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05/01/2023 | FRANCE | N°21/01581

France | France, Cour d'appel de Dijon, 3e chambre civile, 05 janvier 2023, 21/01581


FP/IC















[J] [K] [L]



C/



[E] [H] [O] [Y]

































































































Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL

DE DIJON



3ème chambre civile



ARRÊT DU 05 JANVIER 2023



N° RG 21/01581 - N° Portalis DBVF-V-B7F-F2XM



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : au fond du 08 novembre 2021,

rendue par le tribunal de grande instance de Dijon

RG : 19/01253









APPELANTE :



Madame [J] [K] [L] veuve [Y]

née le 25 Octobre 1932 à ALGOZ (Portugal)

domiciliée :

chez M. [T] [M] - [Adresse 4]

[Localité 11]



représentée p...

FP/IC

[J] [K] [L]

C/

[E] [H] [O] [Y]

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

3ème chambre civile

ARRÊT DU 05 JANVIER 2023

N° RG 21/01581 - N° Portalis DBVF-V-B7F-F2XM

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 08 novembre 2021,

rendue par le tribunal de grande instance de Dijon

RG : 19/01253

APPELANTE :

Madame [J] [K] [L] veuve [Y]

née le 25 Octobre 1932 à ALGOZ (Portugal)

domiciliée :

chez M. [T] [M] - [Adresse 4]

[Localité 11]

représentée par Me Sophie BELLEVILLE, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 47

INTIMÉ :

Monsieur [E] [H] [O] [Y]

né le 01 Janvier 1959 à [Localité 16] (70)

domicilié :

[Adresse 3]

[Localité 8]

représenté par Me Ladice DE MAGNEVAL, membre de la SARL LADICE AVOCATS, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 41

assistée de Me Alexandre LIARD, membre de la SCP DEGRE 7, avocat au barreau de BESANCON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 novembre 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Frédéric PILLOT, Président de chambre, Président, ayant fait le rapport,

Anne SEMELET-DENISSE, Conseiller,

Cendra LEBLANC, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Sylvie RANGEARD,

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 05 Janvier 2023,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Frédéric PILLOT, Président de chambre, et par Sylvie RANGEARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Du mariage de M. [F] [Y] et de Mme [A] [Z] est issu un fils, [E] [Y].

Le couple a divorcé et M. [F] [Y] a repris ses biens propres à savoir, un appartement sis [Adresse 5] et une maison sise [Adresse 7].

M. [F] [Y] a ensuite épousé le 9 octobre 1985 Mme [J] [K] [L], laquelle avait déjà deux enfants d'une précédente union, Mme [V] [K] [M] et M. [T] [L] [M].

Aux termes d'un acte reçu le 14 septembre 1992 par Me [G], notaire à [Localité 12], M. [F] [Y] a fait donation à son épouse de l'usufruit de l'universalité des biens meubles et immeubles, droits et actions mobiliers ou immobiliers au jour de son décès, l'acte précisant que la donation des immeubles ne recevra exécution que sur l'appartement de [Localité 11], et que la donataire devra dresser un inventaire au jour du décès.

M. [F] [Y] est décédé le 13 novembre 2009.

Me [I], notaire à [Localité 12], a ouvert la succession et établi un projet de déclaration successorale.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 29 juin 2010, M. [E] [Y] a interrogé Mme [K] [L] veuve [Y] sur le détail du patrimoine du défunt, sans succès.

Le 20 juillet 2010, M. [E] [Y] a alerté le notaire suite à des virements européens importants et a mandaté un avocat au Portugal qui a découvert que Mme [K] [L] veuve [Y] avait fait virer une somme de 82.050 euros du compte de la communauté vers un compte bancaire portugais au nom de sa fille peu de temps avant l'acquisition par celle-ci d'un appartement à [Adresse 15] au Portugal.

Un procès-verbal de carence a été établi le 17 octobre 2011 par le notaire.

Par acte du 12 juillet 2012, M. [E] [Y] a fait assigner Mme [K] [L] veuve [Y] devant le tribunal de grande instance de Dijon aux fins de partage judiciaire de la communauté existant entre M. [F] [Y] et sa seconde épouse et de la succession de son père.

Par jugement du 7 octobre 2013, le tribunal a fait droit à Ia demande d'ouverture des opérations liquidatives et de partage et a désigné Me [W] comme notaire commis.

Le juge commissaire a ordonné le 18 janvier 2016 aux organismes bancaires de communiquer toutes informations nécessaires aux opérations de partage.

Me [W] a ainsi pu découvrir l'existence :

- d'un compte de communauté ouvert au LCL et de deux comptes bancaires au Portugal, non mentionnés dans la déclaration de succession,

- de virements effectués depuis le compte de communauté LCL vers les deux comptes portugais au nom de Mme [J] [K] [L] et de sa fille [V] à hauteur de 82.050 euros avant le décès et 122.000 euros après le décès,

- d'un paiement par chèque de 10.000 euros tiré du compte de communauté LCL au profit de la SNC [N] [M] dont le gérant est [T], le fils de Mme [J] [K] [L],

- de l'ouverture d'une assurance vie VIVACCIO le 21 janvier 2009 au profit de [V] et de [T], alimenté après le décès par des fonds de la communauté,

- d'une indemnité de 27.000 euros versée par les anciens combattants à M. [F] [Y] sur le compte de communauté CCP.

