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15/09/2022 | FRANCE | N°20/00552

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 15 septembre 2022, 20/00552


MFR/CH













S.A.S. CONDUIT'EN ROUTE





C/



[Z] [A]













































Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée



le :



à :



































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPL

E FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022



MINUTE N°



N° RG 20/00552 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FSZJ



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHALON SUR SAONE, section ENCADREMENT, décision attaquée en date du 23 Novembre 2020, enregistrée sous le n° F 19/00211







APPELANTE :



S.A...

MFR/CH

S.A.S. CONDUIT'EN ROUTE

C/

[Z] [A]

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

MINUTE N°

N° RG 20/00552 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FSZJ

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHALON SUR SAONE, section ENCADREMENT, décision attaquée en date du 23 Novembre 2020, enregistrée sous le n° F 19/00211

APPELANTE :

S.A.S. CONDUIT'EN ROUTE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Anne virginie LABAUNE de la SELARL BLKS & CUINAT AVOCATS ET ASSOCIES, avocat au barreau de MACON/CHAROLLES

INTIMÉE :

[Z] [A]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Cédric MENDEL de la SCP MENDEL - VOGUE ET ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Marie-Françoise ROUX, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,

Marie-Françoise ROUX, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [Z] [A] a été embauchée par la SAS CONDUIT'EN ROUTE le 1er août 2017 selon contrat à durée indéterminée en qualité de directrice pédagogique.

Par courrier en date du 22 novembre 2018, la SAS CONDUIT'EN ROUTE a alerté Madame [A] sur des manquements à la fois sur sa mission et sur son comportement, et conclut en indiquant qu'il s'agit d'une mise en garde.

Par lettre du 18 décembre 2018, la SAS CONDUIT'EN ROUTE a convoqué Madame [A] à un entretien préalable à une sanction disciplinaire fixé le 28 décembre 2018, entretien auquel elle ne s'est pas présentée.

La SAS CONDUIT'EN ROUTE lui a notifié son licenciement pour faute grave par lettre recommandée du 4 janvier 2019.

Le 7 mai 2019, Madame [A] a saisi le conseil de prud'hommes de Chalon-sur-Saône des chefs de demandes suivantes :

- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 4 600 euros

- indemnité de préavis (3mois) : 6 900 euros

- congés payés afférents : 690 euros

- indemnité légale de licenciement : 822,25 euros

- heures supplémentaires : 113,73 euros

- congés payés afférents : 11,37 euros

- article 700 du code de procédure civile : 1 200 euros

- remise des documents légaux rectifiés correspondant aux condamnations prononcées,

- intérêt au taux légal,

- fixer la moyenne de salaire à hauteur de 2 300 euros bruts de façon à permettre l'exécution provisoire.

Par jugement en date du 23 novembre 2020, le conseil de prud'hommes de Chalon-sur-Saône a :

- dit que le licenciement de Madame [A] était dépourvu tant de faute grave que de cause réelle et sérieuse,

- condamné la SAS CONDUIT'EN ROUTE à payer à Madame [A] les sommes suivantes :

* 2 300 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 6 900 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis,

* 690 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis,

* 822,25 euros nets au titre de l'indemnité légale de licenciement,

* 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu'à lui remettre les documents légaux rectifiés,

- dit qu'il y a lieu de débouter Madame [A] de sa demande d'heures supplémentaires et congés payés afférents,

- fixé la moyenne des salaires de Madame [A] à la somme de 2 300 euros bruts,

- débouté la SAS CONDUIT'EN ROUTE de sa demande reconventionnelle de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux entiers dépens.

La SAS CONDUIT'EN ROUTE a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses écritures en date du 21 juillet 2021, la SAS CONDUIT'EN ROUTE demande à la cour de :

- dire et juger recevable l'appel qu'elle a interjeté, le déclarer bien fondé,

en conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [A] de sa demande d'heures supplémentaires et de congés payés afférents,

- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a :

- dit que le licenciement de Madame [A] est dépourvu tant de faute grave que de cause réelle et sérieuse,

- l'a condamnée à payer à Madame [A] les sommes suivantes :

* 2 300 euros de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 6 900 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis,

* 690 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis,

* 822,25 euros nets au titre de l'indemnité légale de licenciement,

* 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à lui remettre les documents légaux rectifiés,

- fixé la moyenne des salaires de Madame [A] à la somme de 2 300 euros bruts,

- l'a débouté de sa demande reconventionnelle de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux entiers dépens.

