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22/09/2022 | FRANCE | N°20/00632

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 22 septembre 2022, 20/00632


SB/LL















[P] [S]



C/



SA LYONNAISE DE BANQUE











































































































Expédition et copie exécutoire dé

livrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON



2ème Chambre Civile



ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022



N° RG 20/00632 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FPIJ



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : au fond du 27 février 2020,

rendue par le tribunal de commerce de Dijon - RG : 19/000899









APPELANT :



Monsieur [P] [S]

né le [Date naissance 2] 1982 à [Localité 6]

domicilié :

[Adresse 3]

[Localité 1]



représenté par Me Jean-Christophe ...

SB/LL

[P] [S]

C/

SA LYONNAISE DE BANQUE

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022

N° RG 20/00632 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FPIJ

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 27 février 2020,

rendue par le tribunal de commerce de Dijon - RG : 19/000899

APPELANT :

Monsieur [P] [S]

né le [Date naissance 2] 1982 à [Localité 6]

domicilié :

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Jean-Christophe BONFILS, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 21

INTIMÉE :

SA LYONNAISE DE BANQUE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège :

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Anne-Line CUNIN, membre de la SCP du PARC - CURTIL - HUGUENIN - DECAUX - GESLAIN - CUNIN - CUISINIER - BECHE - GARINOT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 91

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 juin 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, Président,

Michèle BRUGERE, Conseiller,

Sophie BAILLY, Conseiller, ayant fait le rapport sur désignation du Président,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 22 Septembre 2022,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY a ouvert un compte courant professionnel auprès de la LYONNAISE DE BANQUE.

La SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY a souscrit, le 19 février 2015, auprès de la LYONNAISE DE BANQUE un prêt d'un montant de 150 000 euros, sur une durée de 72 mois, au taux de 2,6 % l'an.

M. [S] président de la SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY s'est porté caution de ce prêt, à la même date, dans la limite de 90 000 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant, des intérêts et pénalités de retard.

A la suite d'impayés du prêt, la LYONNAISE DE BANQUE, par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 juin 2018, a mis en demeure la SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY de régulariser la situation au plus tard le 9 juillet 2018, à peine de déchéance du terme du prêt.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 octobre 2018, la LYONNAISE DE BANQUE a prononcé la déchéance du terme du prêt et a mis en demeure M. [S] d'honorer ses engagements de caution.

Par actes des 6 et 15 février 2019, la LYONNAISE DE BANQUE a fait assigner M. [S], en sa qualité de caution, et la SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY devant le tribunal de commerce de Dijon aux fins d'obtenir :

- leur condamnation in solidum au paiement de la somme de 81 740,35 euros au titre du prêt, outre intérêts au taux contractuel de 2,6 % à compter du 31 octobre 2018,

- la condamnation de la SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY au paiement de la somme de 2 648,92 euros outre intérêts au taux légal à compter du 1er novembre 2018,

- leur condamnation in solidum au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'exécution provisoire et la capitalisation des intérêts.

La SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, suivant jugement du tribunal de commerce de Dijon le 5 février 2019. La Selarl MJ et Associés a été désignée mandataire judiciaire.

La SA LYONNAISE DE BANQUE a déclaré sa créance, par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 mars 2019.

Par jugement réputé contradictoire du 27 février 2019, le tribunal de commerce de Dijon a :

- rejetant toute autre demande ;

- dit régulière, recevable et fondée la demande de la LYONNAISE DE BANQUE et y faisant droit ;

- condamné M. [P] [S] à payer à la LYONNAISE DE BANQUE, en sa qualité de caution, sous déduction de tout acompte qui aurait été versé de ce chef et dont il devra être justifié :

- en principal, la somme de 40 293,06 euros, outre intérêts au taux contractuel de 2,6 % à compter du 31 octobre 2018,

- ordonné la capitalisation des intérêts ;

- fixé la créance de la LYONNAISE DE BANQUE à la liquidation judiciaire de la société GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY à la somme de :

- 2 572,55 euros au titre du compte courant, à titre chirographaire,

- 81 606,88 euros au titre du prêt, à titre privilégié (nantissement de parts sociales),

- 700 euros pour frais irrépétibles en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,

- et au titre des frais privilégiés de procédure, tous dépens de l'instance, dont frais de greffe indiqués en tête des présentes auxquels devront être ajoutés le coût de l'assignation et les frais de mise à exécution de la présente décision.

Il a estimé la créance fondée en son principe et en son montant, en l'absence de comparution des défendeurs et de la société MJ et ASSOCIES représentée par Maître Véronique THIEBAUT, ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY.

