SB/LL
[N] [R]
C/
[B] [T]
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE DIJON
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 13 JUIN 2023
N° RG 22/00358 - N° Portalis DBVF-V-B7G-F5CJ
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : jugement du 03 décembre 2021,
rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chalon sur Saône
RG : 11-20-222
APPELANT :
Monsieur [N] [R]
né le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 8] (71)
[Adresse 5]
[Localité 6]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2021/7308 du 10/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Dijon)
représenté par Me Florence DELHAYE, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 77
INTIMÉ :
Monsieur [B] [T]
né le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 7] (ESPAGNE)
[Adresse 4]
[Localité 6]
représenté par Me Frédéric HOPGOOD, membre de la SELARL HOPGOOD & ASSOCIES, avocat au barreau de [Localité 6]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 avril 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Sophie BAILLY, Conseiller, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :
Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre,
Sophie DUMURGIER, Conseiller,
Sophie BAILLY, Conseiller,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Sylvie RANGEARD,
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 06 Juin 2023 pour être prorogée au 13 Juin 2023,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre, et par Aurore VUILLEMOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par acte sous seing privé du 28 mai 2010, M. [V] [T] a donné à bail à M. [N] [R], son petit-fils un appartement situé [Adresse 5] à [Localité 6] moyennant un loyer mensuel de 100 euros outre une provision mensuelle sur charges de 15 euros.
M. [V] [T] est décédé le [Date décès 3] 2010 en laissant pour recueillir sa succession ses trois enfants :
- Mme [L] [T] épouse [R], mère de M. [N] [R],
- Mme [D] [T],
- M. [B] [T].
Le 28 février 2020, M. [B] [T] a présenté au juge des contentieux de la protection de [Localité 6] une requête afin qu'il soit enjoint à M. [N] [R] de lui remettre les justificatifs de l'entretien de la chaudière de l'appartement dont il est locataire et ce avant le 30 mars 2020, outre la somme de 800 euros à titre de dommages et intéréts en cas d'inexécution.
Par ordonnance du 17 mars 2020, il a été enjoint à M. [N] [R] de justifier de l'entretien de la chaudière avant le 30 avril 2020, l'affaire étant renvoyée à l'audience du 26 mai 2020 à défaut d'exécution dans le délai fixé.
M. [R] ne s'est pas exécuté.
M. [B] [T] a demandé au juge des contentieux et de la protection de [Localité 6] de condamner M. [N] [R] :
- à lui remettre l'attestation d'entretien de la chaudière du logement établie par le professionnel mandaté à cette fin pour les années 2015 à 2020, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- au paiement de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- aux dépens et au paiement de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
En défense, M. [N] [R] demandait :
- à titre principal, de déclarer la demande de M. [B] [T] irrecevable, le demandeur n'ayant pas qualité pour émettre des prétentions en son nom propre,
- à titre subsidiaire, de débouter M. [B] [T] de ses demandes car elles ne sont formulées sur aucun texte,
- En tout état de cause,
o De condamner M. [B] [T] à lui payer la somme de 800 euros de dommages et intéréts en réparation du préjudice moral né de cette action abusive,
o De condamner M. [B] [T] aux entiers dépens,
o D'ordonner l'exécution provisoire.
Par jugement du 3 décembre 2021, le juge des contenteiux de la protection du tribunal judiciaire de [Localité 6] a :
- rejeté la fin de non-recevoir émise par M. [N] [R],
- déclaré l'action de M. [B] [T] recevable, au motif que son action était un acte conservatoire qu'il peut effectuer seul en sa qualité d'indivisaire dans la succession de M. [V] [T],
- débouté M. [B] [T] de toutes ses prétentions, sauf celle formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [N] [R] à payer à M. [B] [T] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté M. [N] [R] de toutes ses prétentions,
- condamné M. [N] [R] aux dépens,
- dispensé totalement M. [B] [T] du remboursement de l'aide juridictionnelle octroyée à M. [N] [R], et ce conformément à l'article 43 de la loi du 10 juillet 1991 et pour des raisons d'équité,
- rappelé que la décision est de droit exécutoire à titre provisoire.
Par déclaration du 16 mars 2022 M. [N] [R] a relevé appel de ce jugement en ce qu'il l'a débouté de toutes ses prétentions et en ce qu'il l'a condamné aux dépens et à payer à M. [B] [T] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses conclusions notifiées le 26 août 2022, M. [N] [R] demande à la cour de :
- Déclarer M. [T] mal fondé en son appel incident, et le débouter de l'intégralité de ses demandes,
- Le dire et juger recevable et bien fondé en son appel partiel,
- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] [T] de sa demande de délivrance des attestations annuelles d'entretien de la chaudière sous astreinte et de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- Réformer le jugement pour le surplus et statuant de nouveau,
- Débouter M. [B] [T] de l'intégralité de ses demandes y compris sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens.
