KG/CH
S.A. [3] - prise en la personne de son directeur général, Monsieur [M]
C/
URSSAF de Bourgogne
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 26 JANVIER 2023
MINUTE N°
N° RG 20/00229 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FPNL
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pôle social du Tribunal Judiciaire de DIJON, décision attaquée en date du 07 Avril 2020, enregistrée sous le n° 19/00307
APPELANTE :
S.A. [3] - prise en la personne de son directeur général, Monsieur [M]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Me Sandrine ANNE, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉE :
URSSAF de Bourgogne
[Adresse 2]
[Localité 1]
représenté par Me Florent SOULARD de la SCP SOULARD-RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Olivier MANSION, Président de chambre,
Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,
Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
La [3] (la société) a reçu une lettre d'observations adressée le 2 octobre 2015, après un contrôle diligenté par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (l'URSSAF) Bourgogne.
Une mise en demeure a été adressée le 16 décembre 2015 pour un montant de 43 065 euros.
A la suite du rejet implicite de la commission de recours amiable de l'organisme social, la société a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Dijon qui par décision du 7 avril 2020 a :
"déclaré le recours recevable,
- confirmé la décision implicite, puis explicite, de la commission de recours amiable de l'URSSAF de Bourgogne,
- constaté que la [3] ne formule aucune contestation à l'encontre des :
chef de redressement n° 2, soit 5 772 euros en principal outre 105 euros de majoration de redressement pour absence de mise en conformité,
chef de redressement n° 3, soit 242 euros en principal,
chef de redressement n° 4, soit 1 451 euros en principal,
chef de redressement n° 5, soit 5 381 euros en principal,
chef de redressement n° 7, soit 593 euros en principal,
chef de redressement n° 8, constituant un rappel pour mise en conformité,
soit la somme globale de 13 439 euros en principal, outre 105 euros de majorations de redressement,
- validé le redressement réalisé par l'URSSAF de Bourgogne à l'encontre de la [3] à hauteur de :
chef de redressement n° 1 « avantage en nature : logement » :
1 598 euros en principal, correspondant au rappel de cotisations révisé par la caisse déduction faite au trop-versé au titre de l'année 2012,
chef de redressement n° 6 « assujettissement et affiliation au régime général : médecins vacataires, personnel médical » :
18 653 euros en principal, et 624 euros de majoration de redressement,
- validé en conséquence la mise en demeure du 16 décembre 2015 à hauteur de :
33 690 euros en principal, et 729 euros de majorations de redressement,
- dit que les majorations de retard devront être révisées pour tenir compte du trop-versé de 888 euros déduit du chef de redressement n° 1 et condamne la [3] au paiement de celles-ci,
- débouté les parties de toute demande plus ample ou contraire,
- condamné la [3] aux dépens."
Par déclaration enregistrée le 23 juin 2020, la société a relevé appel de cette décision.
Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par voie électronique le 22 septembre 2020 et reprises à l'audience sans ajout ni retrait au cours des débats, elle demande à la cour de :
- infirmer partiellement le jugement entrepris et, statuant à nouveau,
- la décharger du redressement notifié pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 en ce qu'il a trait à l'assujettissement des médecins vacataires et autre personnel médical aux cotisations sociales du régime général,
- délaisser les dépens à qui de droit.
Par ses dernières écritures reçues à la cour le 6 octobre 2022 et reprises à l'audience sans ajout ni retrait au cours des débats, l'URSSAF de Bourgogne demande à la cour de :
à titre principal,
- déclarer le présent appel recours recevable,
- la recevoir en toutes ses demandes, fins et conclusions,
- débouter la [3] de ses demandes visant à ce que le jugement soit réformé concernant le chef de redressement n° 6 « assujettissement et affiliation au régime général : médecins vacataires, personnel médical »,
en conséquence, confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire le 7 avril 2020,
à titre reconventionnel,
- condamner la [3] aux entiers dépens de l'instance,
- condamner la [3] à lui verser une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.
MOTIFS
- Sur le chef de redressement n° 6 « assujettissement et affiliation au régime général : médecins vacataires, personnel médical »
La société demande d'annuler ce chef de redressement soutenant que les médecins et kinésithérapeutes vacataires ne sont pas des salariés du club mais des travailleurs indépendants, que le club n'exerce aucune autorité sur le médecin et le kinésithérapeute ne recevant aucun ordre, qu'ils ne sont soumis à aucun contrôle du club et ne peuvent faire l'objet d'aucune sanction.
Ce personnel ne peut donc être soumis aux cotisations générales.
Aux termes des dispositions de l'article L.311-2 du code de la sécurité sociale, sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge, et même s'ils sont titulaires d'une pension, toutes les personnes, quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat.
L'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.
Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail.
C'est à la partie qui invoque l'existence d'une relation salariale d'apporter la preuve du contrat de travail.
En l'espèce, les inspecteurs du recouvrement exposent avoir constaté que :
"ll ressort de la lecture et de l'examen des contrats de prestation de services que les intéressés :
- Organisent et assurent la surveillance médicale des sportifs ;
- Sont astreints à une présence selon un calendrier defini par le Club :
o Lors des matchs à domicile pour le médecin,
o Lors des entrainements, matchs à domicile et à l'extérieurs pour les kinésithérapeutes.
