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07/07/2022 | FRANCE | N°19/00548

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 07 juillet 2022, 19/00548


OM/FF













URSSAF de Bourgogne





C/



Société [4]













































Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée



le :



à :





































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM

DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 07 JUILLET 2022



MINUTE N°



N° RG 19/00548 - N° Portalis DBVF-V-B7D-FJ2D



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de DIJON, décision attaquée en date du 16 Juillet 2019, enregistrée sous le n° 19/224







APPELANTE :



URSSAF de Bourgogne

[Adresse 3]

[Localité 1]



représen...

OM/FF

URSSAF de Bourgogne

C/

Société [4]

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 07 JUILLET 2022

MINUTE N°

N° RG 19/00548 - N° Portalis DBVF-V-B7D-FJ2D

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de DIJON, décision attaquée en date du 16 Juillet 2019, enregistrée sous le n° 19/224

APPELANTE :

URSSAF de Bourgogne

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Florent SOULARD de la SCP SOULARD-RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON

INTIMÉE :

Société [4]

[Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par Me Sébastien MILLET de la SELARL ELLIPSE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX substituée par Maître Guillaume CIANCIA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Olivier MANSION, Président de chambre chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,

Marie-Françoise ROUX, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Kheira BOURAGBA,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Kheira BOURAGBA, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige :

La société [4] (la société) a fait l'objet d'un contrôle sur réquisition du procureur de la République le 13 octobre 2014.

Une lettre d'observations a été émise par l'URSSAF de Bourgogne (l'URSSAF) puis une mise en demeure a été adressée à la société, le 17 décembre 2015, d'un montant de 700 700 euros.

La commission de recours amiable a rejeté le recours de la société qui a saisi le tribunal.

Le gérant de la société a été reconnu coupable de travail dissimulé par arrêt définitif du 31 décembre 2018.

Par décision du 16 juillet 2019, cette juridiction a annulé le redressement pour la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2014 et donc la mise en demeure du

17 décembre 2015, a dit que les mesures tendant à l'annulation des réductions [P], à l'annulation des déductions de la loi TEPA, à la majoration pour travail dissimulé ainsi que les majorations de retard ne sont pas fondées et a rejeté la demande de la société tendant à la mainlevée de l'inscription de privilège pris dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 243-5 du code de la sécurité sociale.

L'URSSAF a interjeté appel le 23 juillet 2019.

Elle demande l'infirmation du jugement, la confirmation de la décision de la commission de recours amiable du 13 octobre 2017, la condamnation de la société à lui payer la somme de 695 692 euros, montant minoré à la suite de la décision précité de la commission et le paiement des sommes de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

La société conclut à la confirmation du jugement et sollicite le paiement de 7 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

D'autres demandes sont formées à titre subsidiaire.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties reprises à l'audience du 7 juin 2022.

MOTIFS :

Sur le redressement :

1°) La société conteste la validité du contrôle effectué en soutenant qu'il existe deux sortes de contrôle, prévus respectivement par les articles L. 243-7 et R. 133-8 du code de la sécurité sociale et que dans le présent litige, le contrôle a été effectué en vue de rechercher des infractions pénales ce qui rendaient applicables les dispositions de l'article R. 133-8.

Il en résulte, selon elle, que les lettres d'observations des 21 juillet et 8 octobre 2015, non signées par le directeur, M. [Z], sont irrégulières.

L'URSSAF répond que seules les dispositions de l'article L. 243-7 sont applicables et que la procédure est régulière.

L'article L. 243-7, dans sa version applicable au litige, dispose que : 'Le contrôle de l'application des dispositions du présent code par les employeurs, personnes privées ou publiques y compris les services de l'Etat autres que ceux mentionnés au quatrième alinéa et, dans le respect des dispositions prévues à l'article L. 133-6-5, par les travailleurs indépendants ainsi que par toute personne qui verse des cotisations ou contributions auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général est confié à ces organismes. Les agents chargés du contrôle sont assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. Ces agents ont qualité pour dresser en cas d'infraction auxdites dispositions des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire. Les unions de recouvrement les transmettent, aux fins de poursuites, au procureur de la République s'il s'agit d'infractions pénalement sanctionnées.

