KG/CH
S.A.S. FAIVRE prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège
C/
CAISSE DE MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE (CMSA) DE FRANCHE COMTÉ
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2022
MINUTE N°
N° RG 20/00194 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FOTM
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pôle social du Tribunal Judiciaire de VESOUL, décision attaquée en date du 10 Mars 2017, enregistrée sous le n° 201600166
Arrêt Au fond, origine Cour d'Appel de BESANCON, décision attaquée en date du 23 Octobre 2018, enregistrée sous le n° 18/00206
Arrêt Au fond, origine Cour de Cassation de PARIS, décision attaquée en date du 23 Janvier 2020, enregistrée sous le n° C 18-26.340
APPELANTE :
S.A.S. FAIVRE prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Florent SOULARD de la SCP SOULARD-RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉE :
CAISSE DE MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE (CMSA) DE FRANCHE-COMTÉ
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Mme [F] [V] (Chargée d'audience) en vertu d'un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Septembre 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Katherine GONTHIER, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Olivier MANSION, Président de chambre,
Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,
Katherine GONTHIER, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
La société Faivre (la société) qui est une entreprise spécialisée dans le secteur du
commerce de gros de céréales, de tabac non manufacturé, de semences et d'aliments de bétail est affiliée depuis le 1er janvier 1992 à la Caisse de mutualité sociale agricole de France-Comté (la MSA).
A la suite d'un contrôle opéré le 18 juillet 2012, l'inspection du travail a établi, le 4 février 2013, à son encontre un procès-verbal de travail dissimulé par dissimulation
d'heures effectuées par un des salariés agricoles de la société, M. [P] [W],embauché à temps partiel en 1997.
Le procès-verbal a été transmis au procureur de la République de Vesoul qui a notifié au responsable légal de la société un rappel à la loi, en application de l'article 41-10 du code de procédure pénale, notamment pour exécution d'un travail dissimulé, entre le 1er juillet 2012 et le 18 juillet 2012.
La caisse a ensuite notifié à la société, le 13 octobre 2015, un redressement de cotisations, "consécutif au constat des infractions de travail dissimulé", d'un montant de 119 768,61 euros pour l'emploi de ce salarié du 1er juillet 1997 au 31 mars 2013 et l'a mise en demeure, le 22 décembre 2015, de payer ladite somme.
Après rejet de son recours amiable, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vesoul d'une contestation de ce redressement.
Par jugement du 10 mars 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale l'a déboutée de son recours et condamnée à payer à la caisse la somme de 119 768,61 euros au titre du redressement de cotisations sociales dues entre 1997 et 2013.
Par arrêt du 23 octobre 2018, la cour d'appel de Besançon a infirmé le jugement en
toutes ses dispositions et a condamné la société à payer à la caisse la somme de 45 951,97 euros au titre des cotisations sociales dues entre 2008 et le 1er trimestre 2013.
Par arrêt en date du 23 janvier 2020 (pourvoi n° 18-26.340) la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 23 octobre 2018 et a renvoyé devant la cour d'appel de Dijon aux motifs suivants :
" Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse de la mutualité sociale agricole de Franche-Comté (la caisse) a notifié, le 13 octobre 2015, à la société Faivre (la société) un redressement de cotisations sociales portant sur les années 1997 à 2013, fondé sur le procès-verbal d'un inspecteur du travail établi le 4 février 2013 constatant le travail dissimulé par dissimulation d'heures de travail d'un salarié embauché à temps partiel ; que la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour dire la caisse recevable à agir pour les cotisations postérieures au 1er janvier 2008 et condamner la société au paiement des cotisations dues entre 2008 et 2013, l'arrêt retient qu'il résulte de l'application combinée des articles L. 725-7 du code rural et de la pêche maritime et L. 244-3 du code de la sécurité sociale que les actions résultant du recouvrement de cotisations dues en cas de fraude ou de fausses déclarations se prescrivent par cinq ans à compter de la mise en demeure et que le délai de prescription court à compter du jour où l'organisme social a eu connaissance du travail dissimulé ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société qui faisait valoir qu'il lui était uniquement reproché d'avoir conclu avec le salarié un contrat de travail ne comportant aucune indication horaire et aucune mention obligatoire spécifique au contrat de travail à temps partiel et que le parquet de Vesoul ne l'avait pas poursuivie pour le délit de travail dissimulé et avait classé la procédure sans suite après notification d'un simple rappel à la loi pour la seule période du 1er juillet au 18 juillet 2012, pour en déduire que la fraude ou la fausse déclaration n'étant pas caractérisée à son encontre, il ne pouvait être fait application d'une prescription autre que la prescription triennale des cotisations sociales prévue à l'article L. 725-7 du code rural et de la pêche maritime, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ."
