VCF/IC
L'AUXILIAIRE
C/
[T] [X]
[G] [Z] épouse [X]
GROUPAMA RHONE ALPES AUVERGNE
S.A.R.L. CHARPENTE LABARGE
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE DIJON
1ère chambre civile
ARRÊT DU 25 OCTOBRE 2022
N° RG 21/00043 - N° Portalis DBVF-V-B7F-FTH7
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : jugement du 07 décembre 2020,
rendu par le tribunal judiciaire de Mâcon- RG : 18/00137
APPELANTE :
L'AUXILIAIRE
[Adresse 2]
[Localité 4]
assistée de Me Myriam KORT-CHERIF, membre de la SELARL BRAILLON LABAUNE KORT-CHERIF SAGNES, avocat au barreau de MACON, plaidant, et
représentée par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126
INTIMÉS :
Monsieur [T] [X]
né le 01 Avril 1949 à [Localité 6] (Maroc)
[Adresse 1]
[Localité 7]
,
Madame [G] [Z] épouse [X]
née le 28 Juillet 1961 à [Localité 6] (Maroc)
[Adresse 1]
[Localité 7]
assistés de William ROLLET, avocat au barreau de MACON, plaidant et représentés par Me Jean-Vianney GUIGUE, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE, postulant, tous deux membres de la SELAS ADIDA ET ASSOCIES, vestiaire : 38
GROUPAMA RHONE ALPES AUVERGNE:
[Adresse 3]
[Localité 4]
S.A.R.L. CHARPENTE LABARGE:
[Adresse 8]
[Localité 5]
représentées par Me Géraldine GRAS-COMTET, avocat au barreau de MACON
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 06 septembre 2022 en audience publique devant la cour composée de :
Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, Président, ayant fait le rapport,
Sophie DUMURGIER, Conseiller,
Leslie CHARBONNIER, Conseiller,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Aurore VUILLEMOT, Greffier
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 25 Octobre 2022,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Aurore VUILLEMOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon un contrat de construction de maison individuelle du 20 novembre 2001, les époux [T] [X] / [G] [Z] ont confié à la société Prost Construction la réalisation de 5 pavillons sur un terrain leur appartenant sis à [Localité 7].
Les ouvrages ont été réceptionnés sans réserve :
- le 18 juillet 2003 pour les pavillons 1, 2, 4 et 5
- le 8 décembre 2003 pour le pavillon 3.
Par courrier du 21 décembre 2012, les époux [X] informaient la société L'Auxiliaire que les murs extérieurs des pavillons 2 et 4 étaient affectés de fissures.
Au titre de l'assurance dommages-ouvrage, la société L'Auxiliaire a mandaté un expert qui, dans ses rapports du 14 février 2013, a retenu que les désordres étaient de nature purement esthétique et n'avaient aucune conséquence sur la solidité des ouvrages.
Par actes des 21 et 24 mai 2013, les époux [X] ont fait citer le liquidateur judiciaire de la société Prost Construction et la société L'Auxiliaire, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Mâcon, aux fins essentiellement d'obtenir l'organisation d'une expertise judiciaire portant sur les pavillons, 2, 3, et 4, ainsi que sur leur maison d'habitation.
Par actes du 30 mai 2013 et des 24, 25, 26 et 28 juin 2013, la société L'Auxiliaire a appelé en la cause différentes entreprises intervenues dans la réalisation des travaux de construction des pavillons, et leurs assurances, parmi lesquelles la société Charpente Labarge, titulaire du lot charpente des pavillons, assurée auprès de Groupama Auvergne Rhône-Alpes.
Par ordonnance de référé du 30 juillet 2013, réformée par un arrêt de la présente cour rendu le 9 décembre 2014, une expertise a été confiée à Mme [L], sa mission consistant notamment à examiner les désordres affectant les pavillons 2, 3 et 4, et la maison des époux [X], à donner son avis sur la nature de ces désordres et leurs conséquences et à déterminer les travaux susceptibles d'y remédier.
Mme [L] a rendu son rapport le 26 juin 2017.
