La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/04/2024 | FRANCE | N°22/00619

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 25 avril 2024, 22/00619


[X] [K]





C/



S.A.R.L. SARI SECURITE

























Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée le 25/04/24 à :

-Me SANCHEZ







C.C.C délivrées le 25/04/24 à :

-Me KOVAC

































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBR

E SOCIALE



ARRÊT DU 25 AVRIL 2024



MINUTE N°



N° RG 22/00619 - N° Portalis DBVF-V-B7G-GA56



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Dijon, décision attaquée en date du 30 Août 2022, enregistrée sous le n° F20/00421





APPELANT :



[X] [K]

[Adresse 3]

[A...

[X] [K]

C/

S.A.R.L. SARI SECURITE

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée le 25/04/24 à :

-Me SANCHEZ

C.C.C délivrées le 25/04/24 à :

-Me KOVAC

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 25 AVRIL 2024

MINUTE N°

N° RG 22/00619 - N° Portalis DBVF-V-B7G-GA56

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Dijon, décision attaquée en date du 30 Août 2022, enregistrée sous le n° F20/00421

APPELANT :

[X] [K]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Maître Florian SANCHEZ, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

S.A.R.L. SARI SECURITE

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Fabien KOVAC de la SCP DGK AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Mars 2024 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller chargé d'instruire l'affaire et qui a fait rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Fabienne RAYON, Présidente de chambre,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Jennifer VAL,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Jennifer VAL, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. [X] [K] a été embauché par la société SARI SÉCURITÉ (ci-après société SARI) le 1er juillet 2014 en qualité d'agent de sécurité, niveau III, échelon 2, coefficient 140 de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

Il a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 2 juillet 2021.

Par requête du 24 août 2020, il a saisi le conseil de prud'hommes de Dijon afin d'ordonner la requalification de son contrat à temps partiel en un contrat à temps complet et condamner l'employeur au rappel de salaire afférent, outre un rappel de prime d'ancienneté, de prime d'habillage, de prime d'entretien des tenues.

Par jugement du 29 août 2022, le conseil de prud'hommes de Dijon a accueilli les demandes du salarié.

Par déclaration formée le 14 septembre 2022, M. [K] a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions du 5 mai 2023, l'appelant demande de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a requalifié le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein à compter du 1er juillet 2019 et par conséquent condamné la société SARI à lui payer les sommes suivantes :

- rappel de salaire de base : 22 591,89 euros bruts, outre 2 259,18 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- rappel de prime d'habillage : 311,49 euros bruts,

- rappel de prime d'ancienneté : 445,28 euros bruts,

- rappel d'indemnité d'entretien des tenues : 85,47 euros nets,

- article 700 du code de procédure civile : 1 000 euros nets,

à titre principal,

- requalifier ab initio le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet,

à titre subsidiaire,

- requalifier le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet à compter du 13 août 2017,

en tout état de cause,

- condamner la société SARI à lui payer les sommes suivantes dues depuis temps non couvert par prescription :

* rappel de salaire de base du 24 août 2017 au 2 juillet 2021 : 40 278,23 euros bruts, outre 4 027,82 euros bruts au titre des congés payés afférents,

* rappel de prime d'ancienneté : 657,13 euros bruts,

* rappel de prime d'habillage : 551,88 euros bruts,

* rappel d'indemnité d'entretien des tenues : 104,04 euros nets,

* article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance : 2 000 euros,

* article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel : 2 000 euros,

* 'entiers dépens de première instance et d'appel,

* intérêts à taux légal à compter de la mise en demeure du 18/08/2020,

* ordonner à la société SARI, sous astreinte journalière de 10 euros à compter de la notification de l'arrêt, de lui remettre un bulletin de paie rectificatif, conforme à l'arrêt à intervenir'.

