section A n° [Cadastre 2] sur la commune de [Localité 7],

- juger que le courrier du 18 septembre 2021 par lequel la SCI Limmova entend mettre un terme à l'occupation par elle de la parcelle section A n° [Cadastre 2] sur la commune de [Localité 7], à effet du 30 septembre 2022, est nul et de nul effet,

Ajoutant,

- condamner la SCI Limmova à lui payer la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SCI Limmova aux entiers dépens et autoriser la SCP Cabinet Littner Bibard à les recouvrer directement en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Selon conclusions d'intimé déposées au greffe le 14 novembre 2023 et adressées à Me Littner par lettre recommandée dont réception a été accusée le 06 novembre 2023, conclusions auxquelles elle s'est expressément référée à l'audience, la SCI Limmova demande à la cour de :

- 'constater que le bail du 27 septembre 2016, régulièrement dénoncé, soit rompu avec effet au 30 septembre 2022 et que ledit contrat, signé avec les époux [M], ne peut pas concerner que la seule Mme [L], appelante,

- juger que ledit bail n'est absolument pas un bail à ferme et que l'inscription de Mme [L], en qualité accessoire et très tardive d'éleveuse de poules ne peut pas être admise et qu'elle est seulement un prétexte pour usurper les droits fondamentaux de la SCI Limmova, totalement étrangère à une manoeuvre à tous le moins sournoise,

- décider l'expulsion avec effet immédiat de Mme [L], avec une indemnité journalière jusqu'à la libération des lieux (100 euros pour enfin en terminer),

- noter que la décision de Mme [L] de saisir la justice est le reflet de s'en moquer,

- condamner Mme [L] à lui verser :

pour acquitter la pénalité de 5 000 euros à la 'SAS Sequoia',

pour couvrir le préjudice moral et financier de la SCI Limmova, soit 10 000 euros (dix mille),

pour couvrir ses débours surabondants (article 700 code de procédure civile) : 1 000 euros (mille)',

Lors de l'audience, la cour a interrogé les parties sur l'absence de M. [M] dans la cause et ses conséquences.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 28 mars 2024.

Sur ce la cour

1/ sur la demande visant à voir déclarer nul le jugement déféré

Le premier juge a déclaré la demande de Mme [M] irrecevable au motif que sa seule prétention dans la requête vise à faire qualifier de bail rural le contrat liant les parties, sans que ne soit émis aucun grief à l'endroit de la SCI Limmova en ne contestant pas notamment l'acte par lequel cette dernière a entendu mettre fin audit bail.

Il en a déduit que l'action de Mme [M] était purement déclaratoire et qu'elle n'était sous tendue par aucun intérêt à agir au sens de l'article 31 du code de procédure civile.

Le tribunal a ainsi soulevé d'office une fin de non recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile sans que les observations des parties n'aient été sollicitées de ce chef.

Il en résulte que le jugement déféré ne peut qu'être annulé pour violation des dispositions de l'article 16 du code de procédure civile.

2/ Sur la dévolution de l'entier litige à la cour

En application de l'article 562 du code de procédure civile, lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement pour une autre cause que l'irrégularité de l'acte introductif d'instance, la cour d' appel, saisie du litige en son entier par l'effet dévolutif de l' appel, est tenue de statuer sur le fond de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'évocation.

3/ Sur la recevabilité de l'action

Le seul fait de demander la qualification du contrat en bail à ferme présente un intérêt évident et suffit à constituer une prétention.

Mme [M], qui est cotitulaire du bail, dispose, à la fois de la qualité (preneur à bail) et d'un intérêt à faire qualifier le bail en bail à ferme de sorte que son action est recevable.

4/ Sur la demande en requalification de bail

Mme [L] épouse [M] entend pouvoir bénéficier du statut du fermage soutenant être seule exploitante agricole.

Selon l'article L411-1 du code rural, toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L. 311-1 est régie par les dispositions du présent titre, sous les réserves énumérées à l'article L. 411-2. Cette disposition est d'ordre public.

Le caractère rural du bail se détermine par la commune intention des parties lors de la conclusion du bail.

Ce caractère ne saurait résulter du seul fait qu'il porte sur un bail rural comportant des possibilités de culture s'il ne résulte pas de la commune intention des parties, lors de sa conclusion, que les biens ont été destinés à la production et à l'exploitation agricole.

La charge de la preuve d'un bail statutaire, de son caractère onéreux et d'une manifestation de volonté certaine du propriétaire de mettre son bien à la disposition d'un exploitant agricole incombe à celui qui s'en prévaut.

En l'espèce, selon convention conclue entre les parties le 27 septembre 2016, il a été convenu que :

'1) le preneur accepte de louer la parcelle A [Cadastre 2] sur la commune de [Localité 7], lieudit [Localité 6]' avec un bâtiment qui était à usage agricole dont l'aile droite en regardant la façade était préalablement un logement d'où les plâtres encores visibles.

Il n'y a pas de compteur d'eau, d'électricité, aucune clef aux différentes portes.

2) : du 1er octobre 2016 au 3.09.19.

3) Loyer de 250 euros et payable d'avance (...)'.

Il en résulte qu'au moment de la mise à disposition, les biens n'avaient plus de vocation agricole et Mme [M] de démontre pas qu'elle exerçait une activité agricole à cette même époque.

En effet, le fait qu'elle était inscrite à la MSA en qualité d'éleveuse de poules pondeuses en novembre 2021 ne permet pas de démontrer que la convention conclue en septembre 2016 entre les parties avait pour objet de mettre les biens à la disposition de Mme [M] en vue d'y exercer cette activité ou tout autre activité agricole.

Mme [M] doit en conséquence être déboutée de sa demande visant à voir qualifier la convention conclue entre les parties en bail à ferme et de sa demande subséquente en nullité du congé délivré par la SCI Limmova.

5) Sur la demande reconventionnelle en constatation de résiliation de bail et expulsion des occupants

Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

La demande de la SCI Limmova, qui n'a pas comparu en première instance, tendant à voir constater la résiliation du bail en suite de la délivrance du congé et obtenir l'expulsion des locataires, constitue une défense au fond de sorte qu'elle est recevable à hauteur de cour.

Toutefois, en l'absence de mise en cause de M. [P] [M], cotitulaire du bail, ces demandes sont irrecevables.

6) Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts

En application de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

La SCI Limmova estime avoir subi des préjudices du fait du comportement de Mme [M].

Outre le fait qu'elle ne justifie pas avoir été contrainte de payer l'indemnité prévue au compromis signé avec la SAS Sequoia en l'absence de réitération de la vente concernant la parcelle litigieuse, elle ne démontre pas davantage avoir subi un préjudice moral spécifique s'agissant d'une personne morale.

L'existence d'un préjudice financier n'est pas davantage étayée.

En conséquence, la SCI Limmova doit être déboutée de sa demande d'indemnisation.

7) Sur les demandes accessoires

Mme [M], partie succombante, est condamnée à supporter les dépens de première instance et d'appel.

Partie tenue aux dépens, elle est condamnée à verser à la SCI Limmova la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

La cour,

Annule le jugement déféré,

Statuant à nouveau par l'effet dévolutif,

Déboute Mme [R] [M] de l'ensemble de ses demandes,

Déclare irrecevable la demande reconventionnelle de la SCI Limmova en constatation de la résiliation du bail et expulsion des locataires,

Déboute la SCI Limmova de ses demandes de dommages-intérêts,

Condamne Mme [R] [M] aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne Mme [R] [M] à payer à la SCI Limmova la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/01039
Date de la décision : 13/06/2024
Sens de l'arrêt : Annulation

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;22.01039 ?
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