Par déclaration du 12 juin 2020 enregistrée le 16 juin 2020, le conseil de M. [S] a interjeté appel du jugement rendu le 27 février 2020 par le tribunal de commerce de Dijon, appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués,

« Réformation ou annulation du jugement en ce qu'il a :

- Dit régulière, recevable et fondée la demande de la LYONNAISE DE BANQUE, en sa qualité de caution, sous déduction de tout acompte qui aurait versé de ce chef et dont il devra être justifié ; (sic)

- Condamné M. [P] [S] à payer à la LYONNAISE DE BANQUE, en sa qualité de caution, sous déduction de tout acompte qui aurait été versé de ce chef et dont il devra être justifié ;

- En principal, la somme de 40 293,06 euros, outre intérêts au taux contractuel de 2,6 % à compter du 31 octobre 2018.

- Ordonné la capitalisation des intérêts. »

Par ses dernières conclusions récapitulatives communiquées par voie électronique le 27 février 2020, M. [P] [S] demande à la cour d'appel de :

« Vu l'article L 332-1 du code de la consommation,

- Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de DIJON le 27 février 2020 sur la situation de la caution M. [S], (sic)

- Juger que l'acte de cautionnement souscrit par M. [S] le 19 février 2015 était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus pour être près de cinq fois, ou 3 fois, équivalent à son revenu annuel moyen, constitué d'indemnités POLE EMPLOI, sans aucun patrimoine liquide, outre un endettement global de 60 000 euros.

- Dire que ses revenus et patrimoine actuels ne lui permettent pas davantage de faire face à son obligation.

- Débouter par conséquent la SA LYONNAISE DE BANQUE de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de M. [S].

- Condamner la SA LYONNAISE DE BANQUE aux entiers dépens dont recouvrement direct au profit de Me BONFILS en application de l'article 699 du CPC, ainsi qu'à payer à Monsieur [P] [S] une somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile. »

Par ses dernières conclusions récapitulatives communiquées par voie électronique le 9 octobre 2020, la SA LYONNAISE DE BANQUE demande à la cour d'appel de :

« Vu les articles L.332-1 et L.343-4 du Code de la consommation,

Vu les articles 2288 et suivants du code civil,

Vu la jurisprudence citée,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de DIJON dont appel,

Vu les pièces versées au débat,

Vu les développements ci-dessus,

- Déclarer l'appel de Monsieur [P] [S] mal fondé et l'en débouter,

- Confirmer en tous points le jugement rendu par le Tribunal de Commerce le 27 Février 2020 dont appel,

Y ajoutant,

- Condamner M. [P] [S] à verser à la LYONNAISE DE BANQUE une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- Condamner Monsieur [P] [S] aux entiers frais et dépens de l'instance. »

La clôture de la procédure a été prononcée le 31 mai 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures signifiées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE

- Sur le caractère disproportionné de l'engagement de caution

L'article L.341-4 du code de la consommation prévoit que :

« Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. »

Pour critiquer le jugement querellé, M. [S] fait valoir que, s'il est exact que la BPI a garanti 50 % de son engagement, de sorte que les condamnations ne portent que sur la moitié des sommes dues par la société, il n'en reste pas moins que son engagement personnel s'élève à 45 000 euros. Il considère qu'au moment de son engagement de caution en faveur de la SAS MANAGEMENT INDUSTRY, ses ressources et charges ne l'autorisaient pas à souscrire un tel acte, manifestement disproportionné. Invoquant sa situation patrimoniale globale à l'heure où il a été appelé comme caution par la SA LYONNAISE DE BANQUE, il estime, là encore, qu'il ne pouvait faire face à son engagement, ses ressources ayant chuté de manière importante.

LA LYONNAISE DE BANQUE soutient qu'au jour où il s'est porté caution de la Société GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY, M. [S] justifiait de revenus annuels à hauteur de 20 400 euros, outre un patrimoine de 10 000 euros en parts sociales ainsi que cela est mentionné dans les statuts de la SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY déposés au greffe de tribunal de commerce de Dijon le 23 janvier 2015 sous le numéro A 382.

Pour statuer comme il l'a fait, par son jugement attaqué, le tribunal de commerce a retenu « (') qu'il résulte des pièces versées au dossier, notamment le contrat de prêt, les courriers annuels d'information de la caution, la déclaration de créance ainsi que les mises en demeure, que la demande apparaît régulière, recevable et fondée, qu'elle est en effet conforme aux obligations souscrites par le défendeur ; Attendu que le jugement prononçant la liquidation judiciaire permet au demandeur de reprendre les poursuites engagées à l'encontre de Monsieur [S] en sa qualité de caution de la SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY ; Attendu qu'en conséquence, le tribunal condamnera Monsieur [S] à payer à la LYONNAISE DE BANQUE la somme de 40 293,06 euros en sa qualité de caution et ordonnera la capitalisation des intérêts ; (') ».

Cependant, ces motifs, en l'absence de M. [S], non comparant ni représenté lors de l'instance devant le tribunal de commerce, ne permettent pas d'apprécier l'éventuelle disproportion de l'engagement de M. [S] en qualité de caution, au bénéfice de la SAS GENERAL MANAGEMENT INDUSTRY.