- Béneficient dans ce cadre d'une structure mise à disposition à titre gratuit par la société.
Cette activité est pratiquée dans les locaux ou évoluent les joueurs lors d'entraînements (pour les kinésithérapeutes) et lors des matchs (kinésithérapeutes et médecins) notamment au Palais des sports de Dijon.
Dans le cadre de l'exécution de leur prestation, les intéressés doivent s'entourer d'avis nécessaires au bon déroulement des soins donnés aux jours (article 4 des contrats des prestation de services).
lls sont donc tenus de rendre compte du suivi médical des joueurs.
Les rémunérations de ces intervenants sont fixées dans le contrat de prestation de services (article 2) :
- Le médecin Monsieur [U] est rémunére forlaitairement à hauteur de 150 euros pour sa présence lors des matchs à domicile,
-Les kinésithérapeutes, Messieurs [X] et [C] perçoivent également une
rémunération forfaitaire de 26 euros par heure de présence aux entrainements, de 65 euros pour leur présence lors des matchs à domicile, 195 euros pour leur présence lors des matchs à l'extérieurs.
ll convient de préciser qu'ils sont rémunérés de façon forfaitaire, quel que soit le nombre de patients éventuellement consultés.
Lorsqu'ils perçoivent des honoraires, ces intervenant médicaux n'etablissent pas de feuille de soins nominatives, en ce sens ils ne perçoivent pas d'honoraires de clientèle.
En conséquence, les intéréssés ne supportent pas de risque économique, caractéristique de l'activité libérale.
Au titre cette activité, le médecin et les kinésithérapeutes ne peuvent pas être considérés comme des praticiens libéraux du fait de l'absence de risque économique et de l'absence de clientèle extérieure au club.
L'ensemble de cette constatation montre que l'activité de Messieurs [U], [X] et [C] est réalisée dans le cadre d'un service organisé avec de la part du club un pouvoir de direction et de contrôle, ainsi qu'une rémunération forfaitaire préalablement convenue entre les parties.
L'URSSAF démontre que les médecins, Messieurs [U] et [O] et les kinésithérapeutes, Messieurs [X] et [C] organisent et assurent la surveillance médical des sportifs, qu'ils bénéficient d'une structure mise à leur disposition et qu'ils sont rénumérés de manière forfaire ( pièces n° 1, 21, 22, 23 et 24 )."
Cependant, elle ne caractérise pas le lien de subordination entre le club et les médecins et personnels paramédical susvisés dans la mesure où :
- d'une part, exerçant une activité libérale, ils peuvent exercer dans d'autres établissements,
- d'autre part, ni les contrats de prestations de service des personnes susvisées (pièces susvisées) ni le contrat d'exercice libéral "surveillance des épreuves sportives" du docteur [O] (pièce n° 24) ne permettent de démontrer que les médecins et personnel paramédical étaient sous les ordres et l'autorité du club,
En effet, ils ont le choix d'accepter ou pas les vacations proposées.
Contrairement à ce que prétend l'URSSAF, la présence du médecin vacataire à la fin des recontres sportives et ce après "concertation des staffs médicaux des deux équipes" correspond au suivi de la surveillance médicale sans aucune autre obligation et non à des directives du club.
Par ailleurs, le fait qu'ils interviennent dans un service organisé ne signifie pas qu'ils sont sous les ordres et directives du club.
Ces éléments sont insuffisants à écarter la présomption de non salariat à l'égard de Messieurs [U] et [O], [X] et [C] et ne justifient pas l'obligation d'affiliation au régime général des cotisations sociales.
Le chef de redressement n° 6 sera annulé.
L'URSSAF devra recalculer la somme réclamée au titre de la mise en demeure du 16 décembre 2015, fixée à hauteur de 33 690 euros à titre principal et 729 euros de majorations de redressement après déduction du chef de redressement annulé.
Le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef.
- Sur les autres demandes :
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'URSSAF Bourgogne,
L'URSSAF Bourgogne supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par décision contradictoire, dans les limites de l'appel,
INFIRME le jugement en date du 7 avril 2020 en ce qu'il a validé le chef de redressement n° 6 « assujettissement et affiliation au régime général : médecins vacataires, personnel médical » l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bourgogne à l'encontre de [3],
Statuant à nouveau :
- ANNULE le chef de redressement n° 6 « assujettissement et affiliation au régime général : médecins vacataires, personnel médical » l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bourgogne à l'encontre de [3],
- DIT que l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bourgogne devra recalculer la somme réclamée au titre de la mise en demeure du 16 décembre 2015, fixée initialement à hauteur de 33 690 euros à titre principal et 729 euros de majorations de redressement, après déduction du chef de redressement annulé,
Y ajoutant :
- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bourgogne,
- Condamne l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bourgogne aux dépens d'appel.
Le greffier Le président
Frédérique FLORENTIN Olivier MANSION