Aux termes de ses dernières conclusions du 13 juillet 2023, la société SARI demande de :

- juger M. [K] mal fondé en son appel et en conséquence le débouter de l'intégralité de ses demandes,

- juger que la société SARI recevable et fondée en son appel incident,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a :

* requalifié le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel de M. [K] en un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet à compter du 1er juillet 2019,

* condamné la société SARI à lui payer les sommes suivantes :

- 22 591,80 euros bruts à titre du rappel de salaire, outre 2 259,18 euros au titre des congés payés afférents,

- 445,28 euros bruts à titre de rappel de prime d'ancienneté,

- 311,49 euros bruts à titre de rappel de prime d'habillage et de déshabillage,

- 85,74 euros à titre de rappel de prime d'entretien des tenues,

- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* précisé que conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil les condamnations prononcées emporteront intérêts au taux légal à compter de la réception de la requête par l'employeur pour les créances de nature salariale, soit le 25 août 2020, à compter du prononcé du jugement pour toutes autres sommes,

* ordonné la remise à M. [K] d'un bulletin de salaire rectifié correspondant aux condamnations prononcées ci-avant, sous astreinte de 10 euros par jour de retard à compter d'un mois après le prononcé du jugement,

* réservé le pouvoir de liquider cette astreinte,

* dit y avoir lieu à exécution provisoire dans les limites de l'Article R 1454-28 du code du travail et fixé la moyenne des salaires des trois derniers mois à 1 606,25 euros,

* débouté la société SARI de l'intégralité de ses demandes,

* condamné la société SARI aux entiers dépens de l'instance,

- débouter M. [K] de l'intégralité de ses demandes,

- le condamner à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel,

à titre subsidiaire,

- le débouter de toute demande supérieure à 16 964,02 euros bruts à titre de rappel de salaire,

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

I - Sur la requalification du contrat de travail à temps partiel en temps complet :

L'article L. 3123-14 du code du travail dispose que le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit mentionnant notamment la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, les modalités selon lesquelles les horaires, pour chaque journée travaillée, sont communiqués par écrit au salarié et les limites dans lesquelles peuvent être effectuées des heures supplémentaires.

A défaut d'écrit ou de ces mentions, le contrat peut être requalifié en contrat à temps complet.

Il en va de même lorsque le salarié est dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail et reste constamment à la disposition de l'employeur.

Il s'agit alors d'une présomption simple supportant la preuve contraire par l'employeur.

M. [K] soutient que deux causes distinctes justifient la requalification à temps complet de son contrat de travail :

- en raison de l'absence d'écrit et d'une durée de travail systématiquement variable, ce qui implique une requalification ab initio,

- en raison des dépassements horaires ayant porté la durée du travail à hauteur d'un temps complet, ce qui implique une requalification a minima dès la première irrégularité.

S'agissant du premier moyen, il indique que :

- il n'a signé aucun contrat écrit, ce qu'il a fait constater par un huissier de Justice (pièce n°9),

- aucune durée de travail fixe n'a jamais été convenue en pratique et dès l'origine de la relation de travail, ses durées de travail mensuelles ont systématiquement varié d'un mois sur l'autre, d'une semaine sur l'autre, et ce dans des proportions très importantes (pièces n°2 à 5 et 15),

et ajoute que pour refuser de requalifier le contrat de travail ab initio, le conseil de prud'hommes a omis de rechercher l'existence d'une durée fixe de travail établie, se limitant à vérifier la condition d'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler alors que les deux conditions sont cumulatives.

S'agissant du second moyen, il indique que sa durée du travail a été portée à hauteur d'un temps complet à plusieurs reprises (du 7 au 13 août 2017 - pièce n°2 pages 3 à 6, du 1er au 7 juillet 2019 - pièce n°4 pages 13 à 14), du 9 au 15 septembre 2019 - pièce n°4 pages 16 à 17, du 21 au 27 octobre 2019 - pièce n°4 pages 18 à 19 et du 11 au 17 novembre 2019 - pièce n°4 pages 20 à 21) et conclut qu'il est fondé à poursuivre la requalification de son contrat en

un temps complet dès la première irrégularité, soit en août 2017.

Il ajoute à cet égard qu'en retenant la semaine du 1er au 7 juillet 2019 comme date de la première irrégularité, le conseil de prud'hommes a commis une erreur manifeste, faisant possiblement application d'une 'sorte de prescription' en considérant que l'irrégularité initiale en août 2017 remontait à plus de trois ans par rapport à la date de sa saisine le 24 août 2020, raisonnement erroné en droit car contraire à l'arrêt du 9 juin 2022 de la Cour de cassation selon lequel le point de départ du délai de prescription n'est pas l'irrégularité invoquée par le salarié mais la date d'exigibilité des rappels de salaire dus en conséquence de la requalification.

