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24/01/2023 | FRANCE | N°21/00520

France | France, Cour d'appel de Dijon, 1re chambre civile, 24 janvier 2023, 21/00520


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L'ADMINISTRATION DES FINANCES PUBLIQUES



























































































expédition et copie exécutoire

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COUR D'APPEL DE DIJON



1ère chambre civile



ARRÊT DU 24 JANVIER 2023



N° RG 21/00520 - N° Portalis DBVF-V-B7F-FVUF



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : jugement du 1er mars 2021,

rendu par le tribunal judiciaire de Dijon - RG : 18/00281









APPELANT :



Monsieur [O] [S]

né le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 5] (21)

[Adresse 4]

[Localité 3]



assisté de Me Adrien LANDON, membre ...

SB/IC

[O] [S]

C/

L'ADMINISTRATION DES FINANCES PUBLIQUES

expédition et copie exécutoire

délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

1ère chambre civile

ARRÊT DU 24 JANVIER 2023

N° RG 21/00520 - N° Portalis DBVF-V-B7F-FVUF

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : jugement du 1er mars 2021,

rendu par le tribunal judiciaire de Dijon - RG : 18/00281

APPELANT :

Monsieur [O] [S]

né le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 5] (21)

[Adresse 4]

[Localité 3]

assisté de Me Adrien LANDON, membre de la SELARL SHUBERT COLLIN Associés, avocat au barreau de PARIS, plaidant, et représenté par Me Céline BOUILLERET, membre de la SCP BERGERET ET ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 14, postulant

INTIMÉE :

L'ADMINISTRATION DES FINANCES PUBLIQUES, poursuites et diligences de la Directrice Générale des Finances Publiques qui élit domicile en ses bureaux :

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 novembre 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et Sophie BAILLY, Conseiller, chargée du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

Sophie BAILLY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Aurore VUILLEMOT, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 24 Janvier 2023,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Sylvie RANGEARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS, PROCÉDURE ET PRETENTION DES PARTIES

Par acte du 26 février 2009, enregistré au service des impôts le 9 mars 2009, M. [R] [S] expert-comptable et Mme [Y] [I] son épouse, gérante de société, ont fait donation à leur fils, M. [O] [S], expert-comptable, de la pleine propriété des 780 actions de la SAS « Cabinet [S] et Associés ».

Pour le calcul des droits de mutation, le donataire a bénéficié des dispositions de l'article 787 B du code général des impôts qui prévoit un abattement de 75 % sur la valeur des titres transmis.

Le 25 mars 2009, les titres reçus ont été apportés à la suite d'une convention d'apport du 2 mars 2009 à la société « [O] [S] expertise, audit et conseil » SARL unipersonnelle créée le 19 décembre 2008 et dont l'objet social est l'exercice des professions d'expertise comptable et de commissaire aux comptes.

Par courrier du 25 juin 2009, en réponse à une demande de M. [O] [S], la direction régionale des finances publiques de Provence Alpes Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône (DGFIP) l'a informé que l'exonération partielle ne pouvait être maintenue en raison de l'apport ultérieur des titres à une société dont l'objet social ne correspondait pas aux exigences du texte de loi, car ne se limitant pas à la conservation de titres de sociétés d'expertise comptable.

Cette remise en cause n'a pas eu de conséquences fiscales immédiates dans la mesure où la base fiscale retenue par l'administration, après remise en cause de l'exonération partielle pouvait bénéficier de l'abattement légal.

Le 26 juin 2012, M. [O] [S] a bénéficié d'une nouvelle donation de titres de la part de ses parents, et ce, selon les mêmes conditions fiscales.

Le 9 décembre 2013, l'administration fiscale a envoyé une proposition de rectification portant sur les droits de donation relatifs à la transmission du 26 juin 2012, en exposant que par suite de la remise en cause de l'exonération prévue à l'article 787 B du code général des impôts à l'occasion de la première donation, le solde de l'abattement légal au moment de la deuxième n'était pas de 98 596 euros mais de 11 091 euros, de sorte que cette seconde donation se trouvait taxable.

Malgré les contestations de M. [S], l'administration fiscale a émis un avis de mise en recouvrement le 30 avril 2015. M. [S] s'est acquitté des impositions et pénalités durant le mois de juillet suivant.

La réclamation contentieuse de M. [S] a été rejetée par décision administrative du 23 octobre 2017.

