LC/IC
S.A.R.L. NEGOCE TRANSPORTEUR CORREZE (NTPC)
C/
S.A.R.L. ENTREPRISE SEZER
S.A. PACIFICA
S.A.R.L. FMS
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE DIJON
2ème chambre civile
ARRÊT DU 11 MAI 2023
N° RG 21/00881 - N° Portalis DBVF-V-B7F-FXQW
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 28 juin 2021,
rendue par le tribunal de commerce de Chalon sur Saône - RG : 19/000850
APPELANTE :
S.A.R.L. NEGOCE TRANSPORTEUR CORREZE (NTPC) agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège social sis :
[Adresse 7]
[Localité 1]
représentée par Me Florent SOULARD, membre de la SCP SOULARD-RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 127
assisté de Me Nicolas MULLER, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES :
S.A.R.L. ENTREPRISE SEZER représentée par la SAS Jean-Jacques DESLORIEUX agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire selon jugement du tribunal de commerce de CHALON SUR SAONE domicilié [Adresse 2], agissant par ses représentants légaux domiciliés au siège social sis :
[Adresse 3]
[Localité 6]
S.A. PACIFICA
[Adresse 5]
[Localité 4]
représentées par Me Sophie LITTNER-BIBARD, membre de la SCP LITTNER-BIBARD, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
S.A.R.L. FMS agissant par ses représentants légaux en exercice domiciliés ès qualités au siège social sis :
[Adresse 11]
[Localité 8]
représentée par Me Carine COUILLEROT, membre de la SELARL CARRE JURIS AVOCATS, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
assistée de Me Jean-Marie PERINETTI, membre de la SELARL JURISQUES, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 09 mars 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, Président,
Sophie BAILLY, Conseiller,
Leslie CHARBONNIER, Conseiller, qui a fait le rapport sur désignation du Président,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 11 Mai 2023,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Le 15 juillet 2015, la société Entreprise Sezer, société d'exploitation forestière domiciliée à [Localité 6] (71), a fait l'acquisition d'un débardeur forestier neuf auprès de la société Forêt Matériel Service (FMS) située à [Localité 8] (55), spécialisée dans la vente de matériaux forestiers.
Au mois d'avril 2016, dans le cadre de la garantie contractuelle, cette machine a été transportée auprès de la société FMS afin que certains travaux d'entretien soient effectués.
Le 14 avril 2016, la société FMS a confié à la SARL Négoce Transporteur Corrèze (NTPC) le transport du matériel.
Au cours de cette opération de transport, le débardeur forestier a heurté un pont et a été endommagé.
Une expertise contradictoire a été réalisée le 2 juin 2016 aux établissements JB Méca puis le 17 janvier 2017 à l'agence BCA Expertise.
Dans son rapport définitif du 7 avril 2017, l'expert a estimé le coût de la remise en état à la somme de 16 887,44 euros HT, les frais de transport à 922,50 euros HT, les frais d'immobilisation à 12 800 euros HT sur la période du 14 avril 2016 au 19 avril 2016 et du 1er juin 2016 au 14 juin 2016, soit 16 jours à 800 euros.
Par courrier du 25 septembre 2017, la compagnie Pacifica a d'abord adressé une réclamation à la société NTPC, pour un montant de 30 609,94 euros.
Par courrier du 3 juillet 2018, elle a réclamé à Générali, assureur de la société FMS, la prise en charge des frais à hauteur de 30 609,94 euros.
Par courrier du 15 novembre 2018, Générali, estimant que la société FMS n'avait commis aucune faute, a répondu défavorablement à cette demande.
Par acte d'huissier délivré le 21 février 2019, la société Entreprise Sezer a assigné par-devant le tribunal de commerce de Chalon sur Saône, la société FMS à l'effet de l'entendre condamner, sur le fondement de l'article 1789 du code civil, à payer les sommes de :
- 30 609,94 euros à titre de dommages et intérêts, cette somme devant être majorée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
- 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
La société FMS a conclu au rejet de ces réclamations.
