KG/CH
Caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or (CPAM)
C/
Société [9]
Société COOPERATIVE AGRICOLE '[8]'
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 02 MARS 2023
MINUTE N°
N° RG 20/00309 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FQWW
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pôle social du Tribunal Judiciaire de MACON, décision attaquée en date du 31 Août 2020, enregistrée sous le n° 19/405
APPELANTE :
Caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or (CPAM)
[Adresse 1]
[Adresse 7]
[Localité 2]
représenté par M. [E] [N] (Chargé d'audience) en vertu d'un pouvoir général
INTIMÉES :
Société [9]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par Me Xavier BONTOUX de la SAS BDO AVOCATS LYON, avocat au barreau de LYON substitué par Me Héloïse FRISA, avocat au barreau de DIJON
Société COOPERATIVE AGRICOLE '[8]'
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Me Nicolas LEGER de la SELARL BPS, avocat au barreau de BESANCON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Janvier 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Olivier MANSION, Président de chambre,
Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,
Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Employé par la société [9] (la société), M. [P] a déclaré une maladie professionnelle portant sur le canal carpien gauche, le 21 octobre 2015, à la caisse primaire d'assurance maladie (la CPAM) de Saône-et-Loire laquelle a été prise en charge.
Le 6 février 2019, la caisse a notifié à la société l'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 15 % au salarié, à la suite de la consolidation de son état de santé.
Par courrier en date du 5 avril 2019, la société [9] a saisi la commission médicale de recours amiable de la caisse d'un recours de cette décision laquelle n'a pas statué dans les délais.
Par requête en date du 21 août 2019, la société [9] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Mâcon d'un recours contre cette décision implicite de rejet.
Par jugement en date du 9 avril 2020, le tribunal a ordonné la mise en cause de la société coopérative agricole " [8] ".
Par décision en date du 30 août 2020, le tribunal judiciaire de Mâcon a :
- déclaré inopposable à la société [9] 21 la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de Côte d'Or de fixer le taux d'IPP de M. [P] à la suite de la maladie professionnelle de ce dernier, déclarée le 23 octobre 2015, à 15 %,
- condamné la CPAM de Côte d'Or au paiement des entiers dépens.
Par déclaration enregistrée le 11 septembre 2020, la CPAM de la Côte d'Or a relevé appel de cette décision.
Dans le dernier état de ses conclusions reçues à la cour le 10 octobre 2022 et reprises à l'audience sans ajout ni retrait au cours des débats, elle demande à la cour de :
à titre principal,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Mâcon en ce qu'il a déclaré inopposable à la société [9] la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de Côte d'Or de fixer le taux d'IPP de M. [P] suite à la maladie professionnelle de ce dernier, déclarée le 23 octobre 2015 à 15 %,
à titre subsidiaire,
- confirmer la décision de la CPAM de la Côte d'Or fixant à 15 % le taux d'IPP attribué à M. [P] en lien avec sa maladie professionnelle déclarée le 23 octobre 2015,
à titre infiniment subsidiaire,
- rejeter la demande d'expertise médicale judiciaire formulée par la société [9],
à toute fin utile,
- condamner la société [9] aux entiers dépens,
- débouter la société [9] de l'ensemble de ses prétentions.