Par acte du 27 février 2019, Mme [J] [K] [L] a été sommée de comparaître à l'office notarial le 14 mars 2019 pour signer l'acte de partage.

Elle ne s'est pas présentée.

Par acte du 18 avril 2019 converti en procès-verbal de recherches infructueuses, M. [E] [Y] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Dijon Mme [J] [K] [L] aux fins d'obtenir la conversion de l'usufruit en capital, en raison du recel de communauté réalisé et de l'abus de jouissance de l'usufruit.

Le 18 janvier 2019, Me [W] a déposé la copie authentique de l'acte liquidatif au greffe du tribunal.

Les parties ont été convoquées devant le juge commis le 16 mai 2019 et une ordonnance de jonction a été rendue le 4 juillet 2019.

Par acte du 30 avril 2019, M. [E] [Y] a assigné à domicile Mme [J] [K] [L].

Le juge de la mise en état a ordonné la jonction des dossiers par ordonnance du 11 juin 2019.

Par jugement du 8 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Dijon a :

- débouté Mme [J] [K] [L] Veuve [Y] de sa demande tendant à voir déclarer nulle la sommation de comparaître du 27 février 2019,

- dit n'y avoir lieu de déclarer inopposable à Mme [J] [K] [L] Veuve [Y] le projet d'état liquidatif dressé par Me [W],

- dit n'y avoir lieu de désigner un nouveau notaire pour procéder aux opérations de liquidation et partage de la communauté et de la succession de M. [F] [Y],

- dit que Mme [J] [K] [L] Veuve [Y] a commis un recel de communauté et doit être privée de tout droit sur la somme de 82.050 euros ainsi que sur la somme de 44.667.78 euros,

- condamné en conséquence Mme [J] [K] [L] Veuve [Y] à verser la somme de 126.717.78euros à M. [E] [Y] outre intérêts à compter du 13 novembre 2009,

- dit que Mme [J] [K] [L] Veuve [Y] a commis un abus de jouissance d'usufruit sur les avoirs bancaires de la succession et qu'à ce titre, il convient de prononcer l'extinction de son usufruit sur les avoirs bancaires,

- dit que Mme [J] [K] [L] veuve [Y] n'a pas commis d'abus de jouissance d'usufruit sur l'immeuble situé au [Adresse 5],

- débouté M. [E] [Y] de sa demande tendant à prononcer l'extinction immédiate et absolue de l'usufruit de la veuve sur l'ensemble des biens de la succession,

- condamné Mme [J] [K] [L] veuve [Y] à verser la somme de 167.540 euros à M. [E] [Y] au titre de la restitution des sommes sur lesquelles elle bénéficiait de l'usufruit,

- ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière,

- débouté Mme [J] [K] [L] veuve [Y] de sa demande reconventionnelle,

- renvoyé les parties devant Me [S] [W], notaire à [Localité 11], aux fins d'achever Ies opérations de compte liquidation et partage de la communauté des époux [Y] et de la succession de M. [F] [Y],

- condamné Mme [J] [K] [L] veuve [Y] à verser la somme de 3000 euros à M. [E] [Y] en réparation de son préjudice,

- condamné Mme [J] [K] [L] veuve [Y] à verser la somme de 3000 euros à M. [E] [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [J] [K] [L] veuve [Y] aux dépens de la présente procédure et aux dépens des précédentes procédures à hauteur de 764,80euros,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision. 

Par déclaration du 14 décembre 2021 enregistrée le 20 décembre 2021, Mme [J] [K] [L] a interjeté appel de ce jugement.

Saisi d'un incident par M. [E] [Y] aux fins de voir prononcer à titre principal la nullité de la déclaration d'appel, à titre subsidiaire, l'irrecevabilité des conclusions d'appel de Mme [J] [K] [L], prononcer la caducité de l'appel, constater l'extinction de l'instance d'appel, le magistrat de la mise en état a, par ordonnance du 9 juin 2022,

- rejeté les demandes de M. [E] [Y],

- ordonné à de Mme [J] [K] [L] de justifier de son domicile réel actuel sous 30 jours, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- condamné Mme [J] [K] [L] aux dépens ainsi qu'à verser à M. [Y] la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.

Par ordonnance du 30 juin 2022, le même magistrat a enjoint aux parties de rencontrer un organisme de médiation.

Saisie par Mme [J] [K] [L] aux fins de faire cesser l'exécution provisoire dont est assortie le jugement du 8 novembre 2021, la première présidente de la cour d'appel de Dijon a, par ordonnance de référé du 20 septembre 2022,

- dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité de l'assignation délivrée par Mme [J] [K] [L] le 9 février 2022,

- débouté Mme [J] [K] [L] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire prononcée par le jugement du 8 novembre 2021,

- déclaré sans objet la demande formée par M. [E] [Y] aux fins que Mme [J] [K] [L] justifie de son domicile,

- condamné Mme [J] [K] [L] aux dépens et à verser à M. [E] [Y] la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon le dernier état de ses conclusions n°2 transmises par voie électronique le 28 avril 2022, Mme [J] [K] [L], appelante, demande à la cour, infirmant le jugement, de :

- dire que Mme [Y] n'a pas commis de recel de communauté,

- dire qu'elle n'a pas commis de faute dans la gestion de l'usufruit communautaire,

- débouter M.[Y] de l'intégralité de ses demandes.