Les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général sont également habilités dans le cadre de leurs contrôles à vérifier l'assiette, le taux et le calcul des cotisations destinées au financement des régimes de retraites complémentaires obligatoires mentionnés au chapitre Ier du titre II du livre IX pour le compte des institutions gestionnaires de ces régimes, des cotisations et contributions recouvrées pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage par les organismes mentionnésaux c et e de l'article L. 5427-1 du code du travail et des cotisations destinées au financement des régimes mentionnés au titre Ier du livre VII du présent code. Le résultat de ces vérifications est transmis auxdites institutions aux fins de recouvrement.

Pour la mise en 'uvre de l'alinéa précédent, des conventions conclues entre, d'une part, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale et, d'autre part, les organismes nationaux qui fédèrent les institutions relevant du chapitre Ier du titre II du livre IX du présent code, les organismes mentionnés aux c et e de l'article L. 5427-1 du code du travail, l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage et les organismes nationaux chargés de la gestion des régimes prévus au titre Ier du livre VII du présent code qui en font la demande fixent notamment les modalités de transmission du résultat des vérifications et la rémunération du service rendu par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général...'.

L'article R. 133-8 dispose, dans sa version antérieure au 1er janvier 2020, que : 'Lorsqu'il ne résulte pas d'un contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 du présent code ou de l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, tout redressement consécutif au constat d'un délit de travail dissimulé est porté à la connaissance de l'employeur ou du travailleur indépendant par un document daté et signé par le directeur de l'organisme de recouvrement, transmis par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Ce document rappelle les références du procès-verbal pour travail dissimulé établi par un des agents mentionnés à l'article L. 8271-7 du code du travail et précise la nature, le mode de calcul et le montant des redressements envisagés. Il informe l'employeur ou le travailleur indépendant qu'il a la faculté de présenter ses observations dans un délai de trente jours et de se faire assister par une personne ou un conseil de son choix.

A l'expiration de ce délai et, en cas d'observations de l'employeur ou du travailleur indépendant, après lui avoir confirmé le montant des sommes à recouvrer, le directeur de l'organisme de recouvrement met en recouvrement les sommes dues selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations de sécurité sociale'.

Il est jugé que si la recherche des infractions constitutives de travail illégal mentionnées à l'article L. 8211-1 du code du travail est soumise aux articles L. 8271-1 et suivants du même code, ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'un organisme de recouvrement procède, dans le cadre du contrôle de l'application de la législation de sécurité sociale par les employeurs et les travailleurs indépendants prévu par l'article L. 243-7 du code de la sécurité sociale, à la recherche des infractions susmentionnées aux seules fins de recouvrement des cotisations afférentes.

Il existe donc deux procédures de contrôle pouvant amener à la recherche d'infraction de travail dissimulé : celle de droit commun prenant la forme d'un contrôle sur place et ayant pour seule finalité le recouvrement de cotisations résultant d'une situation éventuelle de travail dissimulé et celle fondée sur les articles L. 8271-1 du code du travail et R. 133-8 du code de la sécurité sociale.

Dans le premier cas, le contrôle peut être inopiné mais il doit est soumis aux dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale qui dispose, dans sa version applicable au présent litige, que : 'Tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur ou au travailleur indépendant par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail. Cet avis fait état de l'existence d'un document intitulé " Charte du cotisant contrôlé " présentant au cotisant la procédure de contrôle et les droits dont il dispose pendant son déroulement et à son issue, tels qu'ils sont définis par le présent code. Il précise l'adresse électronique où ce document, dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable, et indique qu'il est adressé au cotisant sur sa demande.

L'employeur ou le travailleur indépendant a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l'avis prévu à l'alinéa précédent.

Les employeurs, personnes privées ou publiques, et les travailleurs indépendants sont tenus de présenter aux agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7, dénommés inspecteurs du recouvrement, tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle.

