La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/06/2024 | FRANCE | N°22/00385

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 13 juin 2024, 22/00385


[M] [Z]





C/



Caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or (CPAM)

S.A.R.L. [6]

























C.C.C le 13/06/24 à



-Me



















Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée le 13/06/24 à:



-Me



































RÉPUBLIQU

E FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 13 JUIN 2024



MINUTE N°



N° RG 22/00385 - N° Portalis DBVF-V-B7G-F6ZD



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pole social du TJ de DIJON, décision attaquée en date du 10 Mai 2022, enregistrée sous le n° 20/00181





APPELANT :



[M] [Z]

[Adr...

[M] [Z]

C/

Caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or (CPAM)

S.A.R.L. [6]

C.C.C le 13/06/24 à

-Me

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée le 13/06/24 à:

-Me

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 13 JUIN 2024

MINUTE N°

N° RG 22/00385 - N° Portalis DBVF-V-B7G-F6ZD

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pole social du TJ de DIJON, décision attaquée en date du 10 Mai 2022, enregistrée sous le n° 20/00181

APPELANT :

[M] [Z]

[Adresse 3]

[Localité 4]/ FRANCE

représenté par Maître Nicolas PANIER, avocat au barreau de DIJON

INTIMÉES :

Caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or (CPAM)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Mme [R] [S] (chargée d'audience) munie d'un pouvoir général

S.A.R.L. [6]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Nicolas ROGNERUD de la SELARL AXIOME AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Maître Lisa LAVARINI, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 mars 2024 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme [E] [V], chargé d'instruire l'affaire et qui a fait rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Fabienne RAYON, présidente de chambre,

Olivier MANSION, président de chambre,

Katherine DIJOUX-GONTHIER, conseillère,

GREFFIER : Sandrine COLOMBO, lors des débats, Juliette GUILLOTIN lors de la mise à disposition

ARRÊT : contradictoire,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Fabienne RAYON, présidente de chambre, et par Juliette GUILLOTIN, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. [Z], salarié en tant qu'employé de nuit polyvalent du 20 août 2008 au 26 juillet 2018, au sein de la société [6], qui exploite un hôtel sous l'enseigne commerciale première classe, a transmis à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or (la caisse), une déclaration d'accident du travail datée du 1er août 2018 pour des faits du 9 décembre 2016, en renseignant sur l'activité exercée lors de l'accident : « pliage de linge et surveillance » et sur la nature de l'accident : « insultes, menace de violence physique » ayant provoqué des lésions de nature psychologique sans arrêt de travail, un certificat médical du 13 décembre 2016 étant joint.

Par courrier du 3 octobre 2018, la caisse a notifié à la société sa reconnaissance du caractère professionnel du sinistre déclaré par M. [Z] (le salarié).

Par requête du 29 mai 2020, le salarié a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Dijon aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de la société, lequel, par décision du 10 mai 2022, a :

- déclaré le recours recevable,

- débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes,

- condamné le salarié à verser à la société la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de toute demande plus amples ou contraires et condamné M. [Z] aux dépens.

Par déclaration enregistrée le 9 juin 2022, M. [Z] a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions « n° 2 » reprises oralement à l'audience, il demande de :

- déclarer son appel recevable et bien fondé,

- infirmer le jugement rendu par le pôle social de Dijon le 10 mai 2022 (RG 20/00181) en ce qu'il l'a débouté de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la société qui a contribué à l'accident du travail dont il a été victime dans la nuit du « 9 décembre au 10 2016 » ;

- dire et juger que la société a commis une faute inexcusable qui a contribué à son accident du travail ;

- ordonner une expertise médicale, et désigner tel expert qu'il plaira, aux fins de préciser la nature et l'importance de ses préjudices indemnisables, et notamment déterminer : le taux de majoration de la rente ou du capital attribué, la date de consolidation, le déficit fonctionnel permanent, le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées, la diminution ou perte de chance de promotion professionnelle, le préjudice d'agrément, non seulement pour la répercussion des troubles séquellaires sur les activités de loisir et sportives, mais aussi sur les actes de la vie quotidienne, le déficit fonctionnel temporaire ;

- ordonner dès à présent à la société de verser la somme de 1 000 euros à titre de provision, à valoir sur l'indemnisation de son préjudice ;

- renvoyer l'affaire au pôle social du tribunal judiciaire de Dijon afin qu'il statue sur l'indemnisation du préjudice qu'il a subi après dépôt du rapport d'expertise judiciaire,

- condamner la société aux entiers dépens et à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En substance, le salarié qui expose avoir, dans la nuit du 9 au 10 décembre 2016, subi une agression par un groupe de clients, soutient que la faute inexcusable de la société est de droit, dès lors qu'il avait, six mois plus tôt, signalé le risque clientèle, lors de son entretien individuel avec l'employeur, lequel avait constaté un besoin de développer ses compétences dans la gestion des conflits avec la clientèle, programmant une formation sur ce point par la suite annulée, des clients eux-mêmes ayant, avant l'accident, signalé les situations conflictuelles subies par les salariés. Il argue subsidiairement démontrer la faute inexcusable de la société, l'employeur ayant, au vu de ce qui précède, conscience et connaissance du risque auquel il était exposé sans pourtant prendre les mesures préventives qui s'imposaient, la société ayant par ailleurs manqué à son obligation de sécurité en ne contrôlant pas les identités d'un nombre important de clients à qui, compte tenu de leur état d'ivresse et de leur agressivité, elle aurait dû refuser de donner les clés des chambres et la commande, ajoutant avoir été exposé toute une nuit aux risques, sans intervention de la société et renfort.