La société SARI oppose que :

- s'agissant du premier moyen allégué par le salarié :

* s'il ressort du procès-verbal de constat établi par l'huissier de Justice que seul un contrat à durée déterminée datant de 2012 a été retrouvé dans le dossier de M. [K], c'est parce que son contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel a été, en même temps que d'autres documents administratifs de la société, volé le 21 novembre 2017, fait pour lequel une plainte a été déposée (pièce n°1), ce que M. [K] savait parfaitement. C'est d'ailleurs précisément la raison pour laquelle il a fait établir un procès-verbal de constat ainsi qu'une sommation interpellative puisqu'il savait pertinemment que son employeur serait dans l'impossibilité de remettre un contrat de travail signé le concernant. Mais sur la base des articles 1360 et 1361 du code civil, il convient néanmoins de retenir l'existence d'un tel contrat tel que démontré par un commencement de preuve par écrit, à savoir la durée contractuelle de travail est mentionnée sur les bulletins de paye à hauteur de 60 heures mensuelles jusqu'en mai 2018 puis 80 heures ensuite, le salarié ayant chaque mois perçu une rémunération correspondant à ce volume horaire sans jamais émettre aucune protestation à cet égard. Dès lors, en l'absence de présomption de travail à temps complet, c'est au salarié de démontrer qu'il a travaillé à temps plein complet, ce qui n'est nullement le cas en l'espèce,

* c'est à tort que le conseil de prud'hommes a retenu que l'employeur ne justifiait pas de son impossibilité d'établir un nouveau contrat de travail puisque c'est M. [K] qui a rendu cette régularisation impossible en refusant de lui transmettre son autre contrat de travail (pièces n°2 et 3) alors que cette communication était nécessaire pour avoir connaissance non seulement de la durée de travail mais également, et surtout, de ses horaires, ce d'autant que lorsqu'il s'agissait de choisir, M. [K] privilégiait systématiquement son autre emploi (pièces n°4, 6 et 7). Or le contrat de travail à temps partiel doit impérativement stipuler la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois et si un salarié peut exercer plusieurs activités professionnelles, c'est à la condition que la durée de travail totale ne dépasse pas les durées maximales de travail.

* pour que M. [K] puisse se prévaloir d'un rappel de salaire sur la base d'un temps complet, encore faut-il établir qu'il ait travaillé à temps complet or il ressort de son propre décompte un nombre d'heures travaillées inférieur aux 60 puis 80 heures mensuelles prévues par le contrat de travail ou n'atteignant pas la durée légale de travail à temps complet,

* l'affirmation d'une variation systématique de la durée de travail est contredite ses bulletins de salaire sur lesquels apparaît chaque mois une durée de travail de 80 heures, conformément au contrat de travail et à l'exclusion de toute 'application illégale d'une modulation de son temps de travail avec un lissage de sa rémunération', thèse qu'en tout état de cause il ne démontre pas, l'écrit qu'il allègue émanant de lui et ayant été fait en cours d'instance, donc pour les besoins de la cause,

* la société SARI a fait sommation le 22 avril 2021 à la société FIDUCIAL SECURITE, anciennement PROSEGUR SECURITE, de confirmer l'embauche de M. [K], sa date et la durée du travail et de produire les éléments afférents, ce qui a confirmé la réalité de cet emploi à temps complet depuis le 4 septembre 2013 (pièce n°10). Dès lors, il apparaît particulièrement peu sérieux de la part de M. [K] de prétendre que figureraient sur ses bulletins de salaire des absences injustifiées 'complètement imaginaires', ce d'autant qu'il indiquait chaque mois à la société SARI s'il pouvait ou non se libérer quand ses plannings lui étaient transmis.

* bénéficiant d'une autonomie totale dans l'organisation de son temps de travail pour la société SARI, ce qui ressort des SMS échangés avec son employeur, il ne saurait obtenir la requalification de son contrat à temps partiel en temps complet puisque travaillant à temps plein pour une autre société, il ne peut prétendre s'être tenu constamment à sa disposition.