Ces agents peuvent interroger les personnes rémunérées notamment pour connaître leurs nom et adresse ainsi que la nature des activités exercées et le montant des rémunérations y afférentes, y compris les avantages en nature'.

Dans le second cas, il incombe à l'organisme de recouvrement de respecter les règles de l'article R. 133-8 précité et notamment de porter à la connaissance de la société faisant l'objet du contrôle d'un document sur ce point, daté et signé par le directeur de l'organisme de recouvrement.

Il convient donc de caractériser la nature des opérations de contrôle et de redressement litigieuses pour déterminer quelle procédure était applicable.

Ici, le contrôle a été opéré après réquisition du procureur de la République avec l'intervention du comité opérationnel départemental anti-fraude, l'inspecteur du recouvrement et celles des agents de la gendarmerie nationale et des services fiscaux.

L'avis à adresser à la société conformément aux dispositions de l'article R. 243-59 précité n'est pas requis dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail.

La lettre d'observations du 21 juillet 2015 vise comme objet du contrôle : 'recherche des infractions et interdictions de travail dissimulé mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail' et vise l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale.

Ce document commence par la phrase suivante : 'J'ai l'honneur de vous communiquer les observations consécutives à la vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garanties de salaires concernant les infractions aux interdictions mentionnées aux articles L. 8221-1 et L. 8221-2 du code du travail pour l'établissement ci-dessous référencé...' et indique, par la suite, page 2, que : 'les observations communiquées résultent des infractions de travail dissimulé qui ont été constatées et qui font l'objet d'un procès-verbal daté du 20 juillet 2015 adressé au procureur de la République'.

Cette lettre a été annulée et remplacée par une autre lettre du 8 octobre 2015 visant le même procès-verbal, l'article R. 249-59 et reprenant les mêmes phrases ci-avant citées.

Il résulte de ces circonstances de fait que ce contrôle faisant suite au procès-verbal susvisé a été effectué selon la procédure fondée sur les articles L. 8271-1 du code du travail et R. 133-8 du code de la sécurité sociale. En effet le redressement consécutif n'a pas pour seule finalité le recouvrement de cotisations sociales mais tend aussi à la recherche des infractions aux interdictions de travail dissimulé, peu important que les lettres d'observations visent les articles R. 243-59 et suivants du code de la sécurité sociale.

Les lettres d'observations émanant de l'URSSAF et adressées à la société sont signées par M. [Y], inspecteur de recouvrement et non par le directeur de l'URSSAF, à l'époque M. [Z].

De plus, l'URSSAF n'apporte pas la preuve de l'existence d'une délégation de signature donnée par M. [Z] à M. [Y] et portant sur ce point.

L'article R. 133-8 ne prévoit pas de sanction en cas de violation de ses dispositions.

Toutefois, dès lors que le redressement consécutif au constat d'un délit de travail dissimulé est porté à la connaissance de l'employeur par une personne qui n'avait pas qualité pour agir et qui a signé ce document en lieu et place d'une autre personne compétente, la validité de la procédure en est affectée et le redressement ne peut produire effet.

En conséquence, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a annulé le redressement et la mise en demeure du 17 décembre 2015.

2°) Dès lors que la procédure est irrégulière, il n'y pas lieu d'examiner les moyens contestant, au fond, le redressement.

Sur les autres demandes :

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'URSSAF et la condamne à payer à la société la somme de 3 000 euros.

L'URSSAF supportera les dépens d'appel, lesquels n'ont pas à être chiffrés toutes taxes comprises.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :

- Confirme le jugement du 16 juillet 2019 ;

Y ajoutant :

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'URSSAF de Bourgogne et la condamne à payer à la société [4] la somme de 3 000 euros ;

- Condamne l'URSSAF de Bourgogne aux dépens d'appel, lesquels n'ont pas à être chiffrés toutes taxes comprises ;

Le greffierLe président

Kheira BOURAGBAOlivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/00548
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;19.00548 ?
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