DLP/CH
URSSAF RHONE ALPES
C/
[D] [W]
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 19 JANVIER 2023
MINUTE N°
N° RG 22/00591 - N° Portalis DBVF-V-B7G-GAQC
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MACON, décision attaquée en date du 13 Octobre 2016, enregistrée sous le n° 15/573
APPELANTE :
URSSAF RHONE ALPES
[Adresse 6]
[Localité 1]
représentée par Me Florent SOULARD de la SCP SOULARD-RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON substitué par Me Marie RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉ :
[D] [W]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par Me Jacques BAUDOT de la SELARL CABINET COTESSAT-BUISSON, avocat au barreau de MACON/CHAROLLES substitué par Me Inès PAINDAVOINE, avocat au barreau de DIJON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Décembre 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller, Président,
Olivier MANSION, Président de chambre,
Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
Le 14 octobre 2015, le Régime Social des Indépendants (RSI) Auvergne - contentieux Sud Est a décerné une contrainte, signifiée le 29 octobre 2015, à l'encontre de M. [W], pour la somme de 8 987 euros correspondant aux régularisations des années 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et des cotisations impayées et majorations de retard du 4ème trimestre 2013, des 1er et 2ème trimestre 2015.
Par lettre recommandée du 12 novembre 2015, M. [W] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale aux fins de voir :
- déclarer recevable et bien fondée son opposition à la contrainte délivrée par le RSI Auvergne,
- débouter le RSI Auvergne de toutes ses demandes infondées,
- condamner le RSI Auvergne à lui payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudices moraux subis,
- ordonner au RSI Auvergne de retirer sa contrainte du 30 mars 2016,
- condamner le RSI Auvergne à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le RSI Auvergne aux entiers dépens de l'instance.
Par jugement du 13 octobre 2016, le tribunal :
- déclare recevable le recours de M. [W],
- annule la contrainte délivrée à son encontre le 14 octobre 2015 par le RSI Auvergne - contentieux Sud Est pour une somme de 8 987 euros correspondant aux régularisations des années 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et aux cotisations et majorations de retard du 4ème trimestre 2013, des 1er et 2ème trimestres 2015,
- dit que les frais de signification de ladite contrainte resteront à la charge du RSI Auvergne,
- condamne le RSI Auvergne à payer à M. [W] :
* la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts,
* la somme de 300 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que cette décision est rendue sans frais ni dépens.
Par déclaration enregistrée le 26 octobre 2016, le RSI Auvergne a relevé appel de cette décision.
Dans le dernier état de ses conclusions transmises par voie électronique le 1er décembre 2022 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, l'URSSAF Rhône-Alpes venant aux droits du RSI Auvergne demande à la cour de :
- déclarer l'appel recevable et bien fondé,
- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- valider la contrainte du 14 octobre 2015 signifiée le 29 octobre 2015 pour la somme actualisée à 6 804 euros pour les années 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014, outre majorations de retard complémentaires telles qu'elles peuvent figurer sur l'acte de signification et à parfaire jusqu'à complet règlement des cotisations qui les génèrent,
- condamner le débiteur à lui payer la somme de 6 804 euros,
- débouter M. [W] de toutes ses demandes,
- le condamner à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux dépens.
Par ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 28 novembre 2022 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, M. [W] demande à la cour de :
- déclarer juste et bien fondée son opposition à contrainte,
- annuler la contrainte inhérente à la période du 2ème trimestre 2015 (291 euros) et enjoindre à l'URSSAF de rectifier la cotisation due pour le 1er trimestre 2015, pour la période effective du 1er janvier 2015 au 18 février 2015,
- donner acte à l'URSSAF de l'annulation des cotisations 1er trimestre - 2ème trimestre 2015,
- dire n'y avoir lieu à prescription de la contestation pour les années 2010, 2011 et 2012,
- enjoindre à l'URSSAF de recalculer les cotisations et majorations de retard pour les années 2010 - 2011 - 2012, au seul titre de la retraite de base et de la retraite complémentaire,
- constater que l'URSSAF l'a contraint à exposer des frais de procédure qui auraient pu être liquidés en première instance,
- confirmer le jugement entrepris quant à l'application de l'article 700 à son profit et condamner l'URSSAF à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.
En application des articles 455 et 634 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il sera liminairement relevé que la caisse a annulé les cotisations appelées pour la période du 1er et 2ème trimestres 2015 suite à la dissolution de la société [5] à effet du 18 février 2015.
Reste soumise à la cour la question du bien-fondé du recouvrement au titre des cotisations des années 2010 à 2014, la recevabilité de la contestation de M. [W] et de la demande en paiement de l'URSSAF n'étant pas remise en cause.
SUR LE BIEN-FONDÉ DU RECOUVREMENT
M. [W] a été gérant majoritaire de la SARL [3] du 2 juin 2000 au 29 mai 2013, date de la liquidation judiciaire ayant mis fin à ses fonctions de gérant.
Il a occupé les mêmes fonctions au sein de la SARL [5], qu'il a créée, à compter du 12 septembre 2012 jusqu'au 18 février 2015, date de la radiation d'office de ladite société par le tribunal de commerce.
Il a été affilié au RSI pour l'activité de ces deux sociétés durant les périodes précitées.
Il est constant que le fait d'occuper la fonction de gérant majoritaire d'une SARL est assimilé à l'exercice d'une activité professionnelle, peu important le fait que la société n'ait aucune activité économique effective dès lors qu'elle n'a pas cessé d'exister.
Au cas présent, la contrainte litigieuse a été signifiée à M. [W] en sa qualité de gérant de la SARL [3] alors que cette société n'existait plus mais que son affiliation avait été maintenue en sa qualité de gérant de ladite entreprise.