La société demande d'infirmer le jugement en date du 10 mars 2017 et en statuant à nouveau d'annuler la procédure de redressement de la MSA en raison de nombreuses irrégularités par absence de mentions légales et non respect du contradictoire et à titre subsidiaire de minorer le redressement dans la mesure où la prescription qui s'applique est de trois ans, la fraude n'étant pas caractérisée.
Elle demande à titre infiniment subsidaire si l'intention frauduleuse est reconnue, de minorer le redressement opéré dans la mesure où la prescription qui s'applique est de cinq ans et en toute hypothése de condamner la MSA au remboursement des sommes versées à titre conservatoire, assorties de la majoration de 0,2 % par mois écoulé à compter de la date de perception indue par l'URSSAF et de condamner la MSA à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
La MSA demande de :
"Recevoir la concluante en ses explications.
Débouter la SAS FAIVRE de toutes ses demandes, fins et conclusions.
Confirmer le jugement n° 050/2017 du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Vesoul en date du 10 mars 2017.
En conséquence :
Dire et juger que c'est à bon droit que la MSA a émis un redressement de cotisations a l'encontre de la SAS FAIVRE en suivant les conclusions du procés-verbal de travail dissimulé du 4 février 2013,
Dire et juger que c'est à bon droit que la MSA a effectué un redressement de cotisations sur vingt ans en application de la prescription de droit commun, la SAS FAIVRE ayant commis la fraude pour travail dissimulé par dissimulation d'heures, Valider la rnise en demeure du 22 décembre 2015,
Condamner la SAS FAIVRE au paiement de la somme de 119.768,61 euros à la MSA au titre des cotisations sociales restant dues pour les années 1997 a 2013,
Condamner la SAS FAIVRE au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile."
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues lors de l'audience.
MOTIFS
La société FAIVRE soulève la nullité de la procédure de contrôle diligentée par l'inspecteur du travail ainsi que la mise en demeure du 22 décembre 2015.
- Sur la régularité de la procédure de contrôle
* Sur la nullité du redressement se basant sur le procès-verbal du 4 février 2013 :
La société soutient que le procés-verbal de travail dissimulé en date du 4 février 2013 ne peut servir de base au redressement opéré dans la mesure où le contrôle a eu lieu le 18 juillet 2012 alors que la loi du 17 décembre 2012 modifiant les dispositions de l'article L 725-3-2 du code de la sécurité sociale ne s'applique qu'aux procés-verbaux établis après le 1er janvier 2013.
Il soutient également que l'URSSAF devait engager un nouveau contrôle.
L'URSSAF fait valoir que les nouvelles dispositions de l'article L 725-3-2 du code de la sécurité sociale s'appliquent au redressement opéré, la loi du 17 décembre 2012 ne distinguant pas si les faits et infractions contrôlés sont postérieurs au 1er janvier 2023 ni la circulaire ACOSS du 28 mars 2013.
L'article L243-7-5 du code de la sécurité sociale dispose que :
«Les organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 peuvent procéder au redressement des cotisations et contributions dues sur la base des informations contenues dans les procés-verbaux de travail dissimulé qui leur sont transmis par les agents mentionnés a l'article L. 8271-1-2 du code du travail. Ces organismes ainsi que ceux mentionnés a l'article L. 611-8 du présent code mettent en recouvrement ces cotisations et contributions ».
L'article L 8271-1-2 du code du travail liste les agents de contrôles compétents parmi lesquels figurent, au 1° et 4°, « les inspecteurs et les contrôleurs du travail» et « les agents des organismes de sécurite sociale et des caisses de mutualité sociale agricole agrées à cet effet et assermentés ».
L'article L725-3-2 du code rural et de la péche maritime précise que :
« L'article L. 243-7-5 du code de la sécurité sociale est applicable aux régimes de protection sociale agricole, sous réserve de remplacer les références aux articles L. 213-1, L. 611-8 et L.752-4 du même code par la référence a l'article L. 723-3 du présent code ».