- accueillir la demande reconventionnelle de Mme [Y],

- dire que M. [E] [Y] a commis un recel successoral,

- ordonner le rapport de la valeur de l'appartement de [Localité 11] et des Assurances vie à la succession,

- condamner M. [E] [Y] à payer à Mme [Y] la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens.

Dans le dernier état de ses écritures transmises par voie électronique le 30 mai 2022 M. [E] [Y], intimé, et formant appel incident, demande à la cour, de :

- dire que Mme [J] [K] [L] veuve [Y] a commis un abus de jouissance d'usufruit sur les biens et avoirs de la succession de feu [F] [Y],

- prononcer l'extinction absolue et immédiate de l'usufruit dont Mme [J] [K] [L] veuve [Y] bénéficiait sur les biens dans la succession de feu [F] [Y],

- dire que par l'effet de l'extinction de l'usufruit, M. [E] [Y] est entier propriétaire de l'immeuble cadastré section [Cadastre 9], situé [Adresse 5] (21) et sur lequel Mme [J] [K] [L] veuve [Y] bénéficiait d'un usufruit,

- condamner Mme [J] [K] [L] veuve [Y] ainsi que tout mandataire auquel elle aurait confié la gestion de l'immeuble précité, à restituer à M. [E] [Y] le bail, les clés et le dépôt de garantie relatifs à l'immeuble cadastré section [Cadastre 9], situé [Adresse 5], sous astreinte de 150 euros / jour à compter de la décision à intervenir,

- condamner Mme [J] [K] [L] veuve [Y] à payer à M. [E] [Y] une somme de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts,

- dire que les fonds, droits et biens éventuellement détenus par le Notaire seront attribués par priorité à M. [E] [Y] dans la limite de ses droits conformément au projet établi par Maître [S] [W],

- débouter Mme [J] [K] [L] veuve [Y] de toutes demandes contraires

Y ajoutant,

- condamner Mme [J] [K] [L] veuve [Y] à payer à M. [E] [Y] une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens d'appel. 

La cour fait référence, pour le surplus de l'exposé des moyens des parties et de leurs prétentions, à leurs dernières conclusions récapitulatives sus-visées, en application de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture a été prononcée le 6 octobre 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 10 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

- Sur le recel de communauté reproché à Mme Inicia [K] [L] veuve [Y]

Le jugement critiqué a dit que Mme [J] [K] [L] veuve [Y] a commis un recel de communauté et doit être privée de tout droit sur la somme de 82.050 euros ainsi que sur la somme de 44.667,78 euros, ces sommes devant porter intérêts à compter du décès de M. [F] [Y] soit à compter du 13 novembre 2009. 

Au soutien de son appel, Mme [K] [L] soutient que l'existence du recel n'est pas prouvée alors qu'elle a pu donner des fonds à ses enfants dans la limite de la part lui revenant dans la communauté, part que le notaire a estimée à 38.136,85 euros et ajoute que la communauté lui doit une récompense pour avoir participé au financement des travaux sur la maison appartenant à M. [Y].

Elle fait valoir que ses comptes bancaires permettent très facilement de rapporter la somme due à la succession, que le placement sur une assurance vie VIVACIO ne s'agissait en aucune façon de détourner les fonds mais bien de faire fructifier un capital, et qu'un compte CCP a d'ailleurs été ouvert comme support à cette assurance vie pour y verser les fonds en cas de son pré-décès et aux fins de régler ce qui sera dû à M. [E] [Y].

Elle estime qu'il appartient à ce dernier de démontrer l'intention frauduleuse et elle explique qu'elle pensait en toute bonne foi que la succession avait été effectuée par le notaire qui a omis manifestement de déclarer de nombreux éléments, et que compte tenu de l'erreur de ce professionnel du droit, elle a de bonne foi pensé que la déclaration des éléments financiers avait été effectuée.

Elle ajoute qu'elle ne parlait ni n'écrivait le français ce qui démontre que son époux gérait tout, qu'elle n'était pas au courant de la situation financière et qu'elle a été dans l'incapacité de donner les éléments au Notaire, car M. [E] [Y] a pris tous les dossiers financiers de son père au moment du décès.

M. [E] [Y] conclut à la confirmation du jugement, soulignant que M. [F] [Y] disposait d'un patrimoine important constitué de biens propres avec notamment deux immeubles, soit une maison d'habitation [Adresse 7] (21) et un appartement [Adresse 5], ainsi que des avoirs financiers (indemnisation par l'Office National des Anciens Combattants, comptes bancaires'), mais que sa belle-mère a notamment dissimulé un compte de communauté et un détournement de fonds au profit de ses enfants, notamment de sa fille pour lui permettre d'acquérir un bien immobilier au Portugal, qu'elle a dissimulé deux comptes ouverts au Portugal, un actif propre du défunt composé d'indemnités des anciens combattants, et utilisé un compte de la communauté pour alimenter une assurance vie occulte VIVACIO dont les seuls bénéficiaires sont ses enfants, outre l'ouverture à son nom de deux comptes occultes LIONVIE et d'un compte LCL également occulte, ce pour effectuer des versements à ses enfants.