Par acte d'huissier délivré le 22 novembre 2019, la société Entreprise Sezer et son assureur, la SA Pacifica, ont attrait devant le tribunal de commerce de Chalon sur Saone, la SARL Négoce Transporteur Corrèze (NTPC), aux fins de jonction avec l'instance principale, les demandes indemnitaires étant également présentées contre le transporteur.
Par jugement du 7 mars 2021, la société Entreprise Sezer a été placée en liquidation judiciaire et la SAS Jean-Jacques Deslorieux a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.
Par jugement rendu le 28 juin 2021, le tribunal de commerce de Chalon sur Saône a :
- dit que les sociétés Sezer et Pacifica ont démontré qu'elles avaient l'une et l'autre un intérêt légitime à agir,
- rejeté la demande d'application de la prescription annale prévue à l'article L133-6 du code de commerce de la société NTPC,
- rejeté la demande d'application des dispositions de l'article L133-3 du code de commerce de la société NTPC,
- rejeté la demande de la société NTPC concernant l'origine du sinistre,
- dit qu'il n'est pas démontré que la société FMS se serait rendue coupable d'une faute dans le sinistre ayant atteint le débardeur forestier appartenant à la société Sezer,
- débouté la société Sezer de ses demandes à l'encontre de la société FMS sur la base de l'article 1789 du code civil,
- dit que les dommages subis par la société Sezer seront exclusivement supportés par la société NTPC,
- en conséquence,
- condamné la société NTPC à payer à la société Pacifica la somme de 16.390,56 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2019, au titre des dommages matériels,
- condamné la société NTPC à payer à la société Sezer la somme de 496,88 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2019, au titre des dommages matériels,
- condamné la société NTPC à payer à la société Sezer la somme de 8.922,50 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2019, au titre des frais dommages immatériels,
- condamné la société NTPC à payer aux sociétés Sezer et Pacifica la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société NTPC à payer à la société FMS la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société NTPC aux entiers dépens,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
- dit les parties mal fondées quant au surplus de leurs demandes et les en a déboutées respectivement.
La SARL NTPC a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe du 2 juillet 2021.
Au terme de ses conclusions d'appelantes notifiées par voie électronique le 14 décembre 2021, la SARL NTPC demande à la cour, au visa des articles L.132-8 et suivants du code de commerce, de :
- La déclarer recevable et fondée en son appel,
- Réformer le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
- Débouter les sociétés Sezer et Pacifica de toutes leurs demandes lesquelles devront être déclarées irrecevables et subsidiairement mal fondées,
- Les condamner à lui payer la somme de 5 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner les sociétés Sezer et Pacifica aux entiers dépens.
Subsidiairement,
-Dire et juger que l'indemnité pouvant être mise à sa charge ne saurait excéder la somme de 802,73 euros,
- Débouter les sociétés Sezer et Pacifica du surplus de leurs demandes.