- s'agissant du second moyen, M. [K] ne peut prétendre à une requalification à temps complet au motif qu'il aurait sur 5 semaines non consécutives réparties sur toute la période d'embauche de plus de 3 ans, travaillé à temps complet. Son propre décompte de juillet 2017 à mai 2020 démontre que le plus souvent il a travaillé bien moins que les 60 heures puis 80 heures mensuelles prévues à son contrat de travail sans jamais atteindre la durée légale de travail. Il ne saurait non plus se prévaloir d'une durée de travail portée au niveau d'un temps complet sur une seule semaine, la jurisprudence qu'il cite n'ayant rien à voir avec la présente affaire. En tout état de cause, sa demande ne peut porter que sur la période à compter du premier dépassement de la durée légale de travail a été dépassée, soit la semaine du 10 juillet 2018.

- travaillant à temps complet pour la société FIDUCIAL SECURITE depuis 2013, la requalification alléguée reviendrait à consacrer une situation illégale de cumul de deux temps complets et le fait que M. [K] a toujours dissimulé qu'il exerçait une autre activité à temps complet a eu pour conséquence de faire perdurer une situation illégale puisque la société SARI n'avait pas connaissance qu'en cumulant ses deux emplois, la durée maximale de travail était en permanence dépassée.

En l'espèce, la réalité d'une relation de travail à durée indéterminée et à temps partiel entre M. [K] et la société SARI à compter du 1er juillet 2014 n'est pas discutée par les parties, lesquelles s'opposent seulement sur la signature éventuelle d'un contrat de travail, M. [K] soutenant que tel n'a pas été le cas tandis que l'employeur soutient que s'il n'est pas en capacité de produire le contrat signé, c'est en raison d'un vol dont il aurait été victime le 21 novembre 2017.

Les moyens de preuve d'un contrat de travail sont par principe soumis aux règles de droit commun et s'agissant du contrat de travail à durée indéterminée, vaut commencement de preuve par écrit les bulletins de paie du salarié ou encore la déclaration préalable à l'embauche, documents émanant de l'employeur, l'écrit n'étant en tout état de cause exigé qu'à titre probatoire et non pour sa validité.

Toutefois, lorsque le contrat de travail est, comme en l'espèce, à temps partiel, il doit nécessairement être écrit et mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. A défaut, il est présumé à temps complet.

A cet égard, il est constant que la société SARI n'est pas en mesure de produire le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel de M. [K], celui-ci contestant même en avoir signé un.

Par ailleurs, s'agissant de la force majeure qu'elle allègue pour justifier de son incapacité à produire le dit contrat, en l'occurrence un vol, la cour relève que la société procède par affirmation. En effet, alors qu'il n'est produit aucun élément de la procédure pénale afférente permettant d'en détailler les termes, le récépissé de dépôt de plainte du 1er décembre 2017 ne comporte aucun élément permettant de confirmer d'une part que la victime du vol est la société SARI, son nom n'étant même pas cité, seule l'identité du plaignant, M. [W], étant mentionnée mais sans qu'il soit fait mention de sa qualité de gérant de la société, et le code NATINF retenu se limite à la mention 'vol commis le 21/11/2017 à 08:00 ENTREPRISE - [Localité 4]".

De plus, ce récépissé ne dresse aucune liste des objets ou documents prétendument volés, ce qui ne permet pas d'établir que la version signée du contrat de travail à durée indéterminée à temps complet de M. [K] en fait partie.

Enfin, la société SARI ne saurait sérieusement se prévaloir d'une quelconque impossibilité de régulariser la situation après ce vol au motif qu'elle a, en vain, réclamé à M. [K] son autre contrat de travail, jusqu'à elle aussi faire intervenir un huissier de Justice pour ce faire, sa première demande en ce sens datant du 11 septembre 2020, soit près de trois années après le prétendu vol et un mois après la requête de M. [K] saisissant le conseil de prud'hommes aux fins de requalification.