Il ajoute qu'elle a refusé d'indiquer la consistance complète et exacte du patrimoine en établissant une déclaration de succession incomplète, et qu'elle ne démontre pas que son époux était d'accord avec ces opérations.

Il rappelle que sans les investigations qui ont permis de découvrir ces éléments, ces détournements n'auraient pas été découverts.

En droit, l'article 1477 du code civil dispose que celui des époux qui aurait détourné ou recelé quelques effets de la communauté, est privé de sa portion dans lesdits effets.

Le recel et le divertissement existent dès que sont établis des faits matériels manifestant l'intention de porter atteinte à l'égalité du partage.

Le recel peut résulter d'une appropriation matérielle d'un bien pour le soustraire à la masse commune, d'une omission de déclarer un bien de la communauté que l'époux détient, du silence gardé sur une récompense due à la communauté. Le recel de communauté peut être commis avant ou après la dissolution de la communauté jusqu'au jour du partage.

L'intention frauduleuse de vouloir fausser les opérations liquidatives doit être démontrée.

La sanction prive le receleur dans sa part de l'actif recelé.

Aux termes de l'article 1433 du code civil que la communauté doit récompense à l'époux propriétaire toutes les fois qu'elle a tiré profit de biens propres. Il en est ainsi notamment quand elle a encaissé des deniers propres ou provenant de la vente d'un propre, sans qu'il en ait été fait emploi ou remploi.

L'article 1437 du même code dispose que toutes les fois qu'il est pris sur la communauté une somme, soit pour acquitter les dettes ou charges personnelles à l'un des époux, telles que le prix ou partie du prix d'un bien à lui propre ou le rachat des services fonciers, soit pour le recouvrement, la conservation ou l'amélioration de ses biens personnels et généralement toutes les fois que l'un des deux époux a tiré un profit personnel des biens de la communauté, il en doit la récompense.

En l'espèce, le notaire [W] a relevé au titre de l'inventaire de l'actif de communauté que le compte LCL n°[XXXXXXXXXX02] ouvert au nom des deux époux et créditeur de 13.956,15 euros au 2 novembre 2009 a été omis, tout comme les avoirs déposés sur un compte bancaire joint portugais au nom de Mme [Y] et de sa fille [V] [M], ainsi que la somme de 27.000 euros encaissée par la communauté correspondant à une indemnité d'ancien combattant personnelle à M.[Y].

Ainsi, comme justement relevé par le premier juge les pièces bancaires du compte dépôt LCL n° [XXXXXXXXXX02] révèlent que des virements sont intervenus depuis ce compte au bénéfice du compte joint ouvert entre Mme [J] [K] [L] et sa fille au Portugal Caixa Central de Crédito Agricola n°[XXXXXXXXXX013], entre le 13 décembre 2004 et le 07 août 2009, pour un montant de 82 05 euros, une récompense étant dès lors due à ce titre, selon décompte suivant :

- 10.600 euros le 13 décembre 2004 transférés au Portugal sur le compte de la Caixa Central de Crédito Agricola n°[XXXXXXXXXX013] de [V] [P] [M] ;

- 55.000 euros le 3 février 2005 et transférés au Portugal sur le compte de la Caixa Central de Credito Agricola n°[XXXXXXXXXX013] d'[J] [Y] au motif suivant : 'achat immobilier' ;

- 1.500 euros le 26 mars 2007 au profit du compte portugais de la Caixa Central de Credito Agricola n°[XXXXXXXXXX013] de [V] [M] au motif suivant 'frais de notaire' ;

- 9.150 euros le 30 mai 2008 au profit du compte portugais de la Caixa Central de Credito Agricola n°[XXXXXXXXXX013] de [J] [L] [Y] au motif suivant : 'travaux' ;

- 800 euros le 17 juillet 2009 au profit du compte de la Caixa Central de Credito Agricola n°[XXXXXXXXXX013] de [V] [P] [M] au motif suivant : "aide vacances" ;

- 5.000 euros le 7 août 2009 au profit du compte de la Caixa Central de Credito Agricola n°[XXXXXXXXXX013] de [J] [L] [Y] au motif suivant : 'travaux'.

La somme de 82.050 euros a été transférée du compte joint des époux, vers le compte portugais joint de [V] et [J], avant le décès de M.[Y], sans que Mme veuve [Y] n'ait mentionné au notaire l'existence de ces mouvements ni la récompense afférente au profit de la communauté.

Alors que M. [E] [Y] avait sollicité Mme [J] [K] [L] par courrier recommandé du 29 juin 2010 afin qu'elle confirme que l'ensemble du patrimoine « en France et à l'étranger » figurait sur la déclaration de succession, demande sans aucune réponse de celle-ci, ce n'est que par les démarches du conseil portugais de l'intimé qu'il a été découvert que le 10 mars 2005, la fille de Mme [J] [K] [L], [V] [K] [M], avait acquis un immeuble à [Adresse 15] (Portugal) au prix de 122 200 euros, financé par un apport de 62 200 euros et un emprunt de 60 000 euros, achat à relier avec le virement précité du 3 février 2005 d'un montant de 55 000 euros.