- Condamner les sociétés Sezer et Pacifica à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Au terme de leurs conclusions d'intimées et d'appel incident notifiées par voie électronique le 13 décembre 2021, la société PACIFICA et la société Entreprise Sezer, représentée par son liquidateur la SAS Jean-Jacques Deslorieux, demandent à la cour, au visa des articles 1134, 1147 anciens du code civil et l'article 1789 du même code, de :
- Confirmer le jugement critiqué en ce qu'il a :
=$gt; Rejeté les fins de non-recevoir opposées par la société NTPC aux demandes de la SA Pacifica, alors qu'elle était subrogée dans les droits de son assurée, et tirées des dispositions des articles L133-3 et L133-6 du code de commerce,
=$gt; Condamné la société NTPC à payer à Pacifica la somme de 16.390,56 euros outre intérêts aux taux légal à compter du 22 novembre 2019 au titre des dommages matériels,
=$gt; Condamné la société NTPC à payer à la société Sezer, les sommes de 496,88 euros outre intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2019 au titre des dommages matériels et celle de 8 922,50 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2019 au titre des dommages immatériels,
=$gt; Condamné la société NTPC à leur payer la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
=$gt; Condamné la société NTPC aux entiers dépens,
Réformant partiellement le jugement critiqué, en ce qu'il a rejeté les demandes dirigées par la SA Pacifica, subrogée dans les droits de son assuré, contre la société FMS, et en ce qu'il a réduit les demandes indemnitaires de la société Entreprise Sezer,
- Dire et juger que la société FMS a commis une faute et qu'elle doit réparation à la société Entreprise Sezer dans les droits de laquelle la SA Pacifia est subrogée,
- Condamner in solidum, ou celle d'entre elles qui mieux le devra, les sociétés FMS et NTPC à payer à la SA Pacifica les sommes de:
=$gt; 16.390,56 euros outre intérêts aux taux légal à compter du 22 novembre 2019 au titre des dommages matériels,
=$gt; 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,
- Condamner in solidum, ou celle d'entre elles qui mieux le devra, les sociétés FMS et NTPC à payer à la société Entreprise Sezer représentée par son liquidateur, la SAS Jean-Jacques Deslorieux, les sommes de :
=$gt; 14 219,38 euros à titre de dommages et intérêts, cette somme devant être majorée des intérêts au taux légal à compter de la signification de l'assignation initiale, le 22 juillet 2019, et subsidiairement, le 22 novembre 2019,
=$gt; 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,
- Condamner in solidum, ou celle d'entre elles qui mieux le devra, les sociétés FMS et NTPC aux entiers dépens de première instance,
Ajoutant,
- Condamner in solidum, ou celle d'entre elles qui mieux le devra, les sociétés FMS et NTPC à leur payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, devant la cour d'appel,
- Condamner in solidum, ou celle d'entre elles qui mieux le devra, les sociétés FMS et NTPC aux entiers dépens d'appel et autoriser la SCP Cabinet Littner Bibard à les recouvrer directement en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Au terme de ses conclusions d'appelante notifiées par voie électronique le 11 mars 2022, la SARL FMS demande à la cour, au visa des articles 1789 et suivants et du code civil, de :
A titre principal,
- Confirmer purement et simplement la décision dont appel ;
Vu l'absence de toute faute de sa part dans la réalisation des dommages au matériel de la société Sezer,
- Débouter les sociétés Sezer et Pacifica (et toute autre partie à l'instance) de l'intégralité de leurs demandes à son encontre
A titre subsidiaire,
- Et si par impossible la cour devait réformer la décision entreprise et estimait qu'elle avait commis une faute (ce qui n'est aucunement le cas en l'espèce) :
- Rejeter les demandes des sociétés Sezer (représentée par son liquidateur) et Pacifica au titre des frais immatériels et d'immobilisation et limiter sa condamnation au seul préjudice matériel, à savoir la somme maximale de 802,73 euros (et très subsidiairement celle de 16 690,86 euros),
- Rejeter toutes autres demandes des sociétés Sezer (représentée par son liquidateur) et Pacifica,
En tout état de cause :
- Condamner les sociétés Sezer (représentée par son liquidateur) et Pacifica, ou qui mieux le devra, à lui payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure en cause d'appel, la somme de 5 000 euros,
- Condamner la société Sezer (représentée par son liquidateur) et la société Pacifica, ou qui mieux le devra, aux entiers dépens.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties pour un exposé complet de leurs moyens.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 24 janvier 2023.
Sur ce la cour,
Sur la dévolution de la cour
Au terme de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
En application de l'article 954 du même code, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Dans sa déclaration d'appel, la SARL Négoce Transporteur Corrèze ne critique pas le chef de jugement ayant « dit que les sociétés Sezer et Pacifica ont démontré qu'elles avaient l'une et l'autre un intérêt légitime à agir ».