Or, il ressort des pièces communiquées par M. [S] et par la SA LYONNAISE DE BANQUE que, lors de son engagement de caution, l'intéressé a renseigné la « fiche patrimoniale caution », datée du 16 février 2015, en y inscrivant l'absence de patrimoine immobilier ou mobilier, un revenu mensuel de 1 700 euros et des charges constituées exclusivement d'un loyer de 415 euros. La SA LYONNAISE DE BANQUE se trouvait dès lors informée que le revenu net mensuel de M. [S] ne dépassait pas 1 285 euros, hors charges de la vie courante et impôts sur le revenu. Il sera ainsi observé que l'avis d'impôt 2015 sur les revenus de l'année 2014 de M. [S] retient un revenu fiscal de référence de 18 583 euros, l'impôt dû étant de 1 245 euros. L'avis d'impôt 2016 sur les revenus de 2015 mentionne un revenu fiscal de référence de 28 808 euros, donnant lieu à un impôt fixé à 2 602 euros.

Au surplus, M. [S] communique une attestation Pôle emploi du 15 juillet 2020 précisant qu'il a bénéficié d'une allocation journalière d'aide au retour à l'emploi de 56,57 euros (brut) pour la période du 17 octobre 2013 au 22 avril 2014, d'une allocation journalière de formation ARE de 56,57 euros (brut) pour la période du 23 avril 2014 au 10 juillet 2014, puis d'une allocation journalière d'aide au retour à l'emploi de 56,57 euros (brut) pour la période du 11 juillet 2014 au 12 janvier 2015.

Le patrimoine de 10 000 euros au titre des parts sociales n'avait pas été indiqué dans la fiche de renseignements. En tout état de cause, il ne permettait à M. [S], au regard de sa situation financière réelle rappelée ci-dessus, de supporter la charge d'un engagement de caution de 45 000 euros.

La SA LYONNAISE DE BANQUE, en se bornant à enregistrer la fiche patrimoniale, trop succinctement renseignée relativement aux charges déclarées et laissant déjà transparaître un déséquilibre entre les ressources disponibles et les charges à déduire, ne démontre pas avoir été confrontée à une anomalie non décelable par elle.

Ces divers éléments établissent qu'il existait une disproportion manifeste entre les ressources disponibles de M. [S] et ses charges au moment où il s'engageait comme caution à hauteur de la somme de 90 000 euros, réduite à 45 000 euros après prise en charge partielle par la BPI.

La SA Lyonnaise de Banque ne développe aucun moyen tiré d'un retour à meilleure fortune de M. [S] au moment où il se trouvait mis en demeure d'honorer son engagement de caution, soit le 2 octobre 2018.

Surabondamment, il convient de relever que l'avis d'impôt 2019 sur le revenu perçu par l'intéressé au titre de l'année 2018 portait un revenu fiscal de référence de 10 255 euros, ne donnant lieu à perception d'aucun impôt.

Enfin, M. [S] produit une attestation de la Caisse d'allocations familiales du 30 octobre 2020 précisant qu'il a perçu en octobre 2018 une allocation d'aide au logement de 269 euros et le revenu de solidarité active (RSA), pour un montant global de 971,20 euros, ce qui vient démontrer la dégradation de sa situation financière à cette période.

Ainsi, quand bien même la BPI a pris en charge une partie des sommes dues par M. [S] ainsi que le fait observer l'intimée, la somme réclamée à ce dernier demeure fixée à 40 293,06 euros, ce qui est manifestement disproportionné par rapport à ses facultés contributives précédemment exposées.

Infirmant le jugement déféré, il sera dit que l'engagement en qualité de caution de M. [S] se trouvait manifestement disproportionné par rapport à ses ressources et partant, que la demande en paiement formée contre lui par la SA LYONNAISE DE BANQUE sera rejetée.

- Sur les mesures accessoires

La SA LYONNAISE DE BANQUE, partie perdante, sera tenue aux dépens d'appel.

L'équité commande de condamner la SA LYONNAISE DE BANQUE à payer la somme de 2 000 euros à M. [P] [S] sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a prononcé condamnation de M. [P] [S] à paiement de somme envers la SA LYONNAISE DE BANQUE en sa qualité de caution ;

Statuant à nouveau,

Dit que l'engagement de caution du 19 février 2015 est inopposable à M. [P] [S] ;

Déboute la SA LYONNAISE DE BANQUE de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de M. [P] [S] ;

Condamne la SA LYONNAISE DE BANQUE aux entiers dépens d'appel ;

Condamne la SA LYONNAISE DE BANQUE à payer la somme de 2 000 euros à M. [P] [S] sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00632
Date de la décision : 22/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-22;20.00632 ?
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