Le compte CAIXA CENTRAL DE CREDITO AGRICOLA MUTUO au Portugal n° [XXXXXXXXXX013], qui porte indifféremment le nom de « [J] ([K] [L] veuve) [Y] » ou de « [V] ([C]) ([P]) [K] [M] », compte joint de Mme [J] [K] [L] et de sa fille d'un premier lit, et le compte n°[XXXXXXXXXX014] au nom de [V] [K] [M], la fille de Mme [J] [K] [L], n'ont pas été déclarés lors de la succession.

Au surplus, l'examen des pièces du dossier montre également que la somme de 27.440,82 euros correspondant à une indemnité de M. [Y] au titre des anciens combattants a été versée le 14 mars 2005 sur le compte banque postale n°[XXXXXXXXXX01] correspondant à un compte de dépôt ouvert au nom de Mme [Y], compte créditeur de 7.745 euros au jour du décès, que le notaire a calculé le montant des intérêts depuis le décès sur cette somme de 27.000 euros dès lors qu'en vertu de l'article 1473 du code civil, les récompenses dues par la communauté portent intérêts de plein droit du jour de la dissolution, ces intérêts, arrêtés au premier semestre 2019 s'élevant à 5.220,31 euros, et c'est par des motifs appropriés que la cour adopte que le premier juge a considéré que cette indemnité propre à l'époux devait être mentionnée à titre de récompense due par la communauté à hauteur de 32 220,31 euros.

Les deux contrats d'assurance-vie souscrits avant le décès au LCL Assurances, soit un compte LIONVIE ATOUT PEP, créditeur de 34.504,98 euros le 7 décembre 2010 , et un compte LIONVIE DISTRIBUTION, créditeur de 10.162,80 euros à la date du rachat de ces assurances- vie, n'ont pas été déclarés à la succession par Mme [K] [L], soit un total de 44 667,78 euros.

Dès lors que les sommes litigieuses ont été dissimulées lors des opérations successorales, c'est en vain que Mme [K] [L] invoque son ignorance tout en affirmant que les sommes distribuées correspondent à la part dont elle estime disposer au titre de la communauté, le comportement global de Mme [K] [L], avec un silence constant sur la réalité du patrimoine du de cujus et de la communauté, des omissions de déclaration conjuguées avec des mouvements financiers importants et occultes au profit de sa fille [V], permettant de caractériser son intention délibérée de fausser les opérations liquidatives en portant atteinte à l'égalité du partage.

Mme [J] [K] [L] ne justifie pas de l'intention libérale de M. [E] [Y] envers [V], sa belle-fille.

Compte tenu de ces éléments, pris en leur ensemble, permettant de caractériser les éléments matériels et intentionnels du recel, c'est donc par une juste appréciation que le premier juge a considéré que Mme [K] [L], coupable de recel de communauté, devait être privé de tout droit sur les sommes de 82 050 euros et de 44 6667,78 euros, et devait ainsi être condamnée à verser la somme de 82 050 euros et de 44 667,78 euros à M. [E] [Y] en qualité d'héritier de M. [F] [Y], ces sommes devant portant intérêts à compter du décès de [F] [Y], soit le 13 novembre 2009.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

- Sur l'extinction de l'usufruit de Mme [K] pour abus

Le jugement critiqué a déchue Mme [K] [L] de son droit à usufruit sur les avoirs bancaires de la succession, mais non sur l'immeuble situé au [Adresse 5], et l'a condamné à verser à M. [E] [Y] la somme de 167 540 euros au titre de la restitution des sommes sur lesquelles elle bénéficiait de l'usufruit.

A hauteur de cour, Mme [K] [L] rappelle qu'elle ne sait ni lire ni écrire le français, mais que les obligations de l'usufruit qui pesaient sur elle ont été respectées, soulignant n'avoir jamais mis en péril les biens meubles ou immeubles laissés en usufruit.

Elle explique que l'appartement de la rue Vannerie est loué, qu'elle conserve les loyers et règle les charges de copropriété lui incombant.

S'agissant des fonds donnés à ses enfants, elle rappelle avoir souscrit une assurance vie devant permettre de dédommager M. [E] [Y] dans le cadre de ses droits dans la succession, que les sommes qui ont été données à sa fille [V] l'ont été du vivant de M. [F] [Y], en exécution d'une volonté du couple, M. [F] [Y] ayant également aidé M. [E] [Y].

Mme [K] [L] ajoute que l'absence d'inventaire ne peut constituer une faute et que l'absence de caution n'entraîne pas extinction de l'usufruit, d'autant qu'elle a placé des fonds sur l'assurance-vie pour remplir [E] [Y] de ses droits, et que cette question de la garantie se heurte au régime du contrat de mariage des époux [Y] qui dispense l'époux survivant de caution et d'emploi.

Elle reproche au notaire chargé de liquider la communauté et la succession d'avoir outrepassé ses fonctions, ne lui étant pas permis de donner son avis sur le caractère incertain de la restitution de l'usufruit.

M. [E] [Y] reproche au premier juge de n'avoir pas étendu l'extinction de l'usufruit sur l'ensemble des biens, et à sa belle-mère de n'avoir pas fait dresser d'inventaire après le décès de son père, le privant de la possibilité d'exercer un contrôle sur le contenu du patrimoine du défunt, et permettant à Mme [K] [L] de s'exonérer de toute obligation d'emploi qui aurait pu lui être imposée, alors qu'elle a détourné des fonds occultes vers des comptes occultes au Portugal ou au bénéfice direct de ses enfants d'un premier lit, qu'elle a alimenté l'assurance-vie VIVACIO au bénéfice de ses seuls enfants.