Par ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 18 novembre 2022, la société coopérative agricole "[8]" demande à la cour de :
à titre principal,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Mâcon le 31 août 2020 en ce qu'il :
- a déclaré inopposable à la société [9] 21 la décision de la CPAM de Côte d'Or de fixer le taux d'IPP de M. [P] suite à la maladie professionnelle de ce dernier déclarée le 23 octobre 2015, à 15 %,
condamné la CPAM de Côte d'Or au paiement des entiers dépens,
à titre subsidiaire,
- fixer le taux d'IPP accordé à M. [P] à 5 % suivant le rapport du docteur [Z],
à titre infiniment subsidiaire,
- ordonner avant dire droit une expertise médicale judiciaire sur pièces afin de vérifier la justification du taux d'incapacité attribué à M. [P],
- nommer tel expert qu'il plaira à la cour avec pour missions de :
- prendre connaissance de l'entier dossier médical de M. [P] ayant permis la fixation de son taux d'incapacité,
- déterminer exactement les séquelles,
- fixer le taux attribuable au titre des séquelles présentées en fonction des barèmes indicatifs d'invalidité,
- rédiger un pré-rapport à soumettre aux parties,
- intégrer dans le rapport d'expertise final les commentaires de chaque partie concernant le pré-rapport et les réponses apportées à ces commentaires,
- transmettre le rapport d'expertise au docteur [Z], mandaté dans le cadre de la présente instance, par la société [9],
- enjoindre la CPAM à transmettre sans délai à l'expert désigné l'intégralité du rapport médical reprenant les constats résultant de l'examen clinique de l'assuré ainsi que ceux résultants des examens consultés par le praticien-conseil justifiant sa décision,
- renvoyer l'affaire à une audience ultérieure pour que soit fixé, sous l'éclairage du rapport d'expertise, le taux d'IPP attribué à M. [P].
Dans ses conclusions du 15 novembre 2022, la société [9] demande de :
A TITRE PRINCIPAL :
- CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal Judiciaire de MACON du 31 août 2020 en ce qu'il a :
- DECLARE inopposable à la société [9] la décision de la CPAM de COTE D'OR de fixer le taux d'IPP de Monsieur [K] [P] suite à la maladie professionnelle de ce dernier, déclarée le 23 octobre 2015, à 15% ;
- CONDAMNE la CPAM de COTE D'OR au paiement des entiers dépens.
A TITRE SUBSIDIAIRE :
- ABAISSER le taux à 5 % suivant argumentaire du Docteur [Z] ;
A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE :
- ORDONNER, avant-dire droit, une expertise médicale judiciaire sur pieces afin de vérifier la justification du taux d'incapacité attribué a Monsieur [P] ;
- NOMMER tel expert avec pour mission de :
1° - Prendre connaissance de l'entier dossier médical de Monsieur [P] ayant permis la fixation de son taux d'incapacité,
2° - Déterminer exactement les séquelles,
3° - Fixer le taux attribuable au titre des séquelles présentées en fonction des barémes indicatifs d'invalidité,
4° - Rédiger un pré-rapport à soumettre aux parties,
5° - lntégrer dans le rapport d'expertise final les commentaires de chaque partie concernant le pré-rapport et les réponses apportées à ces commentaires,
6° - Transmettre le rapport d'expertise au Docteur [Z], mandaté par la société [9],
- RENVOYER l'affaire à une audience ultérieure pour qu'il soit débattu du contenu du rapport d'expertise et ABAISSER le taux d'IPP attribué à M.[P].
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.
MOTIFS
- Sur la demande d'opposabilité de la décision attributive de rente
La CPAM fait valoir que l'absence de transmission du rapport médical dans le cadre du recours amiable auprès de l'employeur ne caractérise pas un non-respect du principe du contradictoire puisque, d'une part, les dispositions de l'article R 142-8-2 du code de la sécurité sociale ne prévoit aucune sanction et, d'autre part, l'employeur peut fait valoir ses droits dans le cadre du recours devant le tribunal.
La société " [8] " soutient que le taux d'incapacité permanente attribué au salarié ne lui est pas opposable dès lors que le rapport médical du salarié et l'avis du médecin conseil de la caisse n'ont pas été transmis à son médecin conseil.
La société [9] demande la confirmation du jugement précité.