Par acte du 21 décembre 2017, les époux [X] ont fait citer la société L'Auxiliaire devant le tribunal de grande instance de Mâcon afin d'obtenir sa condamnation au paiement de diverses indemnités.
Par acte du 16 juillet 2019, la société L'Auxiliaire a appelé en la cause la société Charpente Labarge et son assurance, Groupama.
Par jugement du 7 décembre 2020, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire de Mâcon a :
- dit que les désordres affectant les pavillons 2, 3 et 4 constituent des dommages décennaux au titre de l'article 1792 du code civil,
- dit que la compagnie L'Auxiliaire, en sa qualité d'assureur au titre de la garantie décennale de la société Prost Constructions, est tenue à la réparation de ces désordres,
- dit que la société Charpente Labarge et la compagnie Groupama sont tenues in solidum avec la compagnie L'Auxiliaire, à réparer les désordres affectant le pavillon 3,
- condamné la compagnie L'Auxiliaire à verser aux époux [X] les indemnités suivantes :
. 313 728,30 euros au titre des travaux réparatoires à effectuer sur les pavillons 2, 3 et 4, outre réévaluation sur la base de l'indice BT01 du mois de juin 2017,
. 1 000 euros en réparation de leur préjudice moral consécutif aux pertes de temps et tracasseries,
- condamné in solidum d'une part la compagnie L'Auxiliaire et d'autre part la société Charpente Labarge et Groupama, à verser aux époux [X], la somme de 12 700 euros, outre réévaluation sur la base de l'indice BT01 du mois de juin 2017, au titre de la garantie décennale à laquelle ils sont tenus pour le pavillon 3,
- rejeté la demande de la compagnie L'Auxiliaire à être relevée et garantie par la société Labarge et Groupama des sommes dues au titre du pavillon 3,
- débouté les époux [X] de leur demande au titre de l'indemnisation d'un préjudice de jouissance,
- condamné la compagnie L'Auxiliaire
. aux dépens comprenant ceux de la procédure de référé expertise et les frais de l'expertise judiciaire,
. à verser aux époux [X] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 12 janvier 2021, la société L'Auxiliaire a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes du dispositif de ses conclusions notifiées le 29 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien des prétentions, la société L'Auxiliaire demande à la cour, au visa notamment de l'article 1792 du code civil, de :
' infirmer le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté la demande des époux [X] au titre du préjudice de jouissance,
' s'agissant des pavillons 2 et 4,
- juger les demandes des époux [X], prescrites et donc irrecevables
- subsidiairement, juger leurs demandes infondées
- très subsidiairement, laisser à la charge du maître de l'ouvrage une part de responsabilité de 10 %,
' s'agissant du pavillon 3,
- rejeter toute demande formée à son encontre,
- subsidiairement, vu l'article 1147 du code civil alors en vigueur, condamner in solidum la société Charpente Labarge et son assureur, Groupama, à la relever et garantir de l'intégralité des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au bénéfice des époux [X],
' condamner les époux [X] :
- aux entiers dépens de première instance et d'appel comprenant les frais d'expertise judiciaire,
- à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes du dispositif de leurs conclusions notifiées le 12 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien des prétentions, les époux [X] demandent à la cour, au visa notamment des articles 2241 et 1792 du code civil, de :
' confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :
- rejeté leur demande indemnitaire au titre du préjudice de jouissance
- limité leur préjudice au titre de la perte de temps et tracasserie à la somme de 1 000 euros,
' faisant droit à leur appel incident, condamner la compagnie L'Auxiliaire à leur payer les sommes suivantes :
- 100 euros par mois et par pavillon affecté, au titre du préjudice de jouissance, à compter du 21 décembre 2012 et jusqu'à parfait paiement des sommes dues au titre des travaux réparatoires,
- 5 000 euros de dommages-intérêts pour pertes de temps et tracasseries,
' débouter la compagnie L'Auxiliaire de l'intégralité de ses prétentions,
' condamner la compagnie L'Auxiliaire, ou qui mieux le devra, en tous les dépens, comprenant notamment la procédure de référé expertise et les frais d'expertise judiciaire,
' condamner la compagnie L'Auxiliaire à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes du dispositif de leurs conclusions notifiées le 17 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien des prétentions, la société Charpente Labarge et Groupama demandent à la cour de :
' confirmer le jugement déféré en ce qu'il les a condamnées, in solidum avec la compagnie L'Auxiliaire, à verser aux époux [X] la somme de 12 700 euros, outre réévaluation sur la base de l'indice BT01 du mois de juin 2017, au titre de la garantie décennale s'agissant du pavillon 3
' rejeter la demande de la compagnie L'Auxiliaire à être relevée et garantie de toute condamnation s'agissant des sommes dues au titre du pavillon 3,
' condamner la compagnie l'Auxiliaire :
- aux entiers dépens de l'instance,
- à leur payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La clôture est intervenue le 23 juin 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les désordres des pavillons 2 et 4
' Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
Selon l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans le corps des conclusions.