En tant que travailleur indépendant et affilié comme tel à la caisse du RSI sans discontinuité jusqu'au 18 février 2015, M. [W] est redevable des cotisations et contributions afférentes à son activité professionnelle de gérant de société, peu important les modalités selon lesquelles il exerçait son activité.
S'il est établi que M. [W] a été radié comme dirigeant de la SARL [3] à compter de la liquidation judiciaire de cette société, son affiliation a cependant été maintenue en sa qualité de gérant majoritaire de la SARL [5] jusqu'au 18 février 2015, date de la radiation d'office de la société, étant précisé que les cotisations obligatoires de sécurité sociale sont des dettes personnelles de M. [W] et non des dettes de l'entreprise de sorte que M. [W] est redevable des cotisations litigieuses.
L'intimé expose avoir été salarié de la société [3] du 1er janvier 2010 au 29 mai 2013 et ce, parallèlement à sa fonction de gérant de cette société. La caisse admet qu'il justifie de son affiliation au régime général en qualité de salarié de la SARL [3] sur la période uniquement de juin 2013 au 1er janvier 2015 mais aucun document ne vient en justifier pour les années antérieures de 2010 à 2012.
Il résulte de l'article L. 622-2 du code de la sécurité sociale que lorsqu'une personne exerce simultanément une activité salariée et une activité non salariée, elle est affiliée à l'organisme d'assurance vieillesse dont relève son activité non salariée, même si celle-ci est exercée à titre accessoire, sans préjudice de son affiliation au régime des travailleurs salariés. S'agissant des cotisations santé, à défaut de preuve contraire, l'activité non salariée de M. [W] est présumée principale en vertu de l'article R. 613-3 du code de la sécurité sociale.
Ainsi, le fait d'exercer simultanément une activité salariée et une activité non salariée ne le dispensait pas de cotiser à titre obligatoire au RSI. Il devait être affilié et cotiser dans les deux régimes. Les simulations de cotisations régime général/RSI faites par M. [W] n'apporte aucun élément utile et ce dernier ne peut s'octroyer le statut de cotisant non prestataire à la date du 1er janvier 2010 au seul visa des bulletins de salaire de 2010 à 2012 qu'il communique en cause d'appel. Il ne conteste du reste pas qu'il était travailleur indépendant depuis le 2 juin 2000 et, par suite, prestataire du RSI, lorsqu'il a commencé son activité salariée le 1er janvier 2010. Son activité non salariée est considérée comme principale à compter de cette date (cf l'article R. 613-3 du code de la sécurité sociale) et le demeure jusqu'au 31 décembre 2012 de sorte que M. [W] ne peut être exonéré des cotisations maladie-maternité-indemnités journalières pour cette période.
Il se déduit des éléments susvisés que l'intimé a été à juste titre considéré comme prestataire du RSI de l'année 2010 jusqu'au 31 décembre 2012 et que la caisse était fondée à l'inscrire comme « non prestataire du régime RSI » à compter du 1er janvier 2013.
L'URSSAF fait justement observer que la situation de non prestataire induit que les cotisations maladie-maternité soient calculées sur le revenu réel de sorte qu'il n'y a pas lieu à application des bases minimales (art D. 612-5 al 2 du code de la sécurité sociale). En outre, la cotisation indemnités journalières n'est pas due en application de l'article D. 613-15 1° du même code.
L'URSSAF a par ailleurs à bon droit admis que M. [W] était redevable des cotisations obligatoires au titre des années 2013 et 2014 pour les cotisations retraite de base, retraite complémentaire et invalidité décès, les échéances des 1er et 2ème trimestres 2015 ayant été annulées et ne faisant plus partie de la contrainte litigieuse.
Enfin, la caisse URSSAF-SSI a régulièrement procédé au calcul actualisé des cotisations dues au titre des années 2010 à 2014, M. [W] n'apportant aucun élément de nature à démontrer que les revenus pris en considération seraient erronés ou que les calculs effectués par la caisse seraient entachés d'erreurs.
Il convient, en conséquence et par réformation du jugement attaqué, de valider la contrainte pour la somme ramenée à 6 804 euros, outre majorations de retard. Il n'y a pas lieu d'enjoindre à l'URSSAF de recalculer les cotisations et majorations de retard pour les années 2010 - 2011 - 2012, au seul titre de la retraite de base et de la retraite complémentaire,
SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTÉRÊTS
En l'absence de faute caractérisée de l'URSSAF, le jugement querellé sera réformé en ce qu'il a alloué 1 000 euros de dommages et intérêts à M. [W] qui sera débouté de sa demande à ce titre.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
La décision attaquée sera confirmée en ses dispositions relatives aux dépens, mais infirmée en ce qu'elle a condamné le RSI Auvergne à payer à M. [W] une somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il n'y a pas lieu à condamnation aux dépens d'appel.
Enfin, M. [W], qui succombe, supportera une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et sera débouté de sa demande formée à ce titre tant pour les frais d'avocat engagés tant en première instance qu'à hauteur de cour.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Donne acte à l'URSSAF de l'annulation des cotisations pour les 1er et 2ème trimestres de l'année 2015,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Valide la contrainte du 14 octobre 2015 pour la somme de 6 804 euros au titre des cotisations et majorations de retard des périodes de régularisation des années 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014,
Condamne M. [W] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 6 804 euros, outre majorations de retard complémentaires jusqu'à parfait règlement des cotisations,
Déboute M. [W] de ses demandes, y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [W] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 1 500 euros,
Dit n'y avoir lieu à condamnation aux dépens d'appel.
Le greffier Le président
Frédérique FLORENTIN Delphine LAVERGNE-PILLOT