Les nouvelles dispositions de l'article L 243-7-5 du code de la sécurité sociale entrant en vigueur au 1er janvier 2013 permettent d'étendre le choix de la procédure quant à la constatation du travail dissimulé et à son redressement à une autre autorité que celle de l''URSSAF, en l'occurence à la caisse de mutualité sociale agricole agréée.
Les dispositions précitées sont des régles de procédure et donc d'application immédiate.
De plus, l'article L 725-3-2 du code de la sécurité sociale ne distingue pas si les faits objets du contrôle sont antérieurs au 1er janvier 2013, date d'entrée en vigueur des nouvelles dispositions de l'article L 243-7-5 du code de la sécurité sociale.
En conséquence, la MSA peut procéder au redressement des cotisations sociales dues sur la base d'informations contenues dans le procés-verbal relevant un travail dissimulé au 4 février 2013 effectué par un inspecteur du travail, et ce bien que le contrôle a eu lieu le 18 juillet 2012.
Le moyen soulevé par la société est donc inopérant à ce titre.
* Sur la violation du principe du contradictoire :
La société soulève la non conformité de la notification du redressement de la MSA du 13 octobre 2015 et le non respect du délai d'observation.
En application de l'article R 724-9 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable au litige, à l'issue du contrôle, la caisse de mutualité sociale agricole adresse aux personnes contrôlées, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa réception, un document rappelant l'objet du contrôle et mentionnant les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle et, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature et du mode de calcul des redressements d'assiette et de taux envisagés, ainsi que des éventuelles majorations et pénalités, ou du montant des prestations à reverser, tels que connus à cette date.
La MSA produit dans les débats la notification de redressement en date du 13 octobre 2015 (pièce n° 2) qui mentionne la référence du procés-verbal relevant un travail dissimulé, le mode de calcul, le montant des sommes réclamées et les périodes visées par les états récapitulatifs.
Elle a régularisé par courrier en date du 16 novembre 2015 le détail du mode de calcul.
La notifiation de redressement susvisé est donc conforme aux dispositions de l'article R 724-9 du code rural et de la pêche maritime.
En ce qui concerne le délai d'observations, la société a sollicité par courrier en date du 10 novembre 2015 des explications sur le mode de calcul alors que la notification du redressement a été faite le 13 octobre 2015, que ces données ont été explicitées par courrier de la MSA en date du 16 novembre 2015 que la société n'a pas formulé des observations par la suite ni sollicité un nouveau délai.
La MSA a donc respecté le délai de 30 jours entre la notification du redressement et la mise en demeure.
La procédure de contrôle diligentée par l'URSSAF est régulière.
- Sur la validité de la mise en demeure du 22 décembre 2015
La société fait valoir que la MSA ne justifie ni de la nature ni du montant du redressement et son mode de calcul dans la lettre de mise en demeure du 22 décembre 2015 ce qui justifie la nullité de la procédure de redressement.
La MSA estime que la mise en demeure est règulière.
Aux termes de l'article R 725-6 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable au litige, la mise en oeuvre de la procédure de recouvrement doit être précédée d'une mise en demeure adressée au débiteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, le mettant en demeure de s'acquitter de sa dette dans le délai d'un mois. Cette mise en demeure doit, sous peine de nullité, indiquer :
1º) la nature et le montant des cotisations impayées ou des remboursements réclamés et les périodes pour lesquelles les cotisations ou les remboursements sont dus, ainsi que, le cas échéant, le montant et le mode de calcul des majorations et pénalités de retard ;
2º) les voies de recours dont dispose le redevable en application des articles R 142-1 et R 142-18 du code de la sécurité sociale et les délais dans lesquels elles peuvent être exercées.
La mise en demeure doit ainsi permettre au débiteur d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.
Il résulte à la lecture de la mise en demeure du 22 décembre 2015 que celle-ci détaille les cotisations dues, leurs montants, les pénalités de retard et une notice explicatives (pièce n° 2).
L'URSSAF a ensuite régularisé par lettre en date du 16 novembre 2015 le détail du mode de calcul ce qui permet de dire que la mise en demeure est suffisamment compléte pour que la société comprenne ce qu'il lui est réclamé (pièce n° 4).
