DLP/CH
[Z] [W]
C/
URSSAF - AGENCE BOURGOGNE
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2022
MINUTE N°
N° RG 20/00111 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FOAR
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pôle social du Tribunal Judiciaire de MACON, décision attaquée en date du 02 Janvier 2020, enregistrée sous le n° 19/00241
APPELANT :
[Z] [W]
[Adresse 1]
[Localité 3]
comparant en personne
INTIMÉE :
URSSAF - AGENCE BOURGOGNE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par Me Florent SOULARD de la SCP SOULARD-RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON substitué par Me Marie RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Novembre 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller, Président,
Olivier MANSION, Président de chambre,
Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [W] est affilié au régime social des indépendants (RSI) depuis le 1er novembre 2001 en qualité de gérant de la SARL [W].
N'ayant pas réglé les cotisations dues au titre du 4ème trimestre 2018 et de la régularisation de l'année 2018, une mise en demeure lui a été adressée le 9 janvier 2019, réceptionnée le 10 janvier suivant, pour un montant de 29 336 euros, soit 27 887 euros de cotisations et 1 449 euros de majorations de retard.
Par requête du 9 mai 2019, M. [W] a saisi le tribunal judiciaire d'une opposition à la contrainte émise à son encontre. Il a notamment demandé au tribunal :
- de démontrer l'impartialité du tribunal, notamment quant à la rémunération des assesseurs,
- à titre principal, de prononcer la radiation des recours faute pour le SSI de prouver sa compétence et sa qualité pour agir,
- à titre subsidiaire, de surseoir à statuer afin de permettre au tribunal de fournir les différentes pièces demandées, telles que la justification du paiement des assesseurs du pôle social du tribunal de grande instance de Mâcon par le Ministère de la Justice, la justification de la prestation de serment des assesseurs, la justification de l'absence de conflits d'intérêts des assesseurs, les attestations de formation des assesseurs, la transmission des huit documents issus de la loi de financement de la sécurité sociale de 2017-1836.
Par jugement du 2 janvier 2020, le tribunal a rejeté l'ensemble des demandes de M. [W] et validé la contrainte émise le 19 avril 2019 et signifiée le 25 avril 2019 par l'URSSAF pour un montant de 29 336 euros correspondant aux cotisations (27 887 euros) et majorations de retard (1 449 euros) dues au titre du 4ème trimestre 2018 et de la régularisation de l'année 2018, M. [W] étant condamné au paiement de ces sommes.
Par déclaration enregistrée le 21 février 2021, M. [W] a relevé appel de cette décision.
Dans ses écritures reçues à la cour le 5 août 2022 et reprises à l'audience sans ajout ni retrait au cours des débats, il demande à la cour de :
- infirmer le jugement déféré,
- annuler les mises en demeure et la contrainte litigieuse pour vice de forme,
- débouter l'URSSAF de l'intégralité de ses demandes,
- condamner l'URSSAF à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Par ses dernières écritures reçues à la cour le 17 octobre 2022 et reprises à l'audience sans ajout ni retrait au cours des débats, l'URSSAF demande à la cour de :
- déclarer le présent recours recevable pour avoir été introduit dans la forme et les délais requis par la loi,
- sur le fond, débouter M. [W] de l'ensemble de ses requêtes,
- confirmer le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Mâcon le 2 janvier 2020 en ce qu'il a validé la contrainte du 19 avril 2019 et condamné M. [W] à son entier paiement, majoré des frais de signification de la contrainte,
- constater que M. [W] n'a pas procédé au règlement des sommes issues de ce jugement,
Au surplus,
- condamner M. [W] à 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner à 2 000 euros de dommages-intérêts,
- condamner le même à une amende civile de 5 000 euros et aux entiers dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il doit être liminairement relevé que le jugement déféré n'est pas remis en cause en ses dispositions relatives à la recevabilité de l'opposition formée par M. [W], à l'impartialité du tribunal ainsi qu'en celles relatives à la qualité de la caisse à agir et à sa capacité à recouvrer les cotisations.
SUR LA RÉGULARITÉ DES MISES EN DEMEURE ET DE LA CONTRAINTE
M. [W] soutient que tant les mises en demeure que la contrainte sont irrégulières car non motivées, insuffisamment détaillées sur le montant réclamé et comportant des erreurs de date ainsi que dans les numéros des mises en demeure figurant sur la contrainte. Il ajoute que « les lignes déductions sur contraintes sont inexplicites ». Il prétend que ces documents ne lui ont donc pas permis de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation. Il en déduit que les mises en demeure doivent être annulées sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un grief et que la contrainte est subséquemment nulle.