Dans ces conditions, nonobstant la production d'une déclaration d'embauche à effet au 7 août 2014 et des bulletins de paye du salarié, en l'absence d'un contrat de travail à temps partiel écrit, l'emploi est présumé à temps complet et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter cumulativement la preuve :

- d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue,

- d'autre part de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et de ce qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

A cet égard, outre l'absence de contrat écrit et donc de toute clause fixant une durée hebdomadaire ou mensuelle de travail, la mention sur les bulletins de paye du salarié de 60 heures mensuelles d'août 2017 à mai 2018 et de 80 heures ensuite ne suffit pas pour établir une durée exacte mensuelle de travail, ce d'autant que la production par M. [K] de ses plannings depuis juillet 2017 démontre que cette durée du travail n'est en réalité pas respectée, celle-ci se révélant très irrégulière et très souvent inférieure ou supérieure aux 60 heures ou 80 heures prétendument convenues (pièces n°2 à 5).

Dans ces conditions, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la question de l'impossibilité pour le salarié de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur, ni sur le moyen tiré de la mise en oeuvre - au demeurant contestée par l'employeur - d'une modulation du temps de travail, la cour considère que ces éléments ne suffisent pas pour établir la durée exacte de travail convenue entre les parties.

Il s'en déduit par infirmation du jugement déféré que l'employeur échoue a renverser la présomption de travail à temps complet, de sorte que le contrat de travail sera requalifié en ce sens à compter du 1er juillet 2014, date admise par les deux parties dans leurs conclusions respectives comme étant la date d'embauche, nonobstant la déclaration d'embauche produite au débat datant l'embauche du 7 août 2014, cette requalification étant sans incidence sur le principe légal d'interdiction de dépassement des durées maximales de travail.

Du fait de la requalification, et sur la base d'un taux horaire de 10 euros d'août 2017 à février 2018, 10,1997 euros de mars 2018 à février 2019, 10,3221 euros de mars 2019 à avril 2020 et 10,5904 euros de mai 2020 à juin 2021, pour 151,67 heures de travail mensuelles, M. [K] sollicite à titre de rappel de salaire la somme de 40 278,23 euros, outre 4 027,82 euros au titre des congés payés afférents.

La société SARI conclut au rejet de toutes les demandes pécuniaires fondées sur la demande de requalification.

A titre subsidiaire, elle oppose que la demande de rappel de salaire ne peut en tout état de cause porter sur la période antérieure à juillet 2019 en raison de la prescription triennale à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible. Et dans la mesure où le salarié a saisi le conseil de prud'hommes le 24 août 2020, donc avant sa prise d'acte du 2 juillet 2021, il ne peut réclamer un rappel de salaire que pour la période postérieure au 24 août 2017. Par conséquent, c'est une somme maximale de 22 184,75 euros bruts qui devrait lui être allouée.

En application des dispositions de l'article L.3245-1 du code du travail, le délai de prescription de l'action en paiement ou en répétition de salaire est de 3 ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut alors porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour où, si le contrat de travail a été rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat de travail.

La demande de rappel de salaire fondée sur la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise à la prescription triennale de l'article L 3245-1 du code du travail.

Dans la mesure où la saisine du conseil des prud'hommes le 24 août 2020 a interrompu la prescription, soit antérieurement à sa prise d'acte de la rupture, le salarié est en droit de réclamer des sommes au titre des rappels de salaire pour la période allant du 24 août 2017 au 24 août 2020, ce qui est conforme à sa demande à hauteur de cour puisque son décompte porte précisément sur la période du 24 août 2017 au mois de juin 2021, date de la rupture.

Compte tenu des pièces produites, il sera alloué à M. [K] la somme de 40 278,23 euros à titre de rappel de salaire, outre 4 027,82 euros au titre des congés payés afférents.

II - Sur les autres demandes afférentes :

a) - Sur la prime d'ancienneté :

Au visa du chapitre V c de la convention collective applicable, M. [K] soutient que la prime d'ancienneté qui lui a été versée (2% à compter de la 4 ème année d'ancienneté jusqu'à sept années) depuis juillet 2018 a été calculée sur la base d'un temps partiel. (pièce n°10).