La mise en demeure du 22 décembre 2015 est valide et a permis à la société d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.
Le jugement est donc confirmé sur ces points.
- Sur la prescription applicable
La société fait valoir que le montant du redressement opéré doit être minoré dans la mesure où la prescription applicable est de trois ans à compter de la mise en demeure puisque la MSA n'a pas caractérisé le travail dissimulé.
La MSA soutient que la fraude est caractérisée et que la prescription civile de droit commun pour le Recouvrement des cotisations sociales agricoles doit s'appliquer puisque les cas de fraude ou de fausse déclaration ont expressément été exclus par le législateur du champ de la prescription triennale, sans renvoi vers les dispositions du code de la sécurité sociale (article L 725-7 du code rural avant la loi du 31 décembre 2016).
En application de l'article L 244-3 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, l'avertissement ou la mise en demeure ne peut concerner que les cotisations exigibles au cours des trois années civiles qui précèdent l'année de leur envoi ainsi que les cotisations exigibles au cours de l'année de leur envoi. En cas de constatation d'une infraction de travail illégal par procès-verbal établi par un agent verbalisateur, l'avertissement ou la mise en demeure peut concerner les cotisations exigibles au cours des cinq années civiles qui précèdent l'année de leur envoi ainsi que les cotisations exigibles au cours de l'année de leur envoi.
En application de l'article L. 725-7, I, du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016, applicable au litige, sauf le cas de fraude ou de fausse déclaration, les cotisations dues au titre des régimes de protection sociale agricole et les pénalités de retard y afférentes se prescrivent par trois ans à compter de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues.
Ainsi il résulte de la combinaison des articles L 725-7 du code rural et L 244-3 du code de la sécurité sociale que les actions en recouvrement de cotisations dues au titre des régimes agricoles se prescrivent, en cas de fraude ou de fausse déclaration, par cinq ans à compter de l'expiration de l'année civile au titre de laquelle elles sont dues.
Il revient à la cour de rechercher l'existence d'un travail dissimulé pour déterminer la prescription applicable au présent litige.
L'article L. 8221-5 du code du travail disposait dans sa version en vigueur au jour de la cause : « est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1/ Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2/ Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3/ Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales ».
Le délit pénal de travail dissimulé suppose la réunion de plusieurs éléments : le défaut de réalisation des formalités déclaratives prescrites et le caractère intentionnel de l'infraction.
En l'espèce , il résulte que l'inspecteur du travail a caractérisé les faits et infractions de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié dans son procés-verbal du 4 février 2013 à l'encontre de la société de la manière suivante :
"Le fait pour les responsables de l'entreprise Faivre :
- de ne pas déclarer par écrit la durée du travail que M. [W] doit effectuer,
- de ne pas assurer volontairement un décompte de la durée du travail effectué par M. [W], alors que cette obligation est mise en place pour les autres ouvriers de silos,
- d'évoquer une relation de travail "particulière" avec M. [W],
- d'assurer des contreparties par avantages en nature non justifiées,
- de ne pas justifer des récupérations prises par M. [W],
- de ne pas suivre la prise des congés payés de M. [W],
- de ne pas définir de planning d'affectation des ouvriers de silos,
- de sous évaluer la durée du travail accomplie par M. [W],
participe à mettre en évidence que les responsables de l'entreprise Faivre dissimulent volontairement les heures de travail accomplies par M. [W], acte positif pénalement répréhensible au titre d'un travail dissimulé.
Le fait de ne pas reporter sur les bulletins de paye de M. [W] depuis juillet 1997, les heures effectivement réalisées déclarees par M. [W] de 60 heures par mois (13H30 à 16H30 du lundi au vendredi) à un temps plein défini par défaut, et d'assurer la contrepartie inhérente de ces heures, par le paiement ou le bénéfice de repos compensateur de remplacement, alors que les constats effectués mettent en évidence la réalisation de ces heures de travail, constitue l'exercice d'un travail dissimulé par dissimulation d'heures, fait prevu et réprimé par les articles L 8221-5, L 8221-1, L 8224-1 et L 8224-3 du code du travail."
La société n'établit pas en produisant son contrat de travail et ses fiches de paie (pièces n° 4 à 6) que la durée effective du temps de travail de M.[W] est celle déclarée compte tenu des affirmations spontanées et répétées du salarié reprises par l'inspecteur du travail et les témoignagnes produits (pièce n° 19).