En l'espèce, si la société L'Auxiliaire soulève l'irrecevabilité des demandes des époux [X], elle rappelle que le délai de 10 ans est tout à la fois un délai pour agir et un délai d'épreuve et elle n'invoque que l'écoulement du délai d'épreuve sans apparition de désordres présentant un degré de gravité tel qu'ils puissent être de nature décennale au sens de l'article 1792 du code civil.
En conséquence, elle développe un moyen tendant au débouté des époux [X] mais elle ne développe aucun moyen au soutien d'une fin de non-recevoir.
En outre, il résulte de la chronologie des faits de l'espèce que moins de 10 ans se sont écoulés entre la réception des pavillons 2 et 4, le 18 juillet 2003 et la saisine en mai 2013 du juge des référés par les époux [X]. Or, en application de l'article 2241 du code de procédure civile selon lequel la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion, le délai pour agir a été, en l'espèce, interrompu jusqu'à l'arrêt de cette cour du 9 décembre 2014. L'action au fond des époux [X] introduite le 21 décembre 2017 n'est donc pas tardive ou prescrite.
' Sur la nature décennale des désordres
L'article 1792 du code civil définit les désordres de nature décennale comme les dommages, qui, même s'ils résultent d'un vice du sol, compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination.
En l'espèce, le premier juge a retenu une impropriété à la destination, en considérant que la destination contractuellement convenue des pavillons 2 et 4 n'était pas l'habitabilité mais la location pour habitation et dans ses conclusions, l'expert a évoqué cette question de l'impropriété à la destination.
Toutefois, il ressort clairement tant des investigations menées par l'expert, notamment de l'étude hydrogéologique qu'elle a fait réaliser, que des conclusions des parties, que c'est au regard de l'atteinte à la solidité des pavillons 2 et 4 qu'il convient d'apprécier le caractère décennal des désordres dont ils sont affectés, étant observé qu'un bâtiment à usage d'habitation dont la solidité est compromise est nécessairement impropre à sa destination.
La cour relève que les constatations et conclusions de l'expert, telles que retranscrites dans le tableau constituant l'annexe 5 de son rapport, ne sont contestées ou discutées par aucune des parties, qui toutes se réfèrent à ce tableau.
En conséquence, la cour se fonde sur les éléments figurant dans cette pièce.
' S'agissant du pavillon 2
Il est affecté de fissures tant à l'extérieur qu'à l'intérieur du bâtiment, dont les premières sont apparues en 2012 sur les deux principales façades. Ces fissures ont pour cause des fondations insuffisantes eu égard à la nature du sol sur lequel il a été construit, cette nature n'ayant pas été convenablement analysée en l'absence d'une étude de sol.
Ces fissures, dont l'expert a pointé, au moins pour certaines, le caractère évolutif, sont de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage.
La société L'Auxiliaire soutient que ces désordres ne peuvent être couverts par la garantie décennale au motif que ce n'est que postérieurement au délai d'épreuve qu'ils ont présenté un caractère de gravité les faisant entrer dans le champ de la garantie décennale.