Au titre de la requalification à temps complet, il sollicite un rappel de prime d'ancienneté à hauteur de 657,13 euros selon décompte figurant dans ses conclusions

La société SARI conclut au rejet de toutes les demandes pécuniaires fondées sur la demande de requalification et ne formule aucune observation quant au décompte du salarié.

Il résulte des développements qui précèdent et des pièces produites que le rappel de prime d'ancienneté sollicité est justifié. Il sera donc alloué à M. [K] la somme de 657,13 euros à ce titre, le jugement déféré étant infirmé sur ce point.

b) Sur la prime d'habillage et déshabillage :

Rappelant qu'une prime conventionnelle d'habillage et de déshabillage d'un montant de 19,82 euros est accordée aux employés devant porter un uniforme (pièce n°8) mais que la prime qui lui a été versée a été calculée sur la base d'un temps partiel (pièce n°7), M. [K] sollicite la somme de 551,88 euros à titre de rappel selon décompte figurant dans ses conclusions.

La société SARI conclut au rejet de toutes les demandes pécuniaires fondées sur la demande de requalification et ne formule aucune observation quant au décompte du salarié.

Il résulte des développements qui précèdent et des pièces produites que le rappel de prime d'habillage et déshabillage sollicité est justifié. Le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point et il sera alloué à M. [K] la somme de 551,88 euros à ce titre.

c) - Indemnité d'entretien des tenues :

Rappelant que l'accord de branche du 31 août 2018 a instauré à compter du mois de mars 2019 une indemnité d'entretien des tenues de 7 euros nets par mois comptabilisée 11 mois sur 12 et qui ne se confond pas avec la prime d'habillage et de déshabillage (pièce n°13), M. [K] soutient que la prime qui lui a été versée a été calculée sur la base d'un temps partiel et sollicite en conséquence la somme de 104,04 euros à ce titre.

La société SARI conclut au rejet de toutes les demandes pécuniaires fondées sur la demande de requalification et ne formule aucune observation quant au décompte du salarié.

Il résulte des développements qui précèdent et des pièces produites que le rappel de prime d'entretien des tenues sollicité est justifié. Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a alloué à M. [K] la somme de 85,74 euros à ce titre.

III - Sur les demandes accessoires :

- Sur la remise documentaire :

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a ordonné à la société SARI de remettre à M. [K] un bulletin de salaire rectifié correspondant aux condamnations prononcées.

En revanche, les circonstance de l'espèce ne justifient pas que cette condamnation soit assortie d'une astreinte. La demande à ce titre sera donc rejetée, le jugement déféré étant infirmé sur ce point.

- Sur les intérêts au taux légal :

Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Il sera dit que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société SARI de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Le jugement déféré sera confirmé sur ces points.

La société SAR sera condamnée à payer à M. [K] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

La demande de la société SARI au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel sera rejetée,

la société SARI succombant, elle supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement rendu le 29 août 2022 par le conseil de prud'hommes de Dijon, sauf en ce qu'il a :

- condamné la société SARI SÉCURITÉ à payer à M. [X] [K] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à la société SARI SÉCURITÉ de remettre à M. [X] [K] un bulletin de salaire rectifié correspondant aux condamnations prononcées,

- condamné la société SARI SÉCURITÉ aux entiers dépens de l'instance,

- rejeté la demande de la société SARI SÉCURITÉ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,

REQUALIFIE le contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet à compter du 1er juillet 2014,

CONDAMNE la société SARI SÉCURITÉ à verser à M. [X] [K] les sommes suivantes :

- 40 278,23 euros à titre de rappel de salaire, outre 4 027,82 euros au titre des congés payés afférents,

- 657,13 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté,

- 551,88 euros à titre de rappel de prime d'habillage et déshabillage,

- 104,04 euros à titre de rappel de prime d'entretien des tenues,

- 1 500 au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

DIT que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société SARI de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt.

REJETTE la demande d'astreinte,

REJETTE la demande de la société SARI SÉCURITÉ au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

CONDAMNE la société SARI SÉCURITÉ aux dépens d'appel,

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024, signé par M. Olivier MANSION, président de chambre et Mme Jennifer VAL, greffier.

Le greffier Le président

Jennifer VAL Olivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00619
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;22.00619 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award