La société se justifie sur l'absence de décomptes horaires pour M. [W] en déclarant ne pas imposer à cet homme de 73 ans une démarche administrative qu'il ne voulait pas faire.
Cependant, comme le relève l'inspecteur du travail, les autres salariés en bénéficient et le fait que le salarié refuse de se soumettre à ce décompte ne peut exonérer l'employeur de son obligation de tenir un décompte horaire de ses salariés conforme aux dispositions des articles R 713-35 et R 713-36 du code rural et de la pêche maritime.
Par ailleurs, le fait que le parquet du tribunal judiciaire de Vesoul a classé sans suite l'infraction pénale dénoncée ne permet pas de conclure à l'absence de fraude.
La société ne renverse pas la preuve de l'existence d'un travail dissimulé de M. [W].
Sur le montant du redressement
Au vu de la fraude caractérisée, le délai de prescription applicable au litige est de cinq ans à compter de la mise en demeure du 22 décembre 2015.
La société demande, si la prescription quinquennale est retenue, de minorer le montant du redressement en se basant sur une durée de travail de M. [W] de 17h30 par semaine sur cinq ans.
La MSA maintient sa demande de cotisations dues pour les années 1997 à 2013.
Il résulte de l'article L 242-1-2 du code de la sécurité sociale :
que l'employeur doit apporter la preuve de la durée effective d'emploi et de rémunération versées à ses salariés, s'il veut échapper au redressement forfaitaire égal à six fois la rénumération mensuelle minimale .
La société ne rapporte pas la preuve d'une durée effective de temps de travail de 17H30 par semaine sur cinq ans en l'absence d'un décompte horaire effectif de M. [W] et des constats de l'inspecteur du travail.
Par application de la prescription quinquennale retenue, la MSA peut agir dans les cinq ans suivant la mise en demeure du 22 décembre 2015 soit de 2010 à 2015 ce qui concerne les cotisations de :
- pour l'année 2010 : 8 457,12 euros,
- pour l'année 2011 : 9 184,05 euros,
- pour l'année 2012 : 9 572,80 euros,
- pour le 1er trimestre 2013 : 2 276,44 euros,
soit un total de 28 490,41 euros en se basant sur la base d'un temps de travail à temps plein, outre les majorations de retard.
Le jugement en date du 10 mars 2017 est infirmé à ce titre.
- Sur les autres demandes
La société sollicite le remboursement de la somme versée après condamnation de la cour d'appel de Besançon soit la somme de 45 951,97 euros.
Le présent arrêt infirmatif constituant le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, la cour n'a pas lieu de statuer sur cette demande.
La société sollicite également une majoration de 0,2 % par mois écoulé à compter de la date de perception indue, par la MSA.
La MSA indique que le versement de cette somme ne correspond pas à la perception indue mais à la condamnation de la cour d'appel de Besançon et que la demande au titre de la majoration de 0,2 % n'est pas dûe.
La demande de la société concernant la majoration de 0,2 % est rejetée puisque la société est débitrice de l'URSSAF et la majoration ne s'applique que pour des condamnations prononcées ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société et la condamner à verser à la MSA la somme de 2 000 euros à ce titre.
La société supportera les dépens de l'appel et ceux visés dans les dispositions de l'article 639 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, dans les limites de la cassation,
Vu l'arrêt en date du 23 janvier 2020 (pourvoi n° 18-26.340 ) de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation,
Confirme le jugement en date du 10 mars 2017 en ce qu'il a maintenu le redressement opéré à l'encontre de la société Faivre au titre de redressement des cotisations sociales dues,
Infirme le jugement sur le surplus,
Statuant à nouveau :
Condamne la société Faivre à verser à la caisse de mutualité sociale agricole de Franche-Comté la somme de 29 440,41 euros au titre des cotisations dues entre 2010 et le 1er trimestre 2013,
Y ajoutant :
- Rejette la demande de la société Faivre concernant la majoration de 0,2 %,
- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Faivre et la condamne à verser à la Mutuelle sociale agricole de Franche-Comté la somme de 2 000 euros à ce titre,
- Condamne la société Faivre aux dépens de l'appel et ceux visés dans l'article 639 du code de procédure civile.
Le greffierLe président
Frédérique FLORENTINOlivier MANSION