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06/10/2022 | FRANCE | N°20/00558

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 06 octobre 2022, 20/00558


OM/CH













S.A. CONFRATERNELLE D'EXPLOITATION ET DE RÉPARTITION PHARMACEUTIQUE RHIN RHONE MÉDITERRANÉE - prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège





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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 06 OCTOBRE 2022



MINUTE N°



N° RG 20/00558 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FSZ5



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation d...

OM/CH

S.A. CONFRATERNELLE D'EXPLOITATION ET DE RÉPARTITION PHARMACEUTIQUE RHIN RHONE MÉDITERRANÉE - prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège

C/

[W] [N]

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 06 OCTOBRE 2022

MINUTE N°

N° RG 20/00558 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FSZ5

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de CHALON SUR SAONE, section Départage, décision attaquée en date du 03 Décembre 2020, enregistrée sous le n° 18/00185

APPELANTE :

S.A. CONFRATERNELLE D'EXPLOITATION ET DE RÉPARTITION PHARMACEUTIQUE RHIN RHONE MÉDITERRANÉE - prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Laurent GUERDER de la SCP CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, et Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON substituée par Me Harmonie TROESTER, avocat au barreau de DIJON

INTIMÉE :

Corinne PILLOT

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Philippe CHATEAU, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Septembre 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Olivier MANSION, Président de chambre chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Mme [N] (la salariée) a été engagée, d'abord par contrat à durée déterminée, puis par contrat à durée indéterminée, le 1er juillet 1999, en qualité de magasinière par la société confraternelle d'exploitation et de répartition pharmaceutique Rhin Rhône Méditerranée (l'employeur).

Elle occupait en dernier lieu la fonction d'agent de lancement.

Elle a été licenciée le 3 avril 2018 pour faute grave.

Estimant ce licenciement infondé, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes qui, par jugement du 3 décembre 2020, a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné l'employeur au paiement de diverses sommes, d'autres demandes étant rejetées.

L'employeur a interjeté appel le 18 décembre 2020.

Il conclut à l'infirmation du jugement et sollicite le paiement de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, il indique que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et, à titre infiniment subsidiaire, demande de limiter le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement à 11 944,95 euros.

La salariée demande la confirmation du jugement sauf à obtenir le paiement des sommes de :

- 28 463,10 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 5 000 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

et réclame la délivrance des "documents légaux rectifiés".

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties échangées par RPVA les 11 juin et 2 septembre 2021.

MOTIFS :

Sur le licenciement :

Il appartient à l'employeur qui s'en prévaut à l'appui du licenciement de démontrer la faute grave alléguée.

En l'espèce, la lettre de licenciement reproche à la salariée, exerçant une autorité de fait sur les autres salariés, d'avoir humilié et insulté d'autres salariés, d'avoir exercé une surveillance inappropriée et injustifiée des horaires de travail des autres salariés, d'avoir insulté, critiqué et tenté de déstabiliser Mme [I], chef d'exploitation, d'avoir manipulé ses collègues en les incitant à la faute pour les dénoncer par la suite, d'être à l'origine de la dégradation des conditions de travail au sein de son équipe, d'un harcèlement moral et d'une désorganisation grave du fonctionnement de l'établissement, ce comportement s'inscrivant dans une suite de comportements inacceptables, par ailleurs sanctionnés.

Il sera noté, à titre liminaire, que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, ne reproche pas seulement à la salariée d'avoir exercée un harcèlement moral sur d'autres salariés, mais énonce des griefs précis qui doivent être examinés successivement.

Sur le premier grief, l'employeur se reporte aux attestations de Mmes [S], [X], [T], [R] et [B] relatant non pas des insultes mais le caractère difficile de la salariée à l'origine de stress ainsi que des critiques.

La salariée relève que ses attestations ne sont pas conformes aux mentions exigées par les articles 200 à 203 du code de procédure civile et se réfère aux attestations de MM. [G], [K] et [O] qui indiquent que l'ambiance au travail s'est dégradée depuis quelques années sans lien avec la départ de la salariée.

Toutefois, la preuve est libre en droit social et les attestions même non conformes aux articles précités peuvent valoir à titre de renseignements.

Les attestations produites par la salariée ne contredisent pas celles communiquées par l'employeur et ne rapportent aucun comportement de la salariée comme le retracent les autres attestations, par ailleurs suffisamment précises.

Ce grief est donc établi.

Sur le deuxième point, l'employeur précise que la salariée, en tant qu'agent de lancement, n'exerçait pas une fonction d'encadrement.

Il ajoute que les attestations de Mmes [E], [X], [T] sont explicites sur ce point.

La salariée rappelle que sa fonction implique de recueillir les factures de commande puis de les imprimer par numéro afin que les préparateurs puissent travailler après, ce qui implique de noter l'horaire d'arrivée de chacun à son poste pour justifier les retards pris, ce que Mme [Z] confirme dans son attestation.

Toutefois, la fiche de poste à laquelle la salariée se réfère ne comporte pas une telle obligation.

Les attestations produites par l'employeur ne sont pas explicites sur ce point et ne traduisent pas une surveillance inappropriée et injustifiée des horaires de travail des autres salariés.

Ce grief sera donc écarté.

Sur le troisième grief, l'employeur reprend les attestations de Mmes [S], [X], [T], [B], [E], [R], [P], [D], [M] et de M. [L] qui affirment tous que le comportement de la salariée était à l'origine de stress au travail et que depuis son départ, la situation est sereine et apaisée.