La société FMS n'a pas fait d'appel incident sur cette question.
La cour n'a donc pas à statuer sur la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt que les sociétés Sezer et Pacifica auraient à agir.
Sur les fins de non recevoir tirées de la prescription et de la forclusion
Selon l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai prefix, la chose jugée.
La société NTPC soutient que l'action engagée par la société Sezer à son endroit est prescrite en ce que cette dernière était destinataire des marchandises par son intermédiaire, qu'elle était donc associée au contrat de transport dont elle était partie depuis sa formation de sorte que les dispositions des articles L133-3, L133-5 et L133-6 du code de commerce lui sont applicables, ce que conteste cette dernière.
Elle ajoute qu'en tout état de cause, la procédure mise en 'uvre à son encontre est forclose au regard des dispositions de l'article L133-3 du code de commerce en ce qu'aucune réclamation écrite conforme à ces dispositions ne lui a été adressée dans le délai de trois jours.
Au terme de l'article L132-8 du code de commerce, « la lettre de voiture forme un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier. Le voiturier a ainsi une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport. Toute clause contraire est réputée non écrite. »
En application de l'article L133-6 du code de commerce, « les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d'un an, sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélité.
Toutes les autres actions auxquelles ce contrat peut donner lieu, tant contre le voiturier ou le commissionnaire que contre l'expéditeur ou le destinataire, aussi bien que celles qui naissent des dispositions de l'article 1269 du code de procédure civile, sont prescrites dans le délai d'un an ('). Le délai pour intenter chaque action récursoire est d'un mois. Cette prescription ne court que du jour de l'exercice de l'action contre le garanti. »
L'article L133-3 du code de commerce précise que la réception des objets transportés éteint toute action contre le voiturier pour avarie ou perte partielle si dans les trois jours, non compris les jours fériés, qui suivent celui de cette réception, le destinataire n'a pas notifié au voiturier, par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée, sa protestation motivée.
Il résulte du premier texte que le destinataire d'une marchandise est partie au contrat de transport dès l'origine.
Toutefois, l'article L132-8 n'opère pas de distinction entre le destinataire réel, intermédiaire, final ou de transit, le destinataire garant du prix étant celui qui reçoit la marchandise et l'accepte, que ce soit en l'absence de lettre de voiture ou que son nom figure sur la lettre de voiture en tant que destinataire dès lors qu'il n'indique pas agir pour le compte d'un mandant.
En l'espèce, le transporteur soutient que la société FMS lui a confié en avril 2016 un transport retour au départ de ses établissements [Localité 8] (55) et à destination d'[Localité 6] (71) auprès de la société Sezer tandis que cette dernière affirme que le 14 avril 2016, la société FMS a mandaté ledit transporteur pour récupérer le matériel et le déposer aux établissements JB Meca pour des réparations à réaliser sous garantie.
Comme le soutiennent les sociétés Pacifica et Sezer, la lettre de voiture établie le 14 avril 2016 mentionne «FMS» comme donneur d'ordre et la SARL NTPC comme transporteur.
Si le document ne comporte ni le nom de la société Sezer ni la signature de son représentant à l'emplacement de destinataire, il est néanmoins précisé que le lieu de prise en charge est à [Localité 8] à 7 heures avec un départ à 9 heures et le lieu de destination à [Localité 6] avec une arrivée prévue à 16 heures.
Il résulte des opérations d'expertise que le sinistre s'est produit sur la route départementale 973 entre [Localité 6] et [Localité 9] sous le pont du TGV.
L'expert mandaté par Pacifica précise dans son rapport que suite à l'accident «le transport a été dévoyé» à [Localité 10] auprès de la société JB Meca du fait que le matériel ne pouvait être déchargé du camion en raison des flexibles endommagés.
Puis, une facture a été émise le 30 avril 2016 par Reolon TP à l'attention de l'entreprise Sezer pour le transport du matériel le 19 avril 2016 depuis la société JB Meca à destination de St Prix, lieu d'exploitation de la société Sezer.