Aux termes de ses conclusions « n° 2 » reprises oralement à l'audience la société demande, de :

-confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Dijon le 10 mai 2022, et de,

-rejeter la totalité des demandes du salarié et le condamner à lui payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.

En substance, la société conteste la réunion des conditions de la faute inexcusable irréfragable, le salarié ne versant aux débats aucun justificatif démontrant qu'il l'aurait alertée de l'existence d'un danger grave et imminant avant l'accident et n'avoir commis aucune faute inexcusable, objectant le caractère indéterminé des circonstances de l'accident au vu des différentes versions contradictoires de M. [Z] et, en tout état de cause, soutient avoir adopté les mesures suffisantes à prévenir le risque.

La caisse s'en est rapportée à la décision de la cour.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour l'exposé plus ample des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.

SUR CE :

Sur la présomption de faute inexcusable

Ainsi que le rappelle les premiers juges, le bénéfice de la présomption de faute inexcusable de l'employeur invoquée par le salarié est subordonné en application des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code de travail à la démonstration par ce dernier de :

' l'existence d'un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé,

' l'existence d'une alerte préalable de l'employeur émanant du salariée victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle du comité social et économique,

-la matérialisation de ce risque.

Or c'est par de justes motifs que la cour adopte que les premiers juges ont considéré que le salarié ne rapporte pas la preuve d'avoir alerté son employeur d'un dommage imminent, ni que l'employeur ait été informé d'une quelconque autre façon de l'existence d'un climat général d'insécurité laissant craindre pour la santé et la sécurité des salariés auxquels il n'aurait pas déjà remédié par un dispositif ad hoc.

Aucune présomption de faute inexcusable ne peut par conséquent trouver application laquelle doit par conséquent être écartée.

Sur la faute inexcusable

Il incombe au salarié qui invoque la faute inexcusable de son employeur de rapporter la preuve de ce que celui-ci avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé, et de ce qu'il n'avait pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Si le salarié est peu précis sur les circonstances exactes de l'accident litigieux et varie sensiblement dans ses déclarations, la société mettant en exergue au moins trois versions différentes du salarié, pour autant elles n'apparaissent pas totalement sans lien avec l'accident, dans la mesure où il est acquis aux débats que celui-ci, décrit par le salarié dans la déclaration d'accident produite aux débats par l'employeur, par des « insultes, menace de violence physiques » est au moins en lien avec l'arrivée, dans la nuit du 9 au 10 décembre 2016, d'un groupe de clients agités, qui ont commis de nombreuses dégradations au sein de l'hôtel dans lequel M. [Z] occupait seul, son poste d'employé de nuit.

Toutefois le salarié ne soumet aucun élément nouveau à l'appréciation de la cour et c'est à l'issue d'un examen précis et détaillé des éléments de preuve qui leur étaient soumis que, par des motifs pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont retenu qu'il ne rapporte pas la preuve, ni que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger, aucun climat d'insécurité n'étant démontré au sein de l'hôtel dans le passé, alors que rien ne laissait présager que la réservation acceptée par l'hôtel concernait des supporters de football perturbateurs, qu'aucune mesure au demeurant n'aurait permis d'endiguer les débordements, hormis l'intervention et/ou la crainte des forces de l'ordre, auxquelles a d'ailleurs fait appel le salarié, qui avait reçu l'ordre de sa directrice de l'établissement de s'enfermer dans le local sécurisé prévu à cet effet, M. [Z] s'étant d'ailleurs exécuté, comme le rapporte un autre salarié, M. [P], rencontré le matin du 10 décembre à 6h00 alors qu'il venait prendre son service, qui déclare dans une attestation du 10 juillet 2019, dont la sincérité n'est pas remise en cause par le salarié que : « ['] A mon arrivée, comme d'habitude, nous avons fait le point avec [M], il m'a dit que les clients supporters marseillais la nuit dernière était souls, parlait fort, rigolaient et que leur match de la veille était annulé à cause de la météo. Ils ont aussi pris un extincteur situé devant la réception sur la terrasse. Je lui ai demandé pourquoi ils avaient agi ainsi. [M] m'a répondu « je ne sais pas, je m'en fous de ce qu'ils faisaient dehors, ils étaient sous et de toute façon la porte de la réception était fermée, je n'étais pas en danger. ['] ».

La preuve d'une faute inexcusable de l'employeur n'est donc pas rapportée.

Le jugement déféré sera donc confirmé et le salarié sera débouté de l'ensemble de ses demandes.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La condamnation du salarié prononcée par les premiers juges sur le fondement de l'article 700 sera confirmée sans qu'il y ait lieu de faire application de ces dispositions à hauteur de cour.

Le salarié supportera les dépens de première instance, le jugement déféré étant confirmé, et les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Rejette les demandes présentées à hauteur de cour sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les autres demandes de M. [Z] ;

Condamne M. [Z] aux dépens d'appel.

Le greffier Le président

Juliette GUILLOTIN Fabienne RAYON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00385
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;22.00385 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award