La salariée critique l'attestation de Mme [X] et ajoute qu'elle n'aurait pas imaginé se présenter aux élections professionnelles si elle avait eu un sentiment de rejet de la part de ses collègues.

Cependant, même en faisant abstraction de l'attestation de Mme [X], les autres éléments de preuve apportés par l'employeur sont concordants et caractérisent le grief reproché.

Quatrièmement, l'employeur se prévaut de la lettre de Mme [T] qui affirme que la salariée a décrit Mme [I] sous ces termes : "Elle aurait dû rester dans son usine de conserves, c'est une conne", ce que confirme Mme [B] qui ajoute que la salariée a déclaré à propos de Mme [I] que celle-ci n'avait pas rien à faire en tant que chef, qu'elle en avait pas l'étoffe.

La salariée répond qu'elle n'était pas d'accord avec Mme [I] sur l'organisation du travail et qu'elle était surchargée d'où un arrêt de travail de fin septembre au 6 novembre 2016 pour burn out.

La fiche d'aptitude médicale du 15 novembre 2016 relève que des tâches supplémentaires ont été enlevées. Une dépression est diagnostiquée.

Cependant, rien ne permet de rattacher cette dépression à la situation professionnelle alors que Mme [Y] atteste que la salariée avait été opérée de l'épaule et des mains et qu'elle avait beaucoup de difficultés pour les commandes et que sa grande force de caractère l'opposait à "la chef" qui n'était pas conciliante.

Il n'est pas établi non plus, que la salariée était "en quelque sorte la bête noire de Mme [I]" et l'insulte proférée n'est pas justifiable.

Le grief sera donc retenu.

Sur le cinquième grief, les écrits concordants de Mmes [X], [T] et [A] sont crédibles et permettent de retenir que la salariée a dénoncé le départ avant la fin de la préparation de commande de Mme [X] à Mme [A] laquelle, sur demande de la salariée, lui a confirmé que Mme [X] aurait un avertissement comme elle en avait déjà eu un pour ce motif.

La faute est donc caractérisée sur ce point.

Sur le sixième point, force est de constater que ce grief recoupe d'autres griefs déjà examinés et que les attestations révèlent une amélioration des conditions de travail après le départ de la salariée.

Sur le septième reproche, il sera noté que la lettre de licenciement énonce que : "nous vous rappelons que les faits de harcèlement moral et de violences sont réprimés par le code pénal, par les articles 16-2 et 16-24 de notre règlement intérieur et constituent un motif de licenciement pour faute grave".

Cette lettre ne donne aucun exemple précis à ce titre et l'employeur et n'apporte pas la preuve d'une altération de l'état de santé des autres salariés.

Ce grief n'est donc pas fondé.

Sur le huitième grief, l'employeur se prévaut d'un trouble très important au fonctionnement de l'entreprise mais n'apporte pas d'élément suffisamment probant sur ce point, les attestations produites étant insuffisantes à caractériser le trouble allégué.

Enfin, les sanctions précédentes, soit un avertissement le 5 octobre 2015, une mise à pied le 11 avril 2016 et un avertissement le 27 avril 2017 portent sur des faits sans rapport avec ceux reprochés dans le cadre de ce licenciement.

Les cinq griefs retenus, pris dans leur ensemble, caractérisent une faute grave justifiant le licenciement prononcé.

Le jugement sera donc infirmé et les demandes indemnitaires de la salariée rejetées.

Sur les autres demandes :

1°) La salariée demande des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail en soutenant que l'employeur n'a pas respecté les préconisations du médecin du travail, soit d'éviter un poste où la salariée a les bras en l'air afin d'éviter une extension de la colonne cervicale, lors de l'examen du 12 octobre 2017.

Elle produit une lettre du Dr [J] (pièce n° 41) et un écrit du médecin du travail du 15 mars 2018 (pièce n° 27) et précise qu'elle était affectée à un poste d'agent de lancement deux jours sur cinq ce qui impliquait son aide pour les gros volumes.

L'employeur répond que les restrictions ont été émises le 13 novembre 2017 par le médecin du travail et qu'aucun mi-temps thérapeutique n'a été requis.

Il appartient à la salariée d'apporter la preuve de l'exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur.

En l'espèce, il sera relevé que la lettre du Dr [J] fait état d'hypothèses tant sur l'existence d'une fibromyalgie que sur le facteur aggravant du travail.

Par ailleurs, il est établi que le poste occupé par la salariée consistait en des tâches principalement administratives et la fiche de poste versée aux débats par l'employeur ne comporte pas les tâches listées par la salariée consistant au port de bac sur une hauteur d'un mètre cinquante, dans l'aide pour les gros volumes ou encore dans le déchargement des rolls.

En conséquence, et en l'absence de preuve d'un manquement par l'employeur à son obligation de loyauté, la demande de dommages et intérêts sera rejetée et le jugement confirmé par substitution de motifs.

2°) Les demandes formées au visa de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

La salariée supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :

- Infirme le jugement du 3 décembre 2020 sauf en ce qu'il rejette la demande de Mme [N] en paiement de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

- Dit que le licenciement de Mme [N] repose sur une faute grave ;

- Rejette toutes les demandes de Mme [N] ;

Y ajoutant :

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

- Condamne Mme [N] aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffierLe président

Frédérique FLORENTINOlivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00558
Date de la décision : 06/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-06;20.00558 ?
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