Il considère que en réalité, Mme [J] [K] [L] a méticuleusement vidé l'ensemble des comptes bancaires de la communauté au profit de ses enfants d'un premier lit.

Il conclut à l'extinction de l'usufruit de Mme [K] [L] sur l'ensemble des biens, de sorte à ce qu'il puisse être alloti par des attributions en pleine propriété.

En droit, il résulte de l'article 578 du code civil que l'usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété comme le propriétaire lui-même mais à la charge d'en conserver la substance.

L'article 587 du code civil dispose que si l'usufruit comprend des choses dont on ne peut faire usage sans les consommer comme l'argent, l'usufruitier a le droit de s'en servir, mais à la charge de rendre, à la fin de I'usufruit, soit des choses de même quantité et qualité, soit leur valeur estimée à la date de la restitution.

L'article 618 du même code précise que l'usufruit peut aussi cesser par l'abus que l'usufruitier fait de sa jouissance, soit en commettant des dégradations sur le fonds, soit en le laissant dépérir faute d'entretien.

Les juges peuvent, suivant la gravité des circonstances, ou prononcer l'extinction absolue de I'usufruit, ou n'ordonner la rentrée du propriétaire dans la jouissance de l'objet qui en est grevé, que sous la charge de payer annuellement à l'usufruitier, ou à ses ayants-cause, une somme déterminée, jusqu'à l'instant où l'usufruit aurait du cesser.

L'article 1094-3 du code civil précise que les enfants ou descendants pourront, nonobstant toute stipulation contraire du disposant, exiger, quant aux biens soumis à l'usufruit, qu'il soit dressé inventaire des meubles ainsi qu'état des immeubles, qu'il soit fait emploi des sommes et que les titres au porteur soient, au choix de l'usufruitier, convertis en titres nominatifs ou déposés chez un dépositaire agréé. »

La notion sanctionne tout manquement de l'usufruitier à son obligation de se comporter en bon père de famille qui serait de nature à compromettre la conservation et la restitution de la chose même en l'absence de toute intention de nuire.

En l'espèce, compte tenu de la donation entre époux du 14 septembre 1992, Mme veuve [Y] bénéficie de l'usufruit des biens mobiliers et immobiliers.

Postérieurement au décès de son époux, Mme [K] [L] a fait usage du compte joint LCL n°[XXXXXXXXXX02], alors renommé à son seul nom en débitant les sommes de :

- 70.000 euros par virement à [V] le 24 novembre 2010 avec le motif "achat immobilier",

- 49.000 euros par virement à [V] le 3 décembre 2010,

- 3.000 euros par virement à son profit le 12 mai 2011 versés sur le compte joint portugais d'[J] et [V],

- 10.000 euros par chèque le 28 novembre 2011 au profit de la SNC [N]-[M] (bureau de tabac) dont le gérant est sa belle-fille et l'associé, son fils [T].

Toujours après le décès, Mme [K] [L] a effectué plusieurs virements sur le compte initialement joint CCP n°[XXXXXXXXXX01], soit 6.540 euros le 29 avril 2010, 17.000 euros le 15 janvier 2012 et 12.000 euros le 12 juin 2014, ce compte, au 12 novembre 2018 étant seulement créditeur de 58 euros.

Enfin, Mme [K] [L] n'a pas mentionné avoir souscrit, avant le décès de son époux, une assurance-vie VIVACCIO auprès de la CNP ouverte le 21 janvier 2009 avec une somme de 2.500 euros provenant du compte joint des époux à la Banque Postale n°[XXXXXXXXXX01], ce contrat d'assurance-vie, qui serait désormais créditeur de 90.511 euros au 31 décembre 2018, mentionnant au titre des bénéficiaires les enfants de Mme [J] [Y] à hauteur de 50 % chacun, ce qui permettra de faire sortir ces sommes de la succession future de Mme [K] [L], ce au préjudice de M. [F] [Y], les versement suivants ayant été effectués depuis le compte de communauté CCP 02 528 10 G 025,

- le 29.04.2010 : 6 540 euros

- le 23.11.2012 : 80 euros

- le 15.01.2013 : 17 000 euros

- le 12.06.2014 : 12 000 euros

Si l'usufruitier a le droit de jouir de toute espèce de fruits et de consommer les biens donnés, à charge de les restituer, les motifs précédemment énoncés au titre du recel ont monté que Mme [K] [L] n'a pas fait usage des fonds de son époux et des fonds de la communauté dans son seul intérêt, mais a dissimulé à la succession les comptes bancaires et l'assurance-vie, des transferts d'argent ayant été réalisés au profit de ses enfants qui ont pu acheter des biens immobiliers, ces agissements compromettants la restitution de la créance dont est titulaire M. [E] [Y] contre Mme veuve [Y].

Dans le contexte de dissimulation précédemment décrit au titre du recel de communauté, et tout en transmettant postérieurement au décès les fonds soumis à usufruit à ses propres enfants, Mme [J] [K] [L], qui n'a pas conservé la substance de la chose soumise à usufruit, a commis un abus de jouissance, de sorte que c'est par une juste appréciation que le premier juge l'a déchue de son droit à usufruit sur les avoirs bancaires de la succession et l'a condamné à verser à ce titre la somme de 167 540 euros à M. [E] [Y].