Il est constant que la contrainte qui fait expressément référence à la mise en demeure préalable, qui n'a fait l'objet d'aucune contestation et porte les mentions prescrites à peine de nullité par l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, est parfaitement valable. Pour autant, l'envoi d'une mise en demeure adressée au redevable constitue un préalable obligatoire, conditionnant le recours à la contrainte. Elle doit préciser la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent, ainsi que la période à laquelle elle se rapporte.
Ici, la mise en demeure du 9 janvier 2019 comporte l'ensemble des éléments permettant à M. [W] de connaître la nature, l'étendue et la cause de son obligation en ce qu'elle mentionne :
- le nom du cotisant, son numéro et son identifiant NNI,
- les coordonnées de l'organisme créancier,
- la mention « le Directeur (ou son délégataire) »,
- le détail des périodes concernées par le recouvrement: 4ème trimestre 2018 et la régularisation 2018,
- les textes de référence et les voies de recours au verso du document,
- le motif de mise en recouvrement : en la colonne vide « Versement(s) jusqu'au 03/01/2019 »
- la nature des sommes reclamées et le montant de la créance à recouvrer : 'allocations familiales et contributions sociales personnelles obligatoires, majorations et pénalités', ainsi que le detail des montants par nature de cotisations.
Ces mentions sont suffisamment claires, précises et explicites pour permettre à M. [W] de connaître aussi bien la cause, la nature que le montant de sa dette.
S'agissant des erreurs de date et de numéros alléguées, M. [W] expose que la contrainte fait référence à une mise en demeure en précisant un numéro qui ne correspond pas à cette dernière, l'huissier ayant repris une référence interne qui ne correspond pas au numéro d'accusé réception de la lettre recommandée.
Or, il doit être observé avec l'URSSAF qu'aucun texte ne l'oblige à identifier ses mises en demeure sous une forme ou une autre, étant observé que la mise en demeure du 09/01/2019, n° dossier 2018117218, a été adressée par lettre recommandée 2C142 299 32 684 et que c'est ce numéro qui figure également sur la contrainte.
Enfin, la contrainte précise le numéro de la mise en demeure visée et comporte de surcroît des éléments précis sur la cause, la nature et l'étendue de l'obligation du cotisant.
En conséquence, la mise en demeure litigieuse ainsi que la contrainte sont régulières. M. [W] sera donc, par confirmation du jugement déféré, débouté de sa demande en nullité.
SUR LE BIEN-FONDÉ DE LA CONTRAINTE
M. [W] ne formule aucune contestation sur le bien-fondé de la contrainte délivrée à son encontre.
Conformément à l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale, les cotisations personnelles d'allocations familiales des travailleurs indépendants sont calculées sur la base des revenus professionnels de l'intéressé, servant de base au calcul de l'impôt sur le revenu.
En vertu de l'article L131-6-2 du mémé code, les cotisations sont calculées :
- à titre provisionnel, sur la base du revenu d'activité de l'avant-dernière année,
- lorsque le revenu d'activité de l'année au titre de laquelle elles sont dues est définitivement connu, les cotisations font l'objet d'une régularisation sur la base de ce revenu.
Il est constant qu'il appartient à l'opposant à la contrainte de rapporter la preuve du bien-fondé de son opposition et non à l'organisme de recouvrement de prouver le bien-fondé de sa créance.
Au cas présent et en l'absence d'éléments nouveaux soumis à son appréciation, la cour estime que les premiers juges, par des motifs pertinents qu'elle approuve, ont fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties en retenant le bien-fondé des sommes sollicitées par l'URSSAF.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a validé la contrainte en son entier montant et condamné M. [W] au paiement des cotisations et majorations de retard, ainsi qu'aux frais de signification de la contrainte.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
L'article 32-1 du code de procédure civile ne saurait être mis en 'uvre que de la propre initiative du juge saisi, les parties ne pouvant avoir aucun intérêt moral au prononcé d'une amende civile à l'encontre de son adversaire. La demande formée à ce titre par l'URSSAF est donc sans objet.
La demande de dommages et intérêts de M. [W], qui succombe, sera rejetée comme non fondée.
Celle formée par l'URSSAF sera également rejetée en l'absence de preuve d'un préjudice personnel, direct et certain, le préjudice invoqué ressortissant plutôt des frais irrépétibles engagés.
La décision attaquée sera confirmée en ses dispositions relatives aux dépens.
Les dépens d'appel seront supportés par M. [W] qui supportera également une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Rejette les demandes de dommages et intérêts de l'URSSAF et de M. [W],
Dit n'y avoir lieu à amende civile,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [W] et le condamne à payer à l'URSSAF la somme de 2 000 euros,
Condamne M. [W] aux dépens d'appel.
Le greffier Le président
Frédérique FLORENTIN Delphine LAVERGNE-PILLOT