Suivant acte du 18 décembre 2017, M. [O] [S] a fait assigner la DGFIP de Provence Alpes Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône aux fins de voir le tribunal de grande instance de Dijon, statuant au visa des dispositions des articles787 B du code général des impôts et L 208 du livre des procédures fiscales :

- annuler la décision de rejet de l'administration du 23 octobre 2017 ;

- ordonner la décharge et le remboursement de l'imposition supplémentaire mise en recouvrement à son encontre le 30 avril 2015 sous le n° 20100300 2 07891 pour un montant de 41 255 euros en droits et pénalités et acquittée le 8 juillet 2015 ;

- condamner la DGFIP au paiement d'intérêts moratoires et de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la DGFIP aux entiers dépens.

Par jugement du 1er mars 2021 le tribunal judiciaire de Dijon a débouté M. [S] de toutes ses demandes et l'a condamné aux dépens.

Le 14 avril 2021, M. [S] a interjeté appel du jugement.

Aux termes du dispositif de ses conclusions notifiées le 12 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien des prétentions, M. [S] demande à la cour d'appel de :

Vu l 'article 787 B du Code général des impôts,

Vu l'article L 208 du Livre des procédures fiscales,

Vu l'article 700 du Code de procédure civile,

Vu l'état de la jurisprudence,

Vu les pièces versées au débat,

- dire et juger recevable et bien fondé son appel,

- réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Dijon en ce qu'il l'a débouté de toutes ses demandes, et l'a condamné aux dépens,

En conséquence, et statuant à nouveau :

- ordonner la décharge et le remboursement de l'imposition supplémentaire mise en recouvrement à son encontre le 30 avril 2015 sous le n° 20100300 2 07891 pour un montant de 41 255 euros, en droits et pénalités, et acquittée le 8 juillet 2015,

- condamner la DGFIP de Provence Alpes Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône au versement d'intérêts moratoires sur le fondement de l'article L 208 du Livre des procédures fiscales,

- condamner la DGFIP de Provence Alpes Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône à lui payer la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la DGFIP de Provence Alpes Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône aux frais et dépens de première instance.

Aux termes du dispositif de ses conclusions notifiées le 8 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien des prétentions, l'intimée demande à la cour d'appel de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Dijon le 1er mars 2021.

- rejeter les demandes de M. [O] [S] fondées sur les articles 699 et 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [O] [S] au paiement à l'administration d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel. 

La clôture est intervenue le 14 avril 2022.

MOTIVATION

L'article 787 B du code général des impôts (CGI) dispose que sont exonérées de droit de mutation, à concurrence de 75 % de leur valeur, les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises entre vifs si certaines conditions sont réunies.

Parmi ces conditions figure l'engagement par le donataire dans l'acte de donation de conserver les parts ou les actions transmises pendant une durée de quatre ans : cf c de l'article 787 B du CGI.

Le f de l'article 787 B du CGI prévoit toutefois qu'en cas de non-respect « de la condition prévue au c par suite d'un (...) apport pur et simple de titres d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale à une société dont l'objet unique est la gestion de son propre patrimoine constitué exclusivement de participations dans une ou plusieurs sociétés du même groupe que la société dont les parts ou actions ont été transmises et ayant une activité, soit similaire, soit connexe et complémentaire, l'exonération partielle n'est pas remise en cause si les conditions suivantes sont réunies :

1° La société bénéficiaire de l'apport est détenue en totalité par les personnes physiques bénéficiaires de l'exonération. Le donateur peut toutefois détenir une participation directe dans le capital social de cette société, sans que cette participation puisse être majoritaire. Elle est dirigée directement par une ou plusieurs des personnes physiques bénéficiaires de l'exonération. Les conditions tenant à la composition de l'actif de la société, à la détention de son capital et à sa direction doivent être respectées à l'issue de l'opération d'apport et jusqu'au terme de l'engagement mentionné au c ;

2° La société bénéficiaire de l'apport prend l'engagement de conserver les titres apportés jusqu'au terme de l'engagement prévu au c) ;

3° Les héritiers, donataires ou légataires, associés de la société bénéficiaire des apports doivent conserver, pendant la durée mentionnée au 2°, les titres reçus en contrepartie de l'opération d'apport (...) ».

En l'espèce, l'exonération partielle de droits de mutation dont M. [S] a bénéficié lors des deux donations a été remise en cause au motif que l'EURL  [O] [S] expertise, audit et conseil n'avait pas pour objet unique la gestion de son propre patrimoine constitué exclusivement de participations dans une ou plusieurs sociétés du même groupe que la société dont les parts ou actions ont été transmises et ayant une activité, soit similaire, soit connexe et complémentaire.