et statuant à nouveau,

- dire et juger bien-fondé le licenciement pour faute grave de Madame [A],

en conséquence,

- débouter Madame [A] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Madame [A] à lui payer la somme de 2 500 euros pour ses frais irrépétibles de première instance, et la somme de 3 000 euros pour ses frais irrépétibles d'appel, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Madame [A] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions reçues par voie électronique le 8 juin 2021, Madame [A] demande à la cour de :

- confirmer le jugement prononcé par le conseil de prud'hommes de Chalon-sur-Saône sauf sur le montant des dommages et intérêts qui lui ont été alloués au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

statuant à nouveau du chef infirmé et y faisant droit,

- condamner la SAS CONDUIT'EN ROUTE à lui verser une somme de 15 000 euros net de CGS CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la SAS CONDUIT'EN ROUTE à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SAS CONDUIT'EN ROUTE à lui remettre les documents légaux rectifiés aux condamnations prononcées :

* bulletin de paie,

* attestation pôle emploi,

- juger que les sommes ayant une nature ou assimilée produisent intérêts au taux légal à compter de la notification par le conseil de prud'hommes à l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation,

- condamner la SAS CONDUIT'EN ROUTE aux entiers dépens.

L'affaire a été clôturée le 5 mai 2022.

MOTIF DE LA DÉCISION

Par lettre en date du 4 janvier 2019, la SAS CONDUIT'EN ROUTE a notifié à Madame [A] son licenciement pour faute grave dans les termes suivants :

«'Nous vous avons convoquée pour un entretien préalable au licenciement que nous envisagions de prononcer à votre encontre à la date du vendredi 28 décembre 2018 à 10 heures. Comme vous m'en aviez informé par lettre recommandée du 21 décembre 2018, vous ne vous êtes pas rendue à l'entretien. Je n'ai donc pu vous exposer de vive voix les motifs de ce licenciement.

J'ai décidé de poursuivre la procédure en vous mentionnant les motifs de licenciement suivants :

- mise en danger de la sécurité d'un élève du fait de l'utilisation de votre téléphone mobile pendant le cours de conduite entraînant la non maîtrise du véhicule, et ayant provoqué un choc sur un trottoir,

- comportement inadapté avec de nombreux élèves mettant à défaut l'image de notre entreprise et notre marque. Haussement de voie, dévalorisation des élèves, cynisme, ce qui est tout à fait contraire avec la qualité pédagogique et des relations que nous prônons.

Je considère que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise.

Votre licenciement est donc immédiat, sans préavis ni indemnité de rupture.

[...]'».

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Il appartient à l'employeur de l'établir;

- Sur la nature juridique du courrier, daté du 22 novembre 2018, remis en main propre à Madame [A] par son employeur :

Madame [A] fait valoir que, par ce courrier, qui, selon elle, constitue une sanction, la SAS CONDUIT'EN ROUTE avait épuisé son pouvoir disciplinaire en ce qui concerne les faits qui y étaient mentionnés, ce que conteste l'employeur.

Or, après avoir, aux termes de ce courrier, énuméré un certain nombre de reproches à l'encontre de Madame [A], l'employeur lui a précisé, en conclusion qu'il avait décidé de ne pas appliquer de sanction et de lui faire «'simplement une mise en garde'» en lui demandant de se «'remettre en question sans délai sur l'ensemble des points évoqués'».

Ainsi, il résulte des termes mêmes utilisés par l'employeur dans cette lettre qu'il n'avait pas la volonté de sanctionner Madame [A] mais seulement de la mettre en garde sur certains points en ce qui concerne son comportement professionnel.

Par suite la SAS CONDUIT'EN ROUTE n'a pas, en adressant cette lettre à Madame [A], épuisé son pouvoir disciplinaire à son encontre en ce qui concerne les faits antérieurs à la date à laquelle lui a été remise cette lettre.

- Sur les griefs :

* Sur le premier grief :

A l'appui de ce grief l'employeur verse aux débats un seul document consistant en une lettre, datée du 12 novembre 2018, dactylographiée, adressée à l'employeur par Madame [U] [B], mais non accompagnée d'une pièce d'identité de son auteure dont ni l'identité, ni la signature ne sont vérifiables, selon laquelle, au cours d'une leçon dispensée par Madame [A], elle avait «'tapé fort dans le trottoir d'un pont près de Chamforgeuil'» à la suite de quoi Madame [A] lui aurait demandé de ne rien dire, ajoutant que cette dernière «'ne pouvait pas regarder en même temps et la route et le téléphone'» et que cela «'arrivait souvent pendant ses leçons'».