Il s'évince de ces éléments que le matériel a été endommagé alors qu'il était transporté à destination de la société Sezer.
Toutefois, le matériel n'a pas été livré en raison d'un accident au cours du transport de sorte que le destinataire n'a pu adhérer au contrat de transport conclu entre la société FMS et la société NTPC et qu'il ne peut se voir opposer la prescription de l'article L133-6 du code de commerce.
Le jugement déféré doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription, l'article L133-6 du code de commerce ne pouvant être opposé à la société Sezer.
Dès lors que la société Sezer n'était pas partie au contrat, le jugement déféré doit également être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'application des dispositions de l'article L133-3 du commerce.
Sur l'origine du sinistre et les responsabilités encourues
Les sociétés Pacifica et Sezer, la dernière étant représentée par son liquidateur, demandent la condamnation in solidum des sociétés FMS et NTPC à réparer les dommages, estimant que la première est présumée fautive et ne saurait être mise hors de cause.
La société FMS soutient qu'elle n'a commis aucune faute estimant que la responsabilité des dommages incombe exclusivement au transporteur qui, pour sa part, entend voir limiter sa responsabilité aux seuls remplacements des flexibles.
Il résulte du rapport d'expertise amiable et contradictoire que «le matériel a été endommagé par un choc contre un pont lors du transport, le matériel étant confié à la société NTPC mandaté par la société FMS.»
En application de l'article L133-1 du code de commerce, le voiturier est garant de la perte des objets à transporter, hors les cas de la force majeure. Il est garant des avaries autres que celles qui proviennent du vice propre de la chose ou de la force majeure.
Le transporteur, sans contester sa responsabilité, remet en cause l'étendue du préjudice dont se prévaut la société Sezer.
Il résulte de l'article 1789 du code civil, que le locataire d'ouvrage, débiteur des objets qui lui ont été confiés, n'est libéré qu'en établissant que ceux-ci ont péri sans sa faute.
Les premiers juges ont à juste titre rappelé qu'il appartenait à la société FMS, locateur d'ouvrage, qui s'est vu confier le matériel appartenant à la société Sezer, dans le cadre d'une réparation sous garantie, d'en assurer la conservation et la restitution.
Ils ont inversé la charge de la preuve en considérant qu'il n'était pas démontré que la société FMS se serait rendue coupable d'une faute dans le sinistre ayant atteint le débardeur alors qu'il appartient à cette dernière de prouver qu'elle n'en a pas commis.
Toutefois, ils ont justement relevé que le rapport d'expertise permettait d'établir que le matériel avait été endommagé par un choc contre un pont lors du transport alors que l'engin avait été confié à la société de transport NTPC ce dont il résulte que cette dernière est seule responsable de la détérioration du bien appartenant à la société Sezer.
En conséquence les premiers juges doivent être confirmés en ce qu'ils ont écarté la responsabilité de la société Sezer et retenu que les dommages devaient être supportés par le transporteur seul.
Sur l'étendue des dommages matériels
S'il n'est pas contesté qu'un accident est survenu lors du transport du 14 avril 2016 au cours duquel le débardeur a été endommagé, la société NTPC soutient que les intimées ne rapportent pas la preuve que le dommage le plus grave, dont il est demandé réparation, a été causé au cours dudit accident, la société appelante acceptant à minima de prendre en charge la réparation des quatre flexibles mentionnés à la lettre de voiture pour 802,73 euros.
La preuve des pertes ou avaries se prouvent par tous moyens notamment par des présomptions graves, précises et concordantes.
En l'espèce, il n'est pas contesté qu'entre la reconnaissance unilatérale des dommages par l'expert commis par Pacifica en avril 2016 et l'expertise contradictoire du 2 juin 2016, l'engin a travaillé 163 heures.
Toutefois, il doit être relevé qu'il n'a été émis aucune réserve au moment de la prise en charge du matériel par le transporteur.