Concernant le bien immobilier du [Adresse 5], alors que le local est régulièrement entretenu et mis en location, aucun abus de jouissance n'est caractérisé, de sorte qu'il convient de rejeter la demande incidente de M. [F] [Y].

Le jugement critiqué sera confirmé en ce sens.

- Sur le recel de succession reproché à M. [E] [Y]

Le jugement critiqué a rejeté la demande de Mme [K] [L] visant à voir condamner M. [E] [Y] au titre du recel.

Mme [K] [L] soutient que son beau-fils a bénéficié de donations de son père qui n'ont pas été mentionnées dans la succession, ce qu'elle estime constitutif d'un recel, s'agissant d'un appartement sis à [Adresse 6], dépendant de la communauté, qui aurait été donné à M. [E] [Y] le 8 décembre 2000 puisqu'il ne prouve pas avoir procédé au paiement du prix de vente, stipulé « hors la comptabilité du notaire », ainsi que d'assurances-vie, l'une au profit de M. [E] [Y], l'autre au profit de sa fille, dont il ne justifie pas, et qu'il a conservé les meubles de la maison de [Localité 10], sans qu'aucun compte ni inventaire n'ait été effectué.

Elle sollicite donc incidemment que le recel successoral soit constaté et qu'il entraîne la privation des droits du receleur sur les sommes diverties ainsi que l'obligation de les restituer avec intérêts calculés à compter de la date d'appropriation injustifiée.

M. [E] [Y] oppose à Mme [K] [L] la prescription de sa demande, comme étant présentée par cette dernière dans ses conclusions plus de 10 ans après le décès de M. [F] [Y].

Concernant l'appartement de [Localité 8], il précise que l'acte notarié de vente mentionne une vente au prix de 130.000 francs "payé comptant par l'acquéreur ce jour même en dehors de la comptabilité du notaire soussignée au vendeur qui le reconnaît et lui en donne quittance" et qu'il appartient à sa belle-mère de démontrer le contraire.

En droit, l'article 778 du code civil prévoit que sans préjudice de dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

Les écritures de Mme veuve [Y] montre qu'elle agit sur le seul fondement du recel.

En cette matière, il est constant qu'aucun texte spécial ne régit la prescription de l'action en recel successoral, le délai prévu à l'article 780 du code civil ne portant que sur la faculté d'option de l'héritier qui dispose de 10 ans pour prendre parti à défaut de quoi il est réputé renonçant. Dans ces conditions, l'action en recel successoral est soumis à la prescription de droit commun quinquennale prévue par l'article 2224 du code civil qui dispose que les actions personnelles et mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Alors qu'il revient à celui qui prétend que l'action est prescrite de le démontrer, force est de constater que M. [F] [Y] se borne à affirmer que l'action est prescrite sans produire aucune preuve sur la date à laquelle Mme [K] [L] a connu ou aurait du connaître les faits de détournements, de sorte que la fin de non recevoir tirée de la prescription doit être rejetée.

Concernant l'appartement situé [Adresse 6], bien dépendant de la communauté existante entre M. [F] [Y] et Mme [Y], celle-ci considère que le bien a été donné, et non vendu, à [E] [Y] par acte du 8 Décembre 2000, l'acte de vente authentique mentionnant que le prix de 130.000 F soit 19.318.37 euros « a été payé comptant par l'acquéreur en dehors de la comptabilité du Notaire soussigné au vendeur qui le reconnaît et lui en donne quittance. », en affirmant que cet appartement n'a jamais été payé par M. [E] [Y].

Il est jugé que si la quittance d'une somme payée en dehors de la comptabilité du notaire ne fait foi que jusqu'à preuve contraire, celle-ci ne peut être rapportée, en la cause, que dans les conditions prévues par les articles 1341 et suivants du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

Or Mme veuve [Y] ne rapporte aucun élément de preuve de l'absence de paiement par M. [E] [Y], de sorte que le recel ne peut être retenu de ce chef.

Le jugement critiqué sera confirmé sur ce point.

Concernant les deux assurances vie alléguées par Mme veuve [Y], contractées par M. [F] [Y], l'une au profit de M. [E] [Y] et l'autre au profit de sa fille, l'appelante ne fournit aucun élément suffisant de nature à caractériser un fait matériel de détournement, alors que, comme rappelé par le premier juge, la non révélation de l'existence d'un contrat d'assurance vie par un héritier n'est pas constitutive en elle-même d'un recel successoral, faute d'élément intentionnel, dès lors que le capital payable au décès du souscripteur et les primes versées, sauf preuve du caractère manifestement exagéré de celles-ci, ne sont pas soumis a rapport à la succession.

Le jugement critiqué sera confirmé sur ce point.

- Sur l'état liquidatif

Le premier juge a dit que le notaire devra reprendre ainsi son projet d'acte liquidatif en fonction des éléments alors jugés.

Mme [K] explique que le projet d'état liquidatif doit être modifié pour tenir compte de la récompense due par la succession à la communauté pour les travaux effectués par le couple [Y] dans la maison d'habitation.