Toutefois ce fait, dont ni la date, ni le lieu ne sont indiqués, est contesté par Madame [A] alors que rien ne permet d'affirmer que son auteure ait été la personne dont l'identité est indiquée.

Au vu de ce seul document le fait mentionné ne peut être retenu à l'encontre de Madame [A].

Ce grief doit donc être considéré comme étant non établi.

* Sur le second grief :

A l'appui de ce grief l'employeur verse aux débats trois e-mail émanant :

- le 16 novembre 2018, de Madame [R] [P] qui expose que ses deux enfants [K] et [S] qui étaient inscrits dans l'agence depuis octobre 2016 se plaignaient de l'employée qui arrivait en retard, indiquait les changements de direction au dernier moment, dispensait son cours aux heures des embouteillages et n'avait pas souhaité leur faire passer l'évaluation quand elle le lui avait demandé, sans toutefois indiquer le nom de cette employée,

- le 12 décembre 2018, de Madame [I] qui fait part de son mécontentement en ce qui concerne l'accueil de Madame [A] envers son fils [E] auquel elle a refusé l'accès au cours de code au motif qu'il avait égaré sa carte de code et qu'il ne pouvait règler la réactivation d'une nouvelle carte avec sa carte bancaire, sans toutefois expliquer en quoi ce refus caractérisait un comportement inadapté,

- le 16 décembre 2018, de Madame [H] [C] qui indique qu'elle a trouvé Madame [A] trop nerveuse et qu'elle était souvent sur son portable sans rapporter aucun fait précis, daté et circonstancié à l'appui de ses affirmations.,

Par ailleurs, aux termes d'une lettre adressée le 10 novembre 2018 à la SAS CONDUIT'EN ROUTE, Madame [W] indique que Madame [A] n'a pas eu un comportement adapté vis-à-vis de son mari qui avait été victime d'un AVC et qui avait besoin d'être mis en confiance sans préciser en quoi il n'en avait pas été ainsi de la part de Madame [A].

Une lettre, non datée, est également versée aux débats, émanant de Monsieur [D], qui indique que les leçons que lui dispensait Madame [A] lui procuraient du stress sans fournir d'explication sur la manière dont elle se comportait envers lui qui aurait été à l'origine de ce stress.

Au vu de l'ensemble de ces éléments il n'est pas justifié que Madame [A] ait, par son comportement vis-à-vis de ses élèves, manqué à ses obligations contractuelles.

Par suite, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a considéré que le licenciement de Madame [A] ne reposait ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Sur les demandes indemnitaires de Madame [A]

- Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Au moment de son licenciement Madame [A] avait une ancienneté d'un an en année entière.

Calculée sur la base d'un salaire mensuel moyen de 2 300 euros, la somme de 3 800 euros doit lui être allouée à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- Sur le préavis et sur l'indemnité de licenciement

La somme de 6 900 euros, outre les congés payés afférents, allouée par les premiers juges au titre de l'indemnité de préavis ainsi que celle de 822,25 euros allouée au titre de l'indemnité légale de licenciement doivent être confirmées.

Il convient de juger que les sommes allouées à Madame [A], à caractère salarial, porteront intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2019 date de la signature par l'employeur de l'accusé de réception de sa convocation devant le bureau de conciliation.

- Sur les autres demandes

Il y a lieu de constater que Madame [A] ne réclame plus, en cause d'appel, le paiement d'arrièrés d'heures supplémentaires et des congés payés afférents et que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il l'a déboutée de cette demande.

Il convient d'ordonner à la SAS CONDUIT'EN ROUTE de remettre à Madame [A] un bulletin de salaire et une attestation Pôle Emploi, rectifiés, conformes à l'arrêt.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement, sauf sur le montant des dommages et intérêts accordés pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau sur ce point,

Condamne la société CONDUIT'EN ROUTE à payer à Madame [A] la somme de 3 800 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Y ajoutant,

Dit que les sommes allouées ayant un caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2019,

Condamne la société CONDUIT'EN ROUTE à verser à Madame [A] la somme de 1 200 euros au titre de ses frais irrépétibles engagés en cause d'appel,

Condamne la société CONDUIT'EN ROUTE aux dépens d'appel.

Le greffierLe président

Frédérique FLORENTINOlivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00552
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;20.00552 ?
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