Par suite, alors que le matériel a été déposé le jour du sinistre auprès de la société Meca, la lettre de voiture mentionne au moment du déchargement : « 4 flexibles coupés, dessus du bras scalpé ».
Les constatations effectuées, lors de l'expertise contradictoire du 2 juin 2016, font état du bras supérieur découpé en partie haute et des flexibles hydrauliques qui avaient été remplacés entre temps.
L'expert a indiqué que la remise en état consiste à remplacer le bras intermédiaire, les flexibles, les vis de carter de bras final et la réparation de la butée repose bras ainsi que le contrôle de la tourelle et du fonctionnement.
Selon devis non contredit, le montant de ces réparations s'élève à la somme de 16 887,44 euros, déduction faite d'un abattement de 8% sur les pièces d'usure.
La société Pacifica a versé à son assuré la somme de 16 390,58 euros, après déduction de la franchise de 496,88 euros au titre de dommages matériels.
Aussi, au regard des mentions figurant à la lettre de voiture corroborées par les constatations de l'expert, la preuve des dommages est suffisamment rapportée. Le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a condamné la société NTPC au paiement de ces sommes respectivement au bénéfice de l'assureur pour le premier montant et de la société Sezer pour le second.
Sur les dommages immatériels
La société Sezer, représentée par son liquidateur, réclame le paiement des sommes suivantes :
- 922,50 euros HT au titre des frais de transport,
- 12 800 euros au titre des frais d'immobilisation sur les périodes du 14 avril 2016 au 19 avril 2016 puis du 1er juin 2016 au 14 juin 2016, soit 16 jours à 800 euros.
Or, les frais de transport du 19 avril 2016 facturés par la société Reolon (facture du 30 avril 2016) correspondent au retour du matériel après l'entretien sous garantie réalisé par la société FMS, l'accident imputable au transporteur n'ayant fait que repousser ce retour.
Les frais de transports inhérents à l'expertise contradictoire organisée le 2 juin 2016 ne sont pas imputables au transporteur ni au vendeur mais au choix de la société Sezer de faire examiner l'engin auprès de l'établissement JB Méca et non sur son exploitation.
En conséquence, le jugement déféré doit être infirmé sur ce point et statuant à nouveau, la société Sezer, représentée par son liquidateur, doit être déboutée de ce chef de demande.
De la même façon, l'immobilisation subie par la société Sezer sur la période du 14 au 19 avril 2016 n'est pas en lien avec l'accident imputable au transporteur mais à la réparation de l'engin dans le cadre de la garantie.
Les modalités d'organisation de l'expertise contradictoire en juin 2016 relève d'un choix de la société Sezer comme rappelé plus haut de sorte qu'elle ne saurait faire valoir un préjudice qui serait imputable au transporteur alors au surplus que si l'engin a été rapatrié sur l'exploitation seulement le 14 juin 2016 c'est au motif que M. Sezer n'a pas trouvé de transporteur disponible avant cette date.
Il convient donc de réformer le jugement déféré et statuant à nouveau de débouter la société Sezer, représentée par son liquidateur, de ses demandes au titre des préjudices immatériels.
Sur les demandes accessoires
Le jugement déféré doit être confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles non compris dans les dépens.
La société NTPC, partie succombante, est condamnée aux dépens d'appel.
L'équité conduit à ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour.
Par ces motifs
La cour dans les limites de sa saisine,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société NTPC à payer à la société Sezer la somme de 8 922,50 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2019 au titre des dommages immatériels,
Statuant à nouveau sur ce point et y ajoutant,
Déboute la société Sezer, représentée par la SAS Jean Jacques Deslorieux, liquidateur judiciaire, de ses demandes au titre des préjudices immatériels (frais de transport et préjudice d'immobilisation),
Condamne la société NTPC aux dépens d'appel,
Déboute les parties de leurs demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civil à hauteur de cour.
Le Greffier, Le Président,