Elle reproche également au notaire d'avoir commis des erreurs :

- en page 6-7 de l'état liquidatif, Me [W] liste des liquidités à porter en actif de communauté pour 84.141.85 euros alors que page 13, le total porté n'est que de 57.509.53 euros

- il est indiqué dans le jugement querellé que l'appelante sera privée de tous ses droits sur la somme de 44.667.78euros, que cette somme serait le cumul de deux assurances-vie :

- un compte LIONVIE Atout PEP d'un montant de 34.5040.98 euros au 7/12/2010,

- un compte LION Distribution d'un montant de 10.162.80 euros à la date de rachat de ces assurances-vie.

Elle fait valoir que ces sommes ne sont pas prises arrêtées valeur décès, des fonds propres ont pu y être placés, et qu'à défaut de justifier que des fonds propres ont été placés, il convient de les rejeter ou de considérer que c'est la valeur décès qui doit être indiquée.

M. [E] [Y] oppose à sa belle-mère le caractère irrecevable de sa nouvelle demande en appel, concernant les travaux effectués dans la maison qui ouvriraient droit à récompense, outre le fait que ces allégations ne sont pas justifiées selon lui.

Concernant la récompense alléguée par Mme veuve [Y], due par la succession à la communauté au titre des travaux effectués par le couple [Y] dans la maison d'habitation, demande non formulée en première instance mais recevable, en l'absence de production du rapport du juge commis, puisque en relation directe avec les opérations liquidatives et tendant aux mêmes fins, mais demande nullement détaillée ni précisément chiffrée dans les écritures de l'appelante, la cour ne pouvant dés lors que constater que l'appelante ne fournit aucune pièce, ni justificatif ni facture, de nature à permettre d'en apprécier le bien fondé.

Dans ces conditions, la demande de Mme veuve [Y] à ce titre, formulée pour la première fois à hauteur de cour, sera rejetée, le jugement critiqué étant au surplus confirmé sur la reprise de l'état liquidatif par le notaire.

- Sur Ies dommages et intérêts

Pour allouer à M. [E] [Y] des dommages et intérêts s'élevant à la somme de 3 000 euros, le premier juge a retenu l'attitude de Mme [K] [L] qui a contraint M. [E] [Y] à effectuer un nombre conséquent de recherches pendant plusieurs années sur les comptes et placements financiers alors qu'elle a volontairement caché l'existence du compte joint LCL sur lequel la majorité des fonds ont transité avant de créditer un compte au Portugal, puis qui a réalisé, après le décès et suite au courrier du 29 juin 2010 de son beau-fils, de nombreux autres versements au seul profit de ses enfants, et que M. [E] [Y] a ainsi subi un préjudice.

M. [E] [Y] sollicite le versement d'une somme de 60 000 euros à titre d'indemnisation. Il rappelle avoir subi un préjudice résultant du comportement fuyant de Mme [K] [L] qui n'a pas déclaré sa nouvelle adresse, ni établi d'inventaire, le contraignant à solliciter les administrations après avoir saisi le juge, et qui a dissimulé et détourné des comptes au profit de ses enfants, en connaissance de cause puisqu'il avait adressé le 29 juin 2010 un courrier recommandé à sa belle-mère afin d'obtenir les éléments constituant le patrimoine de son père (courrier réceptionné par celle-ci le 2 juillet 2010).

Mme [K] [L] ne conclut pas précisément sur ce point, mais explique au fil de ses écritures, concernant les autres points, ne pas maîtriser la langue française, et n'avoir commis ni recel, ni faute de gestion dans l'exercice de ses prérogatives d'usufruitier.

En droit, il résulte de l'article 1240 du code civil que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l'espèce le recel successoral a été retenu.

M. [E] [Y] a subi un préjudice, en ce que, outre l'affliction liée à la privation partielle d'une partie de la succession à l'initiative de sa belle-mère, il a du procéder à de nombreuses démarches liquidatives puis judiciaires, sources de tracas et dérangements, en lien avec le comportement fautif de Mme Da Conceico [L], qui a délibérément omis de déclarer à la succession des biens de communauté et des biens propres du père de M. [E] [Y] au bénéfice de ses propres enfants.

C'est donc a bon droit que le premier juge a retenu le principe d'une condamnation de Mme [K] [L] à verser des dommages-intérêts à ce titre à M. [E] [Y], une juste appréciation du préjudice subi imposant de porter la somme due à ce titre à la somme de 6 000 euros.

- Sur les autres demandes

Mme [J] [K] [L], qui succombe au principal, supportera les entiers dépens d'appel.

Il est équitable de condamner Mme [J] [K] [L], à verser à M. [E] [Y] la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la Cour, sauf en ce qu'il a fixé à la somme de 3 000 euros le montant des dommages-intérêts dus par Mme [J] [K] [L] à M. [E] [Y],

Et statuant à nouveau dans cette limite,

Condamne Mme [J] [K] [L] à verser à M. [E] [Y] la somme de 6 000 euros de dommages et intérêts,

Y ajoutant,

Rejette la demande de Mme [J] [K] [L] de récompense au titre des travaux effectués,

Condamne complémentairement Mme [J] [K] [L] à payer à M. [E] [Y] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

Condamne Mme [J] [K] [L] aux dépens d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/01581
Date de la décision : 05/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-05;21.01581 ?
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