- Condamner M. [R] à payer à M. [T] une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de Procédure Civile ;
- Condamner M. [R] aux dépens de première instance et d'appel.
Par ses conclusions notifiées le 26 juillet 2022, M. [B] [T] demande à la cour de :
- Débouter M. [R] de son appel.
- Confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir émise par M. [N] [R] et déclarer son action recevable, en ce qu'il a condamné M. [N] [R] aux dépens et à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il l'a dispensé du remboursement de l'aide juridictionnelle octroyée à M. [N] [R],
Et faisant droit à son appel incident, l'infirmer pour le surplus, et statuant à nouveau,
- Condamner M. [N] [R] à lui remettre les attestations d'entretien de la chaudière du logement sis [Adresse 5] pour les années 2015 à 2020, sous une astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt,
- Condamner M. [N] [R] à lui verser une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- Condamner M. [N] [R] à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner M. [N] [R] aux dépens de première instance et d'appel.
Il est renvoyé aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé des moyens des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 mars 2023.
MOTIVATION
- Sur la délivrance par M. [R] des attestations d'entretien annuel de la chaudière sous astreinte et la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive
Par acte du 14 avril 2022, un acte de liquidation et de partage au sein de l'étude notariale Jeannin-Viellard-Canova, notaires à [Localité 6] a mis fin à l'indivision successorale, l'appartement situé [Adresse 5] étant attribué à Mme [L] [R].
M. [R] invoque les dispositions de l'article 883 du code civil lequel dispose que « chaque cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les effets compris dans son lot, ou à lui échus sur licitation, et n'avoir jamais eu la propriété des autres effets de la succession.
Il en est de même des biens qui lui sont advenus par tout autre acte ayant pour effet de faire cesser l'indivision. Il n'est pas distingué selon que l'acte fait cesser l'indivision en tout ou partie, à l'égard de certains biens ou de certains héritiers seulement.
Toutefois, les actes valablement accomplis soit en vertu d'un mandat des coïndivisaires, soit en vertu d'une autorisation judiciaire, conservent leurs effets quelle que soit, lors du partage, l'attribution des biens qui en ont fait l'objet ».
M. [T] n'oppose aucun argument juridique au moyen soutenu par l'appelant au visa du texte précité pour solliciter la confirmation du jugement l'ayant débouté de sa demande de délivrance des attestations annuelles d'entretien de la chaudière et consécutivement de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
M. [T] ne détenant plus aucun droit de propriété sur l'immeuble donné à bail, qui a été attribué à Mme [L] [R] devenue seule bailleresse, il doit être débouté de sa demande d'infirmation de ces chefs du jugement, étant observé en outre que Mme [R] a attesté le 26 mai 2020 que M. [N] [R] avait souscrit un contrat d'entretien annuel pour la chaudière de l'appartement sis [Adresse 5] à [Localité 6].
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté M. [T] de ses prétentions.
- Sur les frais de procès
' Sur les dépens
Selon l'article 696 du code de procédure civile, La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. / Les conditions dans lesquelles il peut être mis à la charge d'une partie qui bénéficie de l'aide juridictionnelle tout ou partie des dépens de l'instance sont fixées par les dispositions de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et du décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020.
Alors même que M. [T] était débouté de ses demandes, le premier juge a condamné M. [N] [R] aux dépens au motif qu'il était 'incapable de démontrer avoir rempli l'obligation annuelle d'entretien de la chaudière en cause et ne l'emportait que sur une carence procédurale de son adversaire'.
M. [N] [R] demande l'infirmation de cette disposition.
Dans les circonstances particulières de l'espèce, et alors que le procès est la chose des parties, la cour ne déroge pas à la règle prescrite par l'article 696 du code de procédure civile et condamne M. [T] aux dépens de première instance et d'appel.
En application de l'article 43 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991, M. [T] est tenu de rembourser au Trésor public les sommes avancées par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle accordée à M. [R], sauf dispense qu'il y a lieu en l'espèce, pour des raisons d'équité, de lui accorder seulement en ce qui concerne les sommes avancées en première instance.
' Sur l'article 700 du code de procédure civile
Les conditions d'application de cet article ne sont réunies qu'en faveur de M. [N] [R].
M. [R] étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle à 100 %, il ne justifie pas avoir exposé des frais non compris dans les dépens et son conseil n'a pas présenté de demande sur le fondement des articles 700 du code de procédure civile et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
En toute hypothèse, dans les circonstances particulières de l'espèce, l'équité conduit la cour à laisser à la charge de M. [R] l'ensemble des éventuels frais non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [B] [T] de sa demande de délivrance des attestations annuelles d'entretien de la chaudière et de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Infirme le jugement pour le surplus de ses dispositions critiquées,
Statuant à nouveau et ajoutant,
Condamne M. [B] [T] aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle,
Dispense toutefois M. [T] de rembourser au Trésor public les sommes avancées par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale accordée à M. [N] [R] en première instance,
Dit n'y avoir lieu à aucune application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,