Toutefois, il y a lieu de rappeler qu'ouvrent droit à garantie décennale les désordres futurs soit ceux qui, au moment où ils sont dénoncés, n'ont pas encore produit un dommage au sens de l'article 1792 du code civil, mais dont il est certain qu'à raison de leur évolution, ils porteront atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendront impropre à sa destination dans un délai prévisible, ce délai pouvant aller au-delà des dix ans de la garantie.
En l'espèce, il peut être retenu que tout ou partie des fissures affectant les deux principales façades du pavillon 2, dénoncées par les époux [X] dès leur courrier du 21 décembre 2012, n'ont pas produit de dommage décennal avant le 18 juillet 2013. Il est néanmoins établi par l'ensemble des investigations menées par l'expert qu'à raison de leur caractère évolutif, ces fissures compromettent, déjà à ce jour, la solidité du pavillon 2.
C'est donc à bon droit qu'au titre des désordres affectant le pavillon 2, les époux [X] entendent obtenir des dommages-intérêts de la société L'Auxiliaire, en sa qualité d'assureur de garantie décennale de la société Prost Construction.
' S'agissant du pavillon 4
Les désordres consistent essentiellement en des fissures extérieures, qui ne sont pas évolutives et qui, même à terme, ne compromettent pas, de manière certaine, la solidité de l'immeuble ; elles ne constituent que des désordres d'ordre esthétique.
L'expert a également pointé un désordre en couverture sans conséquence sur la destination du pavillon 4 ou sur sa solidité.
En conséquence, les époux [X] doivent être déboutés de leur demande tendant à obtenir des dommages-intérêts d'un montant égal au coût de reprise des désordres affectant le pavillon 4.
' Sur la réparation des dommages affectant le pavillon 2
Il résulte de l'article 1792 du code civil que tout constructeur est responsable de plein droit des dommages de nature décennale et qu'il ne peut s'exonérer de cette responsabilité qu'en prouvant que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
En l'espèce, eu égard au contrat de construction de maison individuelle, conclu le 20 novembre 2001 entre les époux [X] et la société Prost construction, les dommages décennaux du pavillon 2 lui sont nécessairement imputables et son assureur de responsabilité décennale doit sa garantie. Invoquant la présence de végétaux à proximité du pavillon 2, la société L'Auxiliaire fait valoir que les époux [X] sont responsables à hauteur de 10 % des désordres dont ils réclament réparation.
Toutefois, l'existence d'un lien de causalité entre les végétaux et les fissures affectant le pavillon 2 n'étant pas établi, la société L'Auxiliaire ne peut pas se prévaloir d'une cause étrangère. Elle est ainsi tenue à l'intégrale réparation des dommages subis par les époux [X].
L'expert a évalué les travaux à réaliser sur le pavillon 2 pour mettre fin aux dommages décennaux et ceux qui leur sont accessoires à la somme globale HT de 117 428 euros.
S'agissant des travaux de reprise des fissures extérieures, la société L'Auxiliaire lui reproche d'avoir retenu un devis d'un montant de 110 178 euros alors qu'un autre devis était produit à hauteur de 46 028 euros. Sur ce point, il convient d'observer que le second devis est émis sous certaines réserves, notamment la faisabilité des travaux d'injection qui en sont l'objet. Il n'est donc pas certain que les travaux énoncés dans ce devis soient de nature à faire cesser les dommages. Il n'est donc pas possible de le retenir.
La somme de 110 178 euros étant constitué à hauteur de 2 780 euros de frais d'études (études d'exécution, plans, PAQ et PPSPS), il n'y a pas lieu de majorer le coût des travaux d'une somme globalement évaluée par l'expert à 5 500 euros, au titre des mêmes frais d'études.
En revanche, compte-tenu de la nature des travaux et de leur but, il est nécessaire de prévoir des frais de maîtrise d'oeuvre représentant 10 % du coût des travaux, soit 11 742,80 euros.
Globalement, c'est donc une somme globale HT de 129 170,80 euros, soit avec un taux de TVA à 20 %, une somme globale TTC de 155 004,96 euros qui revient aux époux [X], sauf à actualiser cette somme entre juin 2017, date du rapport de Mme [L], et la date à laquelle la société L'Auxiliaire a réglé la somme mise à sa charge par le jugement dont appel, qu'elle a exécuté à titre provisoire, ce par référence à l'indice BT01 qui était de 106,2 en juin 2017.