La DGFIP soutient et le premier juge a retenu qu'il convenait d'apprécier l'objet de cette société au seul regard de son objet social, c'est à dire de son objet tel que figurant dans ses statuts, correspondant aux statuts classiques des sociétés opérationnelles d'expertise comptable et de commissariat aux comptes.

Pour sa part, M. [S] fait valoir que les régimes fiscaux prévoyant l'application de règles particulières conditionnées par l'objet d'une société, font primer l'activité réelle exercée par la société sur son objet statutaire.

La cour observe qu'à la différence d'autres textes du CGI, l'article 787 B, f n'évoque que 'l'objet' de la société, et non son 'objet social'.

Ainsi contrairement à ce que soutient la DGFIP, le texte laisse une latitude d'interprétation, qui ne rend pas inopérante la référence par l'appelant au principe de réalisme du droit fiscal, étant rappelé que dans son courrier du 25 juin 2009, la DGFIP a indiqué que 'l'inscription de la société bénéficiaire de l'apport à l'ordre des experts-comptables (...) n'était pas en elle-même de nature à entraîner la remise en cause de l'exonération partielle des droits de donation'.

Par ailleurs, il ressort des documents comptables communiqués par l'appelant et non discutés par l'administration fiscale, soit les bilans portant sur les années 2009 à 2012 de l'EURL [O] [S], expertise, audit et conseil et les liasses relatives à la taxe sur la valeur ajoutée, pour la période du 1er septembre 2011 jusqu'au 31 août 2012, que cette société, malgré son objet social statutaire, n'a, dans les faits, exercé aucune activité d'expertise comptable ou de commissariat aux comptes, aucune opération effectuée à ce titre n'apparaissant en comptabilité et n'ayant été taxée à quelque titre que ce soit. Elle a seulement géré une participation financière de 700 050 euros correspondant au montant de la donation du 26 février 2009.

Il résulte de ces éléments que si l'activité apparente de la société, à laquelle les titres donnés ont été apportés, était celle d'expertise comptable et de commissariat aux comptes, son activité économique réelle a, sur la période 2009 / 2012, seulement consisté à gérer son patrimoine constitué exclusivement de participations dans une ou plusieurs sociétés du même groupe que la société dont les parts ou actions ont été transmises et ayant une activité, soit similaire, soit connexe et complémentaire.

Il est ainsi établi que M. [S] n'a pas failli dans son engagement de conservation des titres et a respecté les dispositions de l'article 787 B du CGI.

Le jugement déféré doit donc être infirmé en ce qu'il a débouté M. [S] de toutes ses demandes.

Au regard de ce qui précède, il convient de décharger M. [S] de l'imposition supplémentaire mise en recouvrement à son encontre le 30 avril 2015 sous le n° 20100300 2 07891 pour un montant de 41 255 euros, en droits et pénalités.

Selon les dispositions de l'article L 208 du livre des procédures fiscales, « Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés.

Lorsque les sommes consignées à titre de garanties en application des articles L. 277 et L. 279 doivent être restituées, en totalité ou en partie, la somme à rembourser est augmentée des intérêts prévus au premier alinéa. Si le contribuable a constitué des garanties autres qu'un versement en espèces, les frais qu'il a exposés lui sont remboursés dans les limites et conditions fixées par décret. »

En application de ce texte, la somme de 41 255 euros devra être remboursée à M. [S], outre intérêts moratoires à compter du 8 juillet 2015, le taux de ces intérêts étant selon les dispositions de l'article 1727 du CGI de 0,40 % par mois jusqu'au 31 décembre 2017 puis de 0,20 % par mois à compter du 1er janvier 2018.

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, la DGFIP est tenue aux dépens de première instance et d'appel.

Elle est condamnée, en équité, à verser la somme de 1 500 euros à M. [S] sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Prononce le dégrèvement de l'imposition supplémentaire mise en recouvrement à l'encontre de M. [O] [S] le 30 avril 2015 sous le n° 20100300 2 07891 pour un montant de 41 255 euros, en droits et pénalités,

Ordonne le remboursement à M. [O] [S] de la somme de 41 255 euros outre intérêts moratoires à compter du 8 juillet 2015, au taux prévu par l'article 1727 du code général des impôts,

Condamne la Direction Régionale des Finances Publiques de Provence Alpes Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne la Direction Régionale des Finances Publiques de Provence Alpes Côte-d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône à verser la somme de 1 500 euros à M. [O] [S] sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 1re chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00520
Date de la décision : 24/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-24;21.00520 ?
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