L'article L. 142-6 du code de la sécurité sociale dans sa version issue de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 dispose que :
" Pour les contestations mentionnées aux 1°, 2°et 3° de l'article L. 142-2, le praticien-conseil du contrôle médical du régime de sécurité sociale concerné transmet, sans que puisse lui être opposé l'article 222-13 du code pénal, à l'attention exclusive de l'autorité compétente pour examiner le recours préalable, l'intégralité du rapport médical reprenant les constats résultant de l'examen clinique de l'assuré ainsi que ceux résultant des examens consultés par le praticien conseil justifiant sa décision. A la demande de l'employeur, ce rapport est notifié au médecin qu'il mandate à cet effet. "
L'article R. 142-8-2 du code de la sécurité sociale dans sa version issue du Décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 précise que :
" Le secrétariat de la commission médicale de recours amiable transmet dès sa réception la copie du recours préalable au praticien-conseil, auteur de l'avis médical contesté.
Dans un délai de dix jours à compter de la date de la réception de la copie du recours préalable, le praticien-conseil transmet à la commission, sous pli confidentiel et par tout moyen conférant date certaine, l'intégralité du rapport mentionné à l'article L. 142-6 ainsi que l'avis transmis à l'organisme de sécurité sociale ou de mutualité sociale agricole sur l'état et le degré d'invalidité ou sur le taux d'incapacité permanente."
L'article R.142-8-3 du code de la sécurité sociale dans sa version issue du décret susvisé précise que :
" Lorsque le recours préalable est formé par l'employeur, le secrétariat de la commission médicale de recours amiable notifie, sans délai sous pli confidentiel, par tout moyen conférant date certaine le rapport mentionné à l'article L. 142-6 accompagné de l'avis au médecin mandaté par l'employeur à cet effet. Le secrétariat informe l'assuré ou le bénéficiaire de cette notification.
Dans un délai de vingt jours à compter de la réception du rapport mentionné à l'article L. 142-6 accompagné de l'avis, l'assuré ou le médecin mandaté par l'employeur peut, par tout moyen conférant date certaine, faire valoir ses observations. Il en est informé par le secrétariat de la commission par tout moyen conférant date certaine."
Il résulte de la combinaison de ces textes que les délais impartis par les articles R. 142-8-2, alinéa 2 et R. 142-8-3, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale pour la transmission à la commission médicale de recours amiable par le praticien-conseil du rapport mentionné à l'article L. 142-6 du même code et pour la notification de ce rapport par le secrétariat de la commission au médecin mandaté par l'employeur, lorsque ce dernier a formé un recours préalable, ne sont assortis d'aucune sanction.
Ainsi, leur inobservation n'entraîne pas l'inopposabilité à l'égard de l'employeur de la décision attributive de rente dès lors que celui-ci dispose de la possibilité de porter son recours devant la juridiction de sécurité sociale à l'expiration du délai de rejet implicite de quatre mois prévu à l'article R 142-8-5 du code de la sécurité sociale et d'obtenir, à l'occassion de ce recours, la communication du rapport mentionné ci-dessus en application des articles L142-10 et R142-16-3 du même code.
L''inopposabilité à l'employeur de la décision attributive de rente ne peut donc pas résulter de l'inobservation de l'absence totale de transmission de ce rapport en phase précontentieuse, dès lors que la communication de ce rapport peut être obtenue dans le cadre d'un recours contentieux.
En l'espèce, ni devant les premiers juges ni devant la cour d'appel, le rapport du médecin conseil de la caisse, le docteur [L], n'est produit aux débats.
Le rapport du docteur [F], médecin de la caisse, réplique aux arguments du médecin conseil de la société [9], le docteur [Z] mais ne mentionne pas le diagnostic du médecin conseil, le docteur [L], qui a retenu un taux de 15%.
En l'absence du respect du principe de la contradiction à l'égard de l'employeur, la décision de la CPAM du 6 février 2019 est inopposable à la société [9].
Le jugement sera donc confirmé sur ce chef.
- Sur les autres demandes
La CPAM supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par décision contradictoire,
- CONFIRME le jugement en date du 31 août 2020,
Y ajoutant :
- Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de Côte d'or aux dépens d'appel.
Le greffier Le président
Frédérique FLORENTIN Olivier MANSION