Sur les désordres du pavillon 3
Il s'agit d'infiltrations affectant plusieurs pièces du pavillon, dont le salon, consécutives à un défaut d'étanchéité de la couverture.
Leur caractère décennal n'est pas discuté, l'impropriété à la destination d'habitation étant évidente dès lors que le bâtiment n'est pas intégralement hors d'eau.
' Sur l'objet de l'assurance de garantie décennale liant la société Prost Construction à la société L'Auxiliaire
Il ressort des pièces 21 et 22 de la société L'Auxiliaire que la société Prost Construction a le 25 septembre 1997, souscrit auprès d'elle, un contrat de responsabilité décennale des constructeurs de maisons individuelles. Elle expose que chaque opération de construction d'une maison individuelle devait être déclarée pour être assurée et elle prétend que le pavillon 3 n'a pas été assuré au titre de la garantie décennale par la société Prost Construction.
Pour leur part, les époux [X] soutiennent que la garantie décennale est une assurance de responsabilité pour laquelle il n'est nullement besoin de déclarer les chantiers bénéficiant de cette garantie, à la différence de la garantie dommages-ouvrage qui est une assurance de chose et qui est donc attachée à la chose.
Il convient de rappeler les stipulations du contrat liant la société L'Auxiliaire à la société Prost construction.
Il est indiqué à l'article 2 des conditions particulières du contrat - appelées conventions spéciales et référencées S017F2, référence rappelée dans le contrat du 25 septembre 1997 - que l'objet de la garantie est précisé dans un avenant d'opération relatif à chaque maison individuelle assurée.
Les articles 3 et 4 de ces conditions particulières évoquent chaque opération de construction déclarée en vertu du paragraphe 14-1 des conditions générales.
Il est d'ailleurs due une prime d'assurance pour chacune des maisons déclarées, le montant de la prime et les plafonds de garantie étant fixés par référence au prix de chacune de ces maisons.
Malgré l'absence de production des conditions générales du contrat, ces éléments suffisent à établir que chaque opération de construction d'une maison individuelle n'entre dans le champ d'application du contrat d'assurance décennale que sous réserve d'une déclaration donnant lieu à un avenant contractuel.
Il ressort d'ailleurs des pièces produites aux débats que 4 des 5 pavillons construits en exécution du contrat du 20 novembre 2001 ont fait l'objet d'une déclaration et d'un avenant : cf avenants 143 à 146 au contrat responsabilité décennale des constructeurs de maisons individuelles portant sur les pavillons 1, 2, 4 et 5, notamment l'avenant 145 produit in extenso par la société L'Auxiliaire qui indique expressément en page 2/2 qu'il est relatif au pavillon 4.
Les époux [X] font valoir que :
- sur certaines copies de l'avenant 145 produites de manière incomplète, il a été ajouté en page 1/2, la mention manuscrite 'lot 3"
- la société L'Auxiliaire a nécessairement disposé du contrat du 20 novembre 2001 et savait donc bien que 5 pavillons étaient construits et qu'entre les chiffres 2 et 4, il y avait nécessairement un 3
- la société L'Auxiliaire a attesté avoir assuré le pavillon 3 au titre de l'assurance dommages-ouvrage : cf pièce 25 de leur dossier.
Bien qu'exacts, ces éléments, confrontés à ceux qui précédent, ne permettent pas de déduire que la société Prost Construction a effectivement souscrit un contrat d'assurance décennale portant sur le pavillon 3, étant précisé que :
- la construction de ce pavillon n'a manifestement pas suivi le même rythme de construction que les 4 autres,
- les époux [X] agissent à l'encontre de la société L'Auxiliaire en sa qualité d'assureur de responsabilité décennale et non en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage.
En conséquence, il convient sur ce point d'infirmer le jugement déféré et de mettre hors de cause la société L'Auxiliaire.
' Sur la réparation des désordres
La disposition du jugement déféré ayant condamné la société Charpente Lafarge et Groupama à payer aux époux [X] la somme de 12 700 euros, outre indexation, n'est contestée par aucune de ces parties.
Elle doit donc être confirmée, étant précisé que la somme a été réglée au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré.
Sur les préjudices accessoires des époux [X]
Les demandes indemnitaires des époux [X] ne sont dirigées qu'à l'encontre de la société L'Auxiliaire. La cour n'examine donc la réalité et l'importance des préjudices accessoires qu'ils allèguent qu'en ce qu'ils concernent le pavillon 2.
' Sur le préjudice de jouissance
Le pavillon 2 n'est pas occupé par les époux [X] eux-mêmes qui le louent.
Le préjudice de jouissance allégué ne peut donc être que d'ordre financier.
Or, les époux [X] ne soutiennent, et a fortiori ne démontrent, pas, soit avoir consenti ou devoir consentir de manière certaine des remises de loyer aux locataires de ce pavillon, soit ne pas avoir pu conserver les locataires de ce pavillon ou n'avoir pas pu le maintenir en location en raison des désordres qui l'affectent.
Enfin, rien ne permet de retenir que le pavillon 2 ne sera pas habitable pendant les travaux de reprise des désordres et de leurs conséquences.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté les époux [X] de leur demande indemnitaire au titre d'un préjudice de jouissance dont la réalité n'est pas établie
' Sur le préjudice constitué par la perte de temps et les tracasseries
Sur ce point, le jugement déféré doit être confirmé tant en ce qu'il a retenu que ce préjudice était caractérisé, les premières démarches des époux [X] remontant à décembre 2012, qu'en ce qu'il en a assuré la juste et intégrale réparation par l'allocation de 1 000 euros de dommages-intérêts.
Sur les frais de procès
En application de l'article 696 du code de procédure civile, la disposition du jugement déféré relative aux dépens doit être confirmée et les dépens d'appel doivent être supportés par la société L'Auxiliaire.
Il convient de confirmer les dispositions du jugement déféré relatives à l'application de l'article 700 du code de procédure civile au seul profit des époux [X] à hauteur de 3 000 euros, somme mise à la charge de la société L'Auxiliaire.
En cause d'appel, seuls les époux [X] peuvent prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Mais dans les circonstances particulières de l'espèce, il n'est pas inéquitable de laisser à leur charge les frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :
- condamné la société mutuelle L'Auxiliaire à payer aux époux [T] [X] / [G] [Z] la somme de 1 000 euros en réparation de leur préjudice moral consécutif aux pertes de temps et tracasseries,
- débouté les époux [X] de leur demande indemnitaire au titre d'un préjudice de jouissance,
- condamné la société mutuelle L'Auxiliaire :
. aux entiers dépens comprenant les frais de procédure de référé expertise ainsi que les frais d'expertise judiciaire,
. à payer aux époux [X] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Pour le surplus, infirme le jugement déféré ; statuant à nouveau et ajoutant,
' Sur les pavillons 2 et 4
- déclare les époux [X] recevables en leurs demandes,
- déboute les époux [X] de leurs demandes en réparation des désordres affectant le pavillon 4,
- condamne la société mutuelle L'Auxiliaire à payer aux époux [X] la somme globale de 155 004,96 euros TTC, au titre des désordres affectant le pavillon 2, somme à actualiser au mois de son paiement par référence à l'indice BT01 qui était de 106,2 en juin 2017,
' Sur le pavillon 3,
- déboute les époux [X] de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société mutuelle L'Auxiliaire,
- condamne la SARL Charpente Labarge et Groupama Rhône-Alpes Auvergne à payer aux époux [T] [X] / [G] [Z] la somme de 12 700 euros au titre des désordres affectant le pavillon 3, somme à actualiser au mois de son paiement par référence à l'indice BT01 qui était de 106,2 en juin 2017,
' condamne la société mutuelle L'Auxiliaire aux dépens d'appel,
' dit n'y avoir lieu à aucune